Interview de Mme Juliette Méadel, ministre déléguée, chargée de la ville, à Sud Radio le 6 janvier 2025, sur les attentats terroristes en France, La France insoumise, les islamistes, la réforme des retraites et la politique de la ville.

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Média : Sud Radio

Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Notre invitée, ce matin, Juliette MEADEL, ministre déléguée chargée de la Ville. Bonjour,

JULIETTE MEADEL
Bonjour,

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous. La ville, si important, je reviendrai sur les problèmes d'insécurité, je reviendrai sur les problèmes de logement, sur tous ces problèmes-là qui pourrissent, parfois, la vie de nos concitoyens. Vous étiez proche de Manuel VALLS, Juliette MEADEL ?

JULIETTE MEADEL
J'ai été sa ministre.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez été sa ministre.

JULIETTE MEADEL
Sous le quinquennat de François HOLLANDE.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Exactement, vous avez été radié du PS en 2017.

JULIETTE MEADEL
2018, pardon.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Absolument, après avoir soutenu Emmanuel Macron.

JULIETTE MEADEL
Oui, 2018.

JEAN-JACQUES BOURDIN
2018, pardon, opposé à la loi immigration, je m'en souviens.

JULIETTE MEADEL
Toujours aussi fermement, pas toute la loi, parce qu'il y avait des choses bien dans la loi, mais surtout la préférence nationale.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Voilà, et vous êtes aussi conseillère d'opposition à Montrouge, c'est important pour vous, et justement Montrouge, le 8 janvier 2015, Clarissa JEAN-PHILIPPE, policière municipale, est assassinée par Amedy KOULIBALY, complice des frères KOUACHI qui, la veille, avait semé la terreur dans les locaux de Charlie Hebdo. KOULIBALY, le lendemain, tuera quatre personnes de confession juive lors de la prise d'otage d'un supermarché cachère à Paris. 2017, vous étiez, 2018, 2016, 2017, vous étiez secrétaire d'état à l'aide aux victimes, et notamment aux victimes du terrorisme, Juliette MEADEL. Donc vous avez côtoyé ce monde, ces victimes, ces familles de victimes, et vous avez mesuré l'ampleur, l'ampleur de cette tragédie terroriste.

JULIETTE MEADEL
La mesurer, presque même la vivre, évidemment, à travers leur récit, puis nous avons vécu aussi les attentats de Nice, puis il y avait aussi eu d'autres attentats, Saint-Etienne-du-Rouvray, et en réalité il y a eu beaucoup d'attentats, même des attentats islamistes contre les français à l'étranger, et ce qui était assez sidérant et marquant, c'était, d'abord, le courage de ces victimes, auxquelles je m'adresse, aujourd'hui, puisque nous allons commémorer les dix ans de l'attentat de Charlie Hebdo et de l'hyper cachère, et surtout ce que nous avons fait à l'époque, c'est que nous avons mis en place un service public pour aider ces victimes-là, c'est-à-dire une prise en charge globale, financière, judiciaire également, administratif, pour éviter que ce soit le parcours du combattant pour les victimes de, en fait, de catastrophes, de toutes les catastrophes.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous aviez une idée en 2018, un impôt, je me souviens de cela, un impôt pour soutenir la liberté d'expression.

JULIETTE MEADEL
Oui, et c'était, d'ailleurs, destiné à aider Charlie Hebdo, à pouvoir faire face à ces dépenses de sécurité qui sont considérables depuis qu'ils ont été victimes de l'attentat, et c'était précisément aussi une manière de dire : " Nous sommes Charlie, nous revendiquons la liberté d'expression, le droit au blasphème ". Et cet impôt, je n'étais plus en responsabilité, n'a pas été retenu.

JEAN-JACQUES BOURDIN
L'idée n'a pas été retenue. Ce que vous regrettez, ce que je regrette aussi d'ailleurs, un impôt qui aurait été payé, par exemple, par les grandes plateformes.

JULIETTE MEADEL
Par exemple, les grandes plateformes numériques, parce que la liberté d'expression, c'est l'un des biens que nous avons de plus cher en démocratie, et nous devons la chérir.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, Charlie donc, c'est quoi pour vous être Charlie, aujourd'hui ?

JULIETTE MEADEL
C'est être fier de ce que la République Française a construit depuis toutes ces années, où nous sommes une république qui accueille, qui intègre, mais qui est aussi exigeante sur le respect de nos quatre principes. La liberté, l'égalité, la fraternité, la laïcité, moi je ne choisis pas, je veux les quatre, et c'est ça être Charlie. Et c'est partager cet idéal. Pourquoi ? Parce que c'est ce qui nous permet de vivre en paix, c'est ce qui nous permet aussi, qui permet à chacun, de vivre sa religion comme il l'entend. Mais la religion, c'est à la maison, et c'est aussi ce qui nous permet d'accueillir la différence. On accueille à condition que le cadre républicain soit respecté. C'est un modèle dont, moi, je suis fière. Je sais qu'à l'étranger, on ne comprend pas notre laïcité, notre fraternité, mais j'en suis fière parce qu'accueillir la différence, l'intégrer, c'est partager cet idéal républicain, et c'est faire de nous, en fait, une nation unie. Et c'est ça qui m'inquiète, aujourd'hui. Donc je me demande si, aujourd'hui, nous aurions la force d'être à nouveau Charlie. Est-ce que nous sommes…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais pourquoi ? Parce qu'à l'intérieur même de la nation française, certains ne sont plus Charlie ? Est-ce qu'aujourd'hui... Non, j'ai lu ce qui vous opposait, par exemple, à Jean-Luc MELENCHON, ou à LFI, à Juliette MEADEL. Vous êtes une femme de gauche. Il y a deux gauches. Il y a cette gauche universaliste, et LFI ne serait plus universaliste. Et LFI aurait délaissé la laïcité ?

JULIETTE MEADEL
Oui, LFI a délaissé la laïcité, et quand on compare l'attitude de Jean-Luc MELENCHON au moment des attentats de Charlie Hebdo, et le Jean-Luc MELENCHON, d'aujourd'hui, il n'a plus rien à voir. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, non seulement, ils prennent des distances par rapport à la laïcité, mais ils font entrer le fait religieux dans le débat public et politique.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Volontairement ?

JULIETTE MEADEL
Volontairement, en s'adressant à des catégories. Mais bien entendu, en s'adressant à des catégories. Ce qui est d'ailleurs, en fait, quand on regarde bien Jean-Jacques BOURDIN, ce qui est insultant, aucun citoyen de France ne veut, aujourd'hui, se revendiquer sur des discriminations religieuses. Les musulmans de France, si tant est qu'il y ait une communauté, je ne crois pas, il n'y a qu'une seule communauté la France, mais admettons, aujourd'hui, n'ont aucune envie qu'on les distingue et qu'on les désigne selon leur religion. La plupart ont envie de vivre, et sont d'abord des citoyens français, mais n'ont aucune envie d'être assimilés à une petite fraction d'islamistes.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous pensez donc, LFI, l'idée de Jean-Luc MELENCHON, c'est d'insérer dans notre République le fait religieux ?

JULIETTE MEADEL
Je pense qu'il insère et il essaie de fracturer la République avec toutes les différences possibles en les exacerbant. La différence religieuse, la différence sociale, il exacerbe toutes nos fractures, et je pense qu'au lieu d'essayer, au contraire, de lutter contre les inégalités, de résorber les fractures, il les accentue. Mais il n'est pas le seul, il n'est pas le seul, le Rassemblement national fait ça aussi.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que, je vous demande, je vous pose la question, est-ce qu'il utilise les musulmans ? Est-ce qu'il utilise, je dis bien utiliser, j'emploie à dessein le mot utiliser, est-ce qu'il utilise les musulmans comme cible électorale pour conquérir le pouvoir ? Comme agent pour conquérir le pouvoir ?

JULIETTE MEADEL
Il instrumentalise.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il instrumentalise.

JULIETTE MEADEL
Il instrumentalise une forme de, parfois oui, de désespérance sociale, qui s'explique par toute une série de raisons, qu'il l'instrumentalise, mais ce faisant, il emboîte le pas aussi d'une forme de radicalité religieuse. Et c'est pour ça que je lui en veux, parce qu'il jette l'opprobre sur une partie de la population qui n'a pas besoin d'être pointée du doigt. Et d'ailleurs, en faisant ça, en réalité, il complète la démarche de Marine LE PEN, qui, pour une partie de ses soutiens, discrimine aussi selon les origines. Et moi, vous voyez, ce qui me pose problème, c'est que je ne veux pas m'adresser aux citoyens de France en pointant leur origine, que ce soit leur origine nationale, religieuse. Non, vous êtes en France, vous êtes en situation régulière, vous payez vos impôts, vous travaillez, vous êtes conformes à la loi, vous êtes français, on ne vous demande pas d'où vous venez, quelle est votre religion. La religion, encore une fois, c'est à la maison, et on s'adresse à vous comme un citoyen français.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais vous savez très bien que dans certains quartiers, vous êtes responsable de la ville, dans certains quartiers, les islamistes ont pris, je ne dirais pas pris le pouvoir, mais sont très écoutés, sont très entendus.

JULIETTE MEADEL
C'est la raison pour laquelle, il faut lutter sans aucune précaution, si ce n'est le cadre légal, contre les mouvements islamistes qui tendent, qui sont des mouvements politiques. Soyons tout à fait clairs, l'islamisme fondamental est un mouvement politique, qui est d'ailleurs destiné à fracturer notre pays, ce que nous avons vécu depuis 2012, parce que les attentats terroristes qui font entrer la France dans les années noires, on peut commencer à 2012, même si on pourrait commencer avant 2012, c'est Toulouse, c'est Montauban, c'est l'école aux Aratoras, c'est cette petite fille qui est tuée à bout portant par le terroriste. En réalité, c'est une guerre idéologique contre notre modèle démocratique, républicain et laïc. Ce n'est pas de la religion, c'est de l'instrumentalisation de la religion à des fins politiques de déstabilisation de la France.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Juliette MEADEL, Jean-Luc MELENCHON, Marine LE PEN, qui espère, là je passe au terrain politique, qui espèrent un départ anticipé d'Emmanuel Macron, destitution ou démission ? Que leur répondez-vous ce matin ?

JULIETTE MEADEL
Je leur réponds qu'ils n'aiment pas la France, pour lui vouloir à ce point du mal, par de la déstabilisation. Depuis la dernière motion de censure, nous avons payé, nous sommes en train de payer, nous, contribuables citoyens, le prix de cette censure. Alors la censure, c'est une expression normale et légitime de la démocratie, mais ça a un prix économique, ça a un prix dans la stabilité politique du pays et maintenant, il faut que nous arrivions à de la stabilité. Le président de la République a été élu jusqu'à 2027, il est indispensable de permettre, maintenant, aux institutions de fonctionner, ne serait-ce que pour que les agriculteurs puissent être payés, pour que, ce qui concerne mon sujet, qui est la politique de la ville, les associations puissent recevoir leurs subventions dans les quartiers, pour qu'on puisse, à nouveau, faire fonctionner correctement, notamment les conditions de vie dans les immeubles, et puis que tous les services publics fonctionnent.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vais revenir aux conditions de vie dans les immeubles, parce que je sais que ça vous tient à coeur. 14 janvier, discours de politique générale de François BAYROU, motion de censure le 16, LFI a déposé ou déposera une motion de censure, alors évidemment tout dépendra du PS, entre autres. Est-ce que le PS va voter la censure ou pas ? Il y aurait des premières discussions, réouvertures de discussions, à propos de la réforme des retraites, vous confirmez ?

JULIETTE MEADEL
Écoutez, je le confirme à mon modeste niveau, mais bien entendu j'ai gardé et je souhaite conserver les bonnes relations que j'ai avec une partie du PS qui veut reconstruire.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est pour ça que je vous pose la question.

JULIETTE MEADEL
Vous avez raison de le faire. Je suis aussi une femme de gauche qui veut construire, qui veut aider le Premier ministre à pouvoir mener son projet à bien, et pour cela, je ne peux pas croire que tout le PS s'enferme dans une posture d'insoumis qui cherchent le chaos. Je sais, aujourd'hui, que j'ai d'anciens camarades qui veulent construire. Tenez par exemple, jeudi, je me rends chez Hélène GEOFFROY, qui est l'ancienne ministre de la ville de François HOLLANDE, nous étions ensemble au Gouvernement, qui est la maire de Vaulx-en-Velin, qui, d'ailleurs, a porté un projet de gauche constructive alternative au dernier congrès du PS, et qui, aujourd'hui, est une femme engagée, qui veut construire, bien sûr, nous ne sommes pas alignés exactement sur le plan idéologique, mais je crois qu'il est temps maintenant de construire une gauche responsable qui prenne ses distances nettes avec l'extrémisme et les insoumis.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il est temps de rompre avec LFI ?

JULIETTE MEADEL
Mais il est plus que temps, ils auraient dû le faire depuis longtemps. Écoutez, au lendemain du 7 octobre, les communications navrantes, mi- chèvre, conditionnées après les attentats du Hamas, étaient déjà le signe que le Parti Socialiste avait perdu sa boussole républicaine. Donc il est temps de rompre, et il est temps de construire l'avenir de la France.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Je reviens sur la réforme des retraites. Donc vous confirmez qu'il y a des discussions avec le Parti Socialiste ?

JULIETTE MEADEL
Le Premier ministre a assez de discussions, évidemment. Moi, à mon modeste niveau, je discute aussi, je vous le dis, avec les élus locaux qui m'accueillent.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc ouverture vers le Parti Socialiste, pourquoi pas réouverture des discussions sur la réforme des retraites, dans le cadre, par exemple, d'une conférence sociale ?

JULIETTE MEADEL
Bien entendu, comme l'a dit le Premier ministre, d'ailleurs bien avant la composition du Gouvernement, c'est aussi l'une des raisons qui ont fait que je l'ai soutenue.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous est prêt, au Gouvernement à remettre sur la table la réforme.

JULIETTE MEADEL
Le Premier ministre a dit, avant même de constituer son gouvernement, qu'il souhaitait une conférence sociale sur la réforme des retraites. Il l'a dit.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et que dit le PS, que disent vos amis du PS ?

JULIETTE MEADEL
L'ancien président de la République, François Hollande, vient de dire, a dit hier, qu'il était favorable à des discussions, qu'il était aussi favorable évidemment à une conférence sociale, et que bien évidemment, il ne fallait pas déstabiliser le gouvernement de ce pays, et encore moins le président de la République, Jusqu'en 2027. C'est une attitude responsable, qui est l'attitude d'un ancien président, et j'espère qu'elle sera durable.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc c'est, aujourd'hui, la piste suivie, l'une des pistes suivies par le Gouvernement, pour essayer de trouver un accord avec la gauche, les socialistes, pour ne pas subir une nouvelle censure.

JULIETTE MEADEL
Vous savez, je crois que...

JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai bien compris, Juliette MEADEL ?

JULIETTE MEADEL
C'est le Premier ministre qui donnera, lui-même, le la, encore une fois, mais je crois que si les socialistes veulent éviter de donner trop d'importance au Rassemblement National, et bien qu'ils prennent leurs responsabilités. Moi je suis venue dans ce gouvernement, aussi parce que j'ai entendu ce qu'ont dit les Français aux élections législatives, ils ont dit qu'ils ne voulaient pas donner le pouvoir au Rassemblement National. Et bien donc le Parti Socialiste, sa responsabilité, en jouant son rôle constructif, en venant discuter, en travaillant, en essayant d'améliorer les projets, son rôle c'est d'éviter que le Gouvernement ne dépende de la censure du Front National, du Rassemblement National.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, bien, bien. Juliette MEADEL, parlons de la politique de la ville.

JULIETTE MEADEL
J'espère bien, je suis venue pour ça que je suis intervenu. Il y a urgence, la situation est très difficile dans les quartiers.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Si on avait un peu abandonné tous nos quartiers, mais il n'y a pas que les quartiers. La ville c'est aussi la ville de province, c'est aussi les quartiers périphériques des villes de province, qui sont aussi abandonnés.

JULIETTE MEADEL
La politique de la ville, vous avez raison de le dire, c'est surtout des zones de France, qui sont des zones à la fois denses, mais pas tant que ça, mais surtout pauvres, frappées par la pauvreté, mais également frappées par la difficulté d'avoir accès aux services publics. Alors, le service public, aujourd'hui, dans ces quartiers politiques de la ville, il est assumé par tous les autres ministres, l'éducation, la santé, etc. Mais ce que fait le ministre de la ville, c'est non seulement qu'il impulse, mais il soutient les associations. Et je vais vous parler de la rénovation urbaine, si vous le voulez bien.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, allez-y

JULIETTE MEADEL
Puisqu'il s'agit dans les quartiers politiques de la ville, c'est-à-dire ces quartiers, encore une fois, pauvres, qui donnent lieu à des contrats. Il y a aujourd'hui 1 600 contrats partout en France signés entre l'État, les communes et les associations dans ces quartiers. Ces quartiers-là, ils doivent être privilégiés, soutenus, non pas privilégiés, mais soutenus davantage par les pouvoirs publics parce qu'ils sont en situation de grande pauvreté. Qu'est-ce que c'est l'argent de la politique de la ville ? Aujourd'hui, c'est à peu près 12 milliards d'euros avec ce qu'on appelle la rénovation urbaine, c'est-à-dire qu'on reconstruit des immeubles qui sont en décrépitude. Cet argent-là, il sert à améliorer les conditions de vie quotidiennes. Mais il n'y a pas que ça. L'État et les communes utilisent vos impôts, Jean-Jacques BOURDIN, pour aider les bailleurs sociaux, c'est-à-dire ceux qui entretiennent votre immeuble dans lequel vous vivez, quand vous vivez, par exemple, dans un logement social, en échange d'une obligation d'entretien. Il faut que les ascenseurs fonctionnent, il faut que les poubelles soient bien relevées, que les boîtes aux lettres soient sécurisées, bref, que vous puissiez, tous les matins, vivre tranquillement, que vous puissiez sortir de chez vous sans être menacé par du trafic de drogue. Eh bien, en échange d'une aide de 315 millions d'euros, les bailleurs sociaux doivent entretenir correctement ces immeubles.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et s'ils n'entretiennent pas correctement ?

JULIETTE MEADEL
Eh bien, c'est là que je demande, aujourd'hui, chez vous, au préfet, de faire un état des lieux, dans les trois semaines qui viennent, de la situation d'entretien des logements sociaux dans les quartiers politiques de la ville, pour voir si, en échange de cette aide de 315 millions d'euros, ils font bien leur travail. Et si le travail n'est pas bien fait, je demanderai au préfet de revenir sur ce qu'on appelle cette exonération de tâches foncières.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, si le bailleur social chargé d'entretenir la HLM, habitation dans le loyer modéré dans les quartiers politiques de la ville, ne fait pas son boulot, sanction ?

JULIETTE MEADEL
Exactement. Et c'est pour ça que je me suis engagée. Vous voyez, c'est très concret. C'est parce qu'un euro dépensé doit être un euro utile. On est dans une période difficile sur le plan budgétaire. Il faut que l'argent public soit bien utilisé. Cette somme de 315 millions d'euros, c'est une somme qui pèse sur quoi ? Sur le budget des communes et sur le budget de l'État. Alors, attention. Heureusement que les bailleurs sociaux sont là, parce qu'ils ont un rôle fondamental, que la vie n'est pas toujours facile pour eux sur le plan économique. Mais la seule chose que je leur demande, c'est faites le job pour lequel vous avez une aide publique, faites-le.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, mais la vie est difficile dans ces quartiers. Elle est difficile parce que les immeubles sont dégradés bien souvent, mais elle est difficile aussi parce qu'il y a du trafic.

JULIETTE MEADEL
Oui, j'y étais d'ailleurs. J'étais à Clichy, à Montfermeil, et j'étais dans le Val d'Oise à Argenteuil, encore avant-hier. J'ai constaté, dans certains immeubles, que les trafiquants s'installent, font des trous dans les murs pour cacher la drogue, et installent, dans les sous-sols, des supermarchés de la drogue. Mais heureusement, l'État est là, l'État veille, et on lutte contre ça. Ce n'est pas facile, attention. Mais c'est ça qui pourrit la vie des habitants. Et donc, il faut une présence. La présence des bailleurs sociaux, elle est indispensable, parce qu'ils mettent des systèmes de gardiennage, ils mettent des systèmes même de surveillance, de propreté. Quand les ascenseurs tombent en panne tous les deux jours, moi j'en ai discuté avec les habitants, hier, c'est insupportable. Donc maintenant, moi, je souhaite que les bailleurs sociaux fassent leur job. Il faut que les ascenseurs fonctionnent, il faut que ce soit propre, il faut que les boîtes aux lettres ferment, c'est simple. C'est ça la ministre de la Ville. Si je dois être la ministre des ascenseurs qui marche, je serai la ministre des ascenseurs qui marche.

JEAN-JACQUES BOURDIN
La ministre de la Ville, c'est aussi la ministre des grandes villes.

JULIETTE MEADEL
Mais bien entendu.

JEAN-JACQUES BOURDIN
On est bien d'accord, Juliette MEADEL. Des grandes villes avec des habitants qui viennent souvent de banlieues, qui veulent venir travailler dans les grandes villes, mais qui peuvent plus s'ils ont une voiture ancienne. Juliette MEADEL, c'est une forme de pénalisation des classes modestes.

JULIETTE MEADEL
Alors vous savez, la zone, vous êtes en train de parler de ce qu'on appelle les ZFE, dont l'objectif est quand même louable, parce qu'il y a quand même 40 000 morts, chaque année, à cause des microparticules. Donc c'est quand même louable de dire on va améliorer la qualité de l'air. Mais là où, vous avez raison de le dire, avec Agnès PANNIER-RUNACHER, on en a parlé…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vous coupe. Alors attendez, vous allez pouvoir vous exprimer. Il reste deux minutes trente, mais je vous coupe. Un, j'habite dans un quartier difficile. Mon immeuble risque d'être dégradé, il l'est souvent, malheureusement. Et c'est là que vous incitez, et vous allez même punir, les bailleurs sociaux qui ne remplissent pas leurs devoirs. Je prends ma voiture. Souvent je fais une heure ou une heure et demie pour aller travailler. J'ai une vieille voiture parce que je n'ai pas les moyens d'avoir une neuve. Et je suis pénalisé si j'entre dans le centre-ville à l'endroit où je vais travailler tôt le matin.

JULIETTE MEADEL
Et je vais rajouter pour les artisans qui travaillent et qui ont besoin d'une voiture pour aller travailler en centre-ville, cette mesure est très difficile. C'est la raison pour laquelle, j'en ai parlé hier avec Agnès PANNIER-RUNACHER, qui est comme moi, tout à fait consciente du fait qu'il faut travailler sur de probables dérogations. Je ne veux pas aller plus loin.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il va y avoir des dérogations ?

JULIETTE MEADEL
Non, je n'ai pas dit ça. Je dis, nous sommes d'accord pour y travailler. Nous allons voir ensemble comment c'est possible.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Dérogations pour qui ? Pour les artisans, par exemple ?

JULIETTE MEADEL
Pour les quartiers politiques de la ville, par exemple, mais nous allons voir, Jean-Jacques BOURDIN, nous allons voir.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire que les quartiers, ceux qui habitent dans les quartiers politiques, donc, de la ville pourraient avoir des dérogations ?

JULIETTE MEADEL
Je ne suis pas en train de vous dire que nous allons exclure une partie du territoire français, une partie considérable, parce que les quartiers politiques de la ville, vous savez, c'est à peu près six millions de Français. Je ne dis pas ça. Je dis : nous allons regarder au cas par cas pour faire en sorte que notre objectif, qui est le mien, qui est de remettre du travail, de l'activité économique et de la dignité dans les quartiers politiques de la ville. La dignité, c'est de ne pas se sentir exclu de la société.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, il est possible qu'il y ait des dérogations ? Il est possible ?

JULIETTE MEADEL
Donc, nous allons y travailler. Oui.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il est possible qu'il y ait des dérogations ?

JULIETTE MEADEL
Nous allons y travailler ensemble. Nous allons voir comment nous faisons, au cas par cas, selon les zones, les régions, comment les transports publics peuvent, ou pas, offrir une alternative. Vous savez, c'est un travail de dentelle, parce que le territoire français est fracturé. Il y a des zones qui vont très bien, puis il y en a qui ne vont pas bien du tout, c'est à ça qu'il faut travailler.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Juliette MEADEL, je vais lancer un appel au nom de tous les artisans. Préservez les artisans. Préservez les petits patrons de PME ou de TPE. Ici, on en a beaucoup qui nous écoutent et qui sont avec nous. Préservez-les de ces difficultés.

JULIETTE MEADEL
Il faut non seulement les préserver, mais surtout les écouter parce que c'est aussi une source d'emploi. Le tissu économique français, c'est beaucoup de PME et sans les artisans, y compris dans les villes. Je vais vous dire, y compris dans les villes, il est absolument…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Même si Montrouge, maintenant, est devenue une commune riche.

JULIETTE MEADEL
Mais pas partout, vous savez.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Pas partout, à Montrouge, je sais.

JULIETTE MEADEL
À Montrouge, il y a des zones qui sont quand même pauvres, vraiment. Et puis il y a même des zones pauvres qui n'ont pas de commerce. Donc les artisans, les commerçants, nous en avons besoin parce que ça fait vivre les villes.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et ils ont besoin d'aller aussi en centre-ville.

JULIETTE MEADEL
Mais nous avons besoin, dans le centre-ville…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et ils n'ont pas les moyens d'avoir des véhicules neufs.

JULIETTE MEADEL
C'est la raison pour laquelle je vous dis qu'il faut travailler pour que chacun se sente pleinement citoyen de la République.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, dérogation possible ?

JULIETTE MEADEL
Possible. Nous allons y travailler avec Agnès PANNIER-RUNACHIER.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Juliette MEADEL.

JULIETTE MEADEL
Merci de votre invitation.

JEAN-JACQUES BOURDIN
D'être venue nous voir ce matin sur l'antenne de Sud Radio.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 7 janvier 2025