Interview de M. François Durovray, ministre délégué démissionnaire aux transports, à Sud Radio le 12 décembre 2024, sur la SNCF, lignes de cars express, l'augmentation du prix du Pass Navigo, la censure du gouvernement, l'interdiction en 2035 de la vente de véhicules neufs à moteur thermique, le Pass rail, RYANAIR et les autoroutes.

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Média : Sud Radio

Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il est 8h35. Merci d'être avec nous sur Sud Radio. Notre invité politique, ce matin, François DUROVRAY, ministre des Transports. Bonjour.

FRANÇOIS DUROVRAY
Bonjour Jean-Jacques BOURDIN.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous. J'ai une question toute simple : est-ce que les trains circuleront à Noël ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Oui, ils circuleront à Noël. Vous avez vu, il y a un mouvement social qui est en cours aujourd'hui mais qui aura très peu d'impact avec une circulation normale sur les grandes lignes et quelques perturbations…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez obtenu la garantie des syndicats ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Il peut toujours y avoir du mouvement, mais en tout cas par rapport aux revendications qui étaient les leurs. Et vous savez, il y avait un décembre noir qui était annoncé pour les Français avec l'absence de train et donc légitime inquiétude pour les Français. C'est un moment où on se retrouve en famille, un moment important évidemment, où il y a les grands départs comme l'été. Et simplement, nous avons discuté avec les syndicats pour leur expliquer la politique qui était la nôtre, notamment sur le fret, mais également pour engager un dialogue social comme il doit y avoir dans chaque entreprise et dialogue social qui a abouti à la signature de deux syndicats sur les quatre et donc une limitation de la grève.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc pas de grève à Noël, on est bien d'accord ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Nous sommes bien d'accord ?

JEAN-JACQUES BOURDIN
Eh bien écoutez, ça c'est déjà une bonne nouvelle pour les Français. Le fret, oui, le fret SNCF va disparaître puis renaître sous la forme, si j'ai bien compris, deux filiales. C'est cela ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Oui, il ne va pas disparaître. Enfin, concrètement… Le fret était sous la menace effectivement d'un remboursement d'aides à hauteur de 5 milliards d'euros qui l'aurait tué. Et simplement le fret - que les auditeurs comprennent bien - il s'agit du transport de marchandises par train ; C'est évidemment indispensable au pays, c'est indispensable à la décarbonation. Nous avons un grand projet de déploiement du fret, notamment sur les grands axes ferroviaires depuis Marseille, depuis Le Havre, pour traverser le pays. Mais il fallait effectivement cette mesure. Je me réjouis que la SNCF et les 5 000 cheminots qui travaillent sur le fret aient de nouvelles perspectives de développement.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous parliez des grèves. Il y a quand même une journée de grève aujourd'hui, deux syndicats (CGT, SUD-Rail) avec quelques perturbations, des perturbations même importantes parfois pour certains usagers en Ile-de-France : RER D, ligne R, ligne H. Et pourtant les cheminots ont obtenu une augmentation de salaire de 2,2% pour 2025. C'est plus que l'inflation. Les cheminots qui ont été augmentés de 17% pour les salaires normaux est de 21% pour les plus bas salaires en deux ans.

FRANÇOIS DUROVRAY
Alors d'abord, ce sont les négociations salariales qui ont lieu au niveau de l'entreprise et c'est normal. Les chiffres que vous indiquez sont tout à fait justes. Vous n'en avez pas mentionné un.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Allez-y.

FRANÇOIS DUROVRAY
C'est que l'an prochain, en moyenne, les salaires des Français vont augmenter de 2,5%. Donc on est à peu près au niveau…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Les salaires vont augmenter dans le privé, vous ne le savez pas ? Vous avez vu l'enquête des Échos ce matin sur les chefs d'entreprise qui vont limiter les augmentations de salaires ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Oui. Et dans un autre journal, ce matin, il est indiqué 2,45% d'augmentation en moyenne. Donc on est dans la moyenne. La SNCF est une entreprise qui va mieux. C'est une entreprise qui, à nouveau, fait des bénéfices.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui coûte combien aux Français ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Il est tout à fait normal que les agents de la SNCF, lorsqu'il y a des efforts qui sont faits et que ces efforts produisent leur effet, puissent également en tirer parti ; de la même façon que l'ensemble des Français en tire parti. Puisque la SNCF, aujourd'hui, contribue à la régénération du réseau. La SNCF paie en partie les travaux nécessaires sur les voies. Et après, c'est une reprise avec des négociations.

JEAN-JACQUES BOURDIN
SNCF qui nous coûte 20 milliards d'euros par an, à nous, contribuables.

FRANÇOIS DUROVRAY
Non, non.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, François DUROVRAY ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Non. Je ne souscris pas du tout à ce chiffre qui a pu être mentionné.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Pourquoi ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Parce que, par exemple, dans les 20 milliards, il est mentionné 7 milliards qui est accordé par les régions à la SNCF. Or, ça correspond à quoi ces 7 milliards ? Je vais vous dire : à deux choses très simples. La première, c'est le paiement des péages qui sont dus à chaque fois qu'un train circule sur des voies, il y a un péage qui est payé. C'est une grande différence entre le rail et la route. La route, il n'y a que les autoroutes que vous payez, 10 000 kilomètres sur 1 million. Le reste des routes est gratuit. Ce n'est pas vrai pour le rail ; la SNCF et les régions paient mais pour l'usage des routes.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais les régions paient avec de l'argent public ; notre argent.

FRANÇOIS DUROVRAY
Mais bien sûr, avec de l'argent public. Mais je veux dire que ce n'est pas la SNCF qui coûte, c'est simplement l'usage des rails. Et l'autre point, et ce qui est le plus important, c'est que sur les régions, il y a 6 milliards d'euros qui sont liés aux services, qui est fait par la SNCF, mais qui est lié à une politique tarifaire particulièrement avantageuse qui est conduite par les régions. Ce sont les choix des régions que je partage en grande partie. Par exemple, quand en région Occitanie, vous payez 1 euro quelle que soit la longueur de votre trajet. Ça ne correspond évidemment pas au coût du train, mais c'est le choix de la région, ce n'est pas le coût de la SNCF.

JEAN-JACQUES BOURDIN
François DUROVRAY, il y a aussi les intérêts de la dette. Ça coûte combien par an les intérêts de la dette ?

FRANÇOIS DUROVRAY
De la SNCF ? Je n'ai pas le chiffre en tête, mais évidemment…

JEAN-JACQUES BOURDIN
De plusieurs milliards.

FRANÇOIS DUROVRAY
Et puis, l'Etat a fait l'effort de reprendre la dette, la SNCF évidemment.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et puis il y a 3,3 milliards versés par l'Etat chaque année à la Caisse de prévoyance et de retraite des personnels de la SNCF.

FRANÇOIS DUROVRAY
Oui, c'est vrai.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est nous tous qui payons.

FRANÇOIS DUROVRAY
C'est vrai. C'est lié à l'histoire de cette entreprise. Il y a eu différentes réformes par le passé qui permettent justement de revenir là-dessus.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Je dis simplement qu'il faut se rappeler ces chiffres quand même.

FRANÇOIS DUROVRAY
Bien sûr. Mais attendez, je ne nie pas…

JEAN-JACQUES BOURDIN
François DUROVRAY, conseil des ministres. Hier matin, Michel BARNIER a alerté Emmanuel MACRON au sujet des fractures sociales, territoriales et rurales de la France. Vous étiez à ce Conseil des ministres.

FRANÇOIS DUROVRAY
Je n'y étais pas en tant que ministre délégué. Mais effectivement, j'ai entendu le compte rendu du Conseil des ministres.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, d'accord.

FRANÇOIS DUROVRAY
Et oui, je partage évidemment. Je partage le constat du Premier ministre Michel BARNIER, que je veux saluer pour son travail. J'ai eu le grand honneur de travailler à ses côtés au cours de ces trois derniers mois. Vous savez, si je suis rentré dans ce Gouvernement, c'est parce que d'abord, je pense que le pays, effectivement, a de grandes fragilités, et notamment dans un certain nombre de secteurs où les Français ne voient plus le commun et n'imaginent plus leur avenir personnel dans un collectif. Et le rôle du politique, c'est quand même de faire en sorte que nous soyons capables de vivre ensemble, de nous rassembler. Et c'est vrai qu'à la tête du ministère des Transports… Et moi, j'ai eu à coeur de développer un certain nombre de politiques qu'il va falloir relancer compte tenu de la censure. Mais lorsque je propose un plan cars express pour desservir les 15 millions de Français qui sont en précarité de mobilité, qui…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Cars express, c'est-à-dire ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Je me permets juste de terminer. Il y a 10 millions de Français aujourd'hui qui, tous les jours, font plus de 50 kilomètres en voiture et qui n'ont pas d'autre choix que la voiture. Ce que je propose pour répondre à votre question, c'est justement parce que… On parlait du train tout à l'heure. Le train c'est 28 000 kilomètres de voies ferrées. Il y a 1 million de kilomètres de routes. Donc vous imaginez bien que le train ne peut pas desservir toutes les zones et notamment les zones les plus rurales. Or, il y a bien des besoins dans le pays entre telle bourgade et la sous-préfecture ou la préfecture du coin. Eh bien, plutôt que de mettre des trains qui sont impossibles parce qu'il n'existe pas de voies ferrées, et plutôt que de rester avec la voiture, moi, ce que je propose c'est qu'on mette en place des cars express qui sont une solution permettant d'améliorer…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais qui va mettre en place ? Les départements, j'imagine ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Les régions.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Les régions, les départements.

FRANÇOIS DUROVRAY
Il y a un plan qui a été construit avec les régions qui permettrait de développer plusieurs centaines de lignes de cars express à travers le pays, et donc d'apporter une triple solution, si vous me permettez, aux Français, d'abord une solution de pouvoir d'achat. Parce que lorsqu'on prend un car…

JEAN-JACQUES BOURDIN
À quel tarif ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Ça dépend des régions. Mais je vous ai dit 1 euro en région Occitanie par exemple. Donc ça coûte beaucoup moins cher. Et les études montrent qu'on divise par 10 le coût de la mobilité. Quand on prend sa voiture tous les jours, c'est jusqu'à 500 euros.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'il faudrait généraliser ce que fait la région Occitanie ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Je ne dis pas... En Ile-de-France, c'est 88 euros le pass Navigo pour avoir accès à un service incroyable. Et ce que je dis simplement, c'est que prendre, grâce aux politiques tarifaires des régions, prendre les transports publics, ça coûte beaucoup moins cher que prendre sa voiture. Donc ça, c'est un bénéfice. Le deuxième bénéfice, c'est qu'évidemment, ça émet beaucoup moins de gaz à effet de serre. Et le troisième bénéfice - je me permets de le dire - c'est que lorsque vous êtes au volant de votre voiture, vous pouvez certes écouter Sud Radio, ce qui est une bonne chose. Ce qui est une très bonne chose même, mais en revanche, vous ne pouvez pas faire autre chose si vous avez envie de vous reposer, si vous avez envie de travailler, de lire…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais dans le bus, on peut écouter Sud Radio sur l'application aussi.

FRANÇOIS DUROVRAY
Exactement, mais on peut aussi faire d'autres choses.

JEAN-JACQUES BOURDIN
François DUROVRAY, à propos des tarifs - et je vais revenir à la politique - à propos des tarifs, tickets à tarifs uniques en Ile-de-France, j'ai vu. 2,50 euros, métro, train, RER, c'est bien cela, ce sont les chiffres. 2,50 euros et 2 euros pour les bus et les trams. C'est cela. Pass Navigo, plus 2,8%, 88 euros. C'est cela ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Oui. C'est ça. Moi, je trouve que c'est une politique tarifaire qui est particulièrement attractive en Ile-de-France. C'est le fruit du travail. Pour le coup, c'est Valérie PECRESSE et j'ai eu le plaisir de travailler avec elle pendant 10 ans. Et notamment, vous savez, je suis président par ailleurs d'un département de la périphérie de Paris, l'Essonne, 1,3 millions d'habitants où beaucoup de personnes doivent aller travailler à Paris. Et c'est vrai qu'il y avait une injustice entre les habitants qui habitent Paris et ceux qui habitent plus loin ; une injustice tarifaire qui est aujourd'hui réparée. Et vous vous rendez compte, 2 euros ou 2,50 euros pour aller à Paris ; là, pour le coup, ça vaut le coup d'utiliser le transport en commun.

JEAN-JACQUES BOURDIN
François DUROVRAY, il y a des entreprises qui remboursent une partie de ces…

FRANÇOIS DUROVRAY
Je vois où vous voulez arriver.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais oui, oui. Sans budget, est-ce qu'il y aura remboursement ? Prise en charge d'une partie d'une partie de ces remboursements ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Alors, c'est une des conséquences de la censure. C'est-à-dire qu'il y a toujours le remboursement à hauteur de 50% de l'abonnement, qu'il s'agisse de pass Navigo en Île-de-France ou des autres abonnements en Provence. En revanche, il existait, depuis quelque temps, la possibilité pour les entreprises de majorer le remboursement, c'est-à-dire de monter à 75%. Or, ça, ça se termine le 31 décembre, puisqu'il n'y a pas de projet de loi de finances 2025 adopté. Ça tombe, c'est une des conséquences de la censure. Et c'est vrai que ceux qui ont voté la censure auraient peut-être dû, avant de la voter, mesurer toutes les conséquences de leur geste.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc un Premier ministre ce soir. Je ne vais pas vous demander de nom, parce que vous ne savez pas. Plusieurs noms circulent. On ne va pas s'engager dans un Monopoly ou un Loto pour savoir qui sera l'heureux ou l'heureuse élue. Mais pas de 49.3, pas de censure, pas de dissolution. C'est l'idée ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Oui, enfin, c'est l'idée.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est l'idée voulue par le Président de la République et discutée avec les partis politiques qui sont venus le voir mardi.

FRANÇOIS DUROVRAY
Tout le monde a en tête la séquence qui a suivi la dissolution et la conséquence de cette Assemblée nationale qui est éclatée entre plusieurs blocs. Effectivement, moi j'ai fait la démarche de rentrer dans un gouvernement alors même que je n'ai jamais appartenu à la majorité présidentielle, mais parce que je pense simplement…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Je rappelle que vous êtes un proche de Xavier BERTRAND.

FRANÇOIS DUROVRAY
Exactement. Et tout simplement parce que je pense que notre pays rencontre des difficultés, il faut que toutes les bonnes volontés acceptent de servir le pays. Et c'est vrai qu'à l'époque, malheureusement, le Parti socialiste notamment avait été quelque peu prisonnier de son alliance avec LFI. Et qu'un des enjeux, si on veut stabiliser, si on veut pouvoir gouverner, avoir de la lisibilité, et on voit bien que c'est important pour le pays, pour avancer, il faut qu'un certain nombre d'élus responsables, et c'est le cas évidemment de cette gauche de Gouvernement, soient capables d'avoir un pacte dont il faudra déterminer la forme, mais un pacte qui assure au prochain Gouvernement une forme de stabilité qui permettra d'avancer pour les Français.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Jusqu'aux présidentielles.

FRANÇOIS DUROVRAY
Bien sûr, c'est possible.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Jusqu'aux présidentielles, stabilité jusqu'aux présidentielles ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Mais attendez, c'est quand même un enjeu, on ne peut pas avoir le pays… Regardez 2024, il y a eu un changement de Gouvernement au mois de juin, il y a eu la campagne européenne, il y a eu la dissolution, il y a eu deux mois pour refaire un Gouvernement, il y a eu deux mois de Gouvernement et à nouveau censure, donc, on n'arrive plus à avancer.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais vous n'avez pas le sentiment que les Français veulent renverser la table ? Je regardais le sondage, hier, que nous publions, Sud Radio, qui donne Marine Le PEN très très haute, est-ce que vous n'avez pas le sentiment que les Français veulent renverser la table, renverser le Gouvernement, renverser le président de la République, provoquer une élection présidentielle ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Mais j'ai le sentiment que les Français sont en colère, et ils ont de bonnes raisons d'être en colère, et qu'ils sont inquiets, et moi, je suis encore une fois sur le terrain très régulièrement, j'y vais encore en fin de journée, nos concitoyens sont inquiets de la situation, ils voient bien que le pays ne va pas bien, ils voient bien que la dette explose, ils voient bien que c'est de plus en plus difficile de vivre avec les salaires qui n'augmentent pas aussi vite que l'inflation, donc, évidemment ce sont des sujets de préoccupation de nos concitoyens, ils attendent des élus, des solutions, et pour avoir des solutions il n'y a pas de secret, il faut qu'il y ait un Gouvernement qui avance, et donc, c'est l'enjeu de la stabilité du pacte, enfin vous l'appelez le pacte, je ne sais pas quelle forme il prendra, mais, en tout cas qu'on ne vive pas sous la menace d'une censure régulière, et qu'on puisse avancer avec des personnes de bonne volonté, qui sont de sensibilité différente, mais qui font le choix de servir leur pays, et qui acceptent des compromis qui ne veulent pas dire des compromissions.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, puisque vous parlez de censure, conséquence, pas de hausse du malus sur le poids du véhicule ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Par exemple, oui, bien sûr.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah, vous le regrettez ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Il y a une trajectoire.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui ou non ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Non, attendez.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Je ne vous sens pas très, sur ce sujet, très engagé.

FRANÇOIS DUROVRAY
Non, non, non, pas du tout.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah, bon, allez-y.

FRANÇOIS DUROVRAY
Non mais j'assume tout ce qui figurait dans le projet de loi de finances, et les bonnes nouvelles, et les efforts qui étaient demandés aux Français, mais je crois que les Français aussi ont compris qu'on était dans un moment où il fallait que chacun fasse des efforts. S'agissant du malus, il s'agit tout simplement d'une mesure qui vise à accompagner le secteur automobile dans l'effort de transformation et notamment de transition écologique. On doit, pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre, électrifier le parc de véhicules, et on doit avoir des véhicules qui sont plus légers. On demande aux constructeurs automobiles, et c'est une trajectoire qui a été fixée il y a longtemps, d'atteindre ces objectifs. Et donc, à mesure que les années passent, il y a un malus qui augmente en fonction du poids du véhicule. C'est une trajectoire qui a été fixée auparavant, qui continue, et que dans la philosophie, j'approuve.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, j'ai deux, trois questions sur les transports. Est-ce que vous réclamez, comme la droite du Parlement européen, un assouplissement de l'interdiction en 2035 de la vente de véhicules neufs à moteur thermique ?

FRANÇOIS DUROVRAY
La France ne fait pas cette demande. Elle ne fait pas cette demande, pourquoi ? Parce que nous sommes dans un moment où il y a une course contre la montre, notamment vis-à-vis des Chinois. Pour la première fois, un autre pays que l'Europe a une avance technologique, c'est le cas, aujourd'hui, de la Chine, avec les véhicules électriques. Et on voit très bien que la Chine peut inonder l'Europe de véhicules électriques, ce qui veut dire qu'on doit se protéger, mais ce qui veut dire aussi... Protéger de barrières douanières, pardon. Mais ce qui veut dire aussi qu'on doit dire aux constructeurs automobiles qu'il faut avancer, accélérer, accélérer. Vous savez, j'ai participé, avec le président de la République, au dîner qui était organisé à la veille du Mondial Automobile, avec toute la filière automobile. Et il y a un constructeur qui a dit : " Mais vous savez, Monsieur le Président, on est dans la Vallée de la Mort. " Vous savez, cette Vallée de la Mort qui est aux États-Unis...

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui, en Californie, oui, désert du Nevada.

FRANÇOIS DUROVRAY
Quand on est dans la Vallée de la Mort... Quand on est dans la Vallée de la Mort, on cherche à en sortir le plus rapidement possible. On ne reste pas figé dans la Vallée de la Mort. Et donc, ce qu'il faut, c'est qu'effectivement, les constructeurs automobiles puissent avancer plus vite.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc pas question d'assouplir cette interdiction ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Non. Par rapport à 2035, non. En revanche, il y a une demande qui est faite par le Gouvernement, c'est qu'il n'y ait pas d'application d'amende en 2025, parce qu'on voit que les objectifs ne sont pas atteints. Et les objectifs ne sont pas atteints parce qu'aujourd'hui, la demande est inférieure à l'offre. Et donc, ce qu'il faut, c'est que nous stimulions la demande. Et on la stimule comment ? D'abord en disant aux entreprises : " Contribuez à l'effort en achetant des véhicules électriques. " C'est une discussion qui est en cours. Il y a une mission à l'Assemblée nationale qui, justement, vise à inciter les entreprises à acheter des véhicules électriques. Et il faut qu'on aide les particuliers, avec des bonus qui sont maintenus en France, contrairement à beaucoup d'autres pays, notamment l'Allemagne, qu'on aide les particuliers à acheter des véhicules électriques. Parce que nos concitoyens ont bien compris qu'en dehors du coût qui est plus élevé, derrière, en termes de fonctionnement, ça coûte beaucoup moins cher d'avoir un véhicule électrique qu'un véhicule à essence.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Les transports toujours ? Le Pass-rail ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Non.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Européens ? Non.

FRANÇOIS DUROVRAY
Le Pass rail, d'ailleurs, ça fait partie des sujets sur lesquels on doit échanger avec les régions. Vous savez que c'était un dispositif qui a été mis en place par l'État avec les régions.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bonne idée !

FRANÇOIS DUROVRAY
Sur l'idée, tout à fait. Après, les conditions de mise en oeuvre avaient été compliquées, et les présidents de régions m'ont demandé d'en faire un bilan. Donc ce bilan, malheureusement, n'a pas pu être établi avant la censure. Il faudra, très rapidement après la censure, qu'on puisse se mettre autour de la table et qu'on décide de ce qu'on fait l'été prochain.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. J'espère. J'espère pour toutes celles et ceux qui nous écoutent.

FRANÇOIS DUROVRAY
Bien sûr.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Notamment les étudiants.

FRANÇOIS DUROVRAY
Oui, bien sûr.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Notamment les étudiants qui attendent ça avec impatience. Est-ce qu'on doit continuer à subventionner les petits aéroports régionaux ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Qu'est-ce que vous voulez dire par subventionner ? Ils ne sont pas subventionnés.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Par les régions, quand même, ou par les départements.

FRANÇOIS DUROVRAY
Non, les régions, généralement, sont propriétaires, délèguent une gestion. Il y a parfois des déficits.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, je dis ça parce que beaucoup, beaucoup de compagnies, de compagnies aériennes étrangères ne veulent plus venir sur ces petits aéroports.

FRANÇOIS DUROVRAY
Alors, oui, j'ai entendu notamment RYANAIR.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, RYANAIR par exemple.

FRANÇOIS DUROVRAY
Quand j'ai entendu, sur les médias, RYANAIR s'exprimer en disant : " On va quitter la France ", moi, j'ai demandé au patron de RYANAIR un échange et on a eu un échange franc. Et aujourd'hui, je peux dire que RYANAIR ne va pas quitter la France. Il y aura des modifications, comme il y en a chaque année, mais évidemment, la France est attractive et évidemment les aéroports régionaux sont importants à la fois pour les loisirs, mais aussi pour les entreprises dans les différents territoires. Donc, quand vous dites subventions, il n'y a pas de subventions, en fait, ce qui se passe, c'est que souvent, les régions accordent des aides sur des lignes qui peuvent être déficitaires. On a la chance d'avoir beaucoup d'aéroports dans notre pays. Moi, je milite pour qu'évidemment, l'aviation se décarbone et on a la chance, en France, grâce à AIRBUS, grâce à quantités de start-ups, d'inventer l'aviation du futur, électriques, à hydrogènes, donc, vous vous imaginez, dans quinze ans, si on n'y arrive, c'est un formidable atout d'avoir des aéroports qui nous permettrons d'assurer des liaisons, La Roche-sur-Yon-Colmar, par exemple qui sont très difficiles par la route ou en train. Et donc on aura toujours besoin de l'avion.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, je vais terminer avec les autoroutes.

FRANÇOIS DUROVRAY
Oui. Ah, beau sujet.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, augmentation limitée des péages.

FRANÇOIS DUROVRAY
Inférieure à l'inflation.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, inférieure à l'inflation. Les concessions, vous avez commencé à discuter, j'imagine. Ça va donner quoi ? Est-ce que vous demandez des efforts considérables aux concessionnaires pour renouveler les contrats ? Vous demandez à ce que les travaux soient toujours engagés. Combien demandez-vous aux concessionnaires ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Alors, attendez, je vais vous répondre très précisément. D'abord, je vais vous dire que les autoroutes, elles appartiennent aux Français et que le rôle du ministère des Transports, c'est de faire en sorte que les Français soient défendus. Et donc, il y a des contrats, aujourd'hui, qui se terminent entre 2031 et 2036. Moi, mon premier boulot, c'est de faire en sorte que les sociétés concessionnaires d'autoroutes fassent ce qu'elles doivent aux Français.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ils seront reconduits ou pas, ces contrats ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Attendez, laissez-moi aller jusqu'au bout de vous dire, d'abord, moi, mon premier boulot, c'est de faire en sorte que les contrats se terminent bien. Et donc, j'avais prévu — la censure l'empêche, là, pour l'instant, mais j'espère pouvoir en venir — j'avais prévu d'imposer aux sociétés d'autoroutes des travaux nous assurant qu'elles seront remises en bon état aux Français en 2031 ou 2036. C'est plusieurs milliards d'euros de travaux qui doivent être réalisés. C'est tout à fait normal. Il n'y a pas de contentieux avec les sociétés.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais remise aux Français ou à l'État ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Remise à l'État. Et ensuite, la question qui va se poser pour répondre à votre question, c'est de savoir quel sera le futur modèle. C'est l'enjeu d'une conférence que je souhaite organiser au début de l'année prochaine, puisque tous les compteurs seront mis à zéro.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc l'État pourrait reprendre la concession ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Tout est sur la table. On peut très bien imaginer nationaliser les autoroutes, ce qui voudrait dire beaucoup de changements. Mais on peut imaginer des concessions comme c'est le cas aujourd'hui. On peut imaginer d'autres dispositifs. Moi, ce qui m'importe demain, c'est qu'on ait des autoroutes qui soient en bon état, dont le contrôle soit correctement assuré par le Gouvernement, par les élus qui se succèdent. Et ce qui m'importe aussi, c'est qu'on ait un système de mobilité qui soit plus performant, parce qu'aujourd'hui, on a d'un côté 10 000 km d'autoroutes qui sont en bon état et on a un million de kilomètres de routes qui souffrent. Et donc, ce qu'il faut, c'est qu'on rehausse notre niveau d'exigence sur l'ensemble des infrastructures et qu'on soit capable, avec l'argent qui est aujourd'hui dépensé par les Français au travers des péages, qu'on soit capable d'assurer un bon niveau pour l'ensemble de nos infrastructures.

JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai une dernière question sur l'A69. On attend la décision définitive.

FRANÇOIS DUROVRAY
C'est entre Toulouse et Castres, pour vos auditeurs.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, ils connaissent bien, Toulouse et Castres. Alors, il paraît que le prix du péage va baisser de 33 %. C'est vrai ou pas, ça ?

FRANÇOIS DUROVRAY
Non, mais ça fait partie des sujets que j'ai mis sur la table lorsque j'ai été nommé, parce que j'ai vu ce dossier qui a été décidé avant que je ne sois nommé. Les travaux sont en cours.

JEAN-JACQUES BOURDIN
300 millions engagés sur 450 millions.

FRANÇOIS DUROVRAY
Et donc, ce qui compte, c'est que ce chantier puisse aller à son terme. Il y a un contentieux. Moi, je suis évidemment très respectueux de notre État de droit, et le juge dira ce qu'il estime devoir dire. Simplement, lorsque j'ai vu ce dossier, j'ai échangé avec les élus locaux et on a considéré que le péage était trop élevé et qu'il fallait donc travailler sur cette question pour que l'autoroute soit accessible.

JEAN-JACQUES BOURDIN
17 euros, Toulouse-Castres. 17 euros, c'était prévu. Baisse de 33%.

FRANÇOIS DUROVRAY
Ça, c'est sur la table. Ça fait partie des discussions. C'est ce que j'ai voulu indiquer au juge pour qu'il ait tous les éléments en tête avant de juger.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci, François DUROVRAY.

FRANÇOIS DUROVRAY
Merci à vous.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être venu nous voir ce matin sur l'antenne de Sud Radio. Il est 8h57. Patrick ROGER, juste après les informations de 9h.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 13 décembre 2024