Interview de M. Othman Nasrou, secrétaire d'Etat chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations, à Sud Radio le 8 octobre 2024, sur la laïcité, l'antisémitisme, le racisme, le conflit à Gaza, la radicalisation islamiste et la politique de l'immigration.

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Média : Sud Radio

Texte intégral

Jean-Jacques BOURDIN 
Il est 08 h 37, merci d'être avec nous sur SUD RADIO, Othman NASROU est notre invité ce matin. Bonjour.

Othman NASROU 
Bonjour.

Jean-Jacques BOURDIN 
Merci d'être avec nous, vous êtes secrétaire d'État chargé de la Citoyenneté et de la lutte contre les discriminations. Tiens, au passage, pourquoi est-ce que vous n'êtes pas aussi chargé de la lutte pour la laïcité, de la défense de la laïcité ? Pourquoi il n'y a pas le nom laïcité dans votre ministère ? Dans l'intitulé de votre ministère ?

Othman NASROU 
Ce qui compte, ce n'est pas que le terme de laïcité soit dans l'intitulé, ce qui compte, c'est qu'il soit dans les politiques que nous mettons en oeuvre, et je peux vous dire qu'au titre de la citoyenneté, la laïcité est un aspect évidemment très important sur lequel le Premier ministre l'a dit : " Nous n'avons pas l'intention de transiger ".

Jean-Jacques BOURDIN 
Alors, je vais y revenir, c'était une provocation, quand même de parler de laïcité, de créer un ministère de la laïcité, c'était une provocation ou pas, non ?

Othman NASROU 
Non.

Jean-Jacques BOURDIN J
e dis ça parce que ça a été, avant même, avant même que le ministère soit créé, que vous soyez nommé. J'ai lu partout : " Ah, si on parle de laïcité, on parle d'islamophobie ", vous avez vu ça aussi ?

Othman NASROU 
J'ai vu que parfois, certaine voulaient dévoyer la laïcité, c'est évident, dans notre pays, elle est caricaturée. Une partie, malheureusement de la gauche, notamment de l'extrême gauche s'en est détournée, ça, c'est une réalité. Pour autant, je peux vous dire, la détermination, encore une fois, de ce Gouvernement à défendre la laïcité.

Jean-Jacques BOURDIN 
J'y reviendrai tout à l'heure. Hier, commémoration du 7 octobre, 3 600 actes racistes et antisémites à l'école en 2023 et depuis 2024, début de l'année 2024, 1 670 à caractère antisémite, il n'y a pas eu de cérémonie de recueillement, hier, dans les écoles, les collèges et les lycées en France, à l'occasion du 7 octobre. Vous le regrettez ?

Othman NASROU 
C'est important que chacun se rende compte de ce qui se passe dans notre pays, vous venez de le dire, Jean-Jacques BOURDIN, il y a une explosion d'actes antisémites, c'est dramatique, c'est intolérable, c'est inacceptable et je veux redire ici combien nous seront attachés à sanctionner chacun de ces actes qui devront tous faire l'objet de signalements et de poursuites judiciaires, ça, c'est la moindre des choses et nous le devons, d'abord parce que nos compatriotes de confession juive se sentent aujourd'hui menacé dans leur propre pays, c'est une idée qui nous être à tous totalement insupportable et donc, nous seront d'une grande fermeté, ces actes, vous l'avez dit, ont été multiplié par quatre en seulement deux ans, sur les deux dernières années, c'est inacceptable. Face à cela, je veux aussi dire que ce ne sont pas que des chiffres et que chacun se rende compte de la gravité des choses, ces chiffres sont parfois des histoires personnelles, je pense à cette jeune fille de douze ans, violée à Courbevoie parce que juive, je pense à ce jeune homme… Je prends ces deux exemples, il y en a malheureusement beaucoup d'autres de 19 ans, agressé dans un bus à Savigny-sur-Orge, parce que juifs. Ça, dans notre pays, ce n'est pas possible, nous vivons dans un pays où l'honneur de la République, c'est de faire en sorte que personne ne soit agressé, insulté, attaqué en raison de sa religion ou d'ailleurs, de son origine ou de sa couleur de peau et aujourd'hui, nous devons être intransigeante face à cette montée de l'antisémitisme.

Jean-Jacques BOURDIN 
Le 7 octobre, Journée nationale de lutte contre l'antisémitisme, pourquoi ne pas décréter une journée nationale de lutte contre l'antisémitisme le 7 octobre ? Vous êtes favorable ou pas ?

Othman NASROU 
Tout ce qui peut participer de la prise de conscience et de la lutte contre l'antisémitisme est bienvenu, mais moi, ce que je souhaite surtout, c'est que ses opinions, ses idéologies, qui aujourd'hui font monter l'antisémitisme, sont réellement combattues, au-delà des mesures symboliques.

Jean-Jacques BOURDIN 
Il faut une journée nationale de lutte contre l'antisémitisme ?

Othman NASROU 
Je vous l'ai dit, moi, ma mission, c'est de faire en sorte qu'on lutte concrètement contre l'antisémitisme.

Jean-Jacques BOURDIN 
Mais je pose la question, quel est votre avis ?

Othman NASROU 
Moi, mon avis, c'est que l'antisémitisme doit être combattu tous les jours de la vie et que, non, mais je vous le dis parce parfois…

Jean-Jacques BOURDIN 
Bon, donc, pas de journée nationale particulière ?

Othman NASROU 
Non mais pourquoi pas ? Mais la réalité, c'est qu'on a affaire parfois à une banalisation de cet antisémitisme et je vous l'ai dit, on parle ici de plus de 1 600 actes antisémites l'année dernière. Comment en plus cette année…

Jean-Jacques BOURDIN 
Comment allez-vous lutter contre l'antisémitisme ? Il y a eu des assises de l'antisémitisme en mai, mais bon, comment concrètement allez-vous lutter contre l'antisémitisme ? Comment ?

Othman NASROU 
D'abord, je veux saluer, remercier nos forces de l'ordre qui sont très mobilisées, en particulier en ce mois d'octobre où il y a de nombreuses fêtes religieuses juives et avec ce triste anniversaire de l'attentat terroriste du 7 octobre, nous avons heureusement des forces de l'ordre extrêmement mobilisées pour sécuriser les lieux de culte, pour faire en sorte que les manifestations de soutien aux victimes du 7 octobre, à leurs familles, aux otages aussi. Je vous rappelle que nous avons encore deux otages français qui sont détenus à Gaza, je suis heureux que nos forces de l'ordre réussissent à faire un travail d'une très, très grande qualité aujourd'hui et donc, ce que je veux dire par là, c'est que la première réponse, c'est d'abord la réponse évidemment sécuritaire et pénale. Là où il y a de l'antisémitisme, il faut qu'il y ait des condamnations.

Jean-Jacques BOURDIN 
Alors, durcir la loi contre l'antisémitisme, criminaliser l'antisionisme, j'ai vu qu'un sénateur proposait de criminaliser l'antisionisme ?

Othman NASROU 
Je crois qu'aujourd'hui, on a un arsenal législatif…

Jean-Jacques BOURDIN 
Suffisant.

Othman NASROU 
Qui doit être mis en place, qui doit être appliquée au maximum…

Jean-Jacques BOURDIN
Non mais il est suffisant ou pas, aujourd'hui, l'arsenal législatif ? Est-ce qu'il est suffisant ?

Othman NASROU 
On peut toujours faire mieux, mais ce qui m'intéresse, moi, encore aujourd'hui, c'est qu'aucun acte antisémite ne soit, ne passe entre les mailles du filet. Aujourd'hui, les dispositions qui existent nous permettent de poursuivre un acte antisémite.

Jean-Jacques BOURDIN 
Donc, aujourd'hui, il y a des actes antisémites qui passent entre les mailles du filet ?

Othman NASROU 
Mais d'abord, et j'en profite pour le dire, il faut que toutes les victimes n'hésitent pas à porter plainte et parfois, ça demande du courage, parfois c'est difficile, parfois, on a peur des représailles et ce n'est pas normal dans notre pays, mais nous avons les outils juridiques, bien sûr, pour poursuivre et condamner les auteurs d'actes antisémites.

Jean-Jacques BOURDIN 
Donc, on ne durcit pas la loi contre l'antisémitisme ? Contre le racisme et l'antisémitisme ?

Othman NASROU 
On durcit la lutte contre l'antisémitisme pour qu'aucun acte ne passe entre les mailles du filet.

Jean-Jacques BOURDIN 
On ne touche pas à la loi, on est bien d'accord ? On ne touche pas à la loi. Le racisme, je vais sortir de l'antisémitisme, le racisme. Vous-même, vous êtes d'origine marocaine, Othman, est-ce que vous avez été victime de racisme dans votre vie ?

Othman NASROU 
Moi, je ne souscris pas à l'idée que nous vivons dans un pays raciste, ce n'est pas ce que je pense, ce n'est pas ce que je crois. Je crois que nous vivons dans un beau pays où on peut réussir, on peut s'émanciper, on peut avoir un parcours quelle que soit notre origine et cette promesse républicaine, on peut en être fier.

Jean-Jacques BOURDIN 
Donc, Moussa DARMANIN n'aurait pas pu être Ministre ?

Othman NASROU 
Non, mais c'est la promesse...

Jean-Jacques BOURDIN 
C'est ce qu'il dit, vous n'avez pas le même avis-là, sur la question.

Othman NASROU 
Moi, je pense que la France n'est pas un pays raciste.

Jean-Jacques BOURDIN 
Donc, que vous, Othmane, vous avez toutes les chances pour réussir, si vous êtes Ministre aujourd'hui, c'est parce que la France vous a donné les chances pour réussir ?

Othman NASROU 
Oui, mais je ne vous dis pas que cette chance, elle existe aujourd'hui pour tous nos concitoyens. Ma responsabilité, précisément au Gouvernement, c'est de faire en sorte que cette promesse républicaine que je suis en train de vous décrire, elle soit vécue par un maximum de nos concitoyens.

Jean-Jacques BOURDIN 
Donc, il n'y a pas de racisme en France ?

Othman NASROU 
Non, la promesse républicaine est imparfaite, il y a du chemin pour qu'il soit une réalité pour tous, mais elle est réelle et on peut être fier d'un pays qui se fixe comme objectif que l'on puisse réunir, sans que la naissance, finalement ne détermine le destin et c'est ça qu'il faut qu'on arrive à rendre plus concret encore, il y a encore du chemin, je vous le dis, ce n'est pas une réalité pour tout le monde, mais on peut être fier encore une fois de cette promesse républicaine.

Jean-Jacques BOURDIN 
Vous auriez dit la même chose que Jean-Luc, Jean-Luc MELENCHON… Que Gérald DARMANIN ?

Othman NASROU 
Gérald DARMANIN a dit ce qu'il avait à dire. Moi, je vous le dis comme je le pense, l'idée que nous vivons dans un pays où il y a du racisme systémique ne correspond pas, je crois, à l'idée que je me fais de notre pays, ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas des discriminations qui sont des entailles à notre pacte républicain, mais la réalité, c'est que nous pouvons être fiers d'un pays qui cherche précisément à les combattre et nous cherchons précisément à les combattre.

Jean-Jacques BOURDIN 
Alors, j'ai commis un petit lapsus, là, je parlais de Jean-Luc MELENCHON, mais je vais vous en parler. Jean-Luc MELENCHON, aujourd'hui, qui souhaite que des drapeaux palestiniens et libanais soient brandis partout, dans toutes les universités, est-ce qu'il attise la haine ?

Othman NASROU 
Moi, je pense que du côté de la France insoumise et de Jean-Luc MELENCHON, ils ont fait de l'antisémitisme un carburant électoral. Je pense qu'ils ont tenu des propos avec une très grande ambiguïté et je pense qu'ils n'ont jamais été là quand il s'agissait de condamner effectivement des actes inqualifiables, donc l'histoire les jugera.

Jean-Jacques BOURDIN 
Oui, mais Patrick HETZEL, qui est le ministre de l'Enseignement supérieur, a envoyé une circulaire aux présidents de l'université, les enjoignant de maintenir l'ordre et de garantir le principe de neutralité, appelant au strict respect de la neutralité, de la sécurité et de la laïcité. Que vient faire la laïcité, là, dans cette affaire ? Je n'ai pas très bien compris.

Othman NASROU 
Je pense que nous n'avons pas trop d'occasions…

Jean-Jacques BOURDIN 
On ne doit pas parler de Gaza à l'université ?

Othman NASROU 
D'abord, je pense que c'est bien qu'on rappelle ce principe de laïcité partout aujourd'hui dans notre pays, parce que ce principe est attaqué, c'est une réalité et la laïcité, c'est d'abord la liberté de croire ou de ne pas croire, c'est d'abord une liberté, mais ça suppose une grande exigence et de respecter ce bien précieux que nous avons qu'est la laïcité, qui fait que la religion doit rester une affaire privée qui ne vient pas empiéter dans l'espace collectif. Ça, c'est, je crois que c'est important de le rappeler, et Patrick HETZEL a entièrement raison de le rappeler, y compris à l'université où il y a des atteintes parfois à la laïcité. Il est dans son rôle.

Jean-Jacques BOURDIN 
Donc, on doit quand même parler de Gaza à l'université, vous êtes bien d'accord ? La situation au Proche-Orient, on peut très bien évoquer cette situation à l'université, on est bien d'accord ?

Othman NASROU 
Ce qui n'est pas acceptable, c'est qu'il y ait des blocages, c'est qu'il y ait encore une fois des propos antisémites. Je pense à cette étudiante qui a été empêchée d'entrer dans un amphithéâtre de Sciences-Po parce qu'elle était juive. Le rapport interne de l'école l'a d'ailleurs établi et donc ça, c'est totalement inacceptable et cette extrême gauche qui joue l'agitation dans nos vies, nos universités, doit évidemment être combattue et être mise devant ses responsabilités. Je pense que le ministre de l'Enseignement supérieur a entièrement raison de le faire.

Jean-Jacques BOURDIN 
Alors, la laïcité, vous approuvez totalement les mesures prises par le Gouvernement précédent, notamment dans les établissements scolaires ? On est bien d'accord ? Vous ne reviendrez pas là-dessus, Othman NASROU ?

Othman NASROU 
Non, bien sûr…

Jean-Jacques BOURDIN 
Est-ce que vous allez durcir encore les lois pour défendre la laïcité ?

Othman NASROU 
Je vous l'ai dit, d'abord, il faut qu'on applique déjà toutes les lois qui existent, et vous avez parlé…, par exemple, vous faisiez référence à l'interdiction de l'abaya dans nos établissements, c'était évidemment absolument nécessaire, et ce principe, qui a été rappelé par Gabriel ATTAL, évidemment, est un principe important, et sur lequel nous ne transigerons pas, le Premier ministre l'a dit. Maintenant, je veux le redire. Cette laïcité, il faut aussi qu'on réexplique ce que c'est. J'ai l'impression que dans notre pays, beaucoup ne comprennent plus de quoi il s'agit. Certains, d'ailleurs, jouent la confusion, et la laïcité, c'est un bien précieux, il va falloir qu'on prenne le temps à nouveau de la défendre, de l'expliquer aussi à nos plus jeunes, qui, parfois, n'ont pas compris ce dont il s'agissait, qui ont été abreuvés à une idéologie qui les a détournés des valeurs de la République. Et c'est ce combat-là aussi qui est de ma responsabilité.

Jean-Jacques BOURDIN 
Oui, à Trappes, par exemple, votre ville, 70% de la population est issue de l'immigration. Est-ce qu'on comprend vraiment ce qu'est la laïcité, est-ce que cette population comprend ce qu'est la laïcité, franchement ?

Othman NASROU 
Mon inquiétude, c'est chez les jeunes générations où j'ai le sentiment qu'aujourd'hui, cette laïcité n'est pas forcément comprise, en tout cas, chez un certain nombre, évidemment, pas chez tous. Et cette bataille-là, nous avons peut-être cru qu'elle était gagnée. Nous avons peut-être cru que c'était un acquis. Nous avons peut-être cru que la laïcité, il suffisait de la mentionner une fois pour qu'elle soit comprise et adoptée par tous. Eh bien, aujourd'hui, nous sommes dans une situation, je le dis clairement, dans laquelle nous devons réaffirmer toutes ces valeurs-là, les défendre, en refaire la pédagogie, et être intransigeants – je veux le redire – sur leur application.

Jean-Jacques BOURDIN 
… Le nombre de mineurs radicalisés en France est en augmentation, très forte augmentation, Othman NASROU…

Othman NASROU 
Oui, il y a une préoccupation aujourd'hui sur la radicalisation, depuis longtemps, la radicalisation des mineurs de plus en plus jeunes…

Jean-Jacques BOURDIN 
21% des mises en examen pour association de malfaiteurs terroristes sont des adolescents dans notre pays. 21%, recrutés sur les réseaux sociaux le plus souvent.

Othman NASROU 
Ce qui est préoccupant, c'est que cette proportion a beaucoup augmenté ces toutes dernières années, d'ailleurs, y compris à la faveur du contexte géopolitique du moment. Ce chiffre est extrêmement inquiétant. Il a nécessité… aujourd'hui, il nécessite la mobilisation de tous nos services. J'ai fait une réunion avec nos services sur ce sujet…

Jean-Jacques BOURDIN 
Mais mobilisation, mais comment allez-vous lutter contre cette radicalisation de plus en plus présente chez les jeunes ? Est-ce que vous allez prendre de nouvelles mesures ? Est-ce que vous allez changer les lois ? Est-ce que vous allez ajouter je ne sais pas, moi… Comment allez- vous lutter, parce que les Français s'interrogent ?

Othman NASROU 
Alors, d'abord, il faut le dire clairement, le " pas de vague ", c'est terminé. Cette idée qu'on peut mettre la poussière sous le tapis, qu'on peut faire comme si de rien n'était, ça ne peut pas marcher. Et ce travail que vous mentionnez, cette bataille, elle passe par beaucoup de leviers, et j'en cite 1, nous formons aujourd'hui nos agents publics à la défense de la laïcité, à la prévention de la radicalisation. Il y en a 500.000 qui ont été formés ces trois dernières années, et plus précisément à la prévention de la radicalisation, pour détecter les signaux faibles, pour rattraper ces jeunes…

Jean-Jacques BOURDIN 
L'accompagnement de familles…

Othman NASROU 
L'accompagnement des familles qui sont identifiées. Les préfets font un travail remarquable, département par département, en regardant les situations individuelles qui remontées par les organismes sociaux. Ce travail-là, nous devons l'intensifier. Et nous devons aussi produire des messages pour expliquer précisément des contenus, pour déconstruire un certain nombre d'idéologies qui attaquent le pacte républicain…

Jean-Jacques BOURDIN
Non, mais ça, j'ai compris, c'est un travail de fond, c'est un travail de fond…

Othman NASROU 
Ah oui, c'est un travail de fond, je vous le confirme…

Jean-Jacques BOURDIN 
Mais est-ce qu'aujourd'hui, la loi vous permet de bien lutter contre ce phénomène de radicalisation, je vous pose franchement la question, est-ce que vous allez changer la loi ?

Othman NASROU 
Moi, je ne m'interdis pas, nous ne nous interdisons pas, avec Bruno RETAILLEAU, qu'il puisse y avoir des dispositions législatives qui soient proposées pour qu'on aille plus loin.

Jean-Jacques BOURDIN 
C'est-à-dire ?

Othman NASROU 
Mais je vous le dirai en temps utile…

Jean-Jacques BOURDIN 
Revenir sur l'excuse de minorité ?

Othman NASROU 
Nous verrons. Il y a beaucoup de choses qui peuvent être regardées le temps…

Jean-Jacques BOURDIN 
Revenir sur l'excuse de minorité ou pas ?

Othman NASROU 
Non, Jean-Jacques BOURDIN, le temps des annonces n'est pas venu. Je n'ai pas d'annonce à faire ce matin. Ce que je peux vous dire, c'est que depuis quinze jours tout juste que nous sommes arrivés, nous regardons tous les outils dont nous pouvons disposer, et ceux que nous pouvons activer…

Jean-Jacques BOURDIN 
Dont celui-là !

Othman NASROU 
Tous les outils, ceux que nous pouvons activer sans disposition législative, eh bien, nous les activons. Et là où il faudra un travail d'initiative, nous en parlerons. Le moment n'est pas venu…

Jean-Jacques BOURDIN 
Donc, vous pouvez modifier la loi ? Il est possible que vous modifiiez la loi, l'améliorer…

Othman NASROU 
Sur ce sujet-là…

Jean-Jacques BOURDIN 
Bon, mais sur les réseaux sociaux…

Othman NASROU 
Comme sur d'autres, nous ferons peut-être des propositions…

Jean-Jacques BOURDIN 
Interdire les réseaux sociaux aux mineurs ?

Othman NASROU 
Il y a un énorme sujet sur les réseaux sociaux, notamment sur certaines plateformes. Certaines ont fait un travail de modération ces dernières années, qui est utile. On trouve moins de contenus aujourd'hui violents sur un certain nombre de plateformes. Sur d'autres, par contre, les dégâts sont terribles. Et aujourd'hui, il faut que tous les parents qui nous écoutent comprennent combien un écran à la portée d'un adolescent peut être un vecteur de danger et un vecteur de radicalisation, pour rester sur le sujet que vous avez mentionné. Ce n'est malheureusement pas le seul. Il y a aussi des problématiques, bien sûr, de harcèlement et de cyber harcèlement. Là-dessus aussi, la tâche est immense. Ce n'est pas un défi qui est posé uniquement à notre pays…

Jean-Jacques BOURDIN 
Vous pourriez travailler sur une interdiction des réseaux sociaux aux mineurs, comme dans d'autres pays ?

Othman NASROU 
Ce qui est important…

Jean-Jacques BOURDIN 
Comme c'est fait dans d'autres pays ?

Othman NASROU 
Aujourd'hui, ce qui est important, c'est qu'on responsabilise davantage les plateformes et les hébergeurs.

Jean-Jacques BOURDIN 
Non, mais ça, on est d'accord, oui, mais, d'accord, mais enfin, bon…

Othman NASROU 
Oui, mais l'interdiction ne se décrète pas, Jean-Jacques BOURDIN, comme ça…

Jean-Jacques BOURDIN 
Non, elle ne se décrète pas, mais elle ne se décrète pas, mais il y a une volonté…

Othman NASROU 
Ah, mais il y a une volonté d'éviter que nos plus jeunes soient confrontés à des contenus de plus en plus violents sur ces plateformes, c'est évident.

Jean-Jacques BOURDIN 
Interdire, ça évite que ces jeunes soient confrontés, non…

Othman NASROU 
Mais la question, ce n'est pas simplement d'interdire, c'est… vous savez, on peut avoir une bonne idée de mesure, encore faut-il qu'elle puisse être appliquée. Et nous vivons dans un monde ouvert sur des régulations qui sont souvent à l'échelle européenne. Nous devons regarder ça plus en détail, mais avec Clara CHAPPAZ, la secrétaire d'Etat dédiée au Numérique, nous allons y travailler.

Jean-Jacques BOURDIN 
Est-ce que l'immigration est une chance pour la France ?

Othman NASROU 
Moi, je pense que c'est la France qui est une chance.

Jean-Jacques BOURDIN 
Non, non, mais, attendez, répondez-moi à la question…

Othman NASROU 
Mais je vous réponds très clairement…

Jean-Jacques BOURDIN 
Est-ce que l'immigration est une chance ou pas pour la France ?

Othman NASROU 
Je vous réponds très clairement, non, mais, Jean-Jacques BOURDIN, si vous me laissez poursuivre, je vais vous répondre, moi, je pense que c'est la France qui est une chance, parce que cette France que nous avons, eh bien, elle permet encore une fois à des gens d'horizons différents de vivre ensemble, de réussir et de dépasser leur naissance et leurs conditions d'origine. Ça, je crois que c'est important qu'on rappelle ce message-là. Et pourquoi je vous dis cela ? Parce que l'immigration, quand elle n'est pas contrôlée, quand elle n'est pas maîtrisée, eh bien, forcément, elle ne peut pas être une chance. Elle ne peut pas être une chance pour le pays, parce que nous n'avons pas la capacité d'intégrer un nombre trop important de personnes qui arrivent. Et aujourd'hui, nous devons relancer cette intégration. Nous devons réussir une intégration qui ne fonctionne pas suffisamment aujourd'hui. Ce sera une de mes missions, et nous devrons être plus exigeants en matière d'intégration, et puis, de la même manière, ce n'est pas une chance pour ceux que nous accueillons dans de mauvaises conditions, donc l'immigration, pour qu'elle puisse être une chance, elle doit être choisie, elle doit être limitée, elle doit être contrôlée…

Jean-Jacques BOURDIN 
Donc, on ne répond ni oui ni non lorsqu'on pose la question : l'immigration est-elle une chance pour la France ? On ne répond ni oui ni non, on est bien d'accord ? Tout dépend ?

Othman NASROU 
Non, aujourd'hui, telle qu'elle se pose aujourd'hui dans les volumes que nous accueillons, dans notre incapacité à maîtriser les flux, à lutter contre l'immigration irrégulière, ça ne peut pas être une chance. Ça, ça me paraît très clair. Pour qu'elle puisse être une chance, il faut qu'on arrive à maîtriser nos flux migratoires. Et c'est le travail qu'a engagé Bruno RETAILLEAU.

Jean-Jacques BOURDIN 
Donc l'immigration peut être une chance pour la France.

Othman NASROU 
Mais il y a des gens issus de l'immigration qui peuvent être une chance pour la France. Encore faut-il que nous maîtrisions les flux migratoires, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

Jean-Jacques BOURDIN 
Bien, l'immigration qui peut être une force et une richesse, on est d'accord ?

Othman NASROU 
Mais à condition qu'elle soit maîtrisée.

Jean-Jacques BOURDIN 
A condition qu'elle soit maîtrisée. Non, mais je vous dis ça parce que je me souviens ce que vous disiez, c'était en 2019, je crois. Je vous cite : il est temps de voir que derrière l'immigration, il y a aussi et surtout des individus avec leurs qualités, leurs défauts, leurs aspirations propres, les accompagner quand ils en ont besoin, absolument. Et vous ajoutez : les inféodés, jamais.

Othman NASROU 
Oui, ce que je regrette, moi, beaucoup dans ce débat, et notamment de la part de la gauche, de l'échiquier politique, c'est qu'on soit dans un débat qui est toujours un débat idéologique et jamais pragmatique. Je vais vous le redire…

Jean-Jacques BOURDIN 
Mais il n'est pas idéologique, il est à droite et à gauche, vous le savez bien, Othman NASROU, vous le savez bien…

Othman NASROU 
Eh bien, écoutez, moi, l'idée que des gens qu'on accueille dans notre pays, même quand ils se rendent coupables de délits et de crimes, qu'on ne puisse pas les renvoyer dans leur pays d'origine, c'est une idée qui est inacceptable pour nos concitoyens. Ne pas le comprendre, ça, ne pas comprendre que nous devons réussir à mieux exécuter ces fameuses OQTF, ne pas comprendre que nous devons réussir à reconduire dans leur pays d'origine non pas ceux qui ont le droit à l'asile, mais ceux qui n'ont rien à faire sur notre territoire national, ce n'est pas rendre service à l'immigration…

Jean-Jacques BOURDIN 
Justement, aujourd'hui, le ministre de l'Intérieur reçoit les préfets, 21 préfets, pour essayer d'améliorer les reconduites, les OQTF. Mais comment ?

Othman NASROU 
Eh bien, je serai aux côtés de Bruno RETAILLEAU tout à l'heure, et effectivement, avec les préfets qui font un travail de terrain là-dessus…

Jean-Jacques BOURDIN 
Mais je sais. Qu'allez-vous dire aux préfets ?

Othman NASROU 
Mais, je vais d'abord vous dire que Bruno RETAILLEAU va engager un bras de fer avec les pays d'origine, naturellement, sur les visas, sur l'aide au développement, pour qu'on puisse obtenir plus de laissez-passer consulaires. Il n'y a pas de raison de donner des visas et de l'aide au développement à un pays qui ne coopère en matière migratoire…

Jean-Jacques BOURDIN 
C'est-à-dire que, ou on donne des visas, si vous donnez des laissez-passer consulaires ?

Othman NASROU 
C'est normal. La coopération doit être dans les deux sens. Ça me paraît être un principe élémentaire, la réciprocité...

Jean-Jacques BOURDIN 
On fait ça avec tous les pays ?

Othman NASROU 
Eh bien, tous les pays qui ne jouent pas le jeu…

Jean-Jacques BOURDIN 
Vous revenez sur les accords entre la France et l'Algérie ?

Othman NASROU 
Il y a eu là-dessus un débat au Parlement. Ça ne m'appartient pas aujourd'hui de le faire…

Jean-Jacques BOURDIN 
Oui, vous, est-ce que vous êtes favorable à ce qu'on revienne sur cet accord ?

Othman NASROU 
Moi, je vous l'ai dit, je suis favorable à ce qu'on fasse le maximum pour que les pays d'origine, eh bien, nous donnent la capacité de renvoyer chez eux leurs ressortissants qui n'ont rien à faire sur le territoire national…

Jean-Jacques BOURDIN 
Oui, non, mais ça, j'ai bien compris, votre volonté…

Othman NASROU 
Oui, mais…

Jean-Jacques BOURDIN 
Mais je vous pose une question précise, est-ce que vous êtes favorable à ce qu'on revienne sur cet accord entre la France et l'Algérie ?

Othman NASROU 
Mais je vous dis, vous avez vu aujourd'hui, Jean-Jacques BOURDIN, l'état de l'Assemblée nationale. Que je vous dise qu'à titre personnel, j'y suis favorable ne réglera pas le fait qu'il y ait une majorité ou pas pour l'adopter…

Jean-Jacques BOURDIN 
Non, mais d'accord, mais vous avez posé la question à l'Assemblée nationale…

Othman NASROU 
Il y a eu une disposition…

Jean-Jacques BOURDIN 
Vous avez posé la question à l'Assemblée…

Othman NASROU 
Il y a eu une disposition posée à l'Assemblée nationale, il y a quelques mois, qui n'a pas été adoptée, dans le sens que vous avez…

Jean-Jacques BOURDIN 
Oui, mais vous allez la remettre sur la table ?

Othman NASROU 
Ecoutez, je ne suis pas parlementaire, mais le groupe, par exemple, de Laurent WAUQUIEZ est favorable à cette position, et moi, je pense qu'à titre personnel, la situation actuelle n'est pas tenable.

Jean-Jacques BOURDIN 
Vous aussi ?

Othman NASROU 
Je ne peux pas être plus clair.

Jean-Jacques BOURDIN 
Donc vous êtes favorable…

Othman NASROU 
Le reste, c'est au Premier ministre…

Jean-Jacques BOURDIN 
Vous êtes favorable à la remise en cause de cet accord ?

Othman NASROU 
Ça sera au Premier ministre de vous dire… je pense que les équilibres aujourd'hui ne sont pas les bons. Et donc, oui, il faudra qu'on aille plus loin. Mais c'est la responsabilité, pas la mienne, ce sera celle notamment du Premier ministre, eh bien, de faire ce type d'annonce.

Jean-Jacques BOURDIN 
Merci Othman NASROU…

Othman NASROU 
C'est moi qui vous remercie…

Jean-Jacques BOURDIN 
D'être venu nous voir ce matin sur l'antenne de Sud Radio.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 9 octobre 2024