Texte intégral
DJAMEL MAZI
Antoine, vous recevez ce matin le ministre délégué chargé des Transports, François DUROUVRAY.
ANTOINE COMTE
François DUROVRAY, bonjour.
FRANÇOIS DUROVRAY
Bonjour.
ANTOINE COMTE
Merci d'être avec nous ce matin sur France Info TV. Vous avez pris vos fonctions de nouveau ministre des Transports, il y a à peine quelques jours. Vous êtes le nouveau ministre des Transports et vous êtes déjà confronté à une crise d'ampleur, je me tourne du côté de la Corse, l'île de beauté, vous avez l'ensemble des ports et des aéroports de l'île qui sont bloqués. Qu'est-ce que peut faire l'Etat pour débloquer la situation, sachant que cette île, en fait, sans les aéroports et sans les ports, on ne peut plus y aller et on ne peut plus en sortir ?
FRANÇOIS DUROVRAY
D'abord vous dire qu'avec Catherine VAUTRIN, nous suivons la situation de près, que nous avons demandé au préfet de Corse de rétablir le dialogue avec la collectivité locale, vous indiquer qu'évidemment nous faisons de la reprise du trafic dans les aéroports, dans les ports, un préalable, d'autant qu'il y a des possibilités de trouver des solutions. Sans rentrer dans les détails, il s'agit d'une question juridique à trancher d'ici le 31 décembre prochain.
ANTOINE COMTE
Il y a un vrai conflit aujourd'hui entre l'État et la collectivité locale de Corse sur la gestion de ces aéroports et ces ports. Qu'est-ce qui se passe concrètement et qu'est-ce que vous proposez pour débloquer la situation ? Parce que ça peut s'enflammer.
FRANÇOIS DUROVRAY
Ecoutez, je ne souhaite évidemment pas que cela s'enflamme et il y a toutes les conditions de la reprise du trafic. Il s'agit d'une interprétation du droit et le représentant de l'Etat sur place a rappelé à la collectivité ce qu'est le droit et ce qu'il devait faire pour les futurs contrats de gestion des ports et des aéroports. Il y a peut-être eu une incompréhension hier lors d'une réunion et je ne pense pas que cela justifie le mouvement social que nous connaissons et qui pénalise gravement les usagers pour lesquels nous avons évidemment la première pensée.
ANTOINE COMTE
Est-ce que ça ne justifie pas aussi votre déplacement sur l'île de beauté sur place en tant que ministre des Transports ? Est-ce que ça va suffire - Désolé de le dire comme ça - avec un préfet, à gérer la situation ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Mais le préfet, représentant du Gouvernement et de chacun des ministres ? C'est la raison pour laquelle je lui ai demandé de reprendre le contact avec Monsieur SIMEONI.
ANTOINE COMTE
Je voudrais qu'on parle sans transition de Michel BARNIER qui a passé son premier grand oral médiatique sur France 2 hier soir. Lui, il se défend de dramatiser la situation, de vouloir mettre en place une rigueur budgétaire, pourtant, il doit faire soixante milliards d'économies pour essayer de ramener le déficit à 5%. Il est a plus de 6% aujourd'hui et donc, il annonce plusieurs mesures, comme par exemple la fusion de certains services publics ou le non-renouvellement de fonctionnaires qui partiraient à la retraite. Ça, ce n'est pas de l'austérité ? C'est quoi ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Ce sont des mesures de bonne gestion qui, d'ailleurs, si j'en crois les enquêtes qui sont réalisées, sont plutôt approuvées par les Français, mais la question de la démesure, c'est de savoir pourquoi nous faisons ça ? C'est évidemment pour ramener le déficit public à des niveaux raisonnables, en tout cas plus acceptables, c'est pour améliorer le pouvoir d'achat des Français, c'est pour améliorer le fonctionnement de nos services publics et notamment de l'éducation, de l'hôpital. Et évidemment, les Français ont bien conscience que pour atteindre ces objectifs, nous devons prendre un certain nombre de mesures de bonne gestion.
ANTOINE COMTE
Mais ce n'est pas de l'austérité ce que vous dites ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Non, ce n'est pas…
ANTOINE COMTE
C'est de la bonne gestion ? Comment vous … ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Ecoutez, la France, enfin, l'Etat dépense aujourd'hui 300 milliards de plus qu'il y a quatre ans, donc nous devons nous réinterroger dans les dépenses. Je ne dis pas que c'est agréable, ce n'est pas agréable pour aucun de mes collègues, mais nous, simplement, nous sommes des gens responsables et nous avons la volonté de redresser le pays et de le faire pour, encore une fois atteindre les objectifs que j'évoquais tout à l'heure. Est-ce qu'aujourd'hui, la situation de l'hôpital ou de l'école est digne d'un pays comme la France ? Non, nous devons agir pour améliorer la vie des Français et nous le faisons par des mesures qui peuvent être impopulaires pour certaines, mais qui sont avant tout des mesures de justice
ANTOINE COMTE
Alors, il y a des mesures qui sont impopulaires pour certains macronistes en tout cas, je pense à Gérald DARMANIN ou Gabriel ATTAL, c'est l'augmentation des impôts, qui sans doute toucheraient les plus fortunés, ceux qui gagnent, des ménages qui gagneraient 500 000 euros par an et plus et puis les entreprises qui déclarent un chiffre d'affaires de plus d'un milliard d'euros par an. Néanmoins, Gérald DARMANIN n'est pas d'accord avec ça. Il l'a dit clairement, il ne votera pas le budget si ces hausses d'impôt sont confirmées, qu'est-ce que vous avez envie de lui dire à Gérald DARMANIN ce matin ?
FRANÇOIS DUROVRAY
D'ailleurs, enfin, d'abord, comme vous venez de le faire en détaillant les mesures, vous voyez qu'il s'agit simplement d'une demande qui me semble légitime vis-à-vis des plus grandes entreprises, vis-à-vis des Français les plus fortunés face à un effort ou j'espère que chacun fait preuve de patriotisme. Ce que j'ai envie de dire, c'est que d'abord, avant de fixer des lignes rouges, il faut voir nos points de convergence et l'état du pays, la situation de crise que nous traversons nécessite que chacun fasse un pas vers l'autre. D'autant que Gérald DARMANIN, sur ce sujet comme sur d'autres, a des propositions à faire, il le fait. Je suis moi-même issu d'une droite populaire et évidemment, la question du travail est pour moi centrale, parce que la création de richesse, qui est indispensable pour le pays, n'est possible que par l'augmentation de quantité de travail. Ce qui ne veut pas dire que les Français qui travaillent devraient travailler davantage, mais qu'on doit permettre à ceux qui n'ont pas accès à l'emploi d'y avoir accès. Je pense notamment aux jeunes, mais c'est un chantier qui prend du temps et il faut dès aujourd'hui prendre des mesures qui se traduisent par, par, par des actes et par des résultats.
ANTOINE COMTE
J'insiste un peu sur le cas Gérald DARMANIN. Visiblement, il a regardé hier, il avait peut-être un petit plateau repas pour regarder Michel BARNIER. Il a passé sa soirée, en tout cas devant France 2, et il a tweeté à l'issue de l'intervention du Premier ministre en disant : " En fait, si on augmente les impôts, ça fait augmenter le chômage " et il l'explique en cinq points. Qu'est-ce que vous répondez à ça ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Et il a tweeté juste après qu'il était favorable à la proposition évoquée par Michel BARNIER d'une allocation sociale unique.
ANTOINE COMTE
Unique, mais ce qui n'a rien à voir, ce qui n'a rien à voir avec une augmentation d'impôt.
FRANÇOIS DUROVRAY
Non mais c'est une proposition. Non mais attendez, il a exprimé un certain nombre de… Enfin, un point de vue, effectivement, cinq points dans un tweet qui rappelle sa position et ensuite, il a indiqué sans son accord ou en tout cas un avis favorable par rapport à la proposition évoquée par Michel BARNIER d'une allocation sociale unique pour faire en sorte que les revenus du travail paient toujours davantage que ceux de l'assistance. Travaillons sur ces questions-là et essayons de converger pour avoir le budget le plus robuste qui permette de répondre aux attentes des Français et je crois que Michel BARNIER attend de Gérald DARMANIN, comme de tous les élus de la majorité relative que nous représentons des propositions pour ce budget 2025.
ANTOINE COMTE
François DUROVRAY, est-ce que vous avez conscience d'appartenir à un Gouvernement qui ne tient qu'à un fil, qu'à un fil politique et dette, comme le dit Marine Le PEN sous la surveillance, je la cite : " démocratique du Rassemblement national " ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Non, nous sommes sous la surveillance des Français face à une situation unique, inédite, une situation de crise et une crise économique et sociale, mais crise démocratique. Pourquoi, moi, qui suis comme je vous l'indiquez issu de la Droite populaire, a accepté de faire un pas et de participer à ce Gouvernement ? C'est tout simplement parce qu'on n'a pas le droit de rester chez soi et de regarder la France sombrer. On a le devoir d'agir et la volonté de Michel BARNIER et de l'ensemble de l'équipe, c'est justement de prendre des mesures qui peuvent être impopulaires. Il a dit qu'il préférait être impopulaire, qu'irresponsable, mais nous avons une feuille de route. J'ai le sentiment d'ailleurs qu'encore une fois, les Français reconnaissent à Michel BARNIER cette honnêteté, la volonté d'agir sereinement et franchement pour les Français et donc, je m'inscris parfaitement dans cette ligne-là. Vous savez, je ne crois pas que, compte tenu de ce qui se passe, je ne pense pas qu'aucune force politique ait intérêt au renouvellement de la crise.
ANTOINE COMTE
Mais être impopulaire, Michel BARNIER l'assume, quitte à utiliser un 49 3 pour le budget ? Il va être obligé de faire ça ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Mais, d'abord ça lui appartient et ensuite, si effectivement le débat à l'Assemblée nationale, ce que nous ne souhaitons pas, ne permettait pas un débat serein, légitime, permettant l'adoption d'un budget, notre Constitution permet fort heureusement et donne au Premier ministre les moyens de continuer à fonctionner pour le pays.
ANTOINE COMTE
François DROVRAY, je voudrais qu'on parle transports, c'est votre portefeuille, ce qui vous concerne au premier chef. Vous avez annoncé que vous souhaitiez, je vous cite : " Lancer un nouveau modèle via des solutions routières par cars, des cars, ce qu'on appelle des cars express, c'est ce que vous vous dites, notamment pour desservir des zones périphériques rurales qui en effet sont peu desservies en termes de transports en commun ? Les écologistes vous sont tout de suite tombés dessus, désolé de le dire comme ça, en vous reprochant finalement de mettre en avant et de vouloir développer un moyen de locomotion qui n'est pas très écologique contrairement aux trains. Et ils vous disent aussi : " Pourquoi n'essayez-vous pas de baisser les prix des trains justement pour inciter les Français à prendre les trains plutôt que d'utiliser des cars ? ".
FRANÇOIS DUROVRAY
C'est une position vraiment purement dogmatique. Les trains, évidemment, ont besoin d'investissements et d'investissements massifs. Élisabeth BORNE a chiffré à cent milliards le besoin pour le ferroviaire, mais je vous rappelle que la ligne de train c'est 28 000 kilomètres dans notre pays et jamais nous ne parviendrons à desservir finement l'ensemble du territoire. Nous avons 28 000 kilomètres, je le disais, de voies ferrées, nous avons un million de kilomètres de routes et les Français, aujourd'hui, n'ont pas d'autres choix que la route pour leurs déplacements. Quinze millions de Français, chaque jour, font plus de 80 kilomètres aller-retour pour se rendre à leur travail en voiture. Est-ce qu'on n'a pas l'obligation ?
ANTOINE COMTE
Admettez que ce n'est pas très écolo comme mesure ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Mais est-ce qu'on n'a pas l'obligation aujourd'hui ? Mais bien sûr que si, c'est beaucoup plus écologique et je vais vous l'expliquer. Est-ce qu'on n'a pas l'obligation - les écologistes compris - de leur apporter des solutions de transports publics à ces Français qui aujourd'hui n'ont absolument rien ? Et c'est écologique, pourquoi ? Parce que lorsqu'on abandonne sa voiture et dans un qu'on monte dans un car, lorsqu'on abandonne sa voiture et qu'on pratique du covoiturage, on divise par deux, par dix le volume de gaz à effet de serre émis parce qu'on divise jusqu'à dix le coût des déplacements. C'est une mesure à la fois écologique et sociale et rapide à mettre en oeuvre, donc oui, je suis favorable aux cars express parce qu'il faut transformer la route, c'est le seul secteur qui, depuis vingt ans, n'a pas évolué sur les gaz à effet de serre.
ANTOINE COMTE
Alors, pour quand seront-ils déployés et sous quel nombre ? Combien de cars express ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Alors d'abord, ce n'est pas le ministre des Transports qui les déploie, ce sont des collectivités. J'étais encore hier à Strasbourg pour expliquer la méthode, pour indiquer aux régions et aux métropoles, ainsi qu'aux intercommunalités qui sont prêtes à développer cette nouvelle offre que nous allons, au cours de l'automne, trouver la bonne méthode, trouver également les financements. Et j'espère que dès l'an prochain, les premiers cars express pourront rouler, pourront relier et offrir une solution de transport à ceux qui n'en ont pas.
ANTOINE COMTE
Un dernier petit mot sur le périphérique parisien, dont la vitesse est limitée, depuis le 1er octobre à cinquante kilomètres/heure, c'est une décision de la maire de Paris, Anne HIDALGO.
FRANÇOIS DUROVRAY
Oui
ANTOINE COMTE
Vous n'y êtes pas trop favorable ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Non.
ANTOINE COMTE
Même pas du tout et vous avez dit qu'un bilan justement sur les effets de la pollution sonore atmosphérique pour un demi-million de personnes qui sont concernées à proximité de ce périphérique, il y aura un bilan qui serait fait dans un an. Si jamais les résultats ne sont pas satisfaisants, vous pourriez, enfin, en tout cas utiliser la loi pour essayer d'imposer finalement à madame HIDALGO de revoir sa mesure, mais les collectivités locales sont souveraines. Comment vous allez faire ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Vous avez tout dit. Aujourd'hui, effectivement, la loi permet à madame HIDALGO de baisser la vitesse à cinquante kilomètres/heure. Je ne suis pas convaincu du résultat, les études, aujourd'hui, sont partagées, c'est son choix. J'ai demandé à Madame HIDALGO qui en a, qui l'a acceptée, que non seulement que nous puissions avoir des études de façon continue pour mesurer les effets de la mesure, que nous puissions revenir sur la mesure si elle n'était pas efficace, si d'aventure…
ANTOINE COMTE
Peut-être que ces effets seront bénéfiques ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Mais bien sûr, et dans ce cas-là, il faudra le reconnaître, mais si ce n'était pas le cas de revenir sur la décision.
ANTOINE COMTE
Vous changerez la loi ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Et si besoin est, force doit être donnée à la loi et donc, la capacité à revenir sur la mesure, la vitesse et puis l y a d'autres décisions qui ont été prises également collectivement pour que les choix faits par Paris soient vus aussi en fonction de l'intérêt des Franciliens et des Français.
ANTOINE COMTE
Merci beaucoup. Merci François DUROVRAY d'avoir été avec nous ce matin.
FRANÇOIS DUROVRAY
Merci à vous.
DJAMEL MAZI
Merci Antoine et merci à votre invité, François DUROVRAY, le ministre délégué chargé des Transports, d'avoir été avec nous dans la matinale de France Info.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 7 octobre 2024