Déclaration de M. Antoine Armand, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, sur la situation économique et financière de la France, à l'Assemblée nationale le 25 septembre 2024.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Antoine Armand - Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie

Circonstance : Audition à la Commission des Finances de l'Assemblée nationale

Texte intégral

Monsieur le ministre, cher Laurent Saint-Martin,
Monsieur le Président,
Monsieur le rapporteur général,
Mesdames et Messieurs les députés,


Je suis très heureux de vous retrouver quelques jours après ma nomination comme ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie afin d'échanger sur la situation économique et financière de notre pays, et le cadre macroéconomique dans lequel nous nous trouvons.

Un mot d'abord sur le contexte européen pour rappeler que la croissance agrégée de la zone euro est proche de 1% et devrait le rester.

Cette situation doit nous conduire, comme l'a déjà souligné le rapport Draghi, à prendre des initiatives pour renforcer notre croissance et améliorer notre productivité. C'est un sujet sur lequel je souhaite travailler dès maintenant avec nos partenaires européens et la nouvelle commission.

Dans ce contexte, je veux dire que sur le plan économique, la France résiste bien.

Notre croissance a atteint 1,1% en 2023 et était donc proche de son niveau potentiel, le pouvoir d'achat progresse de 1,4% en 2024 et l'inflation est passée sous la barre des 2% au mois d'aout dernier.

La France résiste d'autant mieux si nous la comparons à nos voisins. Notre croissance cumulée depuis 2019 est de 3,3%, et donc largement supérieure aux 0,3% affichés par l'Allemagne sur la même période.

Pour l'année 2024, la croissance devrait se stabiliser à 1,1% au-dessus de la prévision présentée par le gouvernement au printemps dernier.

L'un des témoignages de ce contexte favorable est que la France demeure le premier pays européen en termes d'investissements étrangers.

Notre croissance reste donc robuste et se stabilise autour de 1%.

Cette croissance demeure cependant insuffisante pour nous offrir des marges de manoeuvre budgétaires comme vient de le rappeler mon collègue Laurent Saint-Martin.

C'est un sujet d'action prioritaire du gouvernement à la demande du Premier ministre.

Le déficit, le ministre de Comptes publics l'a rappelé, sera élevé. Il atteindra un niveau jamais atteint en dehors de périodes exceptionnelles.

Je voudrais avoir quelques mots détaillés aussi sur la dette.

Le déficit sera élevé et notre dette atteint un niveau qui pèse sur le budget de l'État. Elle était en 2023 de 3100Mds€, soit 111% de notre PIB.

Cette dette est le résultat conjugué de 50 ans de déficit public. Je rappelle que c'est la 50ème année d'affilé que nous n'équilibrons pas notre budget annuel.

C'est aussi le résultat, je le dis ici, du soutien apporté à la population pendant la crise covid et la crise énergétique pour protéger les Français, comme l'a rappelé Laurent Saint-Martin.

Cette dette a évidemment un impact sur la crédibilité de la France et à terme de sa souveraineté.

Cela a aussi un impact sur notre dépense publique. Car je vous le rappelle, ces intérêts, atteignaient 48Mds€ en 2023, ils devraient dépasser les 50Mds€ cette année.

C'est ainsi 12% du budget de l'État qui a été consacré en 2023 au remboursement des intérêts de la dette, C'est autant d'argent qui n'est pas utilisé ailleurs.

Dans ce contexte, avec Laurent-Saint-Martin, nous vous proposerons un budget de vérité et d'effort qui nécessitera des mesures de redressement conséquentes.

Cet effort devra sans doute être partagé.

Il doit d'abord et avant y avoir un effort sur les dépenses publiques. Je vous rappelle qu'elles ont considérablement augmenté. Depuis 2019, c'est une hausse 100Mds€ pour les dépenses de l'État, et de 50Mds€ pour l'ONDAM. Chacun devra donc prendre sa part.

Ce n'est qu'en fournissant d'abord un effort sur les dépenses publiques que nous pourrons ensuite ouvrir le débat sur l'augmentation des recettes.

Je veux vous le dire, ce budget veillera à préserver la croissance et l'emploi qui seront les piliers de ma stratégie économique et qui sont indispensables pour mener la transition écologique et financer notre modèle social.

Nous préserverons les avancées permises par la précédente majorité, ces avancées qui ont fait leurs preuves, notamment en matière d'attractivité et de soutien à notre tissu économique.

Ce budget sera juste. Nous ne serons pas le gouvernement des impôts injustifiés et, comme je l'ai dit, je ne serai pas le ministre de la confiscation fiscale.

Je m'assurerai de ne pas augmenter la charge qui pèse sur les classes moyennes et sur les Français qui travaillent. Mais il ne faut pas s'interdire de réfléchir à des prélèvements ciblés sur les entreprises et les Français qui ont une capacité contributive.

Ce budget engage la crédibilité de la France auprès de nos partenaires européens.

Je vous rappelle que la commission européenne a ouvert une procédure pour déficit excessif contre la France en juillet 2024.

Ma mission est donc de conserver un lien de confiance avec nos partenaires européens, et de leur présenter une trajectoire économique et financière soutenable, cohérente et sérieuse.

Pour ce faire, j'échange dès cette semaine, avec mes homologues européens et avec les entreprises pour parvenir à une solution équilibrée qui redressera notre croissance tout en préservant notre dynamisme économique et notre attractivité.

Ce budget, je veux le présenter à la Commission européenne dans de bonnes conditions. Je veux qu'il ait été préalablement présenté à la représentation nationale.

Je vous annonce donc que j'ai demandé et obtenu un délai supplémentaire jusqu'au 31 octobre. Ce délai nous permettra de le préparer correctement notre budget et de le discuter avec l'ensemble des parlementaires dans les meilleures conditions possibles.

En conclusion Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le président, Monsieur le rapporteur général,

Vous l'aurez compris, face à la situation inédite que notre pays traverse, nous devons travailler à la préservation des acquis économiques et de la maîtrise de nos comptes.

C'est une question de souveraineté nationale.

Cela implique une exigence de vérité à laquelle je m'engage pleinement devant la représentation nationale.

Je serai avec le Ministre chargé du budget et des comptes publics, avant, pendant et après le débat budgétaire, pleinement à votre écoute.


Je vous remercie.


Source https://www.economie.gouv.fr, le 26 septembre 2024