Extraits d'un entretien de M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué, chargé de l'Europe, avec TF1 le 1er mai 2024, sur les ingérences numériques.

Prononcé le 1er mai 2024

Intervenant(s) : 

Média : TF1

Texte intégral

 

Q - Bonjour, Jean-Noël Barrot.

R - Bonjour.

(...)

Q - Lundi, vous avez réuni vos homologues allemand et polonais pour parler des ingérences numériques. Concrètement, est-ce qu'il y a, au moment où l'on se parle des menaces de déstabilisation qui pèsent sur la campagne des européennes ?

R - Il ne se passe pas une semaine sans que la France soit la cible de campagnes structurées et coordonnées par la Russie de Vladimir Poutine ou ses courroies de transmission pour perturber le débat public en période préélectorale.

Q - Et pour donner une bonne image de la Russie ou pour peser sur le scrutin ?

R - L'objectif, c'est de s'en prendre à la démocratie. La démocratie, c'est un trésor que beaucoup de peuples dans le monde nous envient et qui repose sur un principe simple, le fait que les citoyens aient des consciences éclairées. Et c'est à cela que les mages du Kremlin, que les amis de Vladimir Poutine veulent s'en prendre en diffusant des fausses informations par le détournement de sites du Gouvernement, de sites de médias ou par la création de faux comptes sur les réseaux sociaux.

Q - Qu'est-ce que vous pouvez faire ? Qu'est-ce qu'il reste encore comme marges à activer qui puissent empêcher ça ?

R - Première étape, détecter ces manoeuvres de propagande. C'est ce que nous avons fait lundi en dénonçant la création fin mars d'une trentaine de sites visant à perturber le débat public dans la quasi-intégralité des pays de l'Union européenne. Deuxième étape, c'est aux plateformes de prendre leurs responsabilités ; et je les appelle aujourd'hui à supprimer sans délai ou à bloquer sans délai l'accès aux sites Internet que nous avons détectés et qualifiés. Et puis je les convoquerai le 7 mai prochain avec Marina Ferrari pour les rappeler à leurs responsabilités. Elles ont désormais des responsabilités claires, établies par la loi et par la loi européenne, celles d'éviter que se propagent sur leurs services sur leurs plateformes des fausses nouvelles, notamment en période pré-électorale.

Q - Ça veut dire qu'aujourd'hui, les plateformes, les réseaux sociaux ne font pas le travail ?

R - Insuffisamment.

Q - On a vu que la Commission européenne ouvrait une enquête, par exemple contre Facebook et Instagram, leur maison-mère Meta. Le travail n'est pas fait ?

R - Le travail n'est pas fait. La Commission a lancé une enquête, et je constate pour ma part que certains des sites que nos autorités ont attribués à des agents russes n'ont toujours pas été bloqués par certaines de ces plateformes.

Q - Quelles sanctions elles encourent ?

R - Elles encourent, si elles ne respectent pas ces règles que nous nous sommes données au niveau européen, des amendes qui peuvent aller jusqu'à 6% de leur chiffre d'affaires mondial et elles peuvent être bannies de l'Union européenne si elles ne se conforment pas à nos règles à terme.

Q - On a vu également y a quelques temps des deepfakes sur les réseaux sociaux, donc de fausses images, avec des supposées Amandine Le Pen, Léna Maréchal ; ce sont des personnes qui n'existent pas et qui ressemblaient à des influenceuses pro-extrême droite. Ça, comment est-ce qu'on l'empêche ? Comment est-ce qu'on évite que ça se reproduise ?

R - D'abord rappeler qu'une loi, que j'ai portée, qui vient d'être adoptée, a réprimé durement l'utilisation de d'hyper-trucage, comme on le dit, de deepfake, lorsqu'il n'est pas apparent qu'il s'agit d'un hyper-trucage et lorsque la personne concernée n'a pas donné son consentement. Ensuite, la Commission européenne a publié des lignes de conduite à l'égard des plateformes et des partis politiques pour qu'ils fassent un usage raisonné de ces hyper-trucages, pour ne pas troubler les esprits.

Q - Je précise que l'extrême droit a dit qu'elle n'avait rien à voir. Juste un dernier mot pour conclure, Jean-Noël Barrot, vous parliez de l'utilité de vos députés au Parlement européen. Il y a quelques jours, il y a eu un vote sur l'opportunité de pouvoir cumuler, en plus de sa fonction de député, des activités rémunérées. Les députés Renaissance au Parlement européen ont voté pour ce cumul, comme la droite, comme l'extrême droite, comme les alliés de Marion Maréchal. C'était bien utile quand on est député européen, on a besoin d'activités rémunérées en plus ?

R - N'inversons pas les choses. Il s'agit d'amendements sur un texte qui a été porté par la France et par nos députés pour créer un organe d'éthique, organe d'éthique qui a été voté à la majorité au Parlement européen, mais sans les voix de M. Bellamy et sans le vote de Jordan Bardella qui, une nouvelle fois, n'était pas présent au Parlement européen.

Q - Mais vous permettez le cumul de 7.700 euros net d'un député européen et d'activités rémunérées en plus ?

R - Vous verrez que cet organe d'éthique et de transparence permettra de mettre fin à un certain nombre d'aberrations au Parlement européen, que c'est une bonne chose et que c'est la France qui l'a porté.

Q - Merci, Jean-Noël Barrot, d'avoir été sur TF1, ce matin.


Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 6 mai 2024