Texte intégral
Je suis très honoré d'être reçu par votre commission, à laquelle je souhaite rendre hommage, car elle a la tâche très lourde de s'occuper à la fois des affaires qui relèvent du ministère de l'Europe et des affaires étrangères et du ministère des armées, commission où vous cultivez un esprit de pluralisme qui contribue à la qualité de vos travaux.
Je souhaite aussi rendre hommage à un levier essentiel de la diplomatie française, la diplomatie parlementaire. Nous avons, vous et moi, la responsabilité de porter la voix de la France. Nous sommes attentifs au fait de vous fournir tous les éléments dont vous aurez besoin dans vos missions, comme nous sommes heureux de pouvoir bénéficier de vos retours d'expérience, très utiles pour éclairer nos positions d'une lumière différente et calibrer nos messages. Je souhaite que, sur des sujets transversaux, comme les économies budgétaires à réaliser, nous puissions recueillir vos avis. Charge à moi de réaliser les arbitrages et de trancher le moment venu.
J'en viens à la présentation du budget de mon ministère, tel qu'il vous a été soumis par le Gouvernement et sous réserve de son adoption définitive. Ce budget devait connaître entre 2024 et 2027 une hausse importante de ses moyens pour réarmer et moderniser la diplomatie, mais aussi pour atteindre nos objectifs en matière d'aide publique au développement.
Dans le contexte budgétaire que vous connaissez, le plafond des crédits du ministère a été révisé à la baisse, comme pour la plupart des ministères. Mon ministère continue donc d'apporter sa contribution à l'objectif de maîtrise des finances publiques fixé par le Premier ministre. Je dis bien "continue", puisque le ministère a pris une part significative dans les annulations et gels de crédits décidés par le précédent gouvernement en février et juillet dernier. Le montant total de ces diminutions s'élève à 880 millions d'euros, soit 12,5% de notre budget pour l'année 2024.
Les trois quarts de ces économies ont concerné le programme 209, qui porte nos moyens d'aide publique au développement. Les coupes ont porté en grande partie sur l'aide en dons, à travers l'Agence française de développement (AFD), mais aussi sur nos contributions multilatérales ainsi que sur la provision pour risques majeurs, qui nous permet de débloquer rapidement des fonds pour apporter un soutien aux pays subissant des crises aux conséquences humanitaires d'ampleur.
Le programme 105 "Action de la France en Europe et dans le monde" a été affecté par les coupes, pour 153 millions d'euros au total. Dans ce contexte, ce sont les chantiers de réforme et de modernisation visant à rendre notre diplomatie plus agile qui ont été protégés en priorité.
Concernant le programme 185 "Diplomatie culturelle et d'influence", les annulations de crédits ont principalement concerné les subventions aux opérateurs, afin de préserver les actions au service de notre politique d'influence.
Ainsi, pour l'exécution du budget, un effort très important d'économies a été demandé au ministère, ce qui nous a conduits à un travail de priorisation que nous allons poursuivre l'année prochaine.
J'en viens maintenant au projet de loi de finances pour 2025, qui confirme les économies opérées en 2024 et prévoit une économie additionnelle de 200 millions d'euros.
En volume, le plafond ministériel est de 5,8 milliards d'euros en crédits de paiement, soit une diminution d'un milliard d'euros par rapport à la loi de finances initiale adoptée en 2024. Le ministère est appelé à contribuer à nouveau, et de manière très importante, à l'effort de redressement de nos finances publiques.
Dans ce cadre contraint, je procéderai avec méthode pour préserver nos chantiers et actions prioritaires. Je serai guidé par trois critères.
Le premier critère et de préserver les actions et leviers qui sont les plus décisifs pour nous permettre de porter la voix singulière de la France dans le monde. Cela passe évidemment par notre réseau diplomatique à l'étranger et les moyens qui sont à sa disposition, mais également par des leviers d'action tels que notre capacité à agir au coeur des crises en soutien aux populations en détresse et à leurs autorités sollicitant de l'aide.
Le deuxième critère est de préserver les leviers qui agissent directement sur le quotidien des Français. Je pense aux 2,5 millions de Français établis à l'étranger qui ont comme interlocuteur nos services consulaires pour toutes les étapes de leur vie et leurs démarches administratives. Je pense aussi à l'action décisive que mène notre ministère pour préserver la sécurité des Français, répondre au défi migratoire et protéger et renforcer notre souveraineté économique, notre tissu industriel et nos emplois.
Le troisième critère est de veiller à ce que ces contraintes budgétaires ne conduisent pas à l'abandon des investissements qui permettront de rendre notre administration et notre diplomatie plus innovantes, créatives et efficaces. Je pense par exemple au déploiement de notre nouvelle Académie diplomatique et consulaire, qui sera chargée de projeter encore davantage l'inventivité et l'excellence française dans notre action à l'étranger. Nous disposons de moyens plus réduits que d'autres diplomaties, mais notre diplomatie est souvent plus innovante.
Voilà la méthode qui sera la mienne pour opérer les choix nécessaires, auxquels vous serez étroitement associés.
Le Premier ministre a demandé des économies supplémentaires de 5 milliards d'euros pour redresser notre déficit public, en sus des économies prévues dans le PLF pour 2025. Sans pouvoir entrer dans le détail de la répartition de ces économies, en cours d'examen, mon ministère sera mis une nouvelle fois à contribution. Je serai guidé par les mêmes critères.
Je reviens au projet de loi de finances pour 2025, en commençant par les crédits consacrés à nos effectifs. Les dépenses de personnel représenteront plus de 1,15 milliard d'euros, soit une hausse par rapport à la loi de finances initiale pour 2024, ce qui financera la création de 75 nouveaux équivalents temps plein (ETP). Certains estimeront que le compte n'y est pas, puisque les engagements qui avaient été pris indiquaient une trajectoire de 700 ETP d'ici à 2027, dont 150 ETP en 2025.
Dans le contexte que nous connaissons, la préservation de la création de ces 75 ETP constitue une marque de confiance dans notre diplomatie. Le ministère a subi, entre 2006 et 2021, une forme de plan social par étapes, qui a conduit à la suppression de 3.000 ETP au point que le corps social du ministère a fini par réagir de manière très vigoureuse, ce qui a déclenché les états généraux de la diplomatie, qui ont permis d'identifier où mobiliser le plus efficacement possible les 700 nouveaux ETP prévus.
Le plafond d'emplois est ainsi porté à 13.892 ETP, ce qui équivaut aux moyens humains de la métropole de Toulouse. C'est avec ces moyens humains que nous assurons le fonctionnement de plus de 170 postes diplomatiques à travers le monde. J'ai aussi rappelé au Premier ministre que le nombre d'ETP présents en administration centrale équivalait aux effectifs du conseil départemental de la Savoie.
J'en viens maintenant aux quatre programmes principaux dont le ministère a la charge. Nous avons dû prioriser nos efforts. C'est le programme 209 qui assume l'essentiel des efforts. Les autres programmes restent stables, tout en restant en deçà des hausses attendues.
Le programme 105 "Action de la France en Europe et dans le monde" rassemble les moyens de notre action diplomatique et porte aussi le financement de plusieurs contributions obligatoires de la France à l'international.
Les crédits consacrés à ces contributions internationales et aux opérations de maintien de la paix s'élèvent à 820 millions d'euros. Ils sont en baisse de 110 millions d'euros par rapport à 2024, du fait de facteurs externes comme la fermeture d'opérations de maintien de la paix, la diminution programmée de notre contribution à la Facilité européenne pour la paix (FEP) et la diminution de notre quote-part au budget des Nations unies. S'agissant des sommets internationaux qui se tiendront en 2025, 25 millions d'euros de crédits exceptionnels permettront d'organiser deux grands sommets, celui sur l'intelligence artificielle en février et celui sur les océans, en juin, à Nice.
Les moyens dévolus à la poursuite de la mise en oeuvre de l'agenda de transformation voient leur ambition réduite, mais préservée. Nous maintenons le budget de la direction du numérique pour continuer à accompagner les évolutions des métiers de la diplomatie et mettre en oeuvre des technologies innovantes telles que l'intelligence artificielle.
Nous renforçons les crédits consacrés à la sécurité de nos emprises diplomatiques et consulaires pour assurer la protection de nos agents.
Nous allouons aussi des moyens pour mettre en place l'Académie diplomatique et consulaire.
Nous avons ainsi priorisé les projets numériques, les projets de sécurité et les ressources humaines.
Les crédits du programme 151 "Français à l'étranger et affaires consulaires" connaissent une baisse de 5% par rapport à la loi de finances initiale pour 2024, pour s'établir à 156,9 millions d'euros.
Je ne souhaitais pas renoncer aux travaux de modernisation de l'administration consulaire. Les moyens sont ici préservés. L'attente de nos concitoyens est très forte, les sénateurs représentant les Français établis hors de France le savent. Ainsi, la finalisation du registre d'état civil électronique est prévue. En outre, nos services travaillent au développement d'une nouvelle solution de vote par internet, plébiscitée par les électeurs lors des élections législatives. Est également prévue la mise en oeuvre du service France Consulaire de réponse téléphonique aux ressortissants français de l'étranger. Ce service, dont le périmètre s'était élargi à soixante pays cette année, achèvera son déploiement en vue de la couverture mondiale à l'horizon fin 2025.
S'agissant des autres dépenses du programme 151, l'enveloppe pilotée par l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) s'établit à 111,5 millions d'euros. Ces aides continueront de permettre à nombre d'élèves à travers le monde d'accéder à nos lycées, outil fondamental de notre politique d'influence.
Afin de protéger les plus fragiles, les crédits consacrés à l'action sociale de nos postes consulaires s'élèvent à près de 20 millions d'euros, dont 15,2 millions d'euros en aides directes.
Les crédits du programme 185 "Diplomatie culturelle et d'influence" s'établissent en 2025 à 676 millions d'euros. Une grande partie du programme est constituée de la dotation à l'AEFE. Ces crédits représentent une baisse de 6,3 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2024, soit un retour à son niveau de 2023.
Nous continuerons néanmoins la mise en oeuvre de notre feuille de route en matière d'influence en priorisant l'Europe, l'Afrique et l'Indo-Pacifique. Plusieurs actions oeuvreront au rayonnement de la France à l'international, grâce aux bourses de mobilité étudiante - 70 millions d'euros y sont consacrés - et aux établissements à autonomie financière (EAF), dont la dotation de fonctionnement est préservée à hauteur de 45,7 millions d'euros.
L'ensemble des opérateurs devront cependant être mis à contribution par une diminution de leur dotation, pour absorber les économies demandées.
J'en viens au programme 209 "Solidarité à l'égard des pays en développement", très directement impacté par les coupes budgétaires.
L'aide publique au développement est portée par le programme 209, ainsi que par le programme 110 "Aide économique et financière au développement", dont la responsabilité incombe au ministère de l'économie et des finances. Le programme 209 inclut les dons, le programme 110 les prêts, les dotations ou autres moyens octroyés aux banques multilatérales de financement. Les moyens de la mission "Aide publique au développement" ont doublé entre 2017 et 2024. Nous partions de loin, et nous avions prévu d'aller encore plus loin, jusqu'en 2027.
Ces moyens connaîtront en 2025 une baisse de 1,4 milliard d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. Cela confirme les économies demandées en 2024 et en acte de nouvelles. Le programme 209, consacré à la solidarité avec les pays en développement, est le principal mis à contribution, à ce stade, dans ce PLF pour 2025. Cela représente 857 millions d'euros de baisse par rapport à la loi de finances initiale pour 2024, ce qui le ramène globalement à son niveau de 2021, avec 2,4 milliards de crédits de paiement. Nous devrons ainsi prioriser nos engagements tout en cherchant à préserver notre capacité à intervenir rapidement, gage de crédibilité politique.
C'est une équation exigeante, mais nous réussirons. Je souhaite pouvoir vous associer, mesdames, messieurs les sénateurs, à cette réflexion sur la priorisation.
Notre capacité à apporter des réponses d'urgence en cas de crise humanitaire grave s'élèvera à 500 millions d'euros en 2025, alors que 900 millions d'euros étaient prévus en 2024. Nous espérons le maintien de cette réserve pour crise majeure lors des débats parlementaires.
Si nos ambitions sont revues à la baisse en matière bilatérale, les ambassades pourront encore lancer des projets via le fonds Equipe France, outil qui a fait la preuve de son efficacité.
Les crédits délégués à l'AFD, qui constituent le bloc le plus important au sein du programme 209, seront nécessairement impactés par les réductions budgétaires. Il faudra préciser dans la programmation de l'agence, sur le plan géographique comme thématique, ses priorités.
En matière multilatérale, nous devons prioriser. Ces moyens nous permettent de nourrir nos partenariats avec les agences des Nations unies, vecteurs d'influence française importants ; cependant, il faudra faire des choix.
Le programme 110 "Aide économique et financière au développement" mis en oeuvre par le ministère de l'économie et des finances devrait connaître une baisse de 617 millions d'euros en crédits de paiement par rapport à la loi de finances initiale pour 2024 ; les crédits s'élevant à 1,7 milliard d'euros, la hausse reste de 78 % par rapport à 2017.
Les autorisations d'engagement du programme sont préservées, afin notamment de faire face à la reconstitution de l'Association internationale de développement et de contribuer au fonds de la Banque mondiale dédié aux pays les plus pauvres.
J'essaierai de vous présenter la copie budgétaire la plus transparente possible. J'assume un certain nombre de choix budgétaires dictés par l'exigence fixée par le Premier ministre, mais je souhaite qu'un certain nombre de décisions soient prises après consultation des parlementaires, notamment des rapporteurs pour avis et des rapporteurs spéciaux.
(...)
R - Merci madame Boyer, c'est une bonne manière de poser la question et c'est le bon moment pour la poser, car l'équation budgétaire est plus contraignante que précédemment. Je ne connais pas l'étude que vous citez, mais nous ne pouvons nous contenter de comparer le nombre de postes diplomatiques ; il faut aussi tenir compte des représentations permanentes et du nombre d'ambassadeurs auprès des institutions internationales. Il faut aussi s'interroger sur notre action en administration centrale, notamment dans le champ numérique. Cela étant dit, j'ai décidé de confier au Centre d'analyse, de prévision et de stratégie (Caps) une sorte de parangonnage des réseaux diplomatiques les plus performants. Ainsi, nous pourrons faire des choix de priorisation plus rapidement, en tirant les leçons des expériences réussies chez nos rivaux.
Monsieur Lemoyne, deux tiers des 75 ETP viendront alimenter le réseau à l'étranger. L'exercice annuel de programmation des effectifs permettra la mise en oeuvre de ce schéma d'emploi positif, notamment au bénéfice des priorités qui ont été fixées au ministère dans le cadre de son agenda de transformation : communication stratégique et diplomatie numérique dans le réseau, renforcement des postes de présence diplomatique - car sur les 170 postes diplomatiques que nous avons, 25 ont moins de 6 ETP -, et renforcement de nos capacités d'analyse politique et embauche d'experts en cybersécurité en administration centrale.
Je vous remercie d'avoir cité l'action de la DCSD, modeste numériquement mais qui produit des résultats considérables. Les ENVR - une vingtaine - sont très appréciées par nos partenaires, notamment en Afrique. En Afrique subsaharienne, l'objectif pour 2025 est l'endiguement de la menace terroriste, la lutte contre la piraterie et la poursuite du développement des partenariats. En Afrique du Nord et au Moyen-Orient, nous allons oeuvrer au renforcement des capacités régaliennes des Etats, à la lutte contre l'immigration régulière et contre le terrorisme, à la protection civile, au déminage et à l'approbation de l'enseignement du français. En Indo-Pacifique, la direction densifiera son réseau d'experts et développera deux écoles de sécurité maritime, à La Réunion et au Sri Lanka. Dans les Balkans occidentaux, en Europe continentale, la direction devrait achever le projet de Centre de développement de capacités cyber dans les Balkans occidentaux (C3BO) au Monténégro, projet que nous avons porté en lien avec la Slovénie. En Amérique latine et dans les Caraïbes, la direction poursuivra son action au profit de la police haïtienne et continuera à mettre l'accent sur la lutte contre le trafic de stupéfiants et les enjeux de sécurité civile.
(...)
R - Une dotation de 380.000 euros est prévue pour la CFE dans le budget 2025. Cette dotation pourra être ajustée en fin de gestion, en cas de besoin, comme chaque année. Je regarderai attentivement un éventuel amendement s'il est déposé. Je serai toutefois attentif à ce qu'il n'aboutisse pas à sous-budgéter d'autres lignes. Le système actuel de redéploiement en fin de gestion a fait la preuve de son efficacité. S'agissant du niveau de la dotation budgétaire, une mission conjointe de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et de l'inspection générale des finances (IGF) va être lancée sur la gouvernance de la CFE pour mieux évaluer ses besoins. Ses conclusions sont attendues pour décembre 2024.
L'allocation du titre 2 du programme 151 a été basculée dans son intégralité vers le programme 105 : cela peut créer des difficultés de comparaison d'une année sur l'autre, j'en conviens.
J'en viens au délai de carence qui s'applique aux Français de l'étranger pour bénéficier de la sécurité sociale à leur retour en France. Le délai de droit commun est de trois mois au retour en France. Une dispense peut être accordée, sur demande, à titre exceptionnel. Il n'existe en revanche aucun délai de carence pour les adhérents à la Caisse des Français de l'étranger.
Le Pass éducation langue française a bénéficié, à titre expérimental, d'une dotation d'un million d'euros en 2024 sur le programme 151. Ces crédits avaient pour objectif de maintenir et renforcer les compétences en langue française des enfants français vivant à l'étranger, éloignés d'un environnement francophone. Ce dispositif a été expérimenté dans quatorze pays pilotes, moyennant vingt heures de cours de français en ligne pour des enfants âgés de 6 à 11 ans. Cette formation est dispensée par vingt-deux Instituts français et Alliances françaises. Dans l'attente d'une évaluation du dispositif, fixée au deuxième trimestre 2025, il n'est pas prévu de reconduire ces crédits l'année prochaine. Si l'expérimentation démontre l'efficacité du dispositif, ils pourront toutefois être reconduits.
(...)
R - Dans le PLF 2025, la subvention à l'AEFE, qui représente environ deux tiers des crédits du programme 185, est en légère baisse. La priorité a été accordée aux bourses de mobilité pour les étudiants étrangers en France, dans la poursuite de l'effort de renforcement de notre attractivité de ces dernières années. Les crédits consacrés à ces bourses ne sont donc pas affectés par la diminution prévue. L'Institut français et Campus France ont été sollicités.
La subvention pour charges de service public de l'AEFE s'élevait à 445,5 millions d'euros après application du décret d'annulation de février 2024, qui avait gelé 3,1 millions d'euros. Dans le PLF 2025, une subvention de 440,8 millions d'euros est prévue, soit une baisse de 14 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2024. Nous considérons que cette baisse peut être absorbée par l'AEFE, notamment du fait d'un coût inférieur à la prévision initiale de la réforme du statut de ses personnels détachés, dont l'Etat finance 50% du coût réel. Le niveau de trésorerie de l'Agence demeure cependant un enjeu majeur et conditionne sa capacité à réaliser des investissements pour ses établissements en gestion directe. Par ailleurs, l'AEFE est confrontée à des besoins croissants liés au développement du réseau - suivi administratif des différents dossiers, etc. - et à la multiplication des crises. Le ministère reste particulièrement mobilisé pour concilier les objectifs de croissance fixés à l'Agence et le contexte de redressement des finances publiques.
Je prends toutefois bonne note de votre remarque, qui consiste à nous alerter sur le fait que la crise actuelle au Liban pourrait augmenter les coûts auxquels l'AEFE doit faire face. À ce stade, nous n'avons pas identifié de difficulté particulière, mais nous serons vigilants.
Enfin, l'objectif est d'ouvrir l'ambassade de France au Guyana au premier trimestre 2025.
(...)
R - Je ne peux que vous rejoindre sur les priorités que vous avez citées. Dans un contexte budgétaire compliqué, il faut privilégier la lutte contre la grande pauvreté, l'aide alimentaire, l'aide à la formation et l'aide à la santé plutôt que des activités de soutien à des pays déjà avancés, qui se matérialisent souvent par des prêts. Ces derniers concernent essentiellement le programme 110. Le programme 209 doit être tourné pour sa part vers la lutte contre la grande pauvreté et la réponse aux crises humanitaires.
Lorsque j'ai brièvement exercé les fonctions de président de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale, j'ai appelé l'attention du Premier ministre sur la nécessité de publier rapidement le décret d'application relatif à la mise en oeuvre de la commission d'évaluation de l'aide publique au développement. J'ai l'honneur et la joie de vous présenter enfin ce décret, que je m'apprête à signer ! Vous pouvez compter sur moi pour le faire aboutir au plus vite.
Il nous faut conduire un travail de rationalisation et de hiérarchisation des priorités. Je constate que la prérogative de contrôle du Parlement, telle qu'elle est définie à l'article 24 de la Constitution, est souvent redoutée par l'exécutif, alors qu'il devrait s'appuyer sur ce travail d'évaluation pour solliciter de la part des administrations dont il a la charge les efforts qui s'imposent.
Monsieur Joly, est-il bien raisonnable de creuser dans les ressources d'un ministère tel que celui-ci ? Vous avez raison : les préoccupations des Français en matière d'immigration, de sécurité, de pouvoir d'achat ou d'emploi sont toutes liées à son périmètre d'action.
La question de l'immigration, abordée régulièrement dans les médias, se joue en partie au Liban. Si nous ne parvenons pas à trouver la voie du cessez-le-feu par une résolution diplomatique garantissant la sécurité du nord d'Israël et la souveraineté du Liban, nous revivrons ce que nous avons vécu en 2015, soit des vagues importantes de demandeurs d'asile qui viendront chercher refuge en Europe pour fuir la guerre et la persécution. Nous retrouverons la situation de vertige de l'époque, quand l'Europe s'est trouvée totalement démunie et désemparée face à un phénomène qu'elle n'avait pas anticipé.
Notre mission, la vôtre comme la mienne, est de toujours rappeler à nos concitoyens que, lorsque nous voyageons, lorsque nous échangeons avec des dirigeants politiques étrangers, nous le faisons au service des Français. La diplomatie, parlementaire ou gouvernementale, est au service des Français et touche à leurs préoccupations premières.
Lorsque d'importants efforts budgétaires seront nécessaires, la question du lien entre l'activité diplomatique et la résolution de ces problèmes très concrets sera peut-être davantage soulevée.
Le niveau et les modalités de la taxe sur les transactions financières ne relèvent pas du périmètre du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Je souhaite toutefois que ce débat puisse avoir lieu, à l'Assemblée nationale comme au Sénat.
(...)
R - Les négociations relatives à l'application de la TVA sur les écoles françaises au Royaume-Uni sont toujours en cours. J'ai évoqué la question dans mes fonctions précédentes avec mon homologue. La décision d'appliquer la TVA sur les écoles privées découle de la volonté du gouvernement travailliste d'équilibrer son budget. Nous avions proposé des critères pour ne pas pénaliser nos établissements. Je n'ai pas les dernières informations à ce sujet, mais notre ambassadrice sur place suit ce dossier de près.
Dans la fixation de nos cadres salariaux, nous ne sommes pas guidés par le niveau du salaire minimum légal, dont la finalité et les modalités de calcul varient d'un pays à l'autre, mais par les niveaux des salaires effectivement pratiqués, notamment par les autres ambassades. Notre poste à Alger constate un décrochage de nos grilles salariales et en proposera la revalorisation au titre de 2025. J'étudierai attentivement cette demande qui, si elle est acceptée, sera financée par l'enveloppe pour mesures catégorielles figurant dans le budget 2025.
Si vous avez entendu une rumeur concernant les 75 ETP du ministère, je vous remercie d'en rechercher la source et de me la signaler ! Nous nous sommes battus pour les obtenir. Je souhaite qu'ils soient, au minimum, préservés. Comme je vous l'ai dit, un engagement avait été pris pour 150 ETP, afin de tenir la promesse des états généraux de la diplomatie.
Je m'engage par ailleurs à étudier le sujet du Pass éducation langue française avec attention, pour voir s'il est possible d'avancer sans attendre l'évaluation de l'expérimentation, même s'il est toujours préférable d'attendre qu'un bilan soit effectué avant d'étendre les modalités d'une expérimentation ou de la pérenniser.
Les aides à la scolarité diminuent effectivement, de 6 millions d'euros. Les moyens prévus devraient néanmoins suffire pour assurer l'accompagnement des familles. Le budget comporte en effet une enveloppe de 111,5 millions d'euros pour les bourses scolaires ainsi qu'une dotation portée à 2 millions d'euros pour l'accompagnement scolaire des élèves en situation de handicap. Les crédits consacrés aux affaires sociales s'élèveront en outre à 20 millions d'euros. Malgré une baisse de 1,6 million d'euros par rapport à 2024, l'enveloppe budgétaire restera donc à un niveau substantiel par rapport à la période antérieure à la crise du covid-19. Ce niveau est en effet supérieur de 2 millions d'euros à celui de l'enveloppe budgétaire de 2019. De plus, 15,2 millions d'euros seront alloués aux aides sociales directes.
Après une année faste pour la francophonie et la réussite du Sommet de la Francophonie, à Paris et à Villers-Cotterêts, les crédits consacrés à la francophonie diminuent. Cependant, malgré cette baisse de crédits, la France maintient sa capacité d'action au sein de la francophonie institutionnelle en qualité de premier bailleur de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF).
Ce Sommet a été un succès diplomatique. Nous avons pu constater en effet que l'OIF demeurait attractive. Des demandes de réintégration ont été reçues, ainsi que des demandes de promotion, si je puis dire, dans l'ordre de la francophonie. Il a été également un succès populaire. Tous les mouvements d'entrepreneurs de la francophonie se sont en effet retrouvés dans un même lieu à l'occasion du salon FrancoTech, qui s'est tenu à la station F et a été unanimement salué comme une réussite.
Enfin, concernant la double imposition des Français vivant en Thaïlande, les services compétents ont été saisis de la question, notamment la direction de la législation fiscale (DLF). L'ambassade de France dialogue avec les autorités thaïlandaises avec l'appui de la direction des Français à l'étranger et de l'administration consulaire (DFAE). Une réunion d'information avait été organisée pour nos ressortissants au premier semestre 2024.
(...)
R - Monsieur le président, vous l'avez dit, nous rentrons d'Ukraine où nous avons pu constater à quel point la voix de la France y résonne singulièrement. Le combat des Ukrainiens est aussi le nôtre : il s'agit d'un enjeu de sécurité pour nous, Européens, mais aussi d'une question humanitaire - je pense à la situation des enfants ukrainiens blessés, traumatisés, parfois kidnappés ou déportés. Nous sommes aussi les garants d'un ordre international fondé sur le droit qui prémunit l'ensemble des peuples du monde contre la loi du plus fort.
Si l'Ukraine devait tomber, c'est tout l'édifice conçu en 1945 par nos prédécesseurs qui s'effondrerait avec elle. En empêchant la défaite de l'Ukraine par l'aide que nous apportons à ses combattants, ainsi que dans les domaines civil et humanitaire, nous préparons la victoire des principes auxquels nous croyons et nous assurons les conditions de la maîtrise de notre propre destin, qu'il s'agisse du prix de l'énergie et du blé ou du fonctionnement de notre espace numérique.
C'est pourquoi la position de la France est de continuer à soutenir aussi longtemps et intensément que nécessaire la résistance des Ukrainiens face à la guerre d'agression que la Russie mène depuis deux ans et demi.
La voix de la France est également singulière au Proche-Orient.
Le 7 octobre dernier, sur le site du festival Nova, la France était aux côtés des familles et des victimes du pire massacre antisémite depuis la Shoah pour panser les plaies ; elle était aux côtés de la population d'Israël dans son ensemble pour lui dire qu'elle n'oublie ni les plus de mille deux cents victimes, dont quarante-huit Français, ni les otages - tous les otages. Je pense à Erez, Eitan, Sahar et Mia qui ont été libérés dans la joie et les larmes après d'intenses efforts. Je pense à Elia et Orion qui ont été assassinés. Je pense à Ofer et Ohad, pères de famille retenus captifs depuis un an dans la bande de Gaza ; je pense à tous ceux qui partagent leur sort.
Le Président de la République et le Premier ministre ont reçu les familles le jour même. La France n'abandonnera jamais ses compatriotes. Tous les otages doivent être libérés sans condition.
Mais parce qu'elle ne fait pas de distinction entre les victimes civiles, la France se tient aux côtés des Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie depuis le premier jour, en appelant à un cessez-le-feu immédiat et en plaidant pour une solution politique permettant aux deux peuples de vivre en paix et en sécurité. Cette solution passera par la création d'un Etat palestinien, par des reconnaissances collectives et réciproques et par des garanties de sécurité pour Israël.
Au Liban aussi, la France fait entendre sa voix.
Le Hezbollah porte une lourde responsabilité dans la situation que nous connaissons aujourd'hui, en ayant entraîné le pays dans une guerre que le peuple libanais n'avait pas choisie. Déjà des milliers de morts, dont deux de nos compatriotes, déjà des centaines de milliers de déplacés et de nombreux blessés.
Si nous ne faisons rien, le Liban de demain pourrait ressembler à la Syrie d'aujourd'hui, livré au trafic de drogue et au terrorisme, avec des millions de malheureux jetés sur les routes de l'exil.
C'est la raison pour laquelle nous organisons demain, jeudi 24 octobre, une conférence internationale de soutien au peuple et à la souveraineté du Liban pour tracer des perspectives diplomatiques, mobiliser l'aide humanitaire et en garantir l'acheminement, mais également pour accompagner les Libanais dans leur désir de vivre en paix et en sécurité dans un Etat fonctionnel capable d'assurer leur prospérité.
La voix de la France est singulière en Afrique et elle est confrontée à de nombreux défis : crise économique, inégalités, tensions sociales, conséquences du dérèglement climatique... La France est à l'initiative pour agir aux côtés de ses partenaires africains, y compris dans les situations les plus compliquées.
Au Soudan, où une personne sur deux a besoin d'une aide d'urgence, la France est présente. En six mois, grâce à nos efforts, 90 % des 2 milliards d'euros d'engagements financiers promis lors de la conférence de Paris pour le Soudan du mois d'avril ont été décaissés. Des avancées ont été obtenues en matière d'accès humanitaire, dont la réouverture du couloir d'Adré entre le Tchad et le Darfour. J'ai travaillé, en marge de l'Assemblée générale des Nations unies, avec mes homologues allemand et américain et avec le Haut Représentant de l'Union européenne. Nous ne relâchons pas nos efforts.
Dans la région des Grands Lacs, notre rôle est de tout faire pour obtenir la désescalade et construire la paix. Nous soutenons la médiation que conduit l'Angola entre la République démocratique du Congo et le Rwanda. Il faut être à la hauteur des intérêts de la France et des Français.
Les défis qui sont devant nous, géopolitiques, sécuritaires, économiques, démographiques, trouvent tous une part de leur réponse au sud de la Méditerranée, sur ce continent qui compte plus du quart des Etats membres des Nations unies et qui comptera en 2050 deux milliards d'habitants. Etablir avec les pays africains partout où cela est possible des partenariats refondés sur la base d'intérêts mutuellement reconnus est donc une nécessité, voire un impératif diplomatique.
La voix de la France est aussi singulière en Europe, si singulière qu'il lui arrive d'être isolée, mais l'histoire récente nous a donné raison. En matière de politique industrielle, nous avons su mobiliser l'Europe sur l'agenda de Versailles, convaincre nos partenaires concernant le salaire minimum, la réglementation des géants du numérique ou encore la nécessité d'imposer le principe de réciprocité dans les échanges commerciaux.
Une Europe plus forte, plus souveraine, plus unie, plus indépendante. Voilà ce que la France soutient, aux côtés de l'Allemagne, et je ferai en sorte que notre tandem demeure un moteur. Nous défendrons également cette ambition avec nos amis polonais, en format dit de Weimar, qui a été remis sur les rails par mon prédécesseur, Stéphane Séjourné, notamment pour répondre aux menaces informationnelles.
Je continuerai à appuyer nos efforts pour que l'Europe de la défense prenne forme et se hisse à la hauteur des menaces qui nous guettent.
La voix de la France est singulière, enfin, dans le concert des Nations et à l'Organisation des Nations unies. La France ne se contente pas d'occuper son siège, certes confortable, de membre permanent du Conseil de sécurité, elle assume pleinement sa vocation de garant de l'ordre international fondé sur le droit et la Charte des Nations unies. Voilà notre seule boussole, celle que nous utilisons pour condamner toutes les violations du droit international, en particulier du droit international humanitaire.
Cette responsabilité consiste aussi à adapter les enceintes multilatérales aux enjeux actuels pour consolider leur légitimité, en soutenant l'entrée de l'Inde, du Japon, du Brésil et de l'Allemagne au Conseil de sécurité et en ouvrant celui-ci à une présence africaine.
Il s'agit également d'affronter la menace climatique et environnementale qui touche tout le monde et qui affecte particulièrement l'Europe.
C'est pour cela que nous protégeons les poumons de notre planète, notamment les océans. La France a ainsi joué un rôle déterminant dans la conclusion de l'accord dit BBNJ issu de la Conférence intergouvernementale sur la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, sur lequel vous aurez, mesdames, messieurs les sénateurs, à vous prononcer dans quelques jours. Elle renforcera encore cette ambition à Nice où elle organisera avec le Costa Rica la troisième conférence des Nations unies sur les océans.
Puis, nous avons la responsabilité de soutenir nos partenaires qui subissent de plein fouet la crise climatique et, souvent en même temps, la crise de la dette. C'est pourquoi la France a accueilli en juin 2023 un sommet pour un nouveau pacte financier mondial, le pacte de Paris pour les peuples et la planète, soutenu à ce jour par soixante-six pays.
Voilà les quelques mots liminaires que je voulais partager avec vous, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs. Contre tous les vents contraires, contre le surgissement de la violence et de la brutalité dans les relations internationales, la voix de la France ne variera ni ne faiblira.
(...)
R - La Moldavie a effectivement connu, dimanche dernier, le premier tour de l'élection présidentielle et un référendum sur l'adhésion à l'Union européenne. Ce dimanche, une élection, également très importante, a lieu en Géorgie.
D'une certaine manière, ces élections vont façonner une partie du destin de l'Europe pour les années à venir. La Russie mène une guerre sur le champ de bataille en Ukraine et elle mène une guerre sur le terrain électoral en Moldavie et en Géorgie, comme elle l'avait fait en Ukraine, lorsque ce pays avait décidé de se tourner vers l'Union européenne plutôt que de rester sous le joug de la Russie. Quelle attitude adopter ?
Lorsque le président Perrin et moi étions dans le train qui nous ramenait de Kiev, le jour de ces votes en Moldavie, j'ai appelé par anticipation mon homologue, me disant qu'il serait très occupé plus tard dans la soirée. Les premières estimations n'avaient pas encore été diffusées, mais l'importance de la participation pouvait laisser penser à une issue plus favorable que ce qui avait pu être anticipé. Je l'ai félicité pour l'extraordinaire campagne qui avait été menée en faveur de l'adhésion malgré des conditions épouvantables et une importante manipulation de l'opinion - il semble même qu'il y ait eu des achats de voix de la part de la Russie. Cependant, je l'ai senti très prudent au téléphone. Et on s'est effectivement aperçu, durant la soirée, que le surcroît de mobilisation était lié à des manoeuvres russes, certes contrecarrées par la mobilisation du camp pro-européen, que ce soit pour l'élection présidentielle ou pour le référendum.
Il est vrai que Maia Sandu, avec plus de 40% des voix, a fait un très bon score, mais on aurait pu espérer, il y a quelques mois encore, qu'elle passe dès le premier tour. En outre, le référendum a été gagné à 13 000 voix près... C'est pourquoi il nous faut soutenir autant que nous le pouvons, sans ingérence ni soutien qui serait contre-productif, sa campagne de second tour. Elle doit encore être réélue pour pouvoir poursuivre le travail engagé de manière admirable par la Moldavie sur la voie de l'adhésion à l'Union européenne.
J'ai assisté le 25 juin dernier à la conférence intergouvernementale qui a ouvert les négociations d'adhésion de la Moldavie à l'Union européenne et j'ai entendu le Premier ministre moldave dire aux Etats membres : ne nous faites pas de cadeaux, jugez-nous sur nos mérites propres, nous voulons entrer dans l'Union européenne parce que nous voulons l'Etat de droit, la démocratie, la lutte contre la corruption, l'indépendance de la justice et des médias ! C'était admirable, mais tout cela dépend du second tour de l'élection présidentielle...
J'ai adressé cet après-midi un message à mon homologue moldave pour lui demander ce qu'on pouvait faire pour l'aider. Il m'a répondu qu'il fallait veiller à la sécurité des bureaux de vote à l'étranger pour que les Moldaves puissent s'y rendre le jour J, sans le moindre problème, afin d'exercer leur droit civique. Il anticipe de nouvelles campagnes de manipulation informationnelle visant à laisser planer le doute sur les opérations de vote.
Madame Gréaume, je partage votre constat sur l'importance de l'aide publique au développement pour atteindre les objectifs du développement durable. S'agissant de la taxe sur les transactions financières, je veux néanmoins préciser une chose que je n'ai pas mentionnée précédemment faute de temps.
Jusqu'à présent, le produit de la taxe sur les transactions financières était affecté en partie à l'aide publique au développement. Ce n'est plus possible en raison de la révision de la loi organique relative aux lois de finances : on ne peut plus affecter une ressource, sauf dans des circonstances extrêmement limitées. À la place de l'affectation de cette taxe à l'aide publique au développement, le projet de loi de finances pour 2025 tend à créer un fonds de solidarité pour le développement qui va reprendre le montant des crédits qu'aurait fourni l'affectation de la taxe sur les transactions financières. La ressource n'est plus une taxe affectée, elle est budgétaire.
On peut naturellement avoir un débat sur cette taxe, comme sur toute ressource fiscale. Le débat est légitime, mais son résultat n'influera pas directement sur le budget de l'aide publique au développement, puisque cette taxe, je le redis, ne peut plus lui être affectée. Il en va de même pour la taxe sur les billets d'avion.
Madame Carlotti, le Président de la République, qui a de fréquents échanges avec les présidents Tshisekedi et Kagame - ce fut notamment le cas lors du dernier Sommet de la francophonie -, et mon ministère sont pleinement mobilisés sur les sujets agitant la République démocratique du Congo, le Rwanda et la région des Grands Lacs.
L'effort de médiation le plus prometteur est celui mené par l'Angola. Mais la résolution durable des tensions dans la région passera par un travail sur les causes profondes du conflit : celles-ci sont en partie liées à l'histoire, mais elles s'expliquent aussi par des raisons économiques, notamment les ressources naturelles situées à l'est de la RDC. Il nous semble que des solutions peuvent être trouvées pour mieux organiser l'accès à ces ressources et lier le destin de tous les acteurs de cette région. De telles solutions pourraient permettre à celle-ci de sortir de la spirale de la violence dans laquelle elle est malheureusement engagée.
La semaine dernière, mon cabinet a reçu une délégation de parlementaires de RDC ; j'échangerai demain à 15 h 30 avec mon homologue congolaise en vue de trouver le chemin vers les solutions les plus adaptées.
(...)
R - Monsieur Folliot, je vous remercie pour votre question. J'ai consacré mes premiers instants de ministre de l'Europe et des affaires étrangères à l'Ukraine. Dans le cadre de la formule de paix du président Zelensky, j'ai décidé de contribuer au groupe de travail piloté par le Canada et l'Ukraine, en cofinançant deux centres de défense des droits des enfants à Dnipro et à Kharkiv sur le modèle du centre que nous avons visité le week-end dernier à Kiev avec Cédric Perrin et Bruno Fuchs. Ceux-ci servent à la fois de bureau délocalisé du procureur de la Cour pénale internationale (CPI) - le mandat d'arrêt visant Vladimir Poutine a été fondé sur les déportations d'enfants ukrainiens pendant la guerre -, mais aussi de lieu d'accueil pour que les enfants reçoivent les soins physiques et psychologiques nécessaires.
Je n'ai pas de réponse toute prête sur les orphelins de Gaza et du Liban, mais je reviendrai vers vous sur ce point.
Madame Boyer, l'Azerbaïdjan fait montre d'agressivité d'abord à l'encontre de l'Arménie, au mépris du droit international, notamment humanitaire, mais aussi envers notre pays par le biais d'ingérences numériques ou plus classiques - toutes condamnables.
L'Azerbaïdjan a choisi de provoquer une crise sans précédent dans nos relations et poursuit ses agissements hostiles à notre encontre sur le plan informationnel. Le service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (Viginum) a documenté le 17 mai des manoeuvres informationnelles d'origine azerbaïdjanaise à notre encontre en Nouvelle-Calédonie. Cette campagne est d'autant plus préoccupante que le ministre de l'intérieur et des outre-mer avait à l'époque relevé les liens que certains indépendantistes en Nouvelle-Calédonie entretenaient avec l'Azerbaïdjan.
Des manoeuvres similaires, appelant notamment au boycott des jeux Olympiques, avaient déjà été détectées en provenance d'Azerbaïdjan. Celles-ci ont toutefois peiné à obtenir une visibilité suffisante dans le débat public numérique francophone pour produire des effets réels sur le bon déroulement des événements, comme l'indique le rapport de Viginum du 13 septembre. C'est la raison pour laquelle il a été décidé de ne pas organiser une riposte que je qualifierais de bruyante sur ce sujet, de peur de donner à ces manoeuvres informationnelles plus d'écho qu'elles n'en avaient eu... Mais il est clair que de tels agissements affectent de manière très négative notre relation avec l'Azerbaïdjan.
Cela ne doit pas nous faire oublier le soutien que nous devons à l'Arménie et au peuple arménien. Et comme vous le savez, Sébastien Lecornu a été le premier ministre des armées à se déplacer en Arménie. Nous avons aussi obtenu, au niveau européen, que la Facilité européenne pour la paix puisse être étendue à ce pays.
Nous entretenons des relations très étroites avec les autorités arméniennes pour renforcer toujours plus nos coopérations dans les domaines civil et énergétique à un moment un peu critique pour l'Arménie. Le pays se tourne de plus en plus vers l'Union européenne, en rompant une relation qu'il entretenait depuis longtemps avec la Russie.
Mme Boyer m'a interrogé sur la COP 29. Je suis moi aussi un peu sceptique sur les résultats qu'une COP peut avoir dans un pays qui prospère sur les énergies fossiles. Cela dit, le principe des COP doit être préservé. C'est un outil extraordinaire pour faire avancer les sujets climatiques et ceux relatifs à la biodiversité. C'est la raison pour laquelle nous nous projetons davantage sur la COP 30 qui aura lieu à Belém. À Bakou, la présence française sera réduite au minimum - Agnès Pannier-Runacher s'y rendra pour les conclusions.
Le décret d'attribution des compétences ministérielles revient en effet à la formule prévalant avant le gouvernement Attal, à savoir une représentation politique assurée par le ministère de la transition écologique ; c'est plutôt la formule vers laquelle s'orientent la plupart de nos partenaires européens. Cela dit, les négociations elles-mêmes sont menées par une équipe interministérielle placée sous l'autorité d'un ambassadeur dont la nomination, même si elle se fait en bonne intelligence avec le ministère de la transition écologique, relève du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. D'ailleurs, ce poste est aujourd'hui vacant ; nous réfléchissons à le pourvoir.
Monsieur Cadic, je ne peux pas répondre de manière très précise à votre question. Je souhaite simplement rappeler que des exercices militaires chinois se sont tenus dans le détroit de Taïwan le 14 octobre dernier ; ceux-ci nous ont beaucoup préoccupés.
Votre question m'offre l'occasion de réaffirmer l'attachement de la France à la paix et à la stabilité dans la région, qui sont indispensables pour assurer la sécurité et la prospérité globales : une escalade aurait des conséquences incalculables, non seulement pour la région, mais également pour le reste du monde. Nous sommes opposés à toute modification unilatérale du statu quo ainsi qu'à tout usage de la force et de la coercition dans le détroit de Taïwan. Nous appelons évidemment les parties à éviter toute escalade.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 4 novembre 2024