Texte intégral
Merci à toutes et tous en vos grades et qualités d'être présents.
Évidemment, je me trouve devant vous avec les ministres et merci Monsieur le Haut-Commissaire de nous accueillir ici dans un moment extrêmement grave, lourd et dont on mesure tous la solennité. Et avant que nous ne rentrions dans les discussions, si vous m'y autorisez, je voudrais qu'on ait une minute de silence pour celles et ceux qui sont tombés durant ces derniers jours. Je vais lire leur nom : l'adjudant-chef Xavier Salou, le gendarme Nicolas Molinari, Chrétien Neregote, Stéphanie Dooka, Pierre-Yves Girold et Djibril Salo.
[Minute de silence]
Merci pour eux.
Evidemment, je commence cet échange en ayant présent à l'esprit, comme vous, le fait que nous sommes dans un moment qui est aussi un moment de recueillement, de deuil pour leurs familles et leurs proches.
L'objectif de cette rencontre, sous cette forme institutionnelle, politique, mais aussi avec l'ensemble des maires, avec les forces économiques, l'ensemble des services est pour moi avant l'idée de faire très librement le point sur la situation et de commencer à trouver un chemin pour avancer. Donc c'est vraiment avec un esprit constructif, de dialogue, d'apaisement que je suis là, devant vous. Mais aussi avec la responsabilité qui est la mienne et donc celle d'essayer de bâtir ce chemin dans un cadre que nous connaissons, que le peuple a choisi.
La première chose, c'est l'ordre, le calme, la paix. Et la situation qui est encore aujourd'hui en cours, évidemment, nous préoccupe. Je sais la très grande fatigue de beaucoup de familles, l'inquiétude, et je veux ici remercier aussi nos forces de sécurité intérieure, notre Haut-Commissaire, une fois encore, pour tout le travail qui a été fait avec un grand professionnalisme, parce que nous avons connu par le passé des situations de tension extrême comme celle-ci, qui avait donné lieu à des affrontements directs, les morts que j'ai cités. Les enquêtes sont en cours. Mais c'est aussi un très grand professionnalisme de l'intervention de toutes nos forces de sécurité intérieure auxquelles je veux rendre hommage.
Au moment où je vous parle, il y a 3 000 forces de sécurité intérieure en Nouvelle-Calédonie et dans les prochaines heures arriveront les compléments. Donc il y aura 3 000 dans quelques heures et 23 GM et équivalents. Ce qui est inédit et d'ores et déjà depuis plusieurs jours, il n'y en a plus qu'il n'y en avait eu au moment du troisième référendum. Je vais être ici très clair. Ces forces resteront aussi longtemps que nécessaire. Même durant les Jeux olympiques et paralympiques. D'aucuns pourraient penser que le demande le ministre de l'Intérieur, des Outre-mer, et je l'en remercie, a organisé les choses pour qu'il y ait des relèves qui s'effectuent. Et donc que les effectifs qui finiront de se déployer dans les prochaines heures se maintiendront aussi longtemps que nécessaire.
Nous sommes, j'ai pris cette décision avec le Conseil des ministres il y a quelques jours, en état d'urgence. La situation le justifiait. Je pense pour ma part que cet état d'urgence ne devrait pas être prolongé parce que, je vous l'ai dit, je crois profondément que le dialogue est nécessaire. Mais j'en appelle à la responsabilité de tous les dirigeants qui sont ici présents. Il ne sera levé très clairement que si chacun, en sa responsabilité, appelle à lever les barrages, ce qui au moment où je parle, n'est toujours pas le cas avec cette clarté. C'est une phrase simple et elle va le mieux en le disant parce qu'elle peut être suivie d'effet. Et donc, c'est ce que je demande. Le suivi pénal sera exemplaire pour tous et vous aurez noté d'ailleurs que déjà des enquêtes ont commencé avec détermination et clarté.
Au moment où je vous parle aussi, je sais la grande détresse de beaucoup de nos compatriotes sur les questions de santé, d'accès aux soins. Je recevais encore en étant dans l'avion pour vous retrouver une lettre des associations représentant les patients dialysés. Personne ne peut accepter, aucun combat ne peut justifier cela. Et c'est aussi la responsabilité de tous d'appeler vraiment, pas simplement au calme de manière générique, à la levée des barrages, à l'arrêt de toute forme d'attaque.
Je sais aussi la détresse qu'il y a en termes d'approvisionnement, d'alimentation, avec un racisme qu'on ne pensait pas voir revenir, il faut le dire. Mais personne ne peut accepter que l'on puisse avoir accès à la nourriture, à l'alimentation, parce qu'on a telle ou telle couleur de peau ou telle ou telle origine.
Une situation encore très difficile dans certains quartiers, je le sais, qui suscite même au moment où je vous parle à coup sûr de la part de nos compatriotes, une forme d'incompréhension, quand on dit : les effectifs sont là. Aussi parce qu'il y a un modus operandi, le ministre y reviendra en fonction de vos questions dans le débat et on pourra aller au fond des choses, parce qu'il y a une intervention qui se fait dans un cadre très professionnel pour respecter les vies humaines. Mais il y a des organisations véritablement et des prises de certains quartiers qui en quelque sorte expliquent le temps que cela prend pour recouvrer l'ordre en saluant le grand professionnalisme qui est fait.
C'est pour cela que dans les prochaines heures, nous quitterons pour ce faire, le ministre de l'Intérieur retrouvera l'ensemble des forces de l'ordre présentes et leur commandement pour faire un point sur la sécurité, et le ministre des Armées, qu'on remercie aussi de sa présence, fera de même avec les FANC à dessein.
J'ai tenu nos forces armées à part, parce que je tiens ici à le redire, nos forces armées ont toujours été présentes et sont intervenues dans un cadre qui est clair. Ce n'est pas celui de gérer des émeutes urbaines ou des violences, parce que ce n'est pas la vocation de l'armée française. Néanmoins, nos forces armées tiennent des positions, ont un rôle important et je sais l'attachement de l'ensemble de la population de Nouvelle-Calédonie à celles-ci. Elles continueront de le faire. Il fera aussi le point sur l'apport et je remercie nos forces armées de ce qu'elles ont pu déjà faire en termes d'approvisionnement, d'aide aussi en termes de soins, d'accès aux médicaments et de sécurisation de certaines emprises.
Dans les prochaines heures et les prochains jours, ce seront de nouvelles opérations massives qui seront programmées partout où c'est nécessaire. Et c'est la totalité de l'ordre républicain qui sera rétabli. Parce qu'il n'y a pas d'autre choix.
Je souhaite qu'ensuite on ait une discussion sur la reconstruction, les éléments économiques. Je ne vais pas être ici long. Cet après-midi, dans la foulée, on aura l'échange en profondeur ici. Dans la foulée de cette réunion, la ministre déléguée aux Outre-mer, je l'en remercie, tiendra une réunion spécifique dédiée à ce sujet. Monsieur Antony ROQUIN est avec nous qui va mener sous sa supervision une première mission d'évaluation et d'urgence. L'objectif est évidemment de faire l'évaluation suite aux réunions qui ont été tenues par le ministre de l'Économie et des Finances, de pouvoir mobiliser les éléments de trésorerie, de liquidité, d'assurance, de remboursement, d'évaluation, avec déjà des engagements qui ont été pris et on pourra vous les détailler. Obtenu des assureurs, des banquiers et que nous déploierons.
Puis évidemment également avec des décisions très concrètes et rapides de reconstruction, je pense aux écoles, je ne peux pas accepter que ça prenne du temps, à tous les bâtiments publics et de l'aide aux collectivités locales. Les maires qui sont ici présents et les collectivités le savent. On a besoin, là aussi, d'avoir un soutien très rapide. Plus largement, il y aura de toute façon un cadre à bâtir. Là aussi, on y reviendra dans la durée, la question économique dépassant amplement celle de la reconstruction. Mais enfin, elle vient aggraver.
Puis enfin, je veux que nous ayons un débat franc, direct, ouvert sur les questions politiques, institutionnelles et de projet. Dans un cadre que j'ai toujours rappelé quand j'étais parmi vous, celui que j'ai posé en 2018 dans mon discours, en respectant l'histoire de ce territoire, de ce peuple. Celui aussi qui a été avancé ces dernières années par les trois référendums, puis les deux chemins que j'évoquais il y a quelques mois avec vous.
Maintenant il faut reprendre l'intégralité des choses et voir aussi comment trouver ce que j'appellerais l'apaisement constructif, c'est-à-dire retrouver le calme, la capacité de trouver du dialogue et une solution. Mais l'apaisement ne peut pas être le retour en arrière. L'apaisement ne peut pas être de ne pas respecter l'expression populaire qui s'est déjà jouée. L'apaisement ne peut être de nier en quelque sorte un chemin qui a déjà été fait.
Néanmoins, nous devons remettre toutes les parties prenantes autour de la table. Et vous représentez ici pour moi celles et ceux qui les représentent Il faut le faire avec calme, mais en avançant.
Je ne serai pas plus long.
L'objectif est qu'on ait vraiment un débat libre entre nous, qui se veut être confidentiel.
Mais je voulais en tout cas vous dire que j'étais ici pour le retour à la paix, au calme, à l'ordre, que ça passe par un engagement de l'État sur le plan régalien et qui sera assumé dans la durée, que ça passe par une très grande clarté sur ce sujet et aussi par un engagement économique et un engagement politique que la journée permettra de définir. Et moi, je compte sur l'esprit de responsabilité de toutes et tous ici.
Nous y arriverons parce que la Nouvelle-Calédonie le mérite, parce que ça a toujours été la vocation, je crois pouvoir le dire, dans cette région de la France.
Voilà, je propose maintenant qu'on ouvre les débats.