Interview de Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités, à France Inter le 31 mai 2024, sur le projet de loi sur la fin de vie, l'augmentation du prix du paquet de cigarettes et les violences sexistes et sexuelles à l'hôpital.

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Texte intégral

ALI BADDOU
Dans « Le grand entretien », ce vendredi matin, avec Marion L'HOUR, nous recevons une ministre au portefeuille au pluriel et très étendu, elle est en charge de dossiers clés, de dossiers explosifs, de dossiers qui interrogent l'intimité la plus profonde de chacun d'entre nous également, fin de vie, assurance chômage, assurance maladie, MeToo. Chers auditeurs, si vous souhaitez intervenir ou interroger la ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, composez le 01.45.24.7000, ou écrivez-nous sur l'application France Inter. Bonjour Catherine VAUTRIN.

CATHERINE VAUTRIN
Bonjour.

MARION L'HOUR
Bonjour.

ALI BADDOU
Et bienvenue. C'est vrai qu'on ne compte plus le nombre de dossiers et de dossiers compliqués dont vous avez la charge. On va partir de ce sujet qui interroge chacun d'entre nous, le projet de loi sur la fin de vie avec un article un, enfin adopté mercredi, ce sont vos mots sur le réseau X. « Première étape d'un long parcours parlementaire. Continuons le travail. Les Français nous attendent ». Je vous cite. Ça prendra combien de temps avant un prochain texte pour tout simplement valider celui-ci ?

CATHERINE VAUTRIN
Mais vous savez, c'est un texte, vous venez de le dire, qui fait appel à l'intime et qui donc fait appel à la responsabilité, à la conscience de chaque parlementaire, donc de chaque député actuellement, puisque nous sommes en première lecture à l'Assemblée et puis ensuite au Sénat, et bien évidemment c'est un texte qui, pour parler technique parlementaire, ne fait pas l'objet, bien évidemment d'une urgence, ce qui veut donc dire qu'il y aura deux lectures dans chacune des chambres. Et il est normal que chaque député puisse s'exprimer, puisse faire part de l'expérience qui est la sienne. Et ce qui est très intéressant, c'est de voir le travail qui a été fait par les députés en séance, qui sont allés dans des services de soins palliatifs, qui ont rencontré des associations, qui ont rencontré des professionnels. On mesure la gravité du sujet dans nos échanges.

ALI BADDOU
Et vous-même, vous avez rencontré de nombreux députés Renaissance par exemple, pour faire un travail de pédagogie autour de ce texte, mais…

CATHERINE VAUTRIN
Pas que Renaissance, j'en ai rencontré évidemment beaucoup.

ALI BADDOU
Mais, une idée du calendrier, malgré tout, parce que c'est vrai que beaucoup attendent le vote de ce texte qui permettrait de faire évoluer la vie et la fin de vie, Catherine VAUTRIN.

CATHERINE VAUTRIN
Alors, pour être, pour essayer de partager ce que je sais sur le sujet, nous sommes censés finir la discussion à l'Assemblée vendredi de la semaine prochaine. Quand je suis entrée le lundi à l'Assemblée, nous avions 3 314 amendements. Il doit en rester à peu près 3 000 pour être précise. L'article 1, était un article qui, nous savions qu'il ferait l'objet de nombreuses discussions, parce que c'est celui sur les soins palliatifs, les soins d'accompagnement, donc c'est l'entrée dans le texte. Bon. Après, nous allons avoir encore toute une semaine, toute la journée d'aujourd'hui pour discuter, et normalement, l'idée est d'être à l'automne au Sénat pour ensuite revenir à l'Assemblée. J'oserais dire que normalement, dans l'année 25, ce texte devrait avoir fini son parcours.

MARION L'HOUR
Il y a une question et un débat même, y compris au sein de la majorité sur à qui doit être ouverte l'aide à mourir, puisque le texte définit des conditions dans lesquelles un malade majeur atteint d'une affection grave et incurable, entraînant des douleurs physiques et psychologiques insupportables pourra recourir à cette aide à mourir. Et en commission, les députés ont ajouté, ou en tout cas ont changé ces termes, eux parlent d'une affection incurable en phase avancée ou terminale. Vous, vous restez opposée à cette transformation, pour vous, ce n'est pas que du vocabulaire ?

CATHERINE VAUTRIN
Alors, c'est extrêmement important. Nous sommes sur l'article 6. Pour pouvoir demander à accéder à l'aide à mourir, vous venez de le dire, il y a 5 conditions…

MARION L'HOUR
Je n'ai pas fait la liste.

CATHERINE VAUTRIN
Ces 5 conditions sont cumulatives. Et effectivement, l'une des 5 conditions qui était être atteint d'une maladie grave et incurable. Pourquoi les deux ? Parce qu'une maladie incurable ne fait pas forcément mourir. Je prends un exemple, l'arthrose. En revanche…

MARION L'HOUR
Charcot, Alzheimer.

CATHERINE VAUTRIN
Alors, justement, après arrive la maladie grave. D'où la notion de grave et incurable. La maladie grave, c'est celle qui, dans son évolution peut potentiellement entraîner à terme la mort. Et ensuite était dans le texte, avec un pronostic vital engagé, donc on voit bien qu'on comprend que la maladie est tellement grave qu'elle engage votre pronostic vital. Et ensuite, à court et moyen terme. C'était le texte. Le sujet, c'est que le moyen terme, tout le monde sait ce que c'est que le moyen terme. Quelques heures, quelques... le court terme, le court terme.

MARION L'HOUR
Alors, voilà…

CATHERINE VAUTRIN
Le court terme, tout le monde sait ce que c'est, quelques jours, quelques heures. La difficulté, c'est le moyen terme. Et sur le moyen terme, est ce que le moyen terme c'est en mois ou est-ce que c'est en années ? Et ça a été le débat de la Commission. Moi, j'ai saisi la Haute autorité de santé, parce que nous ne sommes pas des médecins, et donc nous légiférons, nous devons écrire un texte qui soit un texte qui puisse être suffisamment clair pour que le médecin qui aura à faire l'examen médical, soit suffisamment informé, ait suffisamment d'éléments pour se prononcer. Et donc, en Commission, les parlementaires ont repris un article du Code de la santé sur effectivement phase avancée ou terminale, et ont retiré la notion de pronostic vital engagé, qui pour nous est un marqueur fort. Donc, j'ai redéposé effectivement un amendement. Et je suis revenue sur pronostic vital engagé à court et moyen terme, et nous aurons la discussion, peut-être pas aujourd'hui, mais en tout cas à la semaine.

MARION L'HOUR
Et donc, à court ou moyen terme, est ce que ça inclut la maladie de Charcot ? Est-ce que ça inclut Alzheimer ?

CATHERINE VAUTRIN
Alors, la maladie de Charcot est incluse évidemment dans le texte. Toute la question c'est à quel stade ? Et c'est ça le sujet.

MARION L'HOUR
Et Alzheimer ?

CATHERINE VAUTRIN
Et Alzheimer n'est pas inclus. Pourquoi est-ce qu'Alzheimer n'est pas inclus ? Parce que l'une des cinq conditions, c'est de bénéficier de son discernement. Pourquoi son discernement ? Parce que dans ce texte, vous avez deux acteurs : le patient qui demande, c'est toujours le patient qui demande. En aucun cas on ne propose au patient. Le patient considère qu'il est en fin de vie, en raison d'une pathologie, c'est très important. C'est son état de santé qui fait que potentiellement, il demande à recourir à l'aide à mourir. Et donc c'est le patient qui demande et qui demande plusieurs fois. Il réitère sa demande, et au moment, s'il est jugé comme étant effectivement potentiellement expertisé, comme pouvant requérir, recourir à l'aide à mourir au moment de prendre le produit létal, c'est la seule fois où là on lui demande, pour être sûr qu'il veut bien prendre et que c'est bien sa demande. Donc il faut qu'il ait son discernement, et malheureusement Alzheimer, la personne n'a plus son discernement.

ALI BADDOU
Mais vous savez, Madame la Ministre, que des associations demandent par exemple à ce que la vie des proches puisse exceptionnellement être prise en compte. Quand vous dites que ce n'est pas inclus, c'est qu'il y a des maladies qui sont exclues pour le moment.

CATHERINE VAUTRIN
Mais vous savez, toute la question, vous reprenez la façon dont notre pays a travaillé sur ce dossier. Les premières approches, c'est 2002. 2002, c'est la Loi Kouchner qui a fixé un premier marqueur qui était la possibilité d'éviter l'acharnement thérapeutique. On a ensuite évolué avec les lois Leonetti et puis Claeys-Leonetti. Claeys-Leonetti, on est allé jusqu'une sédation profonde et continue pouvant provoquer le décès. L'état du droit aujourd'hui en France, c'est ça. Là, aujourd'hui, à la demande de nos concitoyens, la réflexion qui est posée, le texte que je porte aujourd'hui, propose de faire un pas supplémentaire dans un contexte très précis. Et aujourd'hui, nous sommes très attachés à l'équilibre de ce texte. Et aujourd'hui, effectivement, c'est le patient qui est quelque part acteur de sa vie et c'est le patient qui demande, en fonction de son état de santé, état de santé validé par une communauté médicale, cette décision. Et donc aujourd'hui, l'esprit du texte et la volonté du gouvernement, c'est cela.

MARION L'HOUR
Vous parliez tout à l'heure des soins palliatifs qui sont l'ouverture de cette loi. Une récente tribune dans Le Monde s'inquiète de voir cette loi sur le suicide assisté s'appliquer dans un pays où on n'a pas accès aux soins palliatifs, en tout cas pas assez, puisqu'une personne sur deux n'y a pas accès. Elle risquerait, cette loi, de créer du coup une fin de vie à deux vitesses, entre ceux qui ont les moyens de rester chez eux, dans de bonnes conditions, et ceux qui sont placés éventuellement dans des établissements pour personnes âgées, et qui risquent d'être tentés par un suicide assisté faute de soins palliatifs. Qu'est-ce que vous leur répondez ?

CATHERINE VAUTRIN
Eh bien déjà, je leur dis que la loi ne le permet pas, pour une raison très simple, c'est que ce que l'on propose, quand un patient qui, eu égard à sa pathologie, répond aux conditions que nous venons d'évoquer, s'il demande à bénéficier de l'aide à mourir, la première chose que le médecin doit lui proposer, c'est de bénéficier de soins palliatifs. Et donc à partir de là, le patient doit pouvoir aller en soins palliatifs. Il accepte ou il n'accepte pas. Maintenant, si je viens sur la notion des soins palliatifs en tant que tels, toute la première partie de ce texte est précisément sur le développement des soins palliatifs dans notre pays. Parce que, quand on parle de soins palliatifs, il y a plusieurs types de choses. Il y a d'un côté des services totalement dédiés. L'idée, c'est qu'il y ait dans chaque département, d'ici la fin de l'année 25, un service dédié de soins palliatifs. Il manque, au moment où je vous parle, 20 départements, 10 seront équipés cette année, les derniers le sauront l'année prochaine. Deuxièmement, il y a des lits identifiés de soins palliatifs et troisièmement, il y a ce qu'on appelle les soins palliatifs à domicile. Après, en termes de financement, ces financements sont pris en charge par la Sécurité sociale, et donc y compris par les complémentaires Santé solidaires, ce qui veut dire que l'accès aux soins palliatifs n'est pas un sujet financier pour le patient. Et ça, c'est très important que les auditeurs le sachent. Un patient qui est dans une situation qui nécessite qu'il bénéficie de soins palliatifs, peut en bénéficier. C'est pris en charge. Et d'ailleurs il n'y a pas de secteur 2 en matière de soins palliatifs.

MARION L'HOUR
C'est aujourd'hui Catherine VAUTRIN La journée sans tabac. Plus de 3 personnes sur 10 fument. 25 % quotidiennement. La proportion reste stable depuis 2019. On a perdu la lutte contre le tabac. Est-ce qu'il faut augmenter les prix, comme le préconise un rapport sénatorial récemment, peut être jusqu'à 25 € le paquet de cigarettes en 2040 ?

CATHERINE VAUTRIN
Vous savez, moi, je vais vous dire un truc. Je suis une fumeuse repentie et je fête cette année mes 20 ans sans tabac.

MARION L'HOUR
Bravo.

CATHERINE VAUTRIN
Eh bien honnêtement, c'est franchement un sujet perso, et je crois que ça me permet d'élargir sur un point majeur, c'est qu'on est tous propriétaire ou détenteur d'un capital santé, et quelque part on est dans un pays où la santé est très bien prise en charge par les pouvoirs publics. Mais la vraie responsabilité c'est celle de chacune et de chacun d'entre nous, qu'est-ce qu'on fait pour notre capital santé, il est personnel, c'est aussi à nous de l'entretenir. L'entretenir, c'est les 30 minutes de sport, c'est les fruits et légumes et c'est évidemment l'abstinence en matière de cigarettes.

MARION L'HOUR
Et donc augmenter les prix ou non ?

CATHERINE VAUTRIN
Moi je pense que l'augmentation des prix peut potentiellement dissuader. Mais ce que je vois aussi, vous savez, moi je suis une élue de terrain, je suis élue à Reims, à deux pas de la Belgique, je vois bien comment les choses se passent. Donc les prix c'est…

MARION L'HOUR
Le trafic, vous voulez dire.

CATHERINE VAUTRIN
Les prix c'est dissuasif, mais ça ne suffit pas. Il faut que chacun se rende compte des, en fait, des conséquences du tabac sur la santé de nos concitoyens. C'est ça le sujet.

ALI BADDOU
Il y a une question aussi qui est posée par de nombreux auditeurs, notamment Arthur : « A quand des gestes forts dans la lutte contre le tabac, Catherine VAUTRIN ? Interdiction de fumer sur les terrasses des restaurants, interdiction de fumer pour les moins de 16 ans. Coordination européenne sur l'augmentation des prix du paquet de cigarettes. On sait qu'il suffit de franchir une frontière pour faire de sacrées économies. Pourquoi est-ce que ça, ça n'est pas pris en compte aujourd'hui ? ».

CATHERINE VAUTRIN
Eh bien déjà, je salue Arthur. Je dis à Arthur que Xavier BERTRAND…

ALI BADDOU
Qui est médecin.

CATHERINE VAUTRIN
En plus, je le salue d'autant plus et je le remercie de son action pour nos concitoyens. Moi je pense que déjà Xavier BERTRAND a eu le courage à l'époque de sortir les cigarettes. C'était un élément important. Moi, je suis là depuis 5 mois, mais incontestablement, une coordination sur les tarifs, c'est un point important. Et la réflexion sur les jeunes et le tabac, je suis convaincu que plus on évite la cigarette très jeune, plus on peut éviter qu'il y ait des habitudes qui soient prises. C'est un peu la même chose d'ailleurs que pour « Sniff », qui est vraiment l'archétype du geste catastrophique. Commencer à apprendre à snifer, il n'y a rien de pire.

MARION L'HOUR
La poudre blanche…

ALI BADDOU
Sniffy.

CATHERINE VAUTRIN
C'est terrible ce truc.

MARION L'HOUR
Sniffy.

CATHERINE VAUTRIN
Sniffy, c'est terrible ce truc.

ALI BADDOU
Sniffy, et pourtant c'est en vente libre.

CATHERINE VAUTRIN
Eh bien je vais vous dire qu'il faut l'interdire au plus vite en réglementaire ou en législatif, mais on est en train de travailler dessus pour l'interdire au plus vite.

ALI BADDOU
Alors il y a les patients français qui peuvent bénéficier ou qui voudraient bénéficier du cannabis thérapeutique pour soulager leurs douleurs, par exemple. Est-ce que c'est quelque chose que vous envisagez à grande échelle ? Il y a eu des expérimentations, mais on n'est jamais allé au-delà, comme au Canada ou comme dans d'autres pays.

CATHERINE VAUTRIN
Pour l'instant, nous n'allons pas.

ALI BADDOU
Pourquoi ?

CATHERINE VAUTRIN
On n'a pas aujourd'hui d'éléments qui nous conduisent à aller plus loin.

ALI BADDOU
Eh bien, d'autres pays le feront, de grandes démocraties.

CATHERINE VAUTRIN
Oui, mais vous savez, on n'est pas forcément obligé de faire ce que font les uns et les autres. Regardons déjà les résultats et regardons les effets induits.

ALI BADDOU
Non non, mais j'essaie juste de comprendre, en fait.

CATHERINE VAUTRIN
Eh bien je vous dis. Regardons…

ALI BADDOU
Donc les Canadiens, les Américains et les Israéliens…

CATHERINE VAUTRIN
Non regardons, je vous répète, regardons d'un côté les résultats, regardons d'un autre côté les effets induits, c'est-à-dire mesurons risque/ bénéfice, comme pour toute politique publique.

MARION L'HOUR
Catherine VAUTRIN, ce matin, le ministre de la Santé, votre ministre délégué, annonce des mesures concernant l'hôpital, puisqu'un mouvement MeToo hôpital s'est mis en place il y a quelque temps, une cinquantaine de manifestants sont réunis, notamment mercredi devant le ministère, pour demander des mesures concrètes. Et donc elles arrivent. Alors, parmi ces mesures, formation pour tous, effacement des fresques pornographiques qu'on peut voir dans certains hôpitaux, les fresques carabines, création d'une ligne d'écoute d'une équipe d'enquêteurs dédiés. Est-ce qu'on va assez loin, est-ce qu'il ne faut pas être un peu plus coercitif ?

CATHERINE VAUTRIN
Déjà, le premier sujet, c'est de dire que c'est tolérance zéro, c'est totalement inacceptable ; Le deuxième sujet, c'est de remercier celles qui ont le courage de parler parce que vous êtes une femme, je suis une femme, on sait combien c'est courageux d'aller expliquer ce qu'on a pu subir, surtout dans un contexte qui peut en plus être un contexte hiérarchique qui rend les choses encore plus difficiles. Derrière, effectivement, il y a des procédures qui existent plus ou moins dans les établissements. Et je remercie Frédéric VALLETOUX, avec lequel j'ai échangé sur ces sujets, c'est indispensable d'organiser les choses, pour qu'effectivement on puisse condamner. C'est juste inacceptable. Et à partir de là, il y a évidemment toujours, vous savez, sur ce chemin entre la condamnation et puis la présomption d'innocence. C'est là où, une fois de plus, on revient sur ce fameux terme d'équilibre. Mais en tout cas, la condamnation est majeure, et ce qui est mis en place, là, par Frédéric, permet déjà d'organiser une procédure, de travailler avec également les tribunaux pour que la parole soit entendue dans de bonnes conditions, pour que personne n'hésite à aller dire. Parce que c'est ça, comment est-ce que je... et moi je remercie celles et ceux, surtout celles d'ailleurs, qui ont eu le courage de rendre public, parce que c'est courageux. Et ce qu'elles font, elles le font évidemment pour elles, mais elles le font surtout pour les autres. Donc surtout n'acceptez rien, c'est inacceptable et dénoncez.

ALI BADDOU
Catherine VAUTRIN, vous êtes, je le disais, ministre de la Santé, également ministre du Travail. C'est un très grand ministère, et le Premier ministre Gabriel ATTAL a annoncé dimanche le durcissement des conditions d'indemnisation pour les chômeurs. Il faudra désormais avoir travaillé 8 mois sur les 20 derniers pour toucher l'allocation chômage, contre 6 actuellement. Il y avait urgence alors que le chômage est à 7,5 % ?

CATHERINE VAUTRIN
Vous savez, il y a un sujet qui est très important pour le gouvernement, c'est l'émancipation par l'emploi. En d'autres termes, ce qui est important, c'est d'accompagner nos concitoyens vers l'emploi. La liberté, c'est de vivre de son travail et donc du revenu qu'on est capable de se générer. Ce n'est pas une liberté que d'être accompagné par une allocation, parce que malheureusement, on est éloigné de l'emploi.

ALI BADDOU
Mais on choisit d'être au chômage ?

CATHERINE VAUTRIN
Pas du tout. On ne choisit pas d'être au chômage. Mais la question, c'est : comment on a capacité à retourner vers le travail. Et si vous prenez ce qu'a fait le gouvernement depuis 2017, on a 2,5 millions de personnes qui ont d'une part retrouvé le chemin de l'emploi, d'autre part, on a aujourd'hui totalement réformé France Travail, pour accompagner les personnes qui sont en demande d'emploi. Et ce que l'on voit, c'est que les premiers résultats sont particulièrement intéressants, puisqu'on voit que sur les premières cohortes, on a accompagné effectivement plus de 40 % vers l'emploi. Et comment on y est arrivé ? Tout simplement par une écoute suffisamment qualitative pour commencer par régler les freins qui empêchaient le retour à l'emploi. Je prends des exemples très concrets. Quelqu'un qui, une femme seule, parce que famille monoparentale dans la vraie vie, c'est une femme seule avec des enfants, pas de moyens de garde quelquefois, pas de moyens de transport. Ce n'est pas si facile que ça d'aller retrouver un boulot. Quand on a capacité à répondre à ces premières questions, avec par exemple des crèches à vocation d'insertion. Ce qui veut dire que pendant que je cherche un boulot, je peux avoir mon enfant en crèche, ce qui me permet d'avoir du temps pour me consacrer à ma vie et à ma recherche d'emploi. Avoir une capacité à régler quelquefois un problème de logement. Avoir une immersion dans le secteur dans lequel je voudrais aller travailler pour me rendre compte…

ALI BADDOU
Mais on peut vous dire que réduire les indemnités, ça ne crée pas des emplois.

CATHERINE VAUTRIN
Mais, attendez, je finis juste, parce que je crois que c'est important, de dire qu'il y a tout ce bloc autour du demandeur d'emploi, comment je l'amène vers le travail ? Ça, c'est le premier élément. Derrière, regardez la notion de l'allocation chômage. Qu'est-ce qu'on a fait ? On est revenu vers une moyenne qui est la moyenne européenne. Vous prenez par exemple l'Allemagne, en Allemagne on doit avoir cotisé 12 mois dans les 30 derniers mois pour être indemnisé. Eh bien là, en France, on est, on propose à partir du 1?? décembre prochain d'avoir cotisé pendant 8 mois sur les 20 derniers mois.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 3 juin 2024