Texte intégral
APOLLINE DE MALHERBE
Bonjour Sylvie RETAILLEAU.
SYLVIE RETAILLEAU
Bonjour.
APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes ministre de l'Enseignement supérieur. Et l'enseignement supérieur, il y a une porte d'accès, c'est Parcoursup. Parcoursup, c'est hier soir à 19h que toutes les familles d'enfants en terminale… pas de bol pour vous, il se trouve que j'en ai un donc évidemment, je me sens quand même particulièrement concernée. Mais je ne suis pas la seule puisque 950 000 élèves qui sont donc passés par Parcoursup. 950 000 élèves et autant de familles qui étaient devant leur ordinateur avec cette angoisse de se dire « où est-ce que mon enfant va être pris ou non ? ». Et l'angoisse aussi se poursuit pour un certain nombre d'élèves puisqu'il y a ces listes d'attente. D'abord, est-ce que vous pouvez nous dire combien de candidats savent depuis hier soir vraiment ce qu'ils feront l'an prochain ? C'est-à-dire combien ont eu des réponses positives ?
SYLVIE RETAILLEAU
Alors, hier soir, effectivement, sur les 945 000, il y a eu une augmentation de 3% à peu près de candidats. Et hier soir, il y a eu aussi une augmentation, par rapport à l'année dernière, de propositions à ces candidats puisqu'on a eu 2,4 millions de propositions. L'année dernière, le premier jour, on avait 2,05 millions de propositions, donc ça augmente en même temps que le nombre de candidats a augmenté cette année.
APOLLINE DE MALHERBE
Donc, il y a quand même une certaine efficacité du système pour vous ?
SYLVIE RETAILLEAU
Ce système qui s'améliore, je dirai, d'année en année. D'année en année, on essaie parce qu'on connaît, vous l'avez dit et vous le vivez en ce moment effectivement avec votre enfant, futur étudiant. Et donc, ce système doit s'améliorer parce qu'on est conscients que c'est un moment charnière dans la vie et de l'élève et de la famille qui est derrière et donc on améliore en continue.
APOLLINE DE MALHERBE
On est quand même dans un système dont on sent qu'il est un peu encore en rodage. Et c'est vrai que ça, ce n'est pas de bol pour ceux qui sont dans ces années-là, parce que plusieurs choses : d'abord, ça semble très opaque. Ils ont le sentiment souvent que les choix sont faits par un algorithme plutôt qu'en fonction vraiment des dossiers qu'ils ont pourtant assez scrupuleusement remplis.
SYLVIE RETAILLEAU
Alors ça, c'était vrai avant, ce que vous dites. Et ce sentiment, c'est vrai qu'on veut tout savoir et c'est légitime. Et c'est pour cela qu'en six ans de Parcoursup - et on le voit par rapport au nombre de recours, on le voit dans les rapports – la transparence que l'on doit aux étudiants et à leur famille s'est améliorée. Aujourd'hui, non, ce n'est plus opaque. Et d'abord, Parcoursup, et ça je tiens à le dire, ce n'est pas un algorithme. Parcoursup, derrière, ce sont des commissions de voeux avec des gens, des enseignants, des enseignants chercheurs qui regardent les dossiers, je dirais comme avant. Et Parcoursup, c'est une plateforme où les équipes rentrent les résultats des étudiants, des élèves, par rapport à leur dossier. Et Parcoursup, il y a maintenant de l'humain. On a essayé d'accompagner au mieux. Il y a encore des progrès à faire et on y travaille, mais on a amélioré la transparence sur les critères. Chaque formation a une fiche avec tous les critères. On a raccourci le temps d'attente… ce fameux temps que l'on va vivre ce mois. Au début, c'était 107 jours ; aujourd'hui, on est autour de 40 jours sur la période de…
APOLLINE DE MALHERBE
Parce que ce temps d'attente, je précise pour tous ceux qui nous écoutent qu'ils comprennent comment fonctionne aujourd'hui l'Enseignement supérieur en France ; c'est qu'effectivement, on met un certain nombre de voeux dans la machine, dans le système. Et puis, à partir de hier soir 19h, chaque enfant peut avoir parfois des réponses positives en quel cas il a trois jours pour décider si, oui ou non, il accepte. Et puis, quelques points sur lesquels il peut être soit carrément refusé donc ça, c'est fini, soit en attente et sur liste d'attente ; des listes d'attente qui sont très longues. Parfois, on peut être 800e sur une liste d'attente. Et pourtant il faut attendre. Il faut être dans ce stress. Qu'est-ce que vous dites à ceux dont les enfants n'ont peut-être tout simplement pas eu un seul choix validé ?
SYLVIE RETAILLEAU
Eh bien, ceux, et je voulais reprendre, ceux qui n'ont rien eu hier soir, ils vont être rappelés dès aujourd'hui. On va les appeler individuellement pour leur proposer un accompagnement d'orientation avec l'équipe pédagogique du lycée, avec l'équipe Parcoursup et ils vont pouvoir refaire 10 voeux sur la phase complémentaire qui va démarrer le 11 juin.
SYLVIE RETAILLEAU
Donc, surtout ce que je leur dis en général, c'est : pas de panique, cette phase elle va durer un mois…
APOLLINE DE MALHERBE
Facile à dire qu'à faire, mais bon, enfin, , allez-y.
SYLVIE RETAILLEAU
Oui, mais je pense qu'il faut le dire, il faut le dire, il faut accompagner. Je veux dire, vous avez beaucoup de gens derrière qui sont mobilisés dans les lycées, dans le supérieur, l'équipe Parcoursup, il y a un numéro vert qu'ils peuvent contacter. Il va être ouvert tout le week-end ce numéro vert samedi, dimanche, ce soir et vendredi jusqu'à 22 h. Donc, je pense que c'est important de donner beaucoup cette information…
APOLLINE DE MALHERBE
C'est quoi ce numéro vert ?
SYLVIE RETAILLEAU
C'est 0 800 400 070, c'est le numéro vert de Parcoursup, et donc, vous pouvez appeler pour pouvoir être aidé. Quand vous dites « Ils sont en attente », il peut être 800e, oui, et si vous allez sur Parcoursup, que vous cliquez sur « Attente », vous allez voir aussi qu'on a rajouté pour savoir ce que veut dire 800e, parce que si ça veut dire 800e et que l'année dernière
APOLLINE DE MALHERBE
Ils vous précisent que l'année d'avant, jusqu'à combien dans la liste d'attente ils ont pu intégrer la filière…
SYLVIE RETAILLEAU
Exactement. Donc, s'ils voient que jusqu'à l'année dernière, c'était, ils ont pu intégrer mille, finalement, 800e, il a toutes les chances…
APOLLINE DE MALHERBE
Mais enfin, il y a ce petit temps très angoissant…
SYLVIE RETAILLEAU
Oui, mais ce temps d'attente, il est d'un mois et c'est vrai qu'il est angoissant et c'est pour ça que les équipes se mobilisent et qu'on a mis beaucoup d'informations et d'accompagnement.
APOLLINE DE MALHERBE
Autre question, Sylvie RETAILLEAU, ça sert à quoi le bac aujourd'hui ?
SYLVIE RETAILLEAU
Alors, je pense que le bac…
APOLLINE DE MALHERBE
Parce que, franchement, c'est-à-dire que, honnêtement, ils ont le sentiment que leur vie, elle a plutôt basculé, enfin, je veux dire, leur choix de l'année prochaine, c'était hier et c'est sur Parcoursup et que le bac, désormais, ce n'est plus qu'une formalité. D'ailleurs, un grand nombre de toutes ces formations ne demande même plus vraiment de valider par le bac.
SYLVIE RETAILLEAU
Alors ça dépend, mais vous avez raison, le bac n'est plus comme à l'époque où…
APOLLINE DE MALHERBE
De toute façon, c'est déplacé…
SYLVIE RETAILLEAU
Il y avait 30 ou 40 % de jeunes qui l'avaient, on avait un ou deux mentions très bien dans la classe. Aujourd'hui, on a parfois 40-50 % de mentions très bien dans une classe. Donc, c'est pour ça que, aussi comprendre là où on est pris, non pris, c'est plus compliqué que ce qu'on a vécu… Que certains ont vécu. Par contre, je pense que c'est important de garder à un moment où des étudiants, des élèves avant de passer dans le supérieur vont passer un examen vont être soumis à un moment où il faut se concentrer plusieurs jours, préparer, travailler pour passer cet examen. Le bac, peut-être, c'est encore maintenant un moment d'apprentissage de l'examen d'apprentissage du concours. Et finalement, ces jeunes-là, avant, ils n'ont jamais eu cette occasion-là, se confronter à un examen ou un concours avant de rentrer dans le supérieur, donc ça reste aussi une expérience pour un jeune.
APOLLINE DE MALHERBE
Sylvie RETAILLEAU, l'antisémitisme, vous avez donné ce chiffre hier : 76 actes antisémites qui ont été signalés dans l'université ou dans les études supérieures, c'est 17 enquêtes administratives qui ont ensuite été diligentées. Est-ce que vous pouvez me dire de quoi il s'agit ? Quels sont ces actes en question et quelles sont les sanctions ?
SYLVIE RETAILLEAU
Oui. Alors tout d'abord, les 17, ce sont les actes avérés, dans l'ensemble, j'ai dit aussi qu'il y a eu 244 qui sont remontés, mais par exemple des tags et cetera ou vous n'avez pas de... Vous ne savez pas qui les a faits, donc ça ne peut pas conduire à une enquête ou à une commission disciplinaire, ou à une procédure judiciaire…
APOLLINE DE MALHERBE
Parce que c'est anonyme ?
SYLVIE RETAILLEAU
Parce que c'est anonyme et donc, il faut une preuve ou quelque chose… Donc, dans les 70, c'est quelque chose qui a conduit à des enquêtes dans lesquelles, lorsque l'on a les enquêtes, on a qualifié des faits, on a identifié quelqu'un qui a tenu des propos, qui a fait un tag, etc. et c'est pour ça que ces enquêtes ont conduit à des commissions disciplinaires. Donc, dans les 17, ce sont vraiment des qualifications de fait qui conduisent dans les établissements à des commissions disciplinaires et ou des signalements au procureur de la République ou des plaintes. Et donc, c'est important de les mener jusqu'au bout, de faire ces enquêtes, de laisser la justice faire et les sanctions, on ne les connaît pas encore, puisque ces commissions disciplinaires et ces enquêtes sont encore en cours.
APOLLINE DE MALHERBE
Au moment où on se parle, Sylvie RETAILLEAU, est-ce qu'il y a encore des campus bloqués comme il y en à voir à Sciences-Po ou ailleurs ?
SYLVIE RETAILLEAU
Non. Au moment où on se parle, il n'y en a pas. Donc, nous suivons ça, comme je l'ai dit aussi à l'audition. Nous allons mettre une plateforme dialogue pour pouvoir suivre quotidiennement à la fois les faits, mais aussi, comme vous le dites, quelle procédure on met en oeuvre et quelles sanctions on doit suivre. C'est important de la voir pour pouvoir encore mieux agir, parce qu'effectivement, c'est intolérable, ce climat, parce que c'est ça qui est difficile, c'est non seulement les faits à combattre, mais aussi un peu ce climat qu'il y a et ça, c'est encore plus difficile qu'un fait.
APOLLINE DE MALHERBE
Et ça devient un climat ? Pour vous, il y a un climat d'antisémitisme à l'université ?
SYLVIE RETAILLEAU
Mais vous savez, il y a un climat dans la société et l'université, c'est une image de la société avec ses points forts, ses points positifs et ses points faibles.
APOLLINE DE MALHERBE
Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que les étudiants ont peur d'aller en cours ?
SYLVIE RETAILLEAU
Et nous avons, ils nous le disent, des étudiants juifs qui ont ce sentiment effectivement de ne pas être les bienvenus et ça, c'est intolérable. L'université, comme toute école et tout endroit du savoir, doit être un lieu où nos étudiants doivent être accueillis sereinement et donc, combattre des faits, il faut le faire, c'est intolérable, combattre un climat. On le voit aujourd'hui, c'est encore plus difficile et je peux vous dire que tout le monde se mobilise pour le faire, c'est pour ça aujourd'hui, nous n'avons pas de fac bloquée, les facs comme Sciences Po ou autres, c'était quand même une minorité d'étudiants qui bloquait, ces facs par rapport à une majorité d'étudiants qui ont pu tous passer leurs examens. Les examens se sont passés en France. Il faut savoir qu'à peu près, c'étaient 1 800 étudiants sur nos trois millions d'étudiants en France qui ont fait ces blocages. Donc, ça, ça montre bien cette minorité…
APOLLINE DE MALHERBE
1 800 étudiants sur trois millions ?
SYLVIE RETAILLEAU
A peu près, exactement, ça vous donne l'ordre de grandeur... Même si c'est 2 000, ça vous donne l'ordre de grandeur et comme à chaque fois, c'était cinquante, trente étudiants, les établissements ont pu les compter et donner ces statistiques aujourd'hui.
APOLLINE DE MALHERBE
Et ces chiffres précis que vous nous révélez donc ce matin. Merci Sylvie RETAILLEAU.
SYLVIE RETAILLEAU
Merci à vous.
APOLLINE DE MALHERBE
Je rappelle que vous êtes donc la ministre de l'Enseignement supérieur. Il est 7 h 51.
source : Service d'information du Gouvernement, le 3 juin 2024