Texte intégral
MATHIEU BELLIARD
7 h 41 sur RMC, très bon réveil à toutes et à tous sur RMC et RMC Story avec Guillaume KASBARIAN, mon invité, ce matin, le ministre de la Fonction publique, bonjour,
GUILLAUME KASBARIAN
Bonjour,
MATHIEU BELLIARD
Merci d'être en direct avec nous. On a beaucoup de choses à voir ensemble, les syndicats de la fonction publique sont en colère, ils l'ont dit, hier. Mais d'abord une question, après cette information de la nuit, ces scènes d'une rare violence, hier soir, dans les rues d'Amsterdam, des supporters du club israélien, le Maccabi Tel Aviv, pourchassés dans les rues, tabassés, jeté à l'eau même pour certains. Nous en France, dans six jours, on a le match France-Israël qui sera accueilli au Stade de France. Est-ce qu'on peut le maintenir ? Est-ce qu'on peut continuer d'accueillir du public ?
GUILLAUME KASBARIAN
Oui, alors les images qui nous parviennent d'Amsterdam sont choquantes. Il s'agit d'actes antisémites graves et on doit lutter partout, en France, en Europe, contre ces actes antisémites. Et vous l'avez dit, il y aura un match la semaine prochaine. Tout sera mis en oeuvre par le ministère de l'Intérieur, par les forces de l'ordre présentes pour assurer la sécurité des spectateurs, la sécurité bien évidemment des joueurs et faire en sorte que l'on puisse avoir ces événements sportifs qui se déroulent, mais dans le calme, dans l'ordre, dans le respect et bien évidemment sans actes antisémites qui sont, encore une fois, intolérables.
MATHIEU BELLIARD
Je pose la même question à Yonathan ARFI, président du Conseil représentatif des institutions juives de France, après le journal de 8 h tout-à-l'heure. On en vient à votre dossier, votre portefeuille, Guillaume KASBARIAN, vous êtes ministre de la fonction publiques, deux syndicats appellent à la grève, une grève étendue interprofessionnelle, disent-ils. Une évidence même pour la CGT, et si vous êtes sur RMC ce matin, c'est pour détailler les mesures dont vous leur avez parlé, hier. Vous confirmez ? Et c'est peut-être le premier point qui a crispé les syndicats. Trois jours de carence seront imposés aux fonctionnaires en cas d'arrêt-maladie.
GUILLAUME KASBARIAN
Je confirme ma détermination et celle du Gouvernement à mener à bien un plan de lutte contre l'absentéisme qui contient, effectivement, des mesures de responsabilisation. Trois jours de carence dans la fonction publique ou dans un rapprochement avec le privé et une baisse de prise en charge de 100% à 90%, au-delà de la carence, pour limiter en tout cas les phénomènes d'absentéisme qui ont ces dernières années bien augmentés, avec des chiffres alarmants sur lesquels ma responsabilité est d'agir plutôt que de mettre le sujet sur le tapis…
MATHIEU BELLIARD
Vous appelez aussi à des mesures pour répondre à cette inflation d'arrêt maladie pour leurs conditions de travail ?
GUILLAUME KASBARIAN
Bien sûr, il y a à l'inter, je vous le disais, deux mesures de responsabilisation carence et baisse de prise en charge, il y a aussi des mesures d'amélioration des conditions de travail qui font partie des discussions avec les syndicats, il y a des mesures de débureaucratisation pour les agents pour faire en sorte qu'ils y aient moins de tâches administratives pénibles dans leur journée de travail. Il y a des mesures de protection fonctionnelle pour éviter que des agents se fassent agresser ou, en tout cas, pour que l'administration soit vraiment à leur côté, eux et leur famille quand ils se font agresser, pour là aussi, limiter l'impact d'un arrêt de travail et de difficultés d'absence qu'on peut observer dans certains services. Bref, c'est un plan global de lutte contre, de prévention et de réduction de ces absences que l'on peut observer dans la fonction publique. Et donc, ce plan-là, bien évidemment, je suis déterminé à le mener à bien et nous allons le mener à bien. Ensuite, nous avons d'autres échanges sur plein de sujets avec les syndicats, je les ai reçus, hier, dans un esprit de respect, d'écoute, de dialogue et nous avons pu discuter de l'ensemble des sujets qui relèvent de la fonction publique, où, nous avons échoué…
MATHIEU BELLIARD
Et des abus sur les arrêts maladie pour en terminer sur cette question-là, ils abusent, ils sont feignants ?
GUILLAUME KASBARIAN
Je n'emploie jamais ces termes là parce que je ne stigmatise personne et je ne rentre jamais dans du fonctionnaire bashing. Je regarde les chiffres et je trouve que oui, les arrêts maladie ont significativement augmenté depuis dix ans. Dans la fonction publique, on est à 77 millions de jours d'arrêt par an, c'est à peu près l'équivalent de 350 000 équivalents temps plein, c'est plus que les effectifs de LA POSTE ou plus que les effectifs de la SNCF. Et il se trouve que ce taux, le nombre de jours d'absence chez les fonctionnaires est plus élevé, en tout cas, c'est encore plus vrai dans la territoriale et dans l'hospitalier, mais ce chiffre-là est plus élevé que dans le privé. Et donc, plutôt que de dire : " Je laisse filer, je ne m'en occupe pas ", ma responsabilité, c'est de dire la vérité et d'agir dans un contexte budgétaire qui est très difficile, avec un plan qui permet effectivement de réaliser 1,2 milliards d'euros d'économies, c'est aussi, effectivement, des économies…
MATHIEU BELLIARD
Je comprends votre responsabilité sur le sujet, c'est aussi l'enjeu national. Le Smic a été augmenté, le 1er novembre dernier, est-ce que le Gouvernement va revaloriser le point d'indice ?
GUILLAUME KASBARIAN
Alors, je l'ai dit avec un discours de vérité aux syndicats, le contexte budgétaire ne nous permet pas, cette année, d'augmenter le point d'indice, il ne nous permet pas non plus d'augmenter et de verser la prime Gipa qui est une prime de valorisation…
MATHIEU BELLIARD
La garantie individuelle de pouvoir d'achat.
GUILLAUME KASBARIAN
… Voilà, qu'une partie des fonctionnaires pouvait toucher, notamment des catégories A et des fonctionnaires en fin de carrière ou en fin de grille. Bref, le contexte budgétaire…
MATHIEU BELLIARD
Elle ne sera pas versée, cette prime…
GUILLAUME KASBARIAN
Elle ne sera pas versée.
MATHIEU BELLIARD
Un peu de suspens la dessus, elle ne sera pas versée en 2025 ?
GUILLAUME KASBARIAN
Monsieur BELLIARD, ma responsabilité de ministre face à la situation dans laquelle on est, y compris au niveau budgétaire, me pousse à être responsable, franc et direct avec les uns et les autres. Nous n'augmentons pas le point d'indice et nous ne verserons pas la Gipa, cette année. En revanche, il y a d'autres sujets que je souhaite aborder avec les syndicats et je leur ai proposé hier de les aborder, notamment une révision de la grille, une valorisation des métiers, une amélioration des conditions de travail, tous ces travaux que l'on veut mener sur l'attractivité de la fonction publique, le logement aussi des fonctionnaires, ça fait partie des sujets qui sont sur la table. Tous ces travaux-là, nous allons les mener, nous le ferons, encore une fois, dans l'écoute et dans le dialogue, et sans promettre la lune ou sans promettre n'importe quoi…
MATHIEU BELLIARD
Ce sera l'objet de négociation et de discussion.
GUILLAUME KASBARIAN
Exactement, mais est-ce que ça ne serait pas responsable de dire tout pour faire plaisir, mais en réalité, sans avoir les moyens de le faire.
MATHIEU BELLIARD
Ce sera l'objet de discussions avec les syndicats ? De ces derniers éléments, là où pour le coup c'est ferme, pas d'augmentation du point d'indice et pas de versement de la prime Pouvoir d'achat.
GUILLAUME KASBARIAN
Ferme d'un côté et ouvert au dialogue sur des éléments concrets de rémunération, de pouvoir d'achat et de conditions de travail sur lesquels nous pouvons réellement agir. Fermeté sur la situation budgétaire et en même temps dialogue sur des éléments qui sont ouverts à la discussion et à la négociation.
MATHIEU BELLIARD
Autre sujet qui fâche quid du projet qui était porté par votre prédécesseur, Stanislas GUERINI, il comportait plusieurs points, on va les évoquer. Est-ce que vous allez pousser vers plus de rémunération au mérite ?
GUILLAUME KASBARIAN
Alors, il y a beaucoup de chantiers qui avaient été lancés par mon prédécesseur et qui sont intéressants et que je souhaite continuer à discuter avec les organisations syndicales. Il y avait ce projet-là de se dire, on arrête avec les catégories abaissées, on ne fait plus qu'une seule catégorie, il n'y a plus de catégorie, etc. J'ai entendu l'argument à la fois des syndicats et des agents qui me disent que pour eux, ces catégories-là sont des repères historiques traditionnels qui sont importants pour eux et que la fusion comporterait des complexités, des réticences et des choses qui sont compliquées à mettre en oeuvre. Donc, moi, j'entends ces arguments-là et c'est pour ça qu'hier, en responsabilité, je leur ai dit que je les avais entendus et que ce projet-là, en tout cas, cette fusion des catégories ABC étaient mis de côté, que nous ne ferions pas prospérer ces éléments-là. Vous voyez que l'écoute, c'est également cela, c'est-à-dire être ferme sur des positions et être en mesure d'écouter des arguments quand ils sont bons et justifiés, c'est le cas sur la question des catégories sur lesquelles j'ai décidé de ne pas faire prospérer la fusion des catégories ABC, je préfère me concentrer sur d'autres sujets sur lesquelles on peut…
MATTHIEU BELLIARD
La rémunération et le mérite ?
GUILLAUME KASBARIAN
Alors, ces sujets-là sont sur la table. La question de valoriser l'engagement, de valoriser la prise d'initiative, de valoriser ceux qui travaillent et qui se donne et qui s'engage, y compris de façon collective dans un service, ce sont de beaux sujets qui permettent à mon avis d'améliorer la rémunération et que je souhaite pouvoir discuter et concerter avec les syndicats. Je n'ai pas de cible en tête préconçue et c'est ça le sens du dialogue et de l'échange, mais ce sont des sujets qui restent sur la table.
MATTHIEU BELLIARD
Vous avez évoqué une réforme du statut, avec notamment évidemment la question de ce qu'on appelle un peu abusivement l'emploi à vie, la possibilité de licencier pour insuffisance professionnelle. Est-ce que vous allez avancer sur ce terrain-là, qui est un sujet brûlant pour eux ?
GUILLAUME KASBARIAN
Sur le sujet, en tout cas de la gestion de carrière, du moment où on accède à la fonction publique jusqu'au moment où éventuellement on en sort et éventuellement, on en sort parfois même pour des questions d'insuffisance, c'est là aussi des sujets que le ministère a depuis longtemps travaillé, sur lequel il faut pouvoir échanger pour répondre à des besoins de concret, de managers, de chefs d'administration et de services sur lesquels vous pouvez avoir des personnes qui n'ont peut-être pas vocation à rester dans un service parce qu'il y a une insuffisance, parce qu'il y a de la toxicité managériale et sur lesquelles ce ne serait pas responsable de dire, là aussi : " Ecoutez ou on fait semblant de ne pas voir ce problème-là et on continue comme si de rien n'était ". La responsabilité aussi, c'est d'avancer aussi sur ce sujet dans le dialogue et dans la concertation.
MATTHIEU BELLIARD
Mais, donc, on va aussi avancer sur ce terrain-là.
GUILLAUME KASBARIAN
Mais ces sujets-là font pourtant l'objet de concertation avec les syndicats, bien évidemment.
MATTHIEU BELLIARD
Vous allez réformer le statut de la fonction publique ?
GUILLAUME KASBARIAN
Sur le statut, il y a plusieurs choses qui changent en permanence sur la question du statut. Le statut n'est pas quelque chose de figé, c'est quelque chose qui évolue avec le temps. En tout cas, la question de pouvoir, en cas d'insuffisance professionnelle, se séparer d'un élément qui est toxique et qui nuit au service et plutôt que de le muter ou de le garder dans les murs alors qu'il y a un problème, c'est des questions qui existent et qui se posent aujourd'hui. Il y a des outils, déjà, pour agir aujourd'hui, mais la question, c'est : est-ce que dans les cas où on n'y arrive pas, est ce qu'il y a une question de méthode ? Ce n'est pas forcément une modification législative d'ailleurs à faire, ça peut être des modifications réglementaires, mais je souhaite pouvoir en discuter pour ne pas laisser des services entiers minés par éventuellement l'insuffisance d'un élément qui pose problème. Ma responsabilité, encore une fois, ce n'est pas de mettre le problème sur le tapis.
MATTHIEU BELLIARD
Ces annonces, les jours de carence, les 90% de rémunération en cas d'arrêt-maladie, pas d'augmentation du point d'indice, pas de versement de la prime pouvoir d'achat, on retire la fusion des catégories ABC, voilà ce que vous leur avez annoncé hier. Ils sont sortis en menaçant d'une grève. D'un mot, on aura des trains à Noël ?
GUILLAUME KASBARIAN
Écoutez, moi, je ferai en tout cas tout pour garder un dialogue constructif, ouvert et sérieux. Je ne suis ni dogmatique, ni un idéaliste qui va promettre tout et n'importe quoi et je serai ferme sur mes positions tout en étant ouvert à la discussion. Donc, je ferai mon rôle de ministre, c'est-à-dire de servir l'intérêt général, de servir les Français, charge aux syndicats aussi de représenter l'intérêt général et je suis sûr qu'ils le feront et donc, d'être responsable dans les dialogues qui s'annonce dans les semaines qui viennent.
MATTHIEU BELLIARD
Merci, Guillaume KASBARIAN.
GUILLAUME KASBARIAN
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 8 novembre 2024