Interview de Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée, chargée de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, à Sud Radio le 5 septembre 2024, sur le fonctionnement du gouvernement, la fièvre catarrhale ovine, la nomination d'un nouveau Premier ministre, les finances publiques et la réforme des retraites.

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Média : Sud Radio

Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Notre invitée ce matin, il est 08h35, Agnès PANNIER-RUNACHER, qui est députée du Pas-de-Calais, et toujours, je dis bien toujours, ministre déléguée chargée de l'Agriculture. Bonjour.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Bonjour Jean-Jacques BOURDIN.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous, Agnès PANNIER-RUNACHER. Vous êtes toujours ministre ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Je suis toujours ministre, tout à fait.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Voilà. Donc vous êtes toujours au ministère. L'administration fonctionne, non, parce que les Français ne comprennent pas vraiment comment ça fonctionne aujourd'hui. Comment fonctionne le gouvernement aujourd'hui ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
En fait, le gouvernement continue de travailler avec ses administrations, parce qu'une action gouvernementale, c'est d'abord une animation d'équipe, et on n'a pas besoin de texte de loi pour avoir une ministre de l'Education nationale qui s'assure qu'il y ait bien des professeurs face aux élèves, qui s'assure que la rentrée scolaire se passe bien ou dans l'agriculture, pour suivre la bonne application des textes, s'assure que les subventions sont payées en temps et en heure, animer les directions qui sont sous notre responsabilité. Et donc, faire en sorte que les affaires courantes, comme il est convenu de les appeler, continuent à se dérouler. En revanche, on n'a pas le droit de signer des décrets, on peut signer des décrets techniques, des choses qui s'imposent, qui sont naturelles, mais on n'a pas le droit de signer des décrets qui seraient politiques, qui marqueraient une inflexion dans une politique publique.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, l'Etat fonctionne, voilà…

AGNES PANNIER-RUNACHER
L'Etat fonctionne.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Le citoyen va être rassuré, parce qu'il a besoin de savoir…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Et les membres du gouvernement sont au travail.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est une question qu'on se pose tous…

AGNES PANNIER-RUNACHER
On l'a vu pendant les Jeux olympiques, Jean-Jacques BOURDIN…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, non, mais c'est vrai…

AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est-à-dire que ça s'est bien déroulé, et forcément, il y a une animation, et tout l'enjeu, c'est qu'il y a toujours quelqu'un au gouvernement pour travailler et faire travailler les administrations.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, avant de parler politique, vous êtes ministre déléguée chargée de l'Agriculture, la fièvre catarrhale ovine, des éleveurs d'ovins ont manifesté hier devant la préfecture des Ardennes. 50%, on dit que 50% de l'élevage ovin de cette région de France est touché par cette fièvre catarrhale. Il y a une vaccination depuis le 12 août, c'est bien cela ? Mais les éleveurs disent : on a vacciné beaucoup trop tard. C'est inquiétant, franchement ? Est-ce que vous êtes inquiète ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Oui, je suis inquiète, puisqu'à chaque fois que vous avez une épidémie dans…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, c'est un virus, je le rappelle…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Voilà. A chaque fois que…, puisque c'est un virus qui se transmet, donc tout l'enjeu, c'est d'arrêter cette transmission. Et vous savez qu'en plus, moi, j'étais avec les producteurs laitiers encore mardi dernier, c'est que vous avez plusieurs maladies qui sont en train de toucher nos cheptels. Donc vous avez la fièvre catarrhale, mais, vous avez également la MHE pour les troupeaux de bovins, et vous avez des zones qui sont touchées. Donc il faut faire en sorte…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais est-ce que cette fièvre pourrait s'étendre à tous les troupeaux français, à toutes les régions de France, il y a un danger…

AGNES PANNIER-RUNACHER
L'enjeu est double…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a un risque…

AGNES PANNIER-RUNACHER
L'enjeu, il est double, c'est, 1°) : il faut vacciner, parce que, forcément, ça freine immédiatement la propagation de la maladie. Et 2°) : il faut être particulièrement vigilant. Et les marchands de bestiaux doivent notamment être particulièrement vigilants dans le transport des bêtes, de façon à éviter cette transmission. On sait bien que dans certaines régions, on n'en avait pas, et forcément, il y a eu une diffusion. Et cette diffusion, elle est aussi liée à des mouvements d'animaux…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que les éleveurs seront indemnisés ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Vous savez, on a toujours accompagné, à chaque fois qu'il y a eu ce type d'épisode, les éleveurs, on l'a fait pour la MHE, et évidemment, on sera au rendez-vous sur d'autres épisodes…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ils seront donc indemnisés pour la fièvre catarrhale…

AGNES PANNIER-RUNACHER
On sera au rendez-vous sur d'autres épisodes. Mais aujourd'hui, l'enjeu, c'est d'avoir des doses, d'avoir des vétérinaires, et de vacciner au plus vite. Et Marc FESNEAU est mobilisé sur ce sujet-là.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Un Premier ministre, oui. Vous cherchez toujours un Premier ministre, enfin, pas vous, ce n'est pas vous, mais vous avez une idée ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Moi, à titre personnel, je ne cherche pas un Premier ministre…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez une petite info à nous donner ce matin ? Vous savez qui ? Vous n'en savez pas plus que moi, je suis sûr ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, parce que…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Franchement, franchement ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Parce que si je le savais, ça veut dire que le Premier ministre serait nommé en toute logique…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, non, mais vous pouvez savoir qui va être nommé…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Je crois que ce qu'il faut se dire, c'est qu'on a besoin, 1°) : de nommer vite un Premier ministre, parce que le message que nous ont envoyé les Français dans cette élection, il est triple, au premier tour, il place le Rassemblement national en tête. Il faut l'entendre. Il y a un besoin d'autorité et d'ordre dans ce pays. Et tous les partis politiques doivent l'entendre. La deuxième chose, c'est que les Français nous disent à nous : vous avez perdu. Nous voulons un changement de politique, changement de politique, changement de casting. Il faut une nouvelle équipe. Ça aussi, c'est naturel. Et au deuxième tour, ils nous disent qu'ils ne souhaitent pas que ce soit le Rassemblement national qui dirige le pays. Et donc, il faut que les autres partis politiques trouvent un chemin. Ça ne veut pas dire trouver une coalition…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais c'est ce que j'entends depuis 50 jours…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Ça ne veut pas dire trouver une coalition à onze ou à dix, en l'occurrence, puisque le onzième, c'est le Rassemblement national, ça veut dire plus simplement : faire en sorte sur quatre, cinq points, de trouver un pacte de non-agression, de non-censure pour pouvoir avancer. Jean-Jacques BOURDIN, en Belgique, ils ont fait leur élection avant nous. Ils n'ont toujours pas de gouvernement…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, sauf que c'est un régime parlementaire…

AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est une situation classique…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Nous sommes dans un régime présidentiel, pardon, Agnès PANNIER-RUNACHER, ça n'a rien à voir. Ça n'a rien à voir.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Si, nous sommes dans un régime où le Parlement aujourd'hui a récupéré une grande partie du pouvoir, et je pense qu'il appartient… Ce que vous dites est assez juste au sens où les partis n'ont pas l'habitude de se comporter comme si on était dans un régime parlementaire.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui, ça je suis bien d'accord…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Ils n'ont pas cette tradition de coalition et de compromis.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, alors, est-ce qu'il faut un Premier ministre issu de la gauche ou pas, ou issu de la droite, issu de…, je ne sais pas, moi…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Les faits sont têtus. Aujourd'hui, vous avez plus de 190 députés à gauche, vous en avez 47 dans la droite républicaine, et vous avez un bloc central avec à peu près 160 députés autour du président de la République, et une vingtaine qui sont Liot. Donc vous en avez à peu près 190 qui sont au centre, on va dire, pour ou contre Emmanuel MACRON. Ça veut dire que le pays ne penche pas à droite, dès lors qu'on considère que le Rassemblement national n'a pas vocation à gouverner. Ce que nous ont dit les Français, ça veut dire qu'il faut le barycentre de l'Assemblée nationale et plutôt à gauche…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il faut un Premier ministre issu de la gauche…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais la gauche modérée.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous dites ce matin : il faut un Premier ministre issu de la gauche, je rappelle que vous êtes membre de Territoires de Progrès.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Tout à fait…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui est un mouvement qui est à gauche dans la majorité aujourd'hui, dans la majorité centrale, qui est plutôt à gauche. Donc vous dites aujourd'hui, il faut un Premier ministre issu de la gauche ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Moi, je dis qu'il faut effectivement un Premier ministre, mais c'est le barycentre de notre Assemblée, c'est les mathématiques. Ce n'est pas parce que ça me plaît…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc il faut un Premier ministre issu de la gauche…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais je pense qu'il faut un Premier ministre issu de la gauche et qui soit capable de ne pas hystériser, si je peux utiliser ce terme, la droite, c'est-à-dire, qui est capable d'incarner une figure d'autorité, puisque c'est un point sur lequel la droite est très attentive aujourd'hui et les Français…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous êtes toujours un soutien de Bernard CAZENEUVE par exemple ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Par exemple, ou d'autres personnalités. Et je pense qu'il appartient aussi aux partis qui composent, aux partis modérés qui composent le Nouveau Front populaire, parce qu'il n'y a rien à attendre de LFI, de trouver le chemin et de faire des propositions. On ne peut pas être juste sur des lignes rouges…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et Xavier BERTRAND qui vous a soutenue…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Comme le fait monsieur FAURE…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais Xavier BERTRAND, qui vous a soutenue d'ailleurs, lors de la législative…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais Xavier BERTRAND est une personnalité légitime politiquement. Il a été ministre pendant des années. Il connaît parfaitement le territoire et le terrain. C'est en plus une figure politique qu'on ne peut pas… enfin, il n'a eu aucune ambiguïté dans son combat contre le Rassemblement national. Mais, précisément, son assise à l'Assemblée nationale, sauf à ce que, et ça, ça serait une possibilité, le PS, les Verts, le Parti communiste décident de le soutenir, n'est pas aussi large que quelqu'un qui pourrait venir de la gauche. Encore une fois, c'est des mathématiques. C'est-à-dire que la solution, elle est aussi dans la main des partis et des groupes politiques et ils ne peuvent pas renvoyer la responsabilité intégralement à Emmanuel MACRON. Il faut aussi qu'ils bougent.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Je comprends. Alors, il paraît que Xavier BERTRAND inquiéterait les milieux d'affaires, et notamment les plus riches de notre pays, les super-riches comme on les appelle, qui ne voudraient pas de lui, qui préféreraient Michel BARNIER, mais tout ça vous n'en savez pas plus que moi, peut-être un peu plus. Mais, à propos des super-riches, est-ce qu'il faut les taxer, est-ce qu'il faut une… parce qu'à gauche, à gauche on avance cela, est-ce que vous dites, vous, il faut surtaxer les super-riches ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, il y a deux choses. Ce que propose dans son programme Le Nouveau Front populaire, c'est une augmentation d'impôts de 150 milliards, quand vous faites une augmentation d'impôts de 150 milliards vous ne taxez pas les super-riches, vous taxez l'ensemble des Français. Et lorsque Le Nouveau Front populaire parle de revenir sur les impôts, la baisse des taxes que nous avons faites, je rappelle que ça va concerner, je pense à la taxe d'habitation, la plupart des Français, donc il faut sortir de cette idée…

JEAN-JACQUES BOURDIN
La gauche n'a pas dit qu'elle allait rétablir la taxe d'habitation !

AGNES PANNIER-RUNACHER
La gauche a dit qu'elle reviendrait sur les baisses d'impôts que nous avons faites. Je rappelle que la baisse d'impôts que nous avons faites, qui est la plus importante, c'est la taxe d'habitation.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, je me souviens très bien, il l'avait annoncée avec moi, Emmanuel MACRON.

AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est près de 20 milliards d'euros.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Sur RMC, je me souviens.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Donc, les 5 milliards d'euros de baisse de l'impôt sur le revenu, il porte sur les classes moyennes, donc attention à cette fausse idée…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais vous ne répondez pas à ma question.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, maintenant je vais venir sur votre…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Répondez à ma question, est-ce qu'il faut taxer les super-riches ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, la taxation sur les super-riches, si effectivement on parle de taxer ou de rééquilibrer en justice fiscale…

JEAN-JACQUES BOURDIN
De rééquilibrer, oui.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Les super-riches, c'est quelque chose qui peut être regardé, mais…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous n'êtes pas contre ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Moi, encore une fois, tout système qui permet d'équilibrer notre budget, de mettre plus de justice fiscale…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, on en a besoin dites-moi.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Sans augmenter massivement les prélèvements obligatoires, parce que nous sommes les champions du monde des prélèvements obligatoires - on nous dit regardez ce qui se passe aux Etats-Unis, il va y avoir des augmentations d'impôts, regardez ce que fait le Labour britannique, ils augmentent les impôts – oui, sauf qu'aujourd'hui les Britanniques payent beaucoup moins d'impôts que nous, les Américains payent beaucoup moins d'impôts que nous, donc quand on est les champions du monde des impôts, avant d'augmenter les impôts on fait un peu attention.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, Agnès PANNIER-RUNACHER, justement, le budget, justement, la trésorerie de l'Etat, justement, ça ne va pas, ça ne va pas du tout. Le budget, finalement était insincère, c'est ce que nous disait l'opposition, vous vous souvenez, il était insincère finalement ce budget, non ? Quand je vois les déficits, quand je vois le creusement des déficits publics, il était insincère.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, moi je… les gens qui vous expliquent que c'est insincère et qui savent avant nous comment va tourner l'économie…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais enfin là !

AGNES PANNIER-RUNACHER
Et est-ce qu'on sera capable de prélever autant d'impôts qu'on l'avait prévu, c'est remarquable, mais ils n'ont pas été capables de le formuler en temps et en heure, donc c'est une pétition de principe. Ce qui se passe aujourd'hui c'est qu'effectivement les ressources fiscales…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Dérapage.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Les ressources… ce n'est pas un dérapage du côté des dépenses, c'est les ressources fiscales ont dérapé, elles ne rentrent pas au niveau qu'on espérait. C'est d'ailleurs un signal envoyé aussi au Nouveau Front populaire, c'est que compter sur plus d'impôts ça ne marche pas forcément, au passage, donc, les impôts ne rentrent pas autant qu'on le pensait, c'est lié aussi à une situation macro-économique, qui n'est pas exactement là où on l'espérait, et effectivement il nous appartient en responsabilité de rééquilibrer ça et d'aller chercher des économies. Et là aussi j'aimerais que tant le Nouveau Front populaire, que d'ailleurs les autres forces politiques, nous expliquent comment à la fois elles font plus de mesures et de dépenses publiques sans dégrader les finances publiques.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Les finances publiques, bien. Deux sujets d'actualité. La loi sur l'assurance chômage, avant le 31 octobre il va falloir décider, est-ce que vous êtes d'accord… est-ce qu'il faut appliquer, cette loi sur l'assurance chômage, avec des conditions d'accès au chômage plus difficile et une durée d'indemnisation réduite ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors moi j'ai formulé très clairement qu'il me semblait que cette réforme n'était pas appropriée. Pourquoi ? Parce que la dernière fois qu'on a fait une réforme de l'assurance chômage, nous avions pris une position qui était assez claire, qui consistait à dire si la conjoncture économique se dégrade il faudra l'accompagner parce que ça sera plus difficile pour les gens qui perdent leur emploi d'en retrouver un. Or, nous sommes plutôt dans une conjoncture économique qui n'est pas en plein boum, donc je pense qu'il faut être très vigilant. Et puis la deuxième chose, c'est que diminuer la période d'indemnisation, je pense notamment aux travailleurs seniors, sans avoir fait préalablement tout le travail, notamment dans la mise en place de France Travail, d'avoir des vrais accompagnants qui aient le temps et qui puissent faire en sorte que les personnes qui perdent leur emploi retrouvent le plus vite possible et les meilleures formations le plus vite possible, je pense que c'est mettre la charrue avant les boeufs. Nous avons une vraie réforme…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc on suspend cette réforme ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Je pense qu'on peut suspendre cette réforme, tout à fait, c'est mon avis de députée…

JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai compris, c'est votre avis de députée…

AGNES PANNIER-RUNACHER
D'Ensemble pour la République, elle n'engage pas nécessairement mon groupe.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Députée de la majorité, de la gauche de la majorité. Agnès PANNIER-RUNACHER, autre réforme, la réforme des retraites, est-ce qu'il faut là aussi la suspendre ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, la réforme des retraites…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'il faut revoir le dossier, rouvrir le dossier ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Aujourd'hui vous avez des groupes politiques qui vous expliquent qu'on va abroger la réforme des retraites, moi je leur demande s'ils comptent reprendre aux 1,7 million de Français, ce n'est pas rien 1,7 million de Français, qui ont entre 50 et 200 euros de plus sur leur compte en banque tous les mois, cet argent, est-ce qu'ils souhaitent le reprendre ? C'est de ça qu'il est question, première chose. Deuxième chose, la réforme des retraites elle permet aujourd'hui de faire des économies, pas des économies pour des dépenses somptuaires de l'Etat, mais des économies qui permettent en fait à des jeunes qui rentrent aujourd'hui sur le marché de travail de se dire qu'ils ont une chance raisonnable d'avoir une retraite à la fin de leurs 40 et quelques années de travail, eh bien moi je n'accepterais pas qu'on revienne sur une réforme des retraites pour empêcher ces jeunes d'avoir une retraite. Ensuite, si on doit ouvrir le sujet de la pénibilité, par exemple, qui est un des reproches qui a été fait sur la réforme des retraites, pourquoi pas, mais il y a clairement deux sujets sur lesquels je ne vois pas comment on peut revenir dessus, le premier sujet c'est d'avoir un financement des retraites entre les jeunes et les seniors qui soit grosso modo équilibré, et ça c'est difficile parce que les gens vivent plus longtemps d'un côté et il y a moins de jeunes qui arrivent sur le marché du travail, c'est une donnée démographique, je veux dire, il ne s'agit pas d'une donnée de droite ou de gauche, et la deuxième chose c'est de faire en sorte que l'augmentation des retraites, qui a permis cette réforme, soit maintenue pour ceux qui en profitent.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Agnès PANNIER-RUNACHER, j'ai deux, trois questions politiques pour terminer, concernant Emmanuel MACRON. Il y a cette demande de destitution d'Emmanuel MACRON, LFI organise une manifestation le 7, après-demain samedi, est-ce que vous pensez que chez LFI il y a une volonté de destituer – ce sera impossible au Parlement, l'article 68, c'est impossible, il faut les deux tiers, enfin, etc., etc. – mais est-ce qu'il y a une volonté…

AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est surtout ça n'a pas de sens…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça n'a pas de sens, ce que vous dites est bon…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Ça n'a absolument pas de sens.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais est-ce qu'il y a une volonté de LFI de destituer Emmanuel MACRON par la rue, est-ce que vous pensez que LFI irait jusque-là ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, mais il y a une constante et permanente de LFI de contester le résultat de l'élection présidentielle, qu'ils n'ont toujours pas avalé, de 2022., et Monsieur MELENCHON n'aspire qu'à une chose, c'est d'essayer d'être président, il pense que le front républicain va jouer pour lui, mais ça n'existe pas, et c'est irresponsable de sa part.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais alors, imaginons, imaginons Agnès PANNIER-RUNACHER, qu'un nouveau Premier ministre soit choisi, qu'il soit vite censuré, Emmanuel MACRON se retrouve dans une position très inconfortable…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Eh bien on recherchera un nouveau Premier ministre.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'on ne peut pas penser qu'il risque d'y avoir une présidentielle anticipée ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Moi je vais vous dire, en responsabilité aujourd'hui, une démission du président de la République ce n'est pas bon pour nos institutions, ce n'est pas bon, ce n'est pas bon pour le poids que nous pouvons exercer au niveau de l'Europe, dans les négociations internationales, il ne faut pas perdre ça de vue, ce n'est pas bon pour le fonctionnement du pays parce qu'on doit avancer, et donc c'est là où les partis politiques doivent agir en responsabilité, ça serait un échec qu'il y ait une démission du président de la République, ça serait un échec ou ça serait de la petite politique, c'est exactement ce à quoi aspire Madame LE PEN, parce qu'elle est inquiète du jugement qui devra statuer sur les faits qui lui sont reprochés par la justice au niveau du Parlement européen, et qui peuvent aller jusqu'à l'inéligibilité, et c'est une position, enfin ça arrangerait Jean-Luc MELENCHON qu'il y ait aussi une élection présidentielle anticipée, mais sinon ça n'apporte rien aux Français, c'est plutôt le contraire.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais dites-moi, petite politique, alors c'est le cas d'Edouard PHILIPPE !

AGNES PANNIER-RUNACHER
Non.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Edouard PHILIPPE, en annonçant sa candidature, il anticipe dites-moi, la démission éventuellement d'Emmanuel MACRON, ce n'est pas un hasard.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Il y a deux choses.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous pensez que c'est un hasard ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, non, non, Monsieur BOURDIN, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez été ministre d'Edouard PHILIPPE.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Tout à fait. Il y a ceux qui essayent de mettre le bordel dans les institutions et qui s'entendent très bien pour le faire, et ça c'est les extrêmes, le Rassemblement national, sous couvert de bonnes manières, en réalité, je le rappelle, a voté pour qu'il y ait deux vice-présidents LFI à l'Assemblée nationale, et deux vice-présidents LFI à l'Assemblée nationale ça ne correspond pas du tout au poids de LFI dans l'Assemblée nationale, et LFI, dans sa stratégie permanente de bordélisation, continue à essayer de créer des moments ou un espace pour leur leader Maximo. Et puis vous avez des partis qui, en responsabilité, ont effectivement des leaders qui se positionnent, Monsieur BERTRAND ne cache pas son intérêt pour l'élection présidentielle, est-ce que c'est pour ça qu'il veut la destitution du président Non, je ne le crois pas.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Enfin, vous avez vu ce qu'a écrit Rachida DATI, vous allez me dire si vous êtes d'accord avec elle ou pas, " l'élégance, comme la reconnaissance, devrait amener à plus de respect de l'institution présidentielle et de l'homme qui nous a permis d'agir et même d'exister sur le plan politique ", et c'est adressé à Edouard PHILIPPE, vous êtes d'accord ou pas avec ces propos-là ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Franchement, je trouve que c'est des discussions qui ne sont pas celles qui intéressent aujourd'hui les Français…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, non, mais d'accord, mais…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, mais je vous le réponds parce que…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais d'accord, mais enfin…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Moi ce qui m'intéresse aujourd'hui c'est de travailler, ce n'est pas de savoir si Pierre, Paul, Jacques, se sont dit, sont d'accord, sont pas d'accord, s'entendent bien ou s'entendent pas bien, ce n'est pas intéressant.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais enfin, vous savez très bien que la vie politique est sclérosée par les ambitions présidentielles des uns et des autres, vous le dites vous-même.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Précisément, trouvons un Premier ministre qui soit capable d'être au-dessus de la mêlée et trouvons des groupes politiques qui sortent de leurs postures, et que plutôt que de nous expliquer qu'est-ce qui est inacceptable pour eux, nous disent ce qui est acceptable. Moi j'ai négocié beaucoup de choses au niveau européen, j'ai vu comment fonctionnaient les coalitions européennes, je ne comprends pas pourquoi on serait plus bêtes que d'autres pays européens et incapables de mettre en place les groupes politiques, les groupes politiques…

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est qui « on », ce n'est pas les Français ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Les groupes politiques.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et les partis politiques…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Et les partis politiques et les groupes politiques.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et vous-même, et tous, tous mélangés.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Et je me mets dans le sac, je considère que mon devoir c'est d'essayer de discuter avec des gens de droite, avec des gens de gauche, il ne s'agit pas de se mettre d'accord sur un programme, on ne sera pas d'accord, on ne porte pas les mêmes visions de société, et c'est normal, et c'est sain, il s'agit de se dire quels sont les quatre sujets sur lesquels on se bloque pas et on fait en sorte d'avancer, et le sujets ils existent, l'école, la santé, le pouvoir d'achat, l'autorité, et en plus il y a cette réflexion sur une réforme de nos institutions, précisément pour tenir compte…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah ! vous êtes favorable à la proportionnelle, vous demandez à…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Moi, je suis favorable à ce qu'on ouvre le débat, maintenant, la proportionnelle, et la situation actuelle le montre, ce n'est pas la réponse qui fonctionne forcément puisqu'aujourd'hui…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Peut-être, parce que le compromis se fait avant…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Peut-être parce que le compromis se fait avant. En tout cas, c'est un sujet qu'on doit mettre sur la table pour essayer de faire en sorte que nos institutions fonctionnent bien.

JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai une dernière question. Il paraît que vous refusez de prendre l'avion, c'est vrai, pour voyager ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est vrai que j'essaye de limiter au maximum mes trajets en avion dans le cadre personnel et que…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour préserver la planète ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Eh bien, ayant été ministre de la Transition énergétique et jonglé avec tous les chiffres d'émissions de CO2, j'essaye de m'appliquer moi-même ce que j'ai essayé de pousser au niveau national et européen, et international. C'est-à-dire que quand il y a une alternative par le train notamment, c'est mieux de l'utiliser.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, merci Agnès PANNIER-RUNACHER d'être venue nous voir ce matin sur l'antenne de Sud Radio


source : service d'information du Gouvernement, le 10 septembre 2024