Texte intégral
CHRISTOPHE BARBIER
Charlotte PARMENTIER-LECOCQ.
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
Bonjour, Christophe BARBIER.
CHRISTOPHE BARBIER
Et bienvenu. Vous êtes ministre déléguée donc, Chargée des personnes en situation de handicap, vous êtes aussi élue du Nord.
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
Oui, je le revendique haut et fort.
CHRISTOPHE BARBIER
Très attachée, sixième circonscription du Nord. On a appris que Donald TRUMP serait à Paris pour la réouverture de Notre-Dame, première visite à l'étranger du président élu, comme on l'appelle, il vient pour faire une belle photo ou c'est un signe de considération ?
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
Je crois que ça va être un événement très important au plan mondial et puis bon, c'est aussi un événement peut-être qui dépasse toutes les questions politiques.
CHRISTOPHE BARBIER
La présence de TRUMP quand même, c'est une présence fortement marquée de distance avec l'Europe, de conflits commerciaux, est-ce qu'il faut en profiter pour faire la politique ?
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
Sans doute, pour garder des liens très importants et il y en aura toujours, je crois avec les États-Unis qui sont un partenaire diplomatique, économique et autres, et militaire aussi, important, donc oui, je crois que c'est important de garder des relations, qu'il y a toujours eu finalement entre les États-Unis et la France.
CHRISTOPHE BARBIER
Même quand on est un peu fâché, c'est un pays exemplaire en matière d'aide apportée aux handicapés, les États-Unis ?
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
Alors, c'est un pays, j'avais pu rencontrer une représentante américaine de la politique du handicap à l'occasion du G7 Handicap en Italie, c'est un pays qui, oui, a une approche plus inclusive sans doute que la nôtre et qui a aussi une culture de solidarité…
CHRISTOPHE BARBIER
Presque religieuses, oui, presque compensée par l'État.
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
D'entraide presque moins compensée par les aides financières de l'État.
CHRISTOPHE BARBIER
On va reparler évidemment de vos dossiers concernant les personnes handicapées, un mot évidemment de l'ambiance politique, le 49.3 a été déclenché, il entraîne une censure, dans quel état d'esprit est-on un mardi matin comme ça quand on est membre du Gouvernement alors qu'on sait que demain, peut-être, le Gouvernement, c'est fini ?
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
On est au travail, tous les jours, toujours, avec en focus ce qui est important pour les Français ou pour les personnes en situation de handicap. Et puis moi, je suis inquiète pour l'impact que pourrait avoir le vote de cette motion de censure si la gauche et le RN décident de la voter. Je suis inquiète sur l'impact pour les personnes en situation de handicap parce que les impacts vont être très concrets. Là, sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, il y a des mesures importantes qui sont très attendues par les personnes en situation de handicap, notamment ce qu'on appelle les 50 000 solutions. On sait qu'il y a beaucoup de personnes en situation de handicap qui attendent des places ou des solutions pour être mieux accompagnées et il y a aussi du rattrapage à faire sur ce champ-là, c'est 270 millions d'euros, c'est-à-dire un budget extrêmement important qu'on avait prévu de déployer, que nous souhaitons vraiment pouvoir concrétiser pour apporter ces solutions. Là, tout est mis en question si demain la motion de censure est votée par le RN et la gauche.
CHRISTOPHE BARBIER
On apprend aussi dans le Parisien que 2 000 recrutements de AESH, vous savez, c'est les assistants scolaires pour les handicapés, seraient annulés ?
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
Oui, très clairement.
CHRISTOPHE BARBIER
Parce qu'on ne pourra pas les financer.
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
Ils ne seront pas dans le budget, parce qu'il n'y aura pas de budget, donc on va se retrouver dans une situation où le budget de l'année précédente va être reconduit. Dans ce budget de l'année précédente, il n'y a pas les 2 000 AESH, c'est-à-dire les personnes qui accompagnent les enfants à l'école, dans l'école. Les enfants en situation de handicap, on ne les aura pas, alors qu'il y a énormément d'enfants qui sont en attente de ces AESH. Ça, plus des personnels du médico-social, c'est-à-dire vraiment des éducateurs compétents pour accompagner les enfants qui doivent aller dans l'école, des recrutements supplémentaires qui sont prévus, qu'on n'aura pas. C'est aussi des mesures comme Handigynéco, vous savez, c'est des consultations plus longues, plus adaptées pour les personnes en situation de handicap, c'est vraiment des consultations qui sont très importantes, notamment pour prévenir les violences faites aux femmes en situation de handicap qui sont les plus menacées. Dans notre projet de loi de financement de la Sécurité sociale, on a prévu d'étendre, de généraliser, puisqu'aujourd'hui, c'est une simple expérimentation, on a prévu de généraliser ces consultations dans les établissements sociaux et médico-sociaux. Demain, ça tangue si la motion de censure est votée.
CHRISTOPHE BARBIER
Vous ne pouvez rien faire par ordonnance, par décret, par circulaire, vous n'avez pour recréer de nouvelles dépenses supplémentaires. Et un des exemples très marquants qui pourrait être concerné, ce sont les fauteuils roulants. Vous savez que le président de la République s'est engagé à ce que les fauteuils roulants soient remboursés intégralement, c'est extrêmement attendu comme mesure. Le Premier ministre s'est aussi engagé à reprendre, en fait, cette mesure. Et moi, depuis que j'ai été nommé, je travaille avec les acteurs, l'ensemble des acteurs qui sont concernés par la filière des fauteuils roulants, et évidemment les personnes en situation de handicap, pour savoir quel modèle de remboursement qui serait différent d'aujourd'hui, puisqu'on ferait un remboursement intégral. Ça, demain, c'est mis en stand-by si la motion de censure est votée.
CHRISTOPHE BARBIER
C'est-à-dire que vous ne pourrez plus négocier avec toutes les parties prenantes pour que ça rentre en vigueur le plus vite possible ?
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
C'est exactement ça. Très clairement, si demain la gauche et le RN votent cette motion de censure, on met…
CHRISTOPHE BARBIER
Vous resterez pour les affaires courantes, quand même.
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
Oui, mais ce ne sont pas des affaires courantes.
CHRISTOPHE BARBIER
Vous n'avez pas le droit de prendre des décisions et de faire avancer le dossier.
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
Oui, ça modifie des modalités de remboursement. Ça s'appuie sur des discussions, des négociations qui sont longues et complexes, qui sont en train d'atterrir. On est vraiment en passe d'atterrir, parce que moi, j'ai vraiment voulu fixer comme objectif de pouvoir définir ce nouveau modèle de remboursement avant la fin de l'année. Les discussions avancent bien. On lève petit à petit chaque zone d'ombre, questionnement, pour garantir que chaque personne aura le remboursement à 100 % de son fauteuil roulant et des options, des injonctions qui sont nécessaires. Tout ça, si demain... Ça peut être évité, en fait, ce scénario catastrophe. Il suffit que la motion de censure ne soit pas votée.
CHRISTOPHE BARBIER
Alors, justement, j'allais vous le dire, Michel BARNIER vient à la télévision ce soir pour essayer de convaincre. Sur qui comptez-vous ? Sur le Rassemblement national qui pourrait se retirer en disant : "Bon, on a obtenu des choses, quand même, finalement, on ne censure pas" ? Ou plutôt sur les socialistes ?
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
Mais chaque député individuellement porte une responsabilité. Au-delà de son étiquette politique, chaque député doit se poser la question : est-ce que je préfère faire tomber ce Gouvernement parce qu'il ne m'a pas assez traité, parce que le budget ne correspond pas exactement à ce que je veux, dans un contexte où personne n'a la majorité, personne n'a la légitimité pour imposer à 200 % sa vue ? Ou est-ce que je fais ce choix-là, quitte à ce que ça impacte sur les Français ? Et là, j'ai rappelé l'impact sur les personnes en situation de handicap. Je crois que personne ne dit qu'il pas de marge de manœuvre ?
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
C'est très flou en fait, puisque on a une situation qui est complètement inédite. On a probablement des possibilités de texte pour pouvoir poursuivre le budget ou garder des dépenses ouvertes, mais pas ne faut pas des moyens supplémentaires, qu'il ne faut pas aller plus vite dans le remboursement des fauteuils roulants.
CHRISTOPHE BARBIER
C'est plusieurs milliers, voire dizaines de milliers d'euros, un fauteuil roulant.
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
Oui.
CHRISTOPHE BARBIER
Pour les patients, c'est un investissement impossible s'il n'y a pas d'aide.
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
Aujourd'hui, en fait, les personnes qui ont des fauteuils roulants, dans certains cas, sont obligées même de faire des cagnottes pour essayer d'avoir une solidarité pour les aider à financer leurs fauteuils roulants. Elles doivent faire un dossier auprès de la Sécurité sociale avec des montants de base de forfaitaires de remboursement qui sont très bas ou en tout cas trop bas. Elles doivent faire un dossier auprès de la MDPH pour avoir une petite partie aussi de compléments. Et puis après il reste souvent un reste à charge où là, elles vont devoir trouver des solutions. Et donc, depuis 2023, tout le monde travaille ardemment pour mettre en place cette nouvelle réforme du remboursement des fauteuils roulants qui est un schéma quand même complexe à trouver puisqu'il faut garantir la qualité évidemment pour les personnes, le fait que leurs fauteuils soient adaptés spécifiquement à leur situation médicale, alors qu'il n'y a pas une situation. Il y a autant de situations pratiquement que de personnes. Et puis il faut aussi garder un équilibre économique pour les acteurs, aussi bien les fabricants que les distributeurs, tout en garantissant la bonne gestion financière de la sécu. Donc, c'est quand même des travaux qui sont complexes qui ont été menés par mes prédécesseurs que j'ai repris pour pouvoir continuer et faire atterrir progressivement ce scénario. Demain, si la motion de censure est votée, tout ça est en stand-by. Donc, les personnes vont encore attendre avant de pouvoir bénéficier de ces remboursements.
CHRISTOPHE BARBIER
Cette motion de censure, elle a un autre but que de renverser le Gouvernement et bloquer le budget. Elle veut mettre une certaine pagaille dans le pays pour pousser Emmanuel MACRON à la démission.
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
Oui, clairement. Je pense que l'objectif, ce n'est vraiment pas, en tout cas, de se préoccuper de ce qui est bon pour le pays, parce que c'est aussi tous les signaux envoyés au monde économique et on voit tout de suite les impacts sur l'emploi qui commencent à stagner, c'est vraiment être dans une stratégie politique, en fait.
CHRISTOPHE BARBIER
Si vous êtes ce matin parmi nous, c'est aussi parce que c'est la journée internationale du handicap. Quel est l'intérêt d'une journée de ce type ? Ça marque encore les esprits ?
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
Oui, je pense que d'abord, c'est important de toujours parler des personnes en situation de handicap. On a des représentations encore à changer. Les personnes en situation de handicap sont encore discriminées dans certains cas. Et on doit vraiment tout faire pour leur donner leur place pleine et entière dans la société.
CHRISTOPHE BARBIER
Ça progresse en matière d'emploi, par exemple ?
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
Oui, oui, ça a bien progressé puisqu'on a fait reculer le chômage depuis 2019. On l'a fait particulièrement reculer. Il est encore plus haut, malheureusement, que la population active en général. Mais on voit que les représentations changent. Et les Jeux olympiques, les Jeux paralympiques ont donné aussi à voir une autre image pour beaucoup de Français, des personnes en situation de handicap.
CHRISTOPHE BARBIER
Les champions et la cérémonie d'ouverture, ça doit être une révélation.
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
C'est ça. Et puis de pouvoir associer handicap et performance, dépassement de soi. Et ça, c'est aussi ce que des personnes en situation de handicap démontrent tous les jours dans leur travail. Moi, ce que me disent les personnes en situation de handicap, c'est : "Je veux que les employeurs voient que j'ai des compétences, j'ai des aptitudes, j'ai des savoir-faire et j'ai envie de les mettre au service de mon entreprise ou de mon activité".
CHRISTOPHE BARBIER
Les JO tenaient aussi une promesse d'accessibilité des lieux. Ça n'a pas été simple partout, notamment dans les transports en commun. L'accessibilité, on aura un héritage des Jeux olympiques ?
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
Oui, on aura un héritage, ce qu'on appelle un héritage matériel, parce qu'il y a beaucoup de choses qui ont été mises en place en termes de transport, en termes d'accès d'équipements sportifs, il y a le village olympique qui a aussi des logements.
CHRISTOPHE BARBIER
Des logements, eux, qui répondent à toutes les normes.
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
100 % inclusifs. Donc, il y a un héritage matériel, mais il y a surtout un héritage immatériel en termes de méthode de travail, c'est-à-dire d'être dans une logique de conception universelle à chaque fois qu'on développe un projet. Par exemple, un événement sportif, un événement culturel, on a une méthode pour se garantir qu'il va être 100 % inclusif, on a la méthode du groupe d'experts d'usage notamment qui permet d'avoir des personnes en situation de handicap qui apportent une expertise sur quels seront les impacts pour leur propre handicap et donc qu'on puisse le prendre en compte dans la constitution de ces événements. Il y a une boîte à outils là-dessus, d'ailleurs, qui en découle, qui peut permettre à tout porteur de projet maintenant de s'en saisir. Et puis cette façon plus globale de se dire à chaque fois qu'on a un projet, il faut qu'on pense aux personnes en situation de handicap dès le départ.
CHRISTOPHE BARBIER
Je vous transmets les amitiés et le bonjour de champions de la vie, de média handicap qui souhaiterait d'ailleurs vous rencontrer et je vous remercie beaucoup, Madame la Ministre, d'être venue ce matin.
CHARLOTTE PARMENTIER-LECOCQ
C'est moi qui vous remercie. Bonne journée à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 4 décembre 2024