Texte intégral
Q - Jean-Noël Barrot, bonjour.
R - Bonjour.
Q - Vous êtes ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Il y a quelques mois, vous n'étiez qu'à l'Europe, maintenant vous avez le monde, j'allais dire, sous votre responsabilité. L'Ukraine, justement. Cette semaine, la Russie a tiré un nouveau missile hypersonique vers l'Ukraine, en réponse aux Etats-Unis qui ont autorisé l'armée ukrainienne à utiliser des missiles à longue portée pour attaquer la Russie. Les Américains ont également livré des mines antipersonnel. Vladimir Poutine, dans une déclaration solennelle jeudi, a mis en garde contre un risque de guerre mondiale. Le président russe a dit qu'il n'exclut pas de frapper les pays occidentaux. Alors, première question : est-ce qu'il faut prendre les menaces de Vladimir Poutine au sérieux ?
R - Vladimir Poutine nous a habitués depuis deux ans et demi - tout le monde l'a entendu, tous les Français l'ont entendu - à agiter une rhétorique escalatoire, et même une rhétorique nucléaire, pour susciter de l'inquiétude auprès des alliés de l'Ukraine. Alors, ne nous laissons pas intimider et rappelons à Vladimir Poutine qu'il doit tenir son rang, qu'il doit se hisser au niveau de ses responsabilités de pays membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, de pays doté de l'arme nucléaire et qui donc a une responsabilité dans la stabilisation de l'ordre international, alors que là, il se comporte depuis deux ans et demi - et singulièrement depuis quelques jours - comme un agent déstabilisateur.
Q - Alors la France, de son côté, va-t-elle autoriser l'Ukraine à utiliser des missiles français pour viser la Russie ?
R - Le Président de la République, au mois de mai dernier, lorsqu'il s'est rendu en Allemagne, a exprimé très clairement que l'Ukraine doit pouvoir neutraliser des cibles militaires en Russie lorsque ces cibles permettent à la Russie d'agresser les Ukrainiens. C'est un principe de légitime défense et il est reconnu par le droit international.
Q - Et même avec des missiles, s'il le faut ?
R - Même avec des missiles s'il le faut.
Q - Ça veut dire que la France vend des missiles ou livre des missiles à l'Ukraine ?
R - Nous assumons une certaine ambiguïté stratégique, c'est-à-dire que...
Q - Vous ne dites pas tout.
R - Nous ne disons pas tout. Nous ne fixons pas de ligne rouge par avance et nous ne disons pas ce que nous faisons ou ce que nous ne faisons pas.
Q - Mais ce que vous avez dit très clairement là, c'est que s'il doit y avoir des missiles français utilisés de la part de l'Ukraine pour viser la Russie, il n'y a pas d'interdiction.
R - Je vous renvoie aux propos du Président de la République au mois de mai dernier. La ligne de la France n'a pas changé.
Q - Donc c'est la même [ligne] que je viens de résumer ?
R - C'est la ligne que le Président a exprimée et que je vous ai réitérée à l'instant.
Q - Volodymyr Zelensky, lui, demande du renfort militaire en plus. Est-ce que la France va y participer ?
R - Absolument, parce que c'est notre intérêt. Il y a dix jours, je me suis rendu dans l'un de nos camps militaires avec Sébastien Lecornu, ministre des armées, pour rendre visite aux 2.300 soldats ukrainiens qui ont été formés et équipés dans notre pays. C'est la première fois que nous formons une brigade complète de soldats étrangers depuis la Première Guerre mondiale.
Q - Et opérationnels...
R - Ces soldats vont rentrer en Ukraine dans quelques jours pour regagner le front, armés par des équipements français. Et puis dans quelques semaines...
Q - Ça veut donc dire qu'il y aura des troupes françaises au sol ?
R - Ce sont des soldats ukrainiens que nous venons de former...
Q - D'accord, mais est-ce qu'il y aura aussi à côté d'eux...
R - ...qui ont été formés et équipés avec du matériel français.
Q - Il y aura aussi, à côté d'eux, des Français au sol ?
R - Et dans quelques semaines, c'est le Mirage français qui volera dans le ciel de l'Ukraine, conformément aux engagements qu'Emmanuel Macron a pris devant le président Zelensky au mois de juin dernier.
Q - On va parler du Proche-Orient. Israël poursuit ses bombardements au Liban. Hier, à Beyrouth, un immeuble résidentiel a été détruit, faisant plus de 50 morts. L'ambition, c'est, de la part d'Israël, de détruire le Hezbollah, considéré comme l'un des ennemis d'Israël, au même titre que le Hamas. La position de la France, c'est le cessez-le-feu, que ce soit à Gaza ou au Liban. Vous le répétez régulièrement, vous aussi, à l'Assemblée nationale. Mais pour l'instant, ça n'a aucune conséquence. Qui peut influencer, faire entendre raison à Benyamin Netanyahou ?
R - Depuis deux mois, depuis le début de cette incursion terrestre israélienne au Liban - qui provoque, dans ce pays déjà si fragile, des conséquences très lourdes et qui me préoccupe très vivement -, nous avons, avec nos partenaires américains, proposé une formule pour que cesse le feu, mais aussi pour que, durablement, la paix puisse revenir au Liban, que la souveraineté du Liban puisse être garantie, de même que la sécurité d'Israël, et pour que les déplacés des deux côtés, les personnes qui ont dû quitter leur foyer à cause des hostilités, puissent y rentrer.
Q - Sauf que rien ne change.
R - Je constate qu'après de nombreux échanges avec toutes les parties en présence, une fenêtre d'opportunité est en train de s'ouvrir, et j'appelle toutes les parties à s'en saisir.
Q - Pourquoi ? Qu'est-ce qui a changé ? Quelle est cette fenêtre d'opportunité ?
R - C'est qu'à force de diplomatie, à force de travailler, avec les parties en présence, sur les paramètres qui permettent d'assurer à la fois la sécurité d'Israël mais aussi l'intégrité territoriale du Liban, nous sommes, je crois, en train de parvenir à une solution qui peut être acceptable par toutes les parties et qu'elles doivent saisir, pour que le feu cesse et pour que la catastrophe humanitaire cesse également.
Q - Et qui peut aboutir à cesser le feu... Je vous trouve optimiste.
R - Je suis prudent. Je constate juste qu'une fenêtre d'opportunité est en train de s'ouvrir.
Q - Donc ça voudrait dire que ça pourrait être rapide ?
R - Il appartient aux belligérants de s'en saisir.
Q - Et Benyamin Netanyahou en premier lieu, non ?
R - Bien sûr.
Q - Mais est-ce que... Justement, jusqu'à maintenant, ça n'a eu aucun effet, les rappels à l'ordre ? C'est pour ça que je dis que je vous trouve optimiste.
R - Je ne vous parle pas de rappel à l'ordre, Francis Letellier.
Q - D'accord.
R - Je vous parle d'une formule permettant le cessez-le-feu et plus durablement, dans le long terme, la stabilisation du Liban et la sécurité dans le sud du pays. C'est cela, sur quoi nous avons travaillé. Et nous nous en sommes donnés les moyens, puisque vous savez qu'un mois après le début de ces opérations terrestres, c'est-à-dire il y a un mois jour pour jour, nous avons accueilli à Paris la première conférence internationale de soutien au Liban, où nous avons levé plus d'un milliard de dollars, dont 800 millions pour l'aide humanitaire aux populations déplacées et 200 millions pour le renforcement des forces armées libanaises, qui joueront un rôle décisif pour faire appliquer le cessez-le-feu - et durablement - pour garantir la sécurité du sud du pays.
Q - À propos de Benyamin Netanyahou toujours ; la Cour pénale internationale a lancé des mandats d'arrêt contre lui, le Premier ministre israélien, et son ex-ministre de la Défense, Yoav Gallant, pour crimes de guerre, de famine comme méthode de guerre, ainsi que des crimes contre l'humanité, de meurtre, de persécution, d'actes inhumains. Que va faire la France ? Est-ce que la France va respecter à la lettre la décision de la Cour pénale internationale ?
R - D'abord, il faut rappeler ce que c'est que cette décision. C'est la formalisation d'une accusation. Ça n'est pas un jugement, à ce stade. La France est très attachée à la justice internationale et très attachée à ce que la Cour pénale internationale puisse travailler en toute indépendance. Et ce que nous disons depuis toujours, c'est qu'Israël a le droit de se défendre, dans le respect du droit international. Et chaque fois qu'Israël a violé le droit international - en privant les populations d'accès à l'aide humanitaire, en bombardant les populations civiles, en organisant des déplacements forcés de populations ou en incitant la colonisation de la Cisjordanie - nous l'avons dénoncé et nous l'avons condamné avec la plus grande fermeté.
Q - Donc vous donnez raison à la Cour pénale internationale ?
R - Je ne me substitue, en aucun cas, à la Cour pénale internationale.
Q - Non mais quand vous dites : "quand il y a des circonstances, il faut que ce soit condamné." Donc la Cour pénale internationale a condamné ce que vous dites là ?
R - La Cour pénale internationale a émis un mandat d'arrêt, qui est la formalisation d'une accusation qui est portée à certains responsables politiques israéliens.
Q - Si Benyamin Netanyahou vient en France, il sera arrêté ?
R - La France appliquera toujours le droit international.
Q - Donc il sera arrêté, s'il vient en France ?
R - C'est une question hypothétique, à laquelle je ne vais pas répondre tant qu'elle est hypothétique.
Q - Mais sur le fond, sur l'idée, si Benyamin Netanyahou devait venir en France, il serait arrêté ?
R - Je peux revenir sur le fond si vous voulez. Notre position est claire, elle est constante. La position du Gouvernement français, qui joint toujours les actes à la parole, consiste à dire qu'Israël a le droit de se défendre dans le respect plein et entier du droit international...
Q - Mais que la France applique aussi les décisions de la Cour pénale internationale ?
R - La France applique toujours le droit international.
Q - La COP29 qui s'est terminée - sur le climat - cette nuit en Azerbaïdjan. 300 milliards par an pour les pays les plus pauvres afin de les aider à s'adapter aux inondations, canicules notamment, et pour les aider à investir dans des industries moins polluantes. Pour la ministre de la transition écologique, ce n'est pas assez, c'est même un échec. Elle parle du point de vue, j'allais dire, écologique. Vous, du point de vue diplomatique, qu'est-ce que vous en retenez de cette COP29 ?
R - Je retiens qu'il y a eu des progrès, mais qu'Agnès Pannier-Runacher a raison de dire que le résultat est décevant, que nous devons faire beaucoup plus parce que les conséquences du dérèglement climatique, nous les vivons désormais au quotidien. Regardez les inondations dévastatrices en Espagne et, quelques semaines plus tôt, celles que nous avons connues dans certaines régions de France. Il nous faut donc agir beaucoup plus et beaucoup plus fort. Et c'est pourquoi nous nous projetons avec beaucoup d'ambition et beaucoup de résolution sur l'année 2025, qui sera la COP de...
Q - COP30 au Brésil.
R - COP30 à Belém, au Brésil, qui sera marquée par le 10e anniversaire de l'Accord de Paris qui a été signé dans notre pays et grâce à la diplomatie française. Et ce sera aussi l'occasion pour nous, à Nice, au mois de juin, d'accueillir la très grande Conférence des Nations unies sur l'Océan, qui a vocation à être pour l'Océan ce que l'Accord de Paris a été pour le climat.
Q - Les agriculteurs français manifestent depuis plusieurs jours et d'autres actions sont attendues la semaine prochaine. Ils craignent l'arrivée en masse de produits d'Argentine ou du Brésil si le Mercosur est signé, en plus de leurs problèmes quotidiens.
(...)
Q - Jean-Noël Barrot, on voit la ministre de l'agriculture, Annie Genevard, aux avant-postes sur le Mercosur pour répondre aux agriculteurs. Mais le Mercosur, ce n'est pas que l'agriculture. Faut-il tout bloquer, tout le Mercosur, pour sauver l'agriculture ?
R - Personne ne peut rester sourd à la détresse - que nous avons entendue dans votre reportage - des agriculteurs, qui n'en peuvent plus de la bureaucratie qui pèse sur leurs épaules et de la concurrence déloyale des importations qui viennent d'ailleurs. Alors oui, il nous faut un accord avec ces pays du Mercosur pour que nos agriculteurs, nos industriels, nos entreprises puissent y exporter leur production. Mais non, nous n'acceptons pas le traité en l'état. Et je vais même aller un petit peu plus loin. Le Mercosur aurait pu être signé il y a belle lurette. Si cela n'a pas été le cas, c'est parce que le Président de la République a pesé de tout son poids dans la balance. Et aujourd'hui, le Gouvernement est pleinement mobilisé. Vous avez entendu la ministre de l'agriculture, le Premier ministre, qui s'est rendu lui-même à Bruxelles pour rencontrer la présidente de la commission. Et ce que je constate, c'est que nous ne sommes plus si isolés que cela puisque certains pays européens commencent à se rapprocher de nos positions.
Q - Lesquels ?
R - Vous en avez cité certains dans l'entretien précédent.
Q - Non mais c'est-à-dire ? Lesquels ?
R - L'Italie se pose des questions, la Pologne se pose des questions. Mais ce qui est très nouveau, c'est que nous avons entendu aujourd'hui la présidente du Parlement européen...
Q - Roberta Metsola.
R - ...exprimer la nécessité absolue de se laisser du temps pour préserver les intérêts des agriculteurs. Et puis le Président de la République, qui était la semaine dernière en Argentine, a pu entendre de la part de Javier Milei, le Président de l'Argentine, ses réserves, lui aussi, sur certaines dimensions.
Q - Donc vous dites que ce ne sera pas signé du jour au lendemain, cette histoire ?
R - Il faut le retravailler, de toute évidence.
Q - Et on peut se donner du temps pour ça, des années ?
R - Je crois que c'est important.
Q - Mardi aura lieu à l'Assemblée nationale et au Sénat un débat sur le Mercosur, avec probablement une unanimité contre. Qu'est-ce que ça changera à vos yeux, cette unanimité de la représentation nationale ?
R - D'abord, c'est toujours sain et naturel que nous puissions débattre des questions de commerce international au Parlement. Ensuite, ce que ça démontrera, c'est l'unanimité des Français derrière leurs agriculteurs. La France refusera toujours que l'agriculture soit une variable d'ajustement.
Q - En attendant, il y a un autre dossier qui va revenir, c'est l'immigration. En Europe et en France, c'est un sujet central. Et fin janvier, Bruno Retailleau veut relancer une loi, avec notamment l'automaticité du droit du sol qui serait remis en cause, qui durcit les conditions d'obtention des titres de séjour et qui met fin à l'aide médicale d'Etat -j'insiste là-dessus parce que ça fait débat au sein du socle central. Vous êtes du MoDem vous-même. Pour vous, d'abord, est-ce que cette loi est une urgence ?
R - Je crois que la priorité des priorités, c'est d'appliquer les textes que nous avons déjà adoptés.
Q - Donc, il n'y a pas d'urgence ?
R - En janvier dernier, on a adopté une loi sur l'immigration. Il faut que nous puissions prendre les décrets, et je dois en prendre ma part. C'est-à-dire que nous devons prendre les textes qui permettent à la loi d'être appliquée.
Q - Donc il n'y a pas d'urgence à faire une autre loi ?
R - Nous avons, au mois de juin, adopté un pacte, une série de lois européennes sur l'immigration. Il faut commencer par les appliquer.
Q - Donc il n'y a pas besoin d'une autre loi pour l'instant, si je vous entends ?
R - Ça sera au Premier ministre d'en décider le moment venu, mais faisons les choses dans l'ordre.
Q - Et l'aide médicale d'Etat, vous, à titre personnel, vous pensez qu'il faut la supprimer ?
R - Commençons par appliquer les lois que nous nous sommes données, les outils que nous avons cherché à obtenir pour mieux gérer cette politique et faire en sorte qu'elle soit à la hauteur des attentes des Français.
(...)
Q - Jean-Noël Barrot, vous réagissiez tout à l'heure en regardant le reportage, en vous voyant quelques années avant. Vous disiez que quand vous étiez candidat sur une liste aux européennes, c'était la liste de Michel Barnier, à l'époque ?
R - La première campagne électorale à laquelle j'ai participé, c'était sur la liste de Michel Barnier en 2009, pour les élections européennes.
Q - Un Président omniprésent à l'international. Cette semaine, l'ambassadeur de France en Haïti a été convoqué après les propos d'Emmanuel Macron, captés en marge du G20 au Brésil, concernant la situation politique en Haïti.
(...)
Q - L'ambassadeur français a reconnu que les propos étaient malheureux, pour le moins.
R - Dans la période que nous vivons, où la situation est grave - la guerre est à nos portes, la planète est en ébullition, la Chine et les Etats-Unis nous prennent de vitesse, la démocratie est attaquée de toutes parts par des ennemis, à l'intérieur comme à l'extérieur - et nous, nous nous regardons le nombril et nous passons du temps sur des controverses de second ordre. Ce que je retiens, s'agissant d'Haïti, c'est le discours très clair qui a été celui du Président de la République et qui a exprimé, une nouvelle fois, notre soutien aux Haïtiens, à la population haïtienne, qui est un soutien très concret, en matière humanitaire mais aussi en matière sécuritaire.
Q - On revoyait aussi les images de l'incident il y a quinze jours à peu près à Jérusalem, où des gendarmes français qui ont encadré votre déplacement ont été arrêtés par la police israélienne. Est-ce que ça reste un épisode traumatisant pour vous, ça ?
R - C'est un épisode qui ne doit certainement pas se reproduire.
Q - C'est sûr. Mais vous aviez la voix blanche, on vous entendait. C'était traumatisant, à ce moment-là ?
R - Ce qui m'a choqué profondément, ce n'est pas tant le sort qui était réservé à moi-même, mais plutôt celui qui a été réservé à nos gendarmes. Mais le plus important, c'est que cet incident ne se reproduise pas. Et c'est dans ce sens que j'ai engagé des discussions avec mon homologue, le ministre des affaires étrangères d'Israël, pour que nous puissions nous mettre d'accord sur un protocole pour que, lorsque des autorités françaises sont en déplacement à Jérusalem et se rendent dans les domaines qui sont placés sous la responsabilité et la protection de la France, elles puissent le faire en toute sécurité, sans que ces incidents n'aient à se reproduire.
Q - Les députés ont voté, cette semaine, pour une proposition de la France insoumise de créer un groupe d'amitié France-Palestine. Êtes-vous favorable à ce groupe d'amitié France-Palestine ?
R - C'est une décision du Parlement, de l'Assemblée nationale...
Q - Oui, mais philosophiquement ?
R - Je suis trop respectueux de l'institution pour émettre un jugement. Par définition, si l'Assemblée nationale a pris cette décision, c'est une décision démocratique et je la respecte.
Q - Il peut vous aider, ce groupe d'amitié France-Palestine, en tant que ministre des affaires étrangères ? Ça peut créer des liens ?
R - En tout cas, je travaillerai avec ce groupe - comme avec tous les autres groupes - parce que la diplomatie, elle ne se fait pas qu'au Quai d'Orsay. Elle se fait aussi par l'action décisive des parlementaires, députés et sénateurs, des commissions des affaires étrangères, mais aussi des groupes d'amitié qui, au quotidien, se rendent dans les pays pour passer un certain nombre de messages. C'est une dimension très importante de notre politique étrangère.
Q - Donc bienvenue. Gabriel Attal a écrit Il y a Yaël Braun-Pivet, la présidente de l'Assemblée nationale, pour dire qu'il était contre ce groupe parce que, dit-il, entre autres, la France ne reconnaît pas l'Etat de Palestine. Donc est-ce qu'il faut que la France reconnaisse rapidement l'Etat de Palestine ?
R - Nous avons toujours dit que nous le ferions le moment où, par des reconnaissances mutuelles, des garanties de sécurité, nous pourrions participer à construire cette solution politique, la seule susceptible de ramener la paix et la sécurité et la stabilité dans la région, celle qui repose sur deux Etats, un Etat d'Israël et un Etat de Palestine, vivant côte à côte, en paix et en sécurité.
(...)
Q - On va parler d'Elon Musk, propriétaire de X, ex-Twitter, accusé de désinformation, de mener des campagnes de harcèlement en ligne, proche de Donald Trump. Quand vous étiez ministre en charge du numérique - c'était aussi l'un de vos postes avant -, vous aviez menacé de faire interdire Twitter dans l'Union européenne. Est-ce qu'on s'en approche ?
R - Non, je n'ai pas menacé de faire interdire Twitter.
Q - Vous avez dit si...
R - Non. J'ai constaté que nous avions pris, en Europe, des lois qui imposent certaines obligations aux réseaux sociaux - et c'est heureux - et que si les réseaux sociaux ne les respectent pas, alors ils peuvent être bloqués. Et je vois un certain nombre de personnalités, des médias ou politiques, qui disent : "je quitte Twitter". Moi, ma réponse, elle est claire : ce n'est pas à nous de quitter Twitter, c'est à Twitter de quitter l'Europe si Twitter ne sait pas respecter les règles que nous lui avons fixées.
Q - Et puis parce que quand on est ministre ou homme politique, c'est difficile de se passer de Twitter, aussi ?
R - Il y a d'autres réseaux sociaux.
Q - Oui, mais c'est une vraie force de frappe.
R - Il y a d'autres réseaux sociaux. L'idée n'est pas de se satisfaire de ce qu'est devenu Twitter. La Commission européenne a désormais des leviers, l'Europe a désormais des leviers pour imposer un certain nombre de règles sur Twitter. Si elles ne sont pas respectées, alors Twitter pourrait être banni de l'Union européenne.
Q - Donc vous confirmez. Je voudrais vous parler de Boualem Sansal, l'écrivain franco-algérien, prix Goncourt. On n'a plus de nouvelles de lui depuis plusieurs jours. Selon son éditeur, il a été arrêté à l'aéroport d'Alger. Est-ce que vous êtes inquiet ?
R - Le Président de la République a exprimé sa vive préoccupation. Je la partage. De très nombreux Français la partage. C'est pourquoi les services de l'Etat sont mobilisés, à tous les étages, et que nous suivons - je suis personnellement - sa situation, d'heure en heure.
Q - C'est la seule réaction, parce que pour l'instant il y a eu silence radio de la part des autorités de l'Etat. Donc vous dites, vous : "C'est suivi, minute par minute" ?
R - Vous me réinviterez si vous le souhaitez pour que je puisse commenter, le moment venu.
Q - Merci, Jean-Noël Barrot, d'avoir accepté notre invitation.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 26 novembre 2024