Texte intégral
FRANÇOIS GEFFRIER
Bonjour, Agnès PANNIER-RUNACHER.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Bonjour François GEFFRIER.
FRANÇOIS GEFFRIER
Bienvenue sur France Info, ministre de la Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche. Le cyclone Garance a touché l'île de La Réunion, qui est en alerte violette. Il est en ce moment même au-dessus de l'île. L'alerte violette, c'est le plus haut niveau. Est-ce que vous avez de toutes dernières informations, des dernières remontées de terrain sur les impacts de ce cyclone ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Écoutez, la chose vraiment que je veux dire ici, c'est qu'il faut absolument respecter les consignes de sécurité, éviter de sortir sous aucun prétexte, les forces de l'ordre sont confinées le temps que le cyclone passe et nous ferons ensuite un point sur les dégâts quand cet épisode sera passé et qu'on redescendra de ce niveau violet de l'alerte.
FRANÇOIS GEFFRIER
Justement, quand on entend alerte violette, ça nous fait penser immanquablement à Mayotte, il y a deux mois. Alerte violette, c'était le cyclone Chido qui avait aussi été placé sous ce type d'alerte. Des habitations ravagées, plus d'eau, plus d'électricité, un bilan encore flou à un humain de 39 morts à ce stade. Est-ce que vous craignez des dégâts de cet ordre ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
L'île de La Réunion est habituée aux cyclones et il y a une vraie culture de risque et les habitats sont, pour l'essentiel, aux normes cycloniques. Donc, ça, c'est pour le côté positif, mais moi, tant qu'il n'y a pas de bilan réel, je ne me prononcerai pas. On est évidemment aux côtés de tous les habitants de La Réunion. On sait à quel point ces épisodes sont traumatisants. On sait que c'est une population qui sait ce que c'est que des cyclones, qui n'est pas quelque chose de nouveau, mais avec le dérèglement climatique, ces cyclones ont un impact beaucoup plus fort qu'ils ne l'avaient auparavant et on voit, là encore, l'importance de prendre réellement au sérieux le sujet du dérèglement climatique.
VICTORIA KOUSSA
Justement, vous parlez de l'intensité, vous dites que ces habitations sont aux normes, mais effectivement, ces cyclones sont de plus en plus forts. Est-ce que selon vous, les infrastructures, que ce soit sur ces îles ou même sur le littoral, dans l'Hexagone, sont assez adaptées, aujourd'hui, à ces phénomènes-là ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est tout l'enjeu du plan national d'adaptation au changement climatique que je vais présenter en début de semaine prochaine.
VICTORIA KOUSSA
Vous avez déjà des pistes concrètes à nous avancer ce matin ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Vous savez que ce plan va comporter une cinquantaine d'actions. Surtout, c'est le point de départ d'un travail au plus près du terrain pour protéger les Françaises et les Français. Protéger les Françaises et les Français, c'est par exemple, avec tous les élus de littoraux, investir pour améliorer la protection face à la submersion marine, face au retrait de côte et anticiper le fait que d'ici trente ans, d'ici quarante ans, la mer va monter et donc certaines habitations, certaines installations ne pourront plus être à l'endroit où elles sont.
VICTORIA KOUSSA
Mais très concrètement, les gens qui vivent sur le littoral vous écoutent et se disent, qu'est-ce qui va changer pour eux demain ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Ce qui va changer pour eux demain, c'est qu'on va les accompagner s'ils sont amenés à être touchés par ce risque de submersion marine ou ce retrait de côte. Moi, j'ai obtenu avec le budget une augmentation de l'enveloppe de gestion des risques de 40%. Dans le budget contraint dans lequel on était, c'est une performance. Et cet argent, il va permettre deux choses. D'une part, d'améliorer notre protection face à des risques, c'est valable pour la forêt, c'est valable pour la montagne aussi, où il y a des risques importants. Et d'autre part, de reloger ceux qui sont, aujourd'hui, les plus vulnérables par rapport à ce que l'on sait décrire de ce que sera l'impact du dérèglement climatique.
FRANÇOIS GEFFRIER
Agnès PANNIER-RUNACHER, la justice a estimé illégal le chantier en cours de l'autoroute entre Toulouse et Castres. L'A69, ce chantier est suspendu. Est-ce que pour vous, c'est une décision ubuesque comme l'a dit votre collègue ministre des Transports, ou est-ce une bonne chose pour l'environnement ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Moi, je ne commente pas les décisions de la justice. Je vous dis une chose, c'est que l'Etat fera appel, et que je soutiens, évidemment, cet appel. Je rappelle que ce projet, il est soutenu par tous les élus locaux, quels que soient leurs bords, des élus de droite, des élus de gauche, des élus qui ont à coeur de protéger l'environnement.
VICTORIA KOUSSA
Et ça, ça va au-dessus de la justice selon vous ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, c'est que nous allons porter cet appel parce que nous estimons qu'il est faux de dire, ou en tout cas, nous chercherons à défendre, l'idée que ce projet est un projet d'importance majeure, c'est le point sur lequel le tribunal s'est prononcé. Est-ce que ce projet est un projet d'importance majeure pour la population locale ou pas ? Nous nous estimons que c'est un projet de désenclavement, et un projet qui est très important pour les habitantes et les habitants de ce territoire.
VICTORIA KOUSSA
Avec cet appel, il y a une demande d'un sursis à exécution. C'est-à-dire que si c'est accepté, le chantier pourra reprendre le temps de la procédure ? C'est-à-dire que vous assumeriez, vous, en tant que Ministre, qu'un chantier jugé illégal à la justice puisse se poursuivre encore ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Moi, j'applique la loi. Et donc, si la loi nous permet de continuer le chantier, je ne vois pas de raison, puisque je respecte les décisions et j'applique la loi.
VICTORIA KOUSSA
Il est jugé quand même, le tribunal tranche en disant qu'il y a une atteinte à l'environnement. Vous êtes ministre.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, ce n'est pas ce que dit le tribunal, Victoria KOUSSA. Très précisément, le tribunal dit que ce n'est pas un projet d'intérêt majeur.
VICTORIA KOUSSA
Justifiant de porter atteinte à l'environnement ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Justifiant, mais comme tout projet humain. Lorsque vous construisez votre maison, vous portez atteinte, vous avez un impact sur l'environnement. Et cet impact, nous sommes dans un pays où les lois environnementales sont parmi les plus exigeantes au monde et vous savez qu'il y a une séquence. Éviter l'impact, le réduire et le compenser et ce projet le fait avec beaucoup de rigueur. Donc, effectivement, l'État fera appel. C'est un projet de désenclavement. Et moi, je veux dire ici une chose. L'écologie, ce n'est pas des interdictions tous azimuts, c'est précisément ça qui fait qu'aujourd'hui, les Français se détournent de l'écologie, alors même que nous avons absolument besoin de défendre l'environnement, de lutter contre l'effondrement de la biodiversité.
VICTORIA KOUSSA
Il y a déjà une route nationale qui relie Castres à Toulouse. En quoi, comme le dit François GEFFRIER, en quoi gagner 25 à 15 minutes de temps justifie un tel projet ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, moi, je vous invite à écouter ce que nous disent les élus locaux et ce que nous disent les habitants sur le terrain.
VICTORIA KOUSSA
Ils sont partagés les habitants, justement. On a un reportage qu'on entend depuis ce matin sur France Info qui montre que les habitants sont divisés sur ce projet.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais quand vous avez une majorité d'élus locaux qui représentent quand même leur population, je peux toujours vous trouver si important, quelqu'un qui dira qu'il est pour et quelqu'un qui dira qu'il est contre et c'est votre travail de montrer cela, bien entendu. Mais quand tous les élus locaux, de tous bords, de la droite, de la gauche, de la région, députés, maires, vous disent que ce projet est important, c'est parce qu'ils l'entendent de la part de leur population.
FRANÇOIS GEFFRIER
Est-ce qu'il ne faudrait pas laisser la population trancher par un référendum, comme on l'avait vu à Notre-Dame-des-Landes ? Puisque vous dites que la population est favorable.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Il faut aussi entendre ce que dit cette population. Et à un moment, il faut faire confiance aux élus locaux. Il ne faut pas depuis Paris, et peut-être depuis Paris où nous avons la chance d'avoir six autoroutes, des infrastructures extraordinaires, et nous ne pouvons pas parler d'enclavement, décider.
VICTORIA KOUSSA
Quand on vous écoute, on dirais que Castres et Toulouse ne sont pas reliés.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je vous dis ma position, elle est très claire. Moi, je suis à l'écoute des gens sur le territoire, je suis à l'écoute des habitants, et je ne regarde pas les dossiers avec des yeux de Paris, je les regarde d'autant moins avec des yeux de Paris que je suis élue d'un autre territoire où il y a de la ruralité, où les questions de désenclavement dans le Pas-de-Calais se posent.
FRANÇOIS GEFFRIER
Est-ce qu'en tant que ministre de la Transition écologique, c'est parfois compliqué d'être entre deux chaises sur ce type de sujet ? Vous défendez l'écologie d'un côté, vous défendez une solidarité gouvernementale et des projets validés.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Ce n'est pas une solidarité gouvernementale, c'est une conviction que lorsqu'on fait un projet…
FRANÇOIS GEFFRIER
Qu'il faut faire des autoroutes.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, là, vous êtes très caricatural. C'est une conviction que lorsqu'on fait un projet au service de la population et qu'on l'a fait avec rigueur, c'est-à-dire qu'on a minimisé son impact environnemental et que l'on a compensé cet impact environnemental avec des mesures considérables, alors, oui, je pense qu'on a bien fait les choses. Et c'est ma conviction, et je ne veux encore une fois pas opposer écologie et activité humaine. L'écologie, c'est un équilibre, c'est l'équilibre de l'homme avec son environnement, avec son écosystème, ça ne veut pas dire rien faire. C'est ça que les gens d'ailleurs comprennent mal et ils ont raison. Si vous dites que l'écologie, c'est juste des interdictions, c'est une méconnaissance profonde de ce que c'est que l'écologie.
VICTORIA KOUSSA
Agnès PANNIER-RUNACHER, on se souvient d'un tragique événement, la mort de Rémi FRAISSE, il y a plus de dix ans maintenant, qui s'est opposé à un autre projet, le barrage de Sivens, la Cour européenne des droits de l'homme vient de condamner la France pour violation du droit à la vie. Que de temps perdu d'après sa famille, vous la comprenez ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Moi, je comprends surtout la détresse de sa famille. Je pense que perdre un être proche est parmi les choses les plus difficiles, quelqu'un de jeune, je pense que ses parents, évidemment, sont dévastés. La France a été condamnée, là aussi, j'en prends acte. Un Gouvernement n'a pas, et c'est très important, à critiquer ou à discuter des décisions de justice.
VICTORIA KOUSSA
Mais si je vous pose la question, c'est aussi parce qu'il peut y avoir une forme d'inquiétude, notamment de la part de ces militants qui se mobilisent contre ces projets-là. Est-ce qu'il faut aller aussi un peu plus loin dans l'analyse de la gestion de la force, des forces de l'ordre notamment ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je crois que beaucoup d'enseignements ont été tirés de cet épisode. Vous avez raison de rappeler que c'était il y a dix ans et que précisément…
VICTORIA KOUSSA
Il y a un truc de grenade, notamment, qui a été interdit.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Et que précisément, on a pris des mesures pour faire en sorte que dans le cadre de manifestations, et je rappelle que ces manifestations n'avaient pas été déclarées, donc les forces de l'ordre sont légitimes à intervenir, mais tout l'enjeu, c'est d'arriver à avoir cet équilibre, de préserver l'ordre public, mais évidemment de préserver la sécurité des manifestants comme des personnes contre lesquelles ils manifestent. Et moi, je veux remercier les forces de l'ordre parce qu'on l'a vu dans toutes les manifestations qui ont pu se dérouler, cette recherche permanente de protéger d'abord les habitantes et les habitants quelle que soit leur opinion, et de faire en sorte qu'on s'exprime, mais on s'exprime de la manière la plus respectueuse. Mais je ne crois pas. Je ne crois pas qu'aller manifester avec des armes, à aller manifester avec des boules de pétanque…
VICTORIA KOUSSA
Ce n'est pas le cas de tous les manifestants, il faut quand même le rappeler.
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est pour ça que je ne fais surtout pas de caricatures, et moi, j'ai toujours été en soutien des organisations non-gouvernementales qui agissent de manière pacifique. J'ai soutenu France Nature Environnement, quand ils ont été attaqués. J'ai demandé à l'époque aux gardes des Sceaux et aux ministres de l'Intérieur d'accélérer les enquêtes. Vous savez que certaines permanences d'organisation ont été attaquées. Bon, ben voilà, ça tombe sous le coup de la loi. La loi s'applique à tout le monde. Elle s'applique aux militants écologistes, elle s'applique à ceux qui s'opposent aux militants écologistes et les forces de l'ordre font leur travail et je crois plutôt très bien.
FRANÇOIS GEFFRIER
Agnès PANNIER-RUNACHER, vous rentrez de la COP16 consacrée à la biodiversité, c'était à Rome, et un compromis a finalement été trouvé pour financer la protection de la nature. Pourquoi ça a été aussi compliqué de trouver un consensus ? On a parfois l'impression que la biodiversité est un peu cannibalisée par la question du climat. Est-ce que c'est votre ressenti aussi ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
D'abord, je veux dire que c'est une grande victoire politique. Et une grande victoire politique, au moment où les autonomes, les voitures, au moment où certains essayent de nous faire croire qu'on ne peut pas travailler avec les pays du monde pour avancer sur la cause de l'environnement. C'est très important. C'est la première chose.
FRANÇOIS GEFFRIER
Donc le multilatéralisme, les COP, les instances onusiennes, ça fonctionne au moment où Donald TRUMP les rejette ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Ça fonctionne, on a un accord, on voit qu'on arrive à aligner des pays qui ont des intérêts totalement divergents. Je rappelle que dans cette COP, nous avions la Russie, nous avions le Brésil, nous avions l'Inde, nous avions la Chine, nous avions l'Union européenne. Donc nous avions, évidemment, l'Afrique, et les petites îles et nous sommes parvenus à un accord, et c'est un accord au consensus. Donc c'est très fort politiquement et ça, je veux le souligner. Évidemment que c'est difficile. J'ai nommé les pays. Ils ont des intérêts différents. Nous portons des visions différentes. Et ce qui est intéressant, c'est que, néanmoins, nous sommes capables de mobiliser de l'argent et ce n'est pas seulement une question d'argent, c'est aussi le fait que nous avons un cadre qui va permettre de montrer, chaque pays devra démontrer, comment il agit pour lutter contre l'effondrement de la biodiversité, donc c'est de la transparence, c'est du reporting, c'est donner la possibilité à la société civile de savoir ce qui se passe concrètement dans chacun des pays, donc, c'est un accord qui a beaucoup de force et on va continuer à agir. Ça sera très difficile. Je n'ai aucun doute sur ça. Quand je suis partie à Rome pour mener la délégation française, très objectivement, je n'étais pas du tout sûre qu'on aurait un accord. Et je veux aussi dire que la France et l'Union européenne ont joué un rôle important pour obtenir cet accord. Et j'en suis très fière.
FRANÇOIS GEFFRIER
Le 8 :30, France Info avec Agnès PANNIER-RUNACHER, ministre de la Transition écologique continue, dans un instant après le Fil Info à 8 h 46 d'Étienne CHOLEZ.
(…)
VICTORIA KOUSSA
Vous êtes sur France Info avec, Agnès PANNIER-RUNACHER, ministre de la Transition écologique. On parlait de cet accord trouvé dans la nuit, à la COP 16 dont vous revenez. Il y a des objectifs très ambitieux, notamment la protection des terres et des mers. Pour ça, il faut beaucoup d'argent, on en parlait juste avant. Précisément 200 milliards de dollars par an d'ici 2030. On a senti, quand même, une frilosité de la part des pays développés. Qu'est-ce qu'il explique ? Est-ce que c'est le contexte international qui explique aussi cette frilosité à investir pour la biodiversité ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, c'est parce que ce n'était pas la position de l'Union européenne. Ce que nous disons, nous, et ce que je porte, moi, c'est que l'argent qui va venir en soutien de la lutte contre l'effondrement de la biodiversité, elle doit devenir, elle doit venir de toutes les sources. C'est ce que le président de la République a porté depuis plusieurs années, qu'on a concrétisé à Paris il y a deux ans dans un pacte de Paris pour les peuples et la planète. C'est de dire que si on n'arrive pas à faire venir l'argent du secteur privé, si on n'arrive pas, dans nos budgets nationaux, à consacrer des montants importants, et dans ces 200 milliards de dollars que vous mentionnez, c'est la somme de tous les budgets nationaux aussi consacrés à la biodiversité. Si on n'arrive pas à arrêter les subventions qui portent atteinte à la biodiversité et à les réorienter vers la protection de la biodiversité, alors, on ne va pas y arriver collectivement. C'est donc, essayer de lever le regard et d'arriver à un vrai niveau d'ambition. Le risque de ce type de négociations, c'est d'essayer de trouver un coupable. Il est assez vite trouver ou d'essayer de trouver quelqu'un qui est riche et qui peut financer. Le débat, il va beaucoup plus loin, il est beaucoup plus profond, c'est comment collectivement, chaque pays, dans son budget, qu'il soit pauvre ou qu'il soit riche, arrive à mobiliser le maximum de financements pour lutter contre l'effondrement de la biodiversité ?
VICTORIA KOUSSA
Il y avait, quand même, un grand absent, c'était les Etats-Unis à cette COP 16. Est-ce que ça servait vraiment à quelque chose ? Ce sont les Etats-Unis, est-ce qu'on peut conclure un tel accord ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais bien sûr, Et c'est justement ça qui est important.
VICTORIA KOUSSA
Est-ce que ça peut fonctionner, quand même ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
. C'est ça qui est important. C'est-à-dire quand on sait faire des accords sans les Etats-Unis. C'est ça le message fort. Peut-être que les Etats-Unis, aujourd'hui, ont décidé de faire cavalier seul, mais tous les autres pays, y compris l'Argentine, y compris la Russie, y compris des pays qui peuvent apparaître comme en retrait sur les sujets environnementaux ont porté cet accord. Je pense que c'est un message très fort pour tous les populistes qui essaient de nous inviter à ne rien faire sur la finance internationale, sur l'aide au développement. Je rappeler une chose l'aide au développement, c'est un des mécanismes les plus puissants pour lutter contre l'immigration climatique. C'est un des mécanismes les plus puissants pour protéger nos populations…
VICTORIA KOUSSA
On voit que des pays n'ont pas le choix que de couper dedans. Par exemple, les Britanniques sont en train de couper l'aide au développement pour pouvoir financer le reste.
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est pour ça que j'affirme que c'est aussi un sujet de souveraineté et de développement. C'est aussi un sujet de protection des populations et qu'il faut surtout regarder à long terme si on veut vraiment protéger nos populations.
VICTORIA KOUSSA
La France ne doit pas y toucher à son aide au développement, très rapidement ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je pense que l'aide au développement est un budget tout à fait stratégique. On fait des efforts sur tous les budgets, mais c'est un budget stratégique.
FRANÇOIS GEFFRIER
Une figure politique vous a attaquée, Agnès PANNIER-RUNACHER, lors de sa visite au Salon de l'agriculture. C'était Laurent WAUQUIEZ qui veut supprimer, dans sa région, l'Office français de la biodiversité. C'est la police de l'eau et de l'environnement. Il vous accuse de ne pas connaître assez les agriculteurs. Est-ce qu'il vous met la pression, en quelque sorte ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, je ne crois pas. Je ne vais pas nourrir une polémique probablement liée aussi à une campagne pour un parti dont je ne fais pas partie.
FRANÇOIS GEFFRIER
Les Républicains.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je vais laisser cette campagne se faire. Je vais dire très simplement une chose. On ne supprimera pas la police de l'eau et de l'environnement. Pourquoi ? Parce qu'on en a besoin.
FRANÇOIS GEFFRIER
Est-ce que lui a le pouvoir de le faire ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Parce qu'elle existe depuis le Moyen-Âge, cette police. C'est aussi une police de la chasse. Elle est indispensable, en particulier à un moment où les pollutions font que nous avons perdu, en 40 ans, un tiers des points de captage d'eau potable dans notre pays.
FRANÇOIS GEFFRIER
Est-ce que lui, Laurent WAUQUIEZ, a le pouvoir de supprimer l'OFB, l'Office français de la biodiversité, chez lui ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, c'est un propos polémique. Mais on sait tous qu'on ne supprimera pas la police de l'eau et de la biodiversité.
VICTORIA KOUSSA
Donc, ils sont utiles, c'est ce que vous dites.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Bien sûr qu'ils sont utiles. Et personne n'en doute. Il n'y a pas un agriculteur que j'ai rencontré au salon. Il se trouve que j'ai été en charge du portefeuille de l'agriculture aux côtés de Marc FESNEAU, il y a encore quelques mois. J'en ai rencontré des centaines des agriculteurs. On a évidemment parlé de tout ça. Et eux-mêmes nous disent que ce n'est pas le sujet. Le sujet, c'est d'avoir des normes environnementales qui ne soient pas absurdes par rapport aux pratiques agricoles.
FRANÇOIS GEFFRIER
On dirait qu'il y a quand même un malaise avec cet Office français de la biodiversité, notamment le fait qu'il soit armé. François BAYROU leur suggérait d'avoir un port d'arme plus discret, sans qu'on sache ce que ça signifie.
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est quelque chose de très précis et qui a été décidé, que nous avons co-signé avec ma collègue Annie GENNEVARD, dans une circulaire de décembre. Le port d'arme discret, c'est tout simplement un système qui vous permet de mettre votre arme à la ceinture à l'intérieur et qui évite d'être vécue comme une provocation.
VICTORIA KOUSSA
Est-ce que vous ne trouvez pas que ça fragilise les agents de l'Office français de la biodiversité quand François BAYROU s'en prend à eux lors de sa déclaration politique générale ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Vous savez que François BAYROU vient d'écrire une lettre de soutien au patron de l'OFB, à la présidente de son conseil.
VICTORIA KOUSSA
C'est un peu facile après s'être attaqué à l'aide lors de sa déclaration politique générale.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je vous dis les faits. François BAYROU vient d'écrire une lettre de soutien, mais très précise, disant qu'il soutiendrait les poursuites jusqu'à chaque fois qu'il y a eu des agressions contre des agents de l'OFB, qui sont des agressions inadmissibles, qui sont des agressions indignes. On agresse un policier quand on agresse un agent de l'OFB. Il soutiendrait ces poursuites, qui dit qu'il réunira les préfets pour faire en sorte que les contrôles soient pilotés aussi au niveau préfectoral, puisque vous savez que les préfets ont un rôle dans le prononcer des sanctions administratives pour que ça aille plus vite, et qui, évidemment, redit sa confiance aux agents de l'OFB.
VICTORIA KOUSSA
D'un côté, vous dites que cette police de l'environnement est indispensable. De l'autre, il y a un projet de loi qui a été adopté, c'est le projet de loi d'orientation agricole, où on dépénalise les attentes à l'environnement. On contrôle ou on ne contrôle pas ? S'ils ne peuvent plus agir, à quoi ils servent ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Attention ! Les policiers de l'OFB, ils prononcent des sanctions administratives et des sanctions pénales. D'ailleurs, ils prononcent des sanctions administratives et des sanctions pénales. C'est le juge qui prononce des sanctions pénales. Et donc, ils sont officiers de police, et ils ont un rôle de police administrative. Donc, ce n'est absolument pas incohérent.
VICTORIA KOUSSA
Mais comme les atteintes à l'environnement sont moins pénalisées aujourd'hui, est-ce que…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Non. Ce qui est prévu dans le projet de loi. Alors, il y a plusieurs choses, parce que tout n'est pas parfait dans cette loi.
VICTORIA KOUSSA
Qu'est-ce que vous contestez dans cette loi, justement ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Il y a un certain nombre... Je pense notamment au sujet des travaux forestiers, où... Mais je pense qu'il y a peut-être un... On est allé un peu vite pendant la CMP, qui a duré très longtemps.
FRANÇOIS GEFFRIER
Il fallait l'adopter avant le salon d'agriculture, en quelque sorte.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, mais une CMP, c'est... Ça dure 6 heures ou des heures. Les gens qui nous écoutent ne savent pas ce que c'est.
FRANÇOIS GEFFRIER
Ce conclave entre députés et sénateurs.
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est le député qui rapproche le texte voté au Sénat et le texte voté à l'Assemblée nationale, et qui essaye de retrouver... de se mettre d'accord sur une rédaction unique, qui ensuite est promulguée. Donc... Mais je ne vais pas rentrer dans le détail. Ce qu'il faut retenir, c'est que moi, je l'ai porté quand j'étais à l'agriculture. C'est qu'il vaut mieux une sanction qui soit rapide, claire, précise, et qui tape au portefeuille quand il y a des erreurs. Lorsque vous êtes mal garé et que vous avez une amende, tout le monde comprend. Et sur des petits manquements à la loi, et c'était d'ailleurs auparavant prévu, avoir ce type de sanctions administratives, c'est beaucoup plus efficace, c'est beaucoup plus rapide. Ça évite de mobiliser la justice pour avoir ensuite un non-lieu. Parce que je rappelle qu'il y a 0,04% des contrôles de l'OFB qui donnent lieu à une sanction pénale. Donc, en fait, c'est simplement ajuster la réalité des peines avec la réalité du terrain.
FRANÇOIS GEFFRIER
On dirait que le référendum revient à la mode. Est-ce qu'il faudrait un référendum sur les retraites en cas de blocage d'un autre conclave, celui entre les partenaires sociaux qui a commencé, hier ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Moi, j'ai toujours fait confiance aux partenaires sociaux dans tous les portefeuilles où j'ai travaillé, notamment à l'industrie.
FRANÇOIS GEFFRIER
Mais eux ne font pas tous confiance. Le MEDEF est pessimiste, FO a quitté la table, dès hier.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais laissons-les travailler. C'est comme la France. Tout le monde attend que ça allie des échecs dans les négociations. Une bonne négociation, je vais essayer d'aller jusqu'au bout de mon propos, une bonne négociation, c'est une négociation où il y a de la tension. Ça veut dire qu'on est sur les vrais sujets. Et moi, je n'ai pas de raison de penser que les partenaires sociaux ne peuvent pas trouver un accord.
FRANÇOIS GEFFRIER
Sauf qu'il y a un cadrage extrêmement ferme, effectivement, de Matignon, qui a été dénoncé d'emblée, hier, par Force Ouvrière.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais parce que ce cadrage, il est essentiel. C'est, veut-on ou pas, sauver notre système des retraites ?
FRANÇOIS GEFFRIER
Mais du coup, ils disent que la marge de négociation est en fait inexistante.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Parce que le problème est compliqué. Soit on parle du sexe des anges, soit on parle du problème des retraites. Le problème des retraites, ce n'est pas nous qui le disons, c'est la Cour des comptes. Nos retraites, aujourd'hui, ne sont pas financées. Mais c'est essentiel de parler de ce problème-là. Nos retraites ne sont pas financées. Qu'est-ce que ça veut dire, concrètement ? Ça veut dire qu'un jeune qui rentre sur le marché du travail, c'est une chose. C'est qu'il paiera la retraite de ses parents et de ses grands-parents. Mais que lui, sa retraite n'est pas financée. Et ça, c'est une injustice profonde.
FRANÇOIS GEFFRIER
Les jeunes savent ça ? Vous l'affirmez ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je vous affirme qu'aujourd'hui…
FRANÇOIS GEFFRIER
Que les jeunes pensent qu'ils n'ont pas de retraite ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
D'abord, beaucoup vous disent " Je ne sais pas ce que j'aurais ". Mais surtout, ce que j'essaye de vous dire, c'est que quand on est de ma génération, avec trois enfants, et qu'on assume que les retraites ne soient pas financées, ça veut dire qu'on fait un trait sur les retraites de nos enfants. C'est inacceptable, c'est irresponsable. Et donc, poser ce problème, bien sûr qu'il est compliqué, puisque les leviers, c'est est-ce qu'on travaille plus longtemps ? Est-ce qu'on cotise plus ? Est-ce qu'on rentre sur le marché du travail plus tôt ? Est-ce qu'on travaille plus ? C'est ça les leviers qui sont... Et donc, ce sont à chaque fois des points d'équilibre avec des avantages et des inconvénients. Et donc, moi, je fais confiance, encore une fois, aux syndicats de représentants du personnel.
VICTORIA KOUSSA
Pourquoi ne pas les laisser travailler ? François BAYROU vient, en plus, parler de référendum, alors que le conclave vient d'ouvrir, c'est une forme de pression. En tout cas, c'est vécu comme ça du côté de certains syndicats.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Oui, je pense que ce n'est pas tout à fait exact. Et surtout, on a toujours dit de manière très claire qu'on donnait la main aux partenaires sociaux et que s'il y avait un accord, on l'entérinait. S'il n'y avait pas d'accord, il fallait qu'on reprenne la main. Le Premier ministre n'a fait que répéter cette méthode, qui est une méthode de bon sens.
FRANÇOIS GEFFRIER
Merci beaucoup, Agnès PANNIER-RUNACHER, ministre de la Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche, invité du 830 France Info. Merci à vous, Victoria KOUSSA.
VICTORIA KOUSSA
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 13 mars 2025