Texte intégral
APOLLINE DE MALHERBE
Et dans un instant, le premier invité de la matinale, l'invité de 7 h 40, c'est vous, François DUROVRAY, bonjour,
FRANÇOIS DUROVRAY
Bonjour,
APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes ministre des transports. La neige, la grève à la SNC, grosse journée que vous commencez donc sur RMC. Et puis tiens, il y a les taxes, quand même, sur les voitures, sur les avions. Est-ce que vous vous sentez visés par les critiques de votre collègue de l'économie qui dit : " Attention à l'impôt de trop " ? Vous allez nous répondre dans un instant.
(…)
APOLLINE DE MALHERBE
Il est 7 h 42. Excellent réveil sur RMC et mon premier invité ce matin, c'est vous. François DUROaUVRAY, bonjour.
FRANÇOIS DUROVRAY
Bonjour,
APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes le ministre des transports. Beaucoup de questions à voir avec vous, mais finalement, il y en a deux qui, en quelque sorte se catapulte, aujourd'hui, c'est la neige d'un côté et la grève SNCF de l'autre. Quand on vit, aujourd'hui, en grande banlieue parisienne, qu'il neige, qu'on se dit : " C'est justement un jour où je ne vais pas prendre ma voiture ", et qu'on doit prendre le RER D qui est en grève. Honnêtement, comment est-ce possible ? Quel regard vous portez sur la grève qui est maintenue, aujourd'hui, par une partie des agents SNCF ?
FRANÇOIS DUROVRAY
J'en appelle à la responsabilité, la responsabilité des agents de la SNCF. Je pense que personne ne comprend, aujourd'hui, que ça dit grève. Personne ne comprend, d'abord, que le principe même de la grève soit fixé avant que le dialogue ait eu lieu. Et puis ensuite, personne ne comprend la grève parce que tout le monde a compris que, s'agissant du fret, il y a une reconnaissance et un travail qui a été fait pour assurer le développement du fret dans notre pays et que, s'agissant des salaires, il y a des négociations qui sont en cours, mais que les agents de la SNCF bénéficient de la bonne santé de leur entreprise.
APOLLINE DE MALHERBE
Ils bénéficient de la bonne santé de leur entreprise. On va y revenir dans un instant sur la question des augmentations, mais d'abord, en effet, sur la situation, d'abord de la neige, plus de la moitié du pays est en vigilance orange pour neige, verglas et vents violents. Il y a la Mayenne et quatre autres départements normands qui, eux, n'ont plus de transport scolaire. Qu'est-ce que vous dites à ceux qui, donc, vont se retrouver à prendre la route pour emmener leurs enfants eux-mêmes à défaut de cars scolaires ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Moi, j'appelle à la prudence. On a un épisode neigeux, ce qui est assez normal à cette époque de l'année, avec d'abord des équipes qui sont très mobilisées. Les agents de l'Etat, ce sont 7 000 personnes, 2 000 véhicules. Je voudrais, également, saluer l'engagement des agents des départements, des communes qui déneigent l'ensemble des routes. Et puis évidemment, lorsqu'on est automobiliste, qu'on doit prendre la route, il y a un appel à la prudence, à la vigilance. Il y a des mesures qui sont prises d'interdiction de transport scolaire, de limitation de la vitesse, d'interdiction de dépassement pour les poids lourds. J'invite vraiment chacun à respecter les règles du jeu.
APOLLINE DE MALHERBE
Perturbations du trafic SNCF également à Bordeaux et dans la région de Bordeaux en raison du vent. Cette fois-ci, il y a de nombreux TER qui ne circuleront pas. La reprise n'est prévue que demain à midi. Est-ce qu'il y a des plans B ? Pour l'instant, on nous dit qu'il n'y a pas de bus.
FRANÇOIS DUROVRAY
Non, malheureusement, lorsqu'il y a ce genre d'épisodes, encore une fois, ce qui compte, c'est la sécurité des usagers, c'est la prudence. Évidemment, j'ai une pensée pour tous les Français qui vont être pénalisés, aujourd'hui, soit par ces événements météorologiques, soit par la grève. On a heureusement, aujourd'hui, des capacités de télétravail, mais ça ne concerne pas tout le monde. Et encore une fois, je pense à tous les Français qui sont impactés.
APOLLINE DE MALHERBE
La concomitance, en effet, avec la grève SNCF. Hier, la direction a proposé une augmentation de salaire de 2,2% aux cheminots. C'est donc plus que l'inflation. Il y a quatre syndicats qui ont déposé un préavis de grève illimitée à partir du 11 décembre, dont SUD-Rail qui dit déjà que 2,2% ce n'est pas assez. Vous estimez, vous l'avez dit en début de cette interview, que c'est irresponsable ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Je constate, simplement, qu'on a une inflation qui est revenue à 1,5%, que la proposition de la direction est, aujourd'hui, supérieure à l'inflation, ce qui veut dire une amélioration des pouvoirs d'achat qui est liée à la bonne santé de l'entreprise et, encore une fois, j'appelle à la responsabilité, les agents de la SNCF et leurs organisations syndicales parce qu'aucun Français ne comprendrait d'être pénalisé, d'être bloqué au mois de décembre, de ne pas avoir des difficultés pour aller travailler, de ne pas pouvoir retrouver les familles à l'occasion des fêtes de Noël et aujourd'hui…
APOLLINE DE MALHERBE
Est-ce qu'il faut aller jusqu'à encadrer ce droit de grève ? Je sais que certains au sein de votre Gouvernement l'envisagent. Marc FERRACCI qui est le ministre de l'Industrie, Bruno RETAILLEAU qui est le ministre de l'Intérieur, regardez un peu du côté de l'Italie, quand on voit que là-bas il y a interdiction de faire grève, notamment justement sur la période des fêtes, des moments un peu cruciaux pour le déplacement des Italiens. C'est possible, ça, c'est envisageable ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Alors d'abord, je vais vous dire, il y a une mesure qui est très simple et que j'ai demandé au président de la SNCF d'appliquer, c'est que les négociations salariales, elles ne se feront pas au mois de décembre. Désormais, elles se feront au début de l'année.
APOLLINE DE MALHERBE
D'accord.
FRANÇOIS DUROVRAY
C'est la première des choses.
APOLLINE DE MALHERBE
Donc ça, le fait que, depuis des années, effectivement les négociations soient avant Noël et donc encouragent régulièrement…
FRANÇOIS DUROVRAY
On ne peut pas vivre sous la menace, effectivement, d'une grève qui pénalise les Français au moment où les Français ont besoin de se retrouver.
APOLLINE DE MALHERBE
C'est fou d'ailleurs. Ça veut dire que vous vous dites, vous vous dites : " En fait, bon bah quand il y a négo, il y a grève, donc on va juste déplacer la négo pour déplacer la grève ".
FRANÇOIS DUROVRAY
Mais écoutez, enfin moi il y a un moment, encore une fois, moi, je suis très attaché au dialogue social et je suis très attaché à ce que les salariés puissent être représentés par leur syndicat. Après, il faut que tout le monde, encore une fois, soit responsable.
APOLLINE DE MALHERBE
En revanche, encadrer le droit…
FRANÇOIS DUROVRAY
Ensuite sur le service minimum, moi, je constate que notre constitution organise le droit de grève et c'est normal. Mais notre constitution fixe aussi un autre principe, c'est celui de la continuité du service public. Et lorsqu'on est agent du service public, on a cette responsabilité, cette fierté de faire fonctionner un service essentiel à la vie du pays. Donc je ne pense pas que ce soit un sujet qui se traite à chaud. Mais en revanche, la question du service minimum, évidemment, se pose. Il y a déjà eu des travaux qui ont été faits au Sénat. On verra s'ils ont vocation à prospérer.
APOLLINE DE MALHERBE
François DUROVRAY, vous qui êtes ministre des Transports, deux points sur lesquels je voudrais revenir dans le budget qui, en ce moment est discuté. On a un peu du mal à le trouver lisible. On n'arrive plus à très bien le savoir. Il y a des taxes qui sont rajoutées, il y en a d'autres qui sont enlevées un peu au fur et à mesure des discussions budgétaires. Mais il y a deux points en particulier, un, sur la taxe de solidarité sur le secteur aérien, la compagnie aérienne RYANAIR a dit : " Si c'est comme ça, c'est plus viable économiquement, j'enlève mes avions, tant pis pour les passagers ". Et ils menacent de retirer leurs avions d'une dizaine d'aéroports français. Qu'est-ce que vous leur répondez ?
FRANÇOIS DUROVRAY
D'abord, qu'on est assez habitué au coup de ce monstre du patron de RYANAIR, qu'il ne met pas exécution tout simplement parce qu'en France, cette compagnie gagne bien sa vie et que les mesures qui sont proposées ne vont pas impacter le modèle de RYANAIR, puisque ce n'est pas la compagnie qui elle-même paiera ses taxes. Donc voilà, encore une fois, on est assez habitué à cette démarche.
APOLLINE DE MALHERBE
Donc ça ne vous impressionne pas plus que ça ?
FRANÇOIS DUROVRAY
Non, ça ne m'impressionne pas plus que ça. Vous avez dit, sur le budget, il y a quand même une ligne, cette ligne est de lutter contre la dette.
APOLLINE DE MALHERBE
Enfin, à la fin, ce n'est pas seulement RYANAIR, c'est aussi les usagers. Ça veut dire qu'il y a un certain nombre d'aéroports qui sont des aéroports qui ne sont d'ailleurs pas forcément les mieux desservis. Et donc, un certain nombre de personnes qui habitent dans ces coins-là sont assez contentes que RYANAIR soit là. Ils vont, ils risquent de…
FRANÇOIS DUROVRAY
Oui, et d'ailleurs, je constate que RYANAIR bénéficie de subventions publiques pour ses dessertes dans la plupart des cas. Donc, encore une fois, on est dans un moment qui est compliqué, avec une dette qui est importante. Et la ligne de ce budget, c'est de ramener la dette. C'est le Premier ministre qui nous le demande et qui demande à tous les ministres de faire des efforts.
APOLLINE DE MALHERBE
Oui, mais maintenant, vous avez aussi le ministre de l'Économie qui dit " Attention à l'impôt total ".
FRANÇOIS DUROVRAY
Mais attendez, d'abord, on est issus de familles politiques différentes et c'est normal que chacun exprime sa sensibilité.
APOLLINE DE MALHERBE
Enfin, ça fait un peu de cacophonie, quand même.
FRANÇOIS DUROVRAY
À titre personnel, j'estime qu'on doit le faire en famille et on ne doit pas l'exprimer forcément à l'extérieur.
APOLLINE DE MALHERBE
Alors, ça, c'est un petit coup, quand même, pour Antoine ARMAND qui, effectivement, s'exprime.
FRANÇOIS DUROVRAY
C'est une personnalité avec qui je travaille en très bonne intelligence. Simplement, il parle d'une taxe qui est payée par les entreprises, le versement mobilité. S'il y a un impôt qui est utile aux entreprises, c'est bien celui-ci. Pourquoi ? Parce que moi, les chefs d'entreprise, je les connais aussi. Les chefs d'entreprise, ils savent très bien qu'ils ont du mal à embaucher parce que leurs salariés n'arrivent pas à venir travailler dans l'entreprise et ils ont besoin de transport public. Les chefs d'entreprise, ils savent très bien que lorsqu'on permet à des salariés d'abandonner la voiture qui coûte très cher au bénéfice de transport public, c'est la meilleure mesure de pouvoir d'achat. Donc,…
APOLLINE DE MALHERBE
Vous défendez l'impôt sur la mobilité, cette taxe sur la mobilité que paient les entreprises.
FRANÇOIS DUROVRAY
Qui existe, qui est payée par les entreprises depuis très longtemps et qui bénéficie aux entreprises parce qu'encore une fois, les salariés, beaucoup de salariés auraient du mal à aller travailler sans ces transports publics.
APOLLINE DE MALHERBE
On vous sent assez remonté contre le fait que le ministre de l'économie fasse cette semence.
FRANÇOIS DUROVRAY
Je défends tout simplement, ce n'est pas la semence contre le ministre des transports, c'est simplement le ministre des transports qui défend un principe qui me semble très important. Au moment où on a, à la fois des mesures écologiques à prendre et le transport public, c'est une mesure écologique, mais aussi une mesure de pouvoir d'achat. Encore une fois, 10 millions de Français, aujourd'hui, font plus de 50 kilomètres par jour en voiture, du coût pour l'automobiliste…
APOLLINE DE MALHERBE
Vous le voyez comme une mesure de pouvoir d'achat à moyen terme, lui, le voit comme un impôt à court terme.
FRANÇOIS DUROVRAY
Mais si vous me permettez d'aller jusqu'au bout de mon raisonnement, 10 millions de Français pour qui la voiture, c'est plus de 500 euros par mois. Est-ce que pour ces Français-là qui n'ont pas de transport public, on n'a pas une responsabilité collective d'offrir un transport public et de leur permettre de diviser par 10 leurs coûts de la mobilité ? Ça, c'est la vraie mesure écologique, sociale d'amélioration du pouvoir d'achat. Et donc allons-y, les présidents de régions, les présidents de métropoles sont prêts à y aller. Moi, je suis aussi sur le terrain, ils ont envie de développer de l'offre, donc on doit les accompagner. Et les entreprises sont gagnantes au même titre que leurs salariés.
APOLLINE DE MALHERBE
Et pour ça, il faudra que les entreprises commencent par payer, mais elles seront gagnantes à l'issue de cela. Merci François DUROVRAY d'avoir donc défendu en quelque sorte cette taxe mobilité.
FRANÇOIS DUROVRAY
Merci à vous.
APOLLINE DE MALHERBE
Vous qui êtes le ministre des Transports, ce qu'on retient aussi, c'est votre appel à la responsabilité des syndicats de la SNCF.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 25 novembre 2024