Texte intégral
CHRISTOPHE BARBIER
Nicolas DARAGON, bonjour et bienvenue !
NICOLAS DARAGON
Bonjour.
CHRISTOPHE BARBIER
Ministre délégué chargé de la Sécurité du quotidien, maire de Valence aussi dans la Drôme. Alors ce match France-Israël ce soir, alors dans le stade, bien sûr, la sécurité sera organisée, mais en effet pour y aller, pour en revenir, est-ce qu'il y a des craintes à nourrir ?
NICOLAS DARAGON
Il y aura 4 000 policiers présents, 1 600 stadiers dont les effectifs des forces de l'ordre. Il y en aura évidemment à l'extérieur, il y en aura dans les transports, il y en aura sur les trajets. Le préfet de police, Laurent NUNEZ, a pris les choses en main. Et on a affaire au même dispositif que pour les Jeux olympiques à peu près. Ça veut dire une forte présence policière et la volonté évidemment de sécuriser tous les sites autour et dans le stade.
CHRISTOPHE BARBIER
L'idée que les supporters de l'équipe d'Israël puissent être victimes d'une chasse à l'homme, comme on l'a vu à Amsterdam plus tard dans la nuit, dans les rues ; cette idée-là est exclue ?
NICOLAS DARAGON
Nous excluons évidemment parce que nous mettons le dispositif nécessaire pour que ça ne se produise pas. Mais évidemment, on va être extrêmement attentifs et extrêmement présents partout, sur tous les sites et extrêmement prudents.
CHRISTOPHE BARBIER
Peu de billets vendus ; un quart du stade, normalement, sera plein. Ça veut dire la peur aussi des gens. Ça facilitera évidemment la sécurité.
NICOLAS DARAGON
Ça veut dire la crainte, mais ça veut dire aussi que la France ne recule pas, que nous n'avons pas changé de site sous la menace. Nous n'avons pas renoncé à ce match. C'était hors de question. Nous soutenons évidemment nos concitoyens de confession juive. Ils doivent être en France, chez eux, tout à fait normalement, et ils doivent pouvoir se déplacer normalement, participer à des événements normalement. C'est ce à quoi nous nous attachons avec Bruno RETAILLEAU et le préfet de police.
CHRISTOPHE BARBIER
Quand, après Amsterdam, une députée LFI, Marie MESMEUR, dit que ce ne sont pas des juifs mais des racistes qui ont été poursuivis par la foule, qui ont été lynchés. Comment réagissez-vous ?
NICOLAS DARAGON
C'est un pur scandale. Pardon, mais Yaël BRAUN-PIVET a failli ne pas pouvoir tenir une conférence à l'Université Lyon 3. Ce n'est pas parce qu'elle est présidente de l'Assemblée nationale, c'est parce qu'elle s'appelle Yaël. Les supporters du Maccabi de Tel-Aviv ont été pourchassés dans les rues d'Amsterdam, pas parce qu'ils sont supporters, mais parce qu'ils sont juifs et parce qu'ils sont israéliens. C'est bien de l'antisémitisme et c'est purement scandaleux d'entendre ce que dit LFI depuis des années. Je voudrais, si vous permettez, il faut que je prenne une fiche pour vous dire, pour vous parler de LFI. Nous avons fait rentrer un fichier à l'Assemblée nationale, Raphaël ARNAULT. Nous avons un ancien dealer, Louis BOYARD. Nous avons un consommateur de drogue, Andy KERBRAT. Nous avons un député qui pose le pied sur un ballon de foot avec le visage d'un ancien ministre, Olivier DUSSOPT, un député qui violente sa femme, un député qui parle plus de la Palestine que des Français, un député qui brandit un drapeau étranger dans l'hémicycle, celui de la Palestine, Sébastien DELOGU. Il paraît que LFI est un parti politique. Pour moi, c'est tout sauf un parti politique. C'est la cinquième colonne qui a infiltré nos institutions.
CHRISTOPHE BARBIER
C'est une stratégie. Elle a fait plus 1 million de voix entre les européennes de 2019 et les européennes de 2024 avec la locomotive, Rima HASSAN. Ça fonctionne.
NICOLAS DARAGON
C'est la manipulation d'une frange de l'opinion publique qui est sensible à ces sujets. L'islamo-gauchisme, ça existe en France, c'est un vrai danger, c'est un poison pour la République. Il faut que nous luttions contre et que nous continuions à faire à la fois de la pédagogie et à être extrêmement sévère avec les gens qui prônent la haine de l'autre, comme un certain nombre de tweets que vous avez signalés ou comme l'attitude de ces députés dans l'hémicycle doivent être sanctionnés.
CHRISTOPHE BARBIER
Alors, être sévère… Il y a des transmissions au procureur article 40, parfois des convocations pour apologie du terrorisme et ça ne va pas plus loin. On est désarmé juridiquement.
NICOLAS DARAGON
Vous savez qu'il y a une proposition de loi LEFEVRE-YADAN qui accentue les sanctions et j'espère qu'elle sera adoptée, notamment les sujets de haine en ligne, les mandats de dépôt plus automatisés, tous les sujets de sanctions, des propos à caractère raciste, antisémite ou discriminatoire. Le sujet des réseaux est très important, on l'a vu d'ailleurs à Amsterdam. Donc évidemment, nous sommes, avec Bruno RETAILLEAU, très attentif à cette proposition de loi et nous n'hésiterons pas à aller encore plus loin si c'est nécessaire.
CHRISTOPHE BARBIER
Et pour la partie pédagogique, est-ce qu'il faut faire, c'est à l'éducation que ça se joue dans l'école ou dans les familles ?
NICOLAS DARAGON
Il faut déjà qu'on arrête de reculer devant l'évidence. Il faut que la Shoah soit enseignée à l'école partout et qu'on ne recule jamais là-dessus. Et il faut d'ailleurs que les étrangers qui veulent s'installer en France respectent les lois de la République, mais respectent aussi l'histoire de France. Et c'est l'islamo-gauchisme qui est grandissant dans notre pays, il se fonde aussi sur la manipulation d'une opinion, en tout cas sur l'exploitation d'un petit ferment qui existe quand on arrive parce qu'on a des racines qui nous portent à plus d'antisémitisme. Il faut que la France lutte contre ça. Et il faut que ceux qui ne respectent pas les valeurs de la République et qui ne respectent pas l'histoire, la culture de la France – nous sommes sur un continent qui a vécu la Shoah - ne restent pas dans notre pays. Et que ceux qui y sont et qui sont français soient sévèrement sanctionnés.
CHRISTOPHE BARBIER
Mais les enseignants ont peur aussi quand ils enseignent la Shoah choix ou quand ils parlent de la liberté d'expression de Charlie Hebdo. En ce moment, c'est le procès des complices de l'assassin de Samuel PATY, le monde éducatif, vous n'allez pas mettre un policier dans chaque classe ?
NICOLAS DARAGON
C'est toute la difficulté, il faut qu'on redonne de l'autorité à nos enseignants. On a trop souvent reculé, dit que les enseignants étaient au même niveau que les élèves, que l'autorité à l'école, c'était une farce, qu'il ne fallait surtout pas que les élèves pouvaient tutoyer les enseignants. Cette autorité qui a disparu progressivement des salles de cours, il faut qu'on la réinstaure progressivement et qu'on redise, qu'on ne peut pas remettre en cause en permanence au travers d'un discours wokiste, l'histoire et l'éducation et la culture de notre pays.
CHRISTOPHE BARBIER
Alors la sécurité du quotidien c'est aussi beaucoup d'autres dossiers, pour vous. Vous réunissez les préfets aujourd'hui. Pourquoi faire ? Pour les mobiliser, leur donner des objectifs chiffrés ? Quel est le but de cette réunion ?
NICOLAS DARAGON
C'est une réunion qui ne s'est pas tenue depuis, je crois, l'époque où Nicolas SARKOZY était ministre de l'Intérieur et qui est à l'initiative du ministre de l'Intérieur, Bruno RETAILLEAU, pour établir des plans départementaux de restauration de la sécurité du quotidien. Il estime, et nous estimons à Beauvau, qu'il n'y a pas mieux placé que les directeurs départementaux qui sont sur le terrain, en contact avec les élus locaux – je suis moi-même élus local - qui connaissent leur commune, rue par rue, porche d'immeuble par porche d'immeuble, pour travailler sur des plans beaucoup plus agressifs contre la délinquance du quotidien.
CHRISTOPHE BARBIER
On va vous demander des moyens. Les préfets vont vous dire, " donnez-nous des fonctionnaires, donnez-nous des moyens. "
NICOLAS DARAGON
Vous savez que le budget du ministère de l'Intérieur est un des rares à être en progression sur les prévisions pour 2025, de 752 millions d'euros. On continue les recrutements, 23 000 recrutements. Il va y avoir des remplacements dans ces 23 000 recrutements, mais des recrutements supplémentaires. On est donc dans la trajectoire. Des moyens supplémentaires seront notamment accordés pour les centres de rétention administrative, pour l'OFAST et notamment le dispositif contre le narcotrafic. Donc évidemment qu'on va accompagner ça de moyens, mais on ne va pas tout bouleverser. Ce qui compte aussi, c'est la méthode. Et cette méthode, je pense, au plus proche du terrain, trouvera une meilleure efficacité.
CHRISTOPHE BARBIER
Au plus proche encore du terrain, on trouve, vous, les maires, on trouve les polices municipales. Vous allez tenir un Beauvau des polices municipales à l'occasion du prochain congrès des maires. Vous dites dans la Gazette des Communes : " les policiers municipaux ne peuvent pas sanctionner un consommateur de drogue, il faut leur donner cette possibilité. Avec peut-être même accès au PV électronique, prendre l'amende tout de suite. " Ça peut se faire juridiquement, rapidement ?
NICOLAS DARAGON
Depuis 1999, le statut des polices municipales n'a pas évolué. Ce qui veut dire que nous devons le revoir, les effectifs ont triplé depuis 1999. On a 27 000 policiers municipaux. En 2026, il y aura 11 000 postes à pourvoir, et pourtant, ils ne peuvent pas contrôler une identité, ils ne peuvent pas ouvrir un coffre, ils ne peuvent pas rentrer dans un porche d'immeuble. Quand un maire prend un arrêté, il ne peut pas être verbalisé par le PVE, ce qui serait plus rapide, plus efficace, il ne peut pas mettre une amende forfaitaire délictuelle pour le consommateur de drogue. Donc notre sujet, c'est bien d'élargir le champ de compétences des polices municipales, tout ça restant une boîte à outils au choix de chaque maire, qui peut créer une police municipale, qui peut l'armer, qui peut lui donner des pouvoirs. Et donc notre sujet, c'est de remettre à plat la totalité du statut, dans une concertation avec les maires et les policiers municipaux.
CHRISTOPHE BARBIER
L'état d'esprit des maires bouge dans cette évolution-là. On a vu le maire de Bordeaux récemment changer d'avis. Vous le sentez sur tout le territoire ?
NICOLAS DARAGON
Bien sûr, une prise de conscience partout, parce que la société est de plus en plus violente, parce que nos ennemis, nos adversaires, sont eux armés, et parfois lourdement, donc il est nécessaire en effet d'armer notre police municipale à chaque fois qu'elle se trouve, notamment dans les grandes villes. Et je salue ce projet d'armer la police municipale à Bordeaux. C'est nécessaire. Je m'inquiète de voir certaines métropoles qui ne le font pas, et qui mettent littéralement en danger leurs agents quand ils sont sur le terrain en tenue. Les gangsters, eux, ils ne font pas de différence entre un policier national et un policier municipal ; le second, dans certaines villes, n'est pas armé.
CHRISTOPHE BARBIER
Est-ce qu'il ne faut pas imposer l'armement des polices municipales à tous les maires de France ?
NICOLAS DARAGON
Alors, la police municipale, ça fait partie des choix des maires. C'est la libre administration des collectivités locales. Comme vous l'avez si bien dit, vous adressez à un maire très jaloux de ses pouvoirs et de ses compétences. Donc j'estime que c'est au maire de décider, mais j'estime aussi que les maires doivent être lucides. Je m'inquiète du comportement d'un certain nombre d'entre eux dans des communes qui négligent la vidéoprotection, qui négligent leur équipement en policiers municipaux.
CHRISTOPHE BARBIER
Les policiers arrêtent, et puis, on n'a pas de place de prison. On a appris, encore ces derniers jours, que le plan de construction n'atteindrait pas ses objectifs, parce qu'ici, il y a un recours, là, il y a des retards administratifs. Comment faire ?
NICOLAS DARAGON
D'abord, ça vient contredire le fait que la Justice française ne soit pas assez sévère. Si les prisons sont pleines, c'est qu'il y a des gens qui sont condamnés et qui vont en prison régulièrement. Ensuite, le plan d'investissement pour les prisons, c'est un plan à long terme. Chacun le comprend ; construire une prison, ça prend 5 ou 6 ans. Donc évidemment, on va se mettre sur le dossier. Didier MIGAUD, qui est en charge de ce sujet pénitentiaire, va se mettre sur le sujet pour tenter d'accélérer les choses, parce qu'en effet, Michel BARNIER a dit qu'il voulait que les courtes peines soient appliquées. Donc si les prisons sont pleines, ça va être compliqué. On ne va pas sortir les délinquants qui prennent des longues peines.
CHRISTOPHE BARBIER
Et quand on regarde sur le terrain, ce sont souvent les maires qui disent non à des prisons, parce que leurs administrés trouvent que c'est un voisinage un peu menaçant.
NICOLAS DARAGON
Je confirme. Mon prédécesseur avait accepté que la prison se construise à Valence. Ça pose des difficultés, et d'un autre côté, je pense que le principe de " not in my BackYard " ne peut pas fonctionner.
CHRISTOPHE BARBIER
Pas dans mon jardin, bien sûr.
NICOLAS DARAGON
Ça ne peut pas fonctionner, il y a un moment où il faut qu'on accepte les nuisances. Vous savez, aujourd'hui, on parle de densification des villes pour garder de la production agricole et alimentaire à proximité. Si on ne veut pas densifier les villes, on va avoir un vrai problème. Il y a beaucoup de contradictions dans le fonctionnement de notre société. Il faut des prisons si on veut pouvoir incarcérer les délinquants dès les petites peines.
CHRISTOPHE BARBIER
Et puis, il y a les délinquants qu'il faut expulser quand ils sortent de prison ; les délinquants étrangers. Vous vous êtes fait remarquer à l'Assemblée par une grande fermeté de discours sur tous ces étrangers criminels qui doivent partir. Est-ce que vous pensez que dans les mois qui viennent à court terme, vous aurez des résultats de ce côté-là ? On connaît le problème des laissez-passer consulaires.
NICOLAS DARAGON
D'abord, la loi du 24 janvier 2024 a permis de renforcer les conditions d'expulsion, notamment des délinquants. Il y a eu 300 expulsions supplémentaires qui n'auraient pas pu se faire s'il n'y avait pas eu cette loi. Et vous savez que Bruno RETAILLEAU a l'intention, normalement au deuxième trimestre, de réintroduire un projet de loi sur l'immigration et notamment les sujets d'expulsion. Les négociations que nous avons avec différents pays, en ce moment, sont aussi faites pour obtenir des visas consulaires pour mieux expulser. Mais pour moi, les choses sont très claires. Un étranger qui ne respecte pas les règles du pays, qui est délinquant, qui est criminel, il doit être expulsé. Et je voudrais souligner que dans la proposition de loi que j'ai demandée, que nous repoussions du Rassemblement National, il fallait encourir une peine de trois ans de prison. Ça veut dire que la polygamie, c'était autorisée. C'est un an de prison en France la polygamie. Donc évidemment qu'il faut faire attention aux faux-semblants. Il faut regarder dans les détails. Et d'ailleurs, le Rassemblement National a retiré son projet de loi.
CHRISTOPHE BARBIER
Un mot de politique, justement, à propos du Rassemblement National. Prison ferme et inéligibilité exécutoire immédiate requise contre Marine Le PEN dans l'affaire des assistants parlementaires européens. Gérald DARMANIN se dit choqué, il dit " Non, Marine Le PEN, il faut la combattre dans les urnes. " Et vous ?
NICOLAS DARAGON
Vous savez, je suis aux côtés de Bruno RETAILLEAU, au ministère de l'Intérieur, depuis maintenant quelques semaines et je prône la sévérité, les interpellations et j'attends que la Justice condamne. Je ne vais pas avoir de discours selon qu'on est faible ou puissant. Il faudrait qu'on soit traité différemment par la Justice. Évidemment que c'est une difficulté que nous n'ayons pas la candidate attendue, mais je ne doute pas que les partis politiques savent s'organiser pour proposer d'autres candidatures si jamais c'était le cas. En tout cas, il ne peut pas y avoir une Justice à deux vitesses. Il faut que la Justice soit - pardon de se répéter ainsi - mais il faut que la Justice soit juste. Voilà, il faut qu'elle soit équilibrée.
CHRISTOPHE BARBIER
Le Gouvernement des juges, ça ne vous fait pas peur ?
NICOLAS DARAGON
Le Gouvernement des autorités administratives indépendantes me fait plus peur que le Gouvernement des juges. Les juges appliquent la loi. Je ne suis pas un membre de l'exécutif qui va venir critiquer les décisions de Justice.
CHRISTOPHE BARBIER
Un dernier mot, la France n'ira pas en Azerbaïdjan pour la COP29. Vous vous en réjouissez ?
NICOLAS DARAGON
Vous savez qu'à Valence, il y a 10% de la population qui est d'origine arménienne.
CHRISTOPHE BARBIER
C'est pour ça que je vous pose la question.
NICOLAS DARAGON
…que c'est un sujet que je connais bien. Et qu'en effet, je trouve qu'un dictateur qui emprisonne d'anciens dirigeants, notamment du Haut-Karabagh, n'est pas quelqu'un de respectable. Que l'agression et l'annexion de l'Artsakh ou du Haut- Karabagh est une vraie difficulté. A titre personnel, je ne m'exprime surtout pas au titre du Gouvernement, oui, je pense que ça aurait été une erreur de se rendre en Azerbaïdjan pour soutenir monsieur ALIYEV.
CHRISTOPHE BARBIER
Nicolas DARAGON, merci beaucoup et bonne journée.
NICOLAS DARAGON
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 20 novembre 2024