Interview de M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer, à RTL le 26 juillet 2024, sur la sécurité de la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques de Paris.

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Média : RTL

Texte intégral

STEPHANE CARPENTIER
7h45, l'invité de RTL matin est donc en direct, en studio, et sans cravate, une nouvelle fois. Ministre de l'Intérieur du gouvernement démissionnaire, bonjour à vous Gérald DARMANIN.

GERALD DARMANIN
Bonjour.

STEPHANE CARPENTIER
Paris accueille le monde à partir d'aujourd'hui et le monde va regarder Paris et la France avec ce coup d'envoi des J.O 2024, sept ans de préparation pour une cérémonie d'ouverture hors normes et 15 jours de compétitions avant la deuxième phase et les paralympiques. Vous serez où vous, Gérald DARMANIN, ce soir lors de la fameuse cérémonie ?

GERALD DARMANIN
D'abord je serai auprès des policiers et des gendarmes pour les remercier, pour aller voir ce qui se passe évidemment pour le public, les 300 000 spectateurs que nous attendons autour de la Seine, et puis ensuite dans les différents PC sécurité, auprès du préfet de la région, auprès du préfet de police, pour pouvoir prendre des décisions en cas de problèmes.

STEPHANE CARPENTIER
En cas de problèmes, ça veut dire quoi ?

GERALD DARMANIN
Des problèmes, dans une cérémonie comme celle-ci, il peut y en avoir beaucoup, comme tout à l'heure votre chroniqueuse l'a dit, ça peut être des problèmes d'abord météorologiques, l'eau, avec le débit de la Seine, va toucher plus ou moins la parade, ça peut être des problèmes d'ordre public bien sûr, des mouvements de foules, quand on a autant de personnes sur si peu d'espace, évidemment c'est une inquiétude, des problèmes terroristes bien sûr, et puis on a toujours, devant une cérémonie qui n'a pas de précédent dans l'Histoire, aujourd'hui nous participons à un petit bout de l'Histoire, puisqu'on n'a jamais organisé ce genre de cérémonie en dehors d'un stade, qui est regardée par 2 milliards de téléspectateurs, il y a toujours des moments où des décisions sont à prendre.

STEPHANE CARPENTIER
Paris sous cloche donc, Gérald DARMANIN, combien de policiers, combien de gendarmes, combien de militaires sont mobilisés, rien que ce vendredi ?

GERALD DARMANIN
Aujourd'hui il y a 45 000 policiers et gendarmes, qui sont mobilisés pour la cérémonie d'ouverture et pour le reste des événements à Paris, il y a des fan-zones, il y a quelques milliers de militaires qui nous aident, soit pour la couverture anti-drones, soit pour les patrouilles Sentinelle, je remercie le ministre des Armées, et puis il y a 20 000 agents de police municipale dans différentes villes de banlieue et à Paris, et les agents de sécurité privée, donc il y a plus de 50 000 personnes qui ce soit vont protéger les Français.

STEPHANE CARPENTIER
On imagine qu'il fallait ça, que c'était le minimum, parce que la menace d'actions contre les Jeux et la France elle existe, Gérald DARMANIN, Olivier CHRISTEN était à votre place hier matin, le procureur antiterroriste, et il nous confirmait qu'il y a des risques qui pèsent.

GERALD DARMANIN
Alors, il n'y a pas de menace caractérisée au sens où nous n'avons pas d'informations de la DGSI, de la DGSE, de nos services de renseignement ou des services étrangers, avec des revendications ou des préparations que nous connaîtrions et qui toucheraient les Jeux olympiques ou la cérémonie d'ouverture, sinon je pense que nous ne l'aurions pas organisée, ou je dirais " stop ", si j'ose dire, au chef de l'Etat, nous n'avons pas ces menaces caractérisées, mais il est évident que le monde dans lequel nous vivons est un monde extrêmement dangereux. L'agression de la Russie sur l'Ukraine, qui fait naître beaucoup de menaces sur la France qui a pris fait et cause pour l'Ukraine, vous le savez, la tension extrêmement forte au Proche-Orient, et notamment les massacres à Gaza nous font évidemment revendiquer à un certain nombre de passages à l'acte possibles, et puis le terrorisme islamiste classique, si j'ose dire, malheureusement, qui touche la France, et notamment l'État islamique au Khorassan, les responsables de l'attentat de Moscou. Mais vous savez, quand vous regardez ce qui s'est passé à Moscou, qui est quand même un pays autoritaire, et qui n'ont pas pu empêcher ce massacre, ou aux Etats-Unis, alors que nous avons les meilleurs services de renseignement du monde aux Etats-Unis, sur le président TRUMP, ça reste très modeste, et donc je suis très modeste et très concentré.

STEPHANE CARPENTIER
Vous parliez du Proche-Orient, Israël a mis en garde la France sur des menaces potentielles d'attaques terroristes contre ses athlètes et touristes par des groupes soutenus par l'Iran, est-ce que vous confirmez ça, vous avez reçu un courrier en la matière ?

GERALD DARMANIN
Alors, j'ai compris que le ministre des Affaires étrangères israélien avait écrit à notre ministre des Affaires étrangères à nous, ce que je peux vous dire c'est que les services de renseignement se parlent, ceux qui sont nos autorités, nous n'avons pas de menace caractérisée, même si l'Iran fait partie de ces pays que nous regardons particulièrement.

STEPHANE CARPENTIER
3600 personnes écartées, c'est ça, pouvant représenter une menace ?

GERALD DARMANIN
Un petit peu plus, un petit peu moins de 5000…

STEPHANE CARPENTIER
Ah oui !

GERALD DARMANIN
Sur le million d'enquêtes administratives que nous avons faites, ça concernait des agents de sécurité privée, des bénévoles de Paris 2024, des stadiers, des porteurs d'eau.

STEPHANE CARPENTIER
5000, vous n'avez pas pris de risques, c'est-à-dire que vous avez ratissé très très large.

GERALD DARMANIN
Alors mon travail à moi c'est effectivement de limiter au maximum les risques, bien sûr, donc il y a des gens qui sont confondus pour espionnage, que nous avons écartés, un millier de personnes, parce que les Jeux olympiques c'est aussi un endroit où les gens ont envie de venir pour sans doute faire des cyberattaques, récupérer des informations, économiques, culturelles, sportives parfois, des personnes qui sont de l'islam radical, d'ultragauche ou d'ultradroite, des personnes qui avaient des casiers judiciaires, nous les avons écartées de l'organisation des Jeux olympiques.

STEPHANE CARPENTIER
Gérald DARMANIN, il y a deux individus qui ont été arrêtés ces derniers jours, un jeune de 18 ans en Gironde, et puis un autre, ils étaient visiblement tous les deux en contact, sont toujours en garde à vue, est-ce qu'ils menaçaient concrètement ces Jeux olympiques ?

GERALD DARMANIN
Oui, c'est ce que pensent les services français. La justice va pouvoir concrétiser nos soupçons, mais nous pensons qu'ils étaient à la fois radicalisés, malgré leur jeune âge, et qu'ils voulaient passer à l'acte. C'est le quatrième projet d'action violente que nous avons déjoué en quelques semaines.

STEPHANE CARPENTIER
Parmi les menaces il y a les drones, Gabriel ATTAL disait en début de semaine que six drones sont interceptés chaque jour aux abords des sites des Jeux, c'est vrai ça ?

GERALD DARMANIN
Oui, c'est vrai. Alors, c'est des drones, ce n'est pas des drones méchants, on appelle parfois ça…

STEPHANE CARPENTIER
Oui, ce n'est pas une réelle menace.

GERALD DARMANIN
Alors, la menace des drones est une réelle menace parce que ce que nous voyons souvent, dans le terrorisme, si j'ose dire civil, c'est les pratiques faites dans le monde de la guerre qui est appliqué à notre vie de tous les jours. Donc en ce moment qu'est-ce qui se passe au Yémen, en Israël, en Ukraine ? Ce sont des drones chargés d'explosifs, que l'ennemi envoie sur une foule, envoie sur un individu, donc c'est ça notre menace, et vous savez, dans les années précédentes, je pense en Espagne au Camp Nou, au stade de Barcelone, il y avait eu une attaque de drones chargés d'explosifs qui a été déjouée par les services espagnols, et donc c'est sans doute la grande menace d'aujourd'hui et de demain, et sans doute que la menace d'après-demain ça sera un drone chargé d'explosifs avec une attaque cyber qui va paralyser la police et son intervention, ou les hôpitaux qui sont censés être ceux qui vont soigner les personnes blessées par le drone, donc ça c'est sans doute ce à quoi nous devons nous préparer, c'est ça la menace terroriste d'aujourd'hui et de demain. Mais pour revenir à nos couvertures anti-drones que nous avons mises en place, il y a beaucoup de gens qui utilisent des drones, des médias non-accrédités, des particuliers, des personnes qui veulent regarder ce qui se passe, prendre des images tout simplement, donc nous arrivons à les neutraliser, c'est ce qu'on appelle les drones bienveillants, même s'ils n'ont pas le droit de voler au-dessus de telle ou telle enceinte, jusqu'au jour où on aura des drones malveillants, c'est-à-dire chargés d'explosifs, aujourd'hui nous n'avons pas eu ça sur nous, ni la Coupe du monde de rugby, ni la préparation des athlètes, puisqu'on prépare déjà un certain nombre de couvertures anti-drones depuis plusieurs semaines, mais c'est sûr que c'est la menace, sans doute, qui touche les pays comme le nôtre.

STEPHANE CARPENTIER
Gérald DARMANIN, la cravate, vous ne la portez pas ce matin, pas plus qu'il y a quinze jours lorsque vous êtes venu la dernière fois ici dans les locaux de RTL, c'est quoi cette histoire ?

GERALD DARMANIN
Ce n'est pas une histoire, d'abord ça me permet d'en discuter avec vous médiatiquement, c'est-à-dire que c'est un symbole, et les symboles ils sont faits pour être interprétés. Je constate qu'il y a une sécession…

STEPHANE CARPENTIER
C'est un symbole de quoi alors ?

GERALD DARMANIN
Il y a une sécession très forte entre ce que les Français appellent les élites, politiques, journalistiques, économiques, et ce qu'ils vivent. Moi qui viens de province, qui vient du Nord, comme beaucoup de gens sans doute, on voit bien que ces élections elles sont révélatrices de ce que beaucoup de Français savent, c'est qu'il y a des gens, voilà, qui ne vivent pas comme eux, qui ne vivent pas les mêmes choses qu'eux, voilà, et je pense que la morale, la posture morale et la posture de distance qu'ont parfois les élites, elle est désormais devenue insupportable pour une grande partie des Français, on leur reproche de rire, de manger, de voter, d'écouter, de regarder des choses, et il y a une élite parisienne qui leur dit « ça c'est pas bien. » Je pense que les Français en ont marre de ça, et donc ma petite façon à moi de dire aux habitants du Nord, à ceux qui me connaissent bien, d'où je suis, je vous comprends, je comprends qu'il y a un problème entre les décisions politiques et les Français, c'est au maximum de pouvoir se comporter, d'être, de vivre parmi les miens, je suis de quelque part, je suis de Tourcoing, et de ne pas ressembler à ce qu'est Paris et les décisions très lointaines de Paris.

STEPHANE CARPENTIER
Donc sans cravate, c'est un geste symbole de l'élite, vous nous dites ce matin, mais les gens normaux, qui sont loin de l'élite, ils portent la cravate quotidiennement pour aller travailler.

GERALD DARMANIN
Non mais, encore une fois, la cravate en soi n'a aucune importance…

STEPHANE CARPENTIER
Ça mettait une distance, c'est ça ?

GERALD DARMANIN
Quand je vais à un enterrement, quand je vois le président de la République, évidemment que je porte une cravate, je suis un garçon poli et bien élevé par ma maman, mais ce que je veux vous dire c'est que ça permet d'en parler. Vous savez, il y a de très nombreuses personnes qui ont constaté cette sécession entre l'élite et le peuple, simplement personne n'en tire des conséquences. Je pense que sur les questions d'immigration, d'identité, de pouvoir d'achat, de gens qui bossent, qui ne s'en sortent pas, des femmes seules qui bossent, qui ne s'en sortent pas, on en discute dans des colloques, mais rien de concret ne change pour les Français, et moi je veux vous dire que j'ai compris de cette campagne électorale qu'il y avait une grande acrimonie contre nous, parfois une grande violence, qu'il faut que nous comprenions et qu'il faut qu'on ne dise pas " business as usual ", on continue comme avant, donc ça, ça se traduit par cette discussion, et j'en suis fort heureux de pouvoir l'expliquer, et moi je dis attention à tous mes collègues des partis politiques, mais aussi effectivement à des grands médias, à des grands décisionnaires économiques, attention, nous sommes de plus en plus éloignés de notre peuple et notre peuple il ne peut pas être écarté des décisions, parce que lorsqu'on fait la politique sans le peuple ça se termine toujours mal et ce n'est pas la démocratie.

STEPHANE CARPENTIER
Gérald DARMANIN, vous serez aux PC sécurité ce soir pour la cérémonie d'ouverture, c'est ce que vous nous disiez tout à l'heure, vous avez prévu d'aller voir des épreuves, vous êtes sport ou pas, vous aimez le sport ?

GERALD DARMANIN
Oui, j'ai beaucoup le sport.

STEPHANE CARPENTIER
Vous l'avez pratiqué ?

GERALD DARMANIN
J'étais arbitre de football pendant de très longues années.

STEPHANE CARPENTIER
D'accord, et vous courez toujours aujourd'hui ?

GERALD DARMANIN
Je cours moins, mais quand je ne serai plus ministre de l'Intérieur je reprendrai un peu plus le sport, mais oui je vais courir, oui oui, je vais aller voir le match de basket de l'équipe de France demain chez moi justement à Lille. Bon, après, j'ai tendance à voir, depuis 4,5 ans que je suis ministre de l'Intérieur, plus les Bleus en dehors du terrain que les Bleus sur le terrain, et c'est vrai qu'on s'inquiète toujours, les événements sportifs c'est sans doute la chose la plus importante médiatiquement, qui draine le plus de monde, et donc c'est souvent des problèmes de sécurité, donc je serai heureux, un jour, de ne regarder que le match.

STEPHANE CARPENTIER
Le dernier relayeur de la flamme ou derrière relayeuse de la flamme ce soir, vous allez me dire que vous ne savez pas…

GERALD DARMANIN
Si, si…

STEPHANE CARPENTIER
Ah vous savez ?

GERALD DARMANIN
Oui, mais je ne suis pas là pour le dire.

STEPHANE CARPENTIER
Ah vous savez, vraiment ?

GERALD DARMANIN
Quand on est ministre de l'Intérieur…

STEPHANE CARPENTIER
Oui, c'est mieux de le savoir.

GERALD DARMANIN
Voilà.

STEPHANE CARPENTIER
C'est rassurant. C'est un homme, c'est une femme ?

GERALD DARMANIN
Ce sera un très beau spectacle.

STEPHANE CARPENTIER
Très beau spectacle. Un homme ou une femme ?

GERALD DARMANIN
Ce sera un très beau spectacle.

STEPHANE CARPENTIER
Qui a des médailles d'or olympique ?

GERALD DARMANIN
Ce sera un très beau spectacle. En tout cas, ce que je peux vous dire, c'est que la médaille d'or elle revient à tous les policiers, les gendarmes, qui aujourd'hui, vous savez, n'ont pas de congés avec leurs enfants, avec leur famille, pour nous protéger, pour faire le plus bel événement du monde, parce que la France c'est ça, c'est un pays incroyable qui est capable d'organiser la chose la plus incroyable du monde et on peut être tous très fiers de nos forces de sécurité.

STEPHANE CARPENTIER
Ce sera une femme ?

GERALD DARMANIN
Je vous souhaite une très belle cérémonie d'ouverture.

STEPHANE CARPENTIER
Tout pareil. Merci beaucoup Gérald DARMANIN d'avoir été l'invité ce matin…

GERALD DARMANIN
Merci à vous.

STEPHANE CARPENTIER
Sur RTL, ministre de l'Intérieur, entretien qu'on peut retrouver évidemment sur rtl.fr.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 29 juillet 2024