Texte intégral
JEAN-JACQUES BOURDIN
Notre invité ce matin, Bruno RETAILLEAU, ministre de l'Intérieur et des Cultes. Parce que le ministre de l'Intérieur est ministre des Cultes en France. Bonjour Bruno RETAILLEAU.
BRUNO RETAILLEAU, MINISTRE DE L'INTERIEUR
Bonjour Jean-Jacques BOURDIN.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous sur Sud Radio ce matin. Bruno RETAILLEAU, première question toute simple, pourquoi n'êtes-vous pas allé à la Grande Mosquée de Paris hier soir au repas de rupture du jeûne du Ramadan ?
BRUNO RETAILLEAU
Question simple, comme vous dites, réponse simple, c'est que j'ai une ligne de conduite, je suis ministre de l'Intérieur et des Cultes, mais je ne participe à des cérémonies religieuses pour peu qu'il y ait une dimension officielle. Là, l'Iftar, la rupture du jeûne, c'est un moment religieux. Je ne suis pas, vous voyez, allé officiellement à la messe du mercredi des cendres, parce que si j'étais allé, évidemment, on serait tombé dessus. Donc c'est une ligne, je veux m'y tenir, parce que je pense que le modèle républicain, c'est la laïcité, il faut y faire très attention, mais ça ne m'a pas empêché de recevoir dans mon ministère, il y a quelques semaines, le FORIF, le forum qui représente les musulmans de France.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, Jean-Noël BARROT, ministre des Affaires étrangères, y était et il a dit : " La France est attachée à sa relation avec l'Algérie ". Vous aussi ?
BRUNO RETAILLEAU
Mais bien sûr. Mais évidemment.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous aussi.
BRUNO RETAILLEAU
Moi, mon obsession, je vais vous dire, je vois où vous voulez en venir.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
BRUNO RETAILLEAU
Mon obsession, ce n'est pas la relation diplomatique. Mon obsession, écoutez-moi bien, j'en ai qu'une, c'est la sécurité des Français. Je ne veux pas que demain, il y ait sur le territoire national, un attentat terroriste comme nous avons eu, il y a peu de temps, à Mulhouse. Qu'est-ce qui s'est passé à Mulhouse ? Parce que malheureusement, on oublie trop vite aujourd'hui. Un Algérien qui aurait dû être en Algérie, terroriste, a poignardé et a assassiné un ressortissant portugais, à Mulhouse, sur le sol national. Ce terroriste, à 14 reprises, on avait demandé au consulat algérien de le reprendre. Mon prédécesseur, Gérald DARMANIN, à deux reprises, avait signalé ce cas à l'ambassadeur algérien. L'Algérie n'en a rien fait. Je ne veux pas que ça se reproduise. Je suis comptable, moi, de la sécurité des Français.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, les rapports entre la France et l'Algérie, je vais y revenir. Quelques mots, pour commencer, parce que c'est la priorité. Boualem SANSAL, êtes-vous inquiet, pessimiste ? Avez-vous des nouvelles ? Est-ce que vous avez des nouvelles ?
BRUNO RETAILLEAU
Je n'ai pas de nouvelles. Écoutez, je n'ai pas de nouvelles.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Aucune nouvelle ? L'Algérie ne donne aucune nouvelle au Gouvernement français.
BRUNO RETAILLEAU
Son épouse a quelques nouvelles, mais nous ne savons pas ces nouvelles, si elles sont le produit de pression ou autre. Je me tiens à informer aussi auprès de son avocat, François ZIMERAY, qui n'a pas de nouvelles. Vous savez que les geôliers de Boualem SANSAL lui ont demandé de changer d'avocat au prétexte que cet avocat était juif. Vous vous rendez compte ? Est-ce que ça fait grand cas en France ? Vous savez, je n'ai pas entendu l'extrême-gauche, la gauche, protester sur cette proclamation pourtant antisémite. Et Boualem SANSAL est retenu arbitrairement. Qu'est-ce qu'on lui reproche ? Être amoureux de la langue française. C'est son dernier livre. Son dernier livre, le titre c'est « Le français, parlons-en », un hymne à la langue française. On lui reproche de trop aimer la France, d'être trop libre. Ça n'est pas acceptable. Il est âgé et il est malade. Voilà.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc il doit être libéré. Bruno RETAILLEAU ? L'Algérie a refusé de reprendre les Algériens. La liste d'Algériens que vous vouliez renvoyer dans leur pays d'origine, combien ? 60 ?
BRUNO RETAILLEAU
Une soixantaine. Je n'ai jamais voulu dire le nombre exact, peu importe.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Peu importe le nombre. Bien. Alors, j'ai entendu hier le ministre de la Justice, votre prédécesseur, DARMANIN, dire : " Il faut absolument que l'ambassadeur de France en Algérie soit rappelé ". Vous êtes d'accord ? Il faut rappeler l'ambassadeur de France en Algérie maintenant ?
BRUNO RETAILLEAU
Attendez, il faut se tenir à la ligne que le Gouvernement et le Premier ministre, que nous avons arrêtée ensemble, c'était au comité interministériel qu'il présidait il y a quelques semaines. C'était à la fin du mois de février. Pendant des semaines, je me suis retrouvé seul, si j'ose dire, face aux menaces algériennes. J'étais seul et ce comité interministériel a acté une ligne qui est celle de l'ensemble du Gouvernement, c'est la riposte graduée. La riposte graduée tout simplement parce que nous ne sommes pas belliqueux. Nous ne voulons pas la guerre avec l'Algérie. C'est l'Algérie qui nous agresse. Donc, on a mis sur la table une réponse qui va monter en gamme en fonction de la riposte algérienne.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc rappel de l'ambassadeur de France en Algérie, non. Vous dites non.
BRUNO RETAILLEAU
Je ne dis pas non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Aujourd'hui, ce n'est pas d'actualité.
BRUNO RETAILLEAU
Aujourd'hui, nous sommes sur cette riposte. Cette riposte, par exemple, nous avons commencé à la mettre en oeuvre avec la suspension des facilités à la nomenklatura algérienne, avec la semaine prochaine...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les passeports diplomatiques.
BRUNO RETAILLEAU
Bien sûr, le visa…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais ils vont passer par un autre pays de Schengen pour venir en France.
BRUNO RETAILLEAU
Non. Il y a l'article 22 du Code de Schengen. Cet article 22, il est de droit, on le déclenche et dès lors, les 26 autres pays, enfin plutôt les pays de Schengen qui participent aux accords de Schengen ne peuvent pas faire entrer quelqu'un chez eux sans nous avoir consultés avant.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il est déclenché, c'est-à-dire ?
BRUNO RETAILLEAU
Il sera déclenché lorsque nous passerons à la seconde étape, notamment de la remise en cause des accords de 2007. Les accords de 2007, c'est précisément que ceux qui détiennent un passeport diplomatique n'ont pas besoin de visa. Voilà. Il faut savoir quand même que... Je m'explique pour que les auditeurs comprennent bien.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. Très vite.
BRUNO RETAILLEAU
L'Algérie et les ressortissants bénéficient de trois immenses avantages qui sont exorbitants. Un, en matière de regroupement familial, ça, ce sont les accords de 68. Deux, les passeports diplomatiques, ce sont les seuls, par exemple au Maghreb, à ne pas avoir à demander de visa. Troisièmement, pour l'ensemble des ressortissants algériens, écoutez-moi bien, parce que ça, personne ne le dit, ils bénéficient d'un régime ultra-avantageux pour les soins qui les met au même niveau que les ressortissants européens. C'est-à-dire qu'on a octroyé, vous m'entendez bien, aux Algériens qui viennent en France, pour se faire soigner, le même régime qu'on peut octroyer à un Allemand, à un Belge, etc. Donc on voyait que le paquet…
JEAN-JACQUES BOURDIN
On pourrait mettre fin à l'ensemble de tout ça.
BRUNO RETAILLEAU
À l'ensemble. Bien sûr. La riposte graduée, ce qui est intéressant, c'est qu'elle permet de dire, un, nous ne sommes pas l'agresseur, nous allons progressivement ajuster en fonction des reprises par l'Algérie de ses ressortissants. Ça, c'est l'accord de 94. L'accord de 94 dit, voilà, il faut que l'Algérie ne barguigne pas quand on est convaincu avec une pièce d'identité, un passeport, que le ressortissant est Algérien, elle doit le réadmettre…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui mais réponse graduée, très bien, mais graduée jusqu'à quand ? Parce que c'est bien beau, réponse graduée, mais est-ce qu'il y a des délais ?
BRUNO RETAILLEAU
Le Premier ministre a parlé de six semaines. Voilà. On va tranquillement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
À partir d'aujourd'hui, six semaines.
BRUNO RETAILLEAU
Sereinement mais avec détermination, s'impliquer dans cette relation. Et moi, je suis solidaire de cette ligne. J'étais seul pendant longtemps, je suis heureux maintenant que cette position soit partagée. On ne peut pas changer chaque jour et chaque semaine de pieds.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, j'ai entendu Marine LE PEN qui demande gel des visas, gel des transferts de fonds privés, fin de l'aide publique au développement, dénonciation des accords de 68.
BRUNO RETAILLEAU
Mais c'est sur la table.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est sur la table.
BRUNO RETAILLEAU
Dans la riposte graduée, il y a des choses d'ailleurs dont personne ne parle, qui peuvent aussi être sur la table.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire ?
BRUNO RETAILLEAU
Je n'en dirai pas plus.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Moi, je peux vous dire. Je peux vous donner des idées, si vous voulez.
BRUNO RETAILLEAU
Allez-y.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais j'ai plein d'idées, par exemple, à la descente des ferrys, multiplier les contrôles par exemple, fermeture des consulats, par exemple. Fermeture des consulats, à gérer en France.
BRUNO RETAILLEAU
Non mais quand je dis riposte graduée, il y a un ensemble de mesures qui pourraient être prises et on les ajustera. Voilà.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les patrimoines des personnalités, on pourrait peut-être, je ne sais pas moi, y penser, non ?
BRUNO RETAILLEAU
Je pourrais vous recruter, Jean-Jacques BOURDIN, au ministère de l'Intérieur.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais vous y pensez ou pas ?
BRUNO RETAILLEAU
Mais tout est sur la table. Voilà. Ensuite, on doit ajuster cette riposte graduée.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous n'êtes pas mis dans une nasse ? Est-ce que vous avez brandi votre démission dimanche, parce que j'ai vu cela tout à coup franchement ?
BRUNO RETAILLEAU
Le Parisien a titré sur cette démission.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez mis votre démission sur la table ou pas, franchement, Bruno RETAILLEAU ?
BRUNO RETAILLEAU
J'ai toujours indiqué, Jean-Jacques BOURDIN, vous me regardez les yeux dans les yeux…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. On se regarde les yeux dans les yeux. Dites-moi.
BRUNO RETAILLEAU
Que ma seule obsession, c'est la sécurité des Français. Évidemment que, si un jour, il m'arrivait de tomber sur un obstacle qui pourrait mettre en cause la sécurité de nos compatriotes, alors je devrais m'interroger. Oui. Aujourd'hui, la question…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Quel obstacle ?
BRUNO RETAILLEAU
L'obstacle sur la sécurité des Français.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais quel serait cet obstacle ? Vous pensez à quoi ?
BRUNO RETAILLEAU
Je ne veux pas que Mulhouse se reproduise. Mulhouse, c'est l'Algérie qui ne veut pas reprendre un individu dangereux qui est Algérien.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça veut dire que si, au bout, après toutes ces mesures, ces réponses graduées, vous n'obtenez pas les réponses, vous démissionnez.
BRUNO RETAILLEAU
Ah ! Mais non. Si le Gouvernement reste solidaire, et surtout, si le Gouvernement a cette ligne sécuritaire sur les Français, il n'y a pas de raison que je démissionne.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. Mais si le Gouvernement n'obtient pas, malgré toutes les réponses graduées, de l'Algérie ce que le Gouvernement français veut, que faites-vous ?
BRUNO RETAILLEAU
Il y a deux choses. Soit nous capitulons. Et alors là, la question se poserait. La capitulation serait, si j'ose dire, à l'initiative du Gouvernement. Ce serait pour moi insupportable. Mais je ne le pense pas. Ce n'est pas la disposition ni du président de la République que j'ai vu, ni du Premier ministre. Soit c'est l'Algérie qui ne veut rien entendre. Mais je vois bien que monsieur TEBBOUNE aujourd'hui a une seule chose en tête. Ça ne vous a pas échappé.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Laquelle ?
BRUNO RETAILLEAU
Ma démission. Chaque jour, je fais la une de la presse algérienne. Avec, évidemment, des articles très agressifs. Et ceux qui souhaitent le plus ma démission, aujourd'hui, c'est le régime algérien. C'est monsieur TEBBOUNE. Alors, vous pensez bien qu'au stade actuel, je ne veux pas leur faire ce cadeau. Tant que, évidemment, je sais que le Gouvernement est sur la ligne que je préconisais.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'Emmanuel MACRON est sur la même ligne que vous ? Vous en avez parlé, vous avez dîné avec lui.
BRUNO RETAILLEAU
Non, pas dîné.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous l'avez rencontré. En tête à tête.
BRUNO RETAILLEAU
Bien sûr.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il est exactement sur la même ligne que vous ?
BRUNO RETAILLEAU
Il est sur cette ligne de protéger les Français. Bien sûr. On a parlé ensemble de cette réponse graduée. Et il y a consenti parfaitement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous devriez démissionner si les accords de 1968 avec l'Algérie ne sont pas remis en cause. Qui dit cela, selon vous ? Qui dit cela ?
BRUNO RETAILLEAU
Un ami cher.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Un ami cher. Un de vos amis chers. Qui est cet ami cher ?
BRUNO RETAILLEAU
Je vois les lettres s'inscrire dans vos yeux, cher Jean-Jacques BOURDIN.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, il s'appelle Laurent WAUQUIEZ. C'est votre ami cher, Laurent WAUQUIEZ. Bruno RETAILLEAU, c'est aussi votre adversaire.
BRUNO RETAILLEAU
Non. C'est mon compétiteur.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pourquoi dit-il cela, selon vous ?
BRUNO RETAILLEAU
Je ne sais pas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous ne savez pas ? Franchement, vous ne savez pas.
BRUNO RETAILLEAU
Non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous ne savez pas.
BRUNO RETAILLEAU
Non mais la question des accords de 1968, d'ailleurs, aujourd'hui, la plupart des forces politiques au centre et à droite les remettent en question. Si demain, d'ailleurs, ce que j'espère, la droite revient au pouvoir, sans doute faudra-t-il les remettre en question. Parce que ces accords accordent précisément des avantages exorbitants à l'Algérie. Et pour l'instant, on n'est pas d'ailleurs payé de retour. Simplement, encore une fois, mon obsession, ce n'est pas les accords, c'est la sécurité des Français.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Rien sur l'AME, rien sur l'Algérie, rien sur la loi immigration, c'est ce que l'on dit autour de Laurent WAUQUIEZ. Présidentielle... ben oui, vous ne faites pas de commentaires, vous pouvez.
BRUNO RETAILLEAU
Si mais... Non mais…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Cette rivalité…
BRUNO RETAILLEAU
Attendez, je vais m'expliquer.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il dit : " Il ne peut pas être à la fois ministre de l'Intérieur et candidat à la présidentielle LR ". C'est impossible.
BRUNO RETAILLEAU
Écoutez, justement, la démonstration que j'ai faite depuis que je suis au ministère de l'Intérieur depuis septembre, eh bien, la droite a retrouvé des couleurs. Parce que les Français qui partagent nos convictions veulent qu'on ne se planque pas. Les Français qui aiment la France veulent que, même dans des conditions difficiles, je suis dans des conditions difficiles, le Gouvernement est un Gouvernement de coalition, où il y a une ligne, mais on n'est pas tous avec le même parcours politique, et il n'y a pas de majorité à l'Assemblée nationale. Mais moi, je travaille au quotidien pour améliorer les choses. Et très franchement, on voit bien que, quand la droite est dans l'action, quand on est capable d'être à la fois dans l'action, sans abandonner, sans abdiquer ses convictions, alors les Français nous encouragent.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Si vous êtes président LR du parti, est-ce que vous serez candidat à la présidence de la République ? Franchement.
BRUNO RETAILLEAU
Non, je me méfie de cette obsession présidentielle, parce que ma famille politique l'a payé très cher.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, vous ne serez pas candidat ?
BRUNO RETAILLEAU
Je ne dis pas que je serai ou que je ne serai pas candidat. Je dis simplement que l'obsession présidentielle a fait beaucoup de mal au parti. Pourquoi ? Il s'est transformé en une simple écurie présidentielle et on a oublié de travailler. On a oublié de réfléchir. Depuis quand est-ce qu'on a proposé une idée neuve qui permet de dire aux Français on va porter pour vous un projet de société au moment où la France va mal ? Donc, le travail d'un parti, c'est d'abord de réfléchir, de proposer un projet de société, des idées nouvelles qui permettront demain de redresser la France.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, l'immigration. Deux textes inscrits au Sénat…
BRUNO RETAILLEAU
Mais vous voyez bien qu'il y a des textes qui sont inscrits.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais oui, au Sénat, qui ont été votés d'ailleurs. Maintien en rétention des étrangers condamnés pour des faits graves. Alors, pas 90 jours, c'est le cas aujourd'hui, mais jusqu'à 180 et 210 jours. Et puis, deuxième texte, conditionner l'octroi de certaines prestations sociales aux étrangers à au moins deux ans de résidence en France. Vous approuvez ces deux textes ?
BRUNO RETAILLEAU
Bien sûr que je les approuve.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous les soutenez ?
BRUNO RETAILLEAU
Je les soutiens évidemment. Et d'ailleurs, c'est la méthode. Dès d'ailleurs le Gouvernement avec Michel BARNIER, nous avons fait le constat qu'avec cette Assemblée nationale où nous ne disposons pas de majorité, il ne fallait pas un grand texte, un grand monument législatif.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il n'y en aura pas. Il n'y aura pas de grand texte sur l'immigration.
BRUNO RETAILLEAU
Mais il ne peut pas y en avoir. Et moi, je ne demande pas un texte fétiche avec mon nom sur le socle. Ce n'est pas ce que je demande. Je ne demande pas une loi RETAILLEAU. Je demande des outils particuliers, ponctuels, des objets uniques par des propositions de loi qui viennent des députés ou des sénateurs. C'était le cas d'ailleurs avec les députés dans une niche LR sur le droit du sol pour Mayotte. Et c'est le cas au Sénat avec l'extension du délai de rétention dans les CRA. Vous savez que la jeune Philippine a été assassinée parce qu'on ne disposait pas de cette arme. Pour moi, c'est fondamental. Et puis, les prestations sociales. Moi, j'estime qu'il y a des appels d'air. Et que les prestations sociales qu'on appelle non-contributives, les allocations familiales, ce n'est pas un dû pour un étranger.
JEAN-JACQUES BOURDIN
APL, allocations familiales et APA
BRUNO RETAILLEAU
Ce n'est pas un dû. Les Français travaillent dur précisément pour maintenir à flot notre modèle social.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais Bruno RETAILLEAU, est-ce que ça va être inscrit à l'Assemblée nationale ? Parce que pour l'instant, ça ne l'est pas.
BRUNO RETAILLEAU
Ça ne l'est pas pour des raisons d'ordre du jour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais ça le sera ?
BRUNO RETAILLEAU
J'espère bien que ça le sera. Moi, l'engagement qu'a pris François BAYROU lorsque j'ai dit oui…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez obtenu cela ? Ce sera inscrit à l'Assemblée nationale ?
BRUNO RETAILLEAU
Je lui avais dit : " Je ne veux pas de grands textes. Je veux des PPL ". Et il m'avait dit oui. Je n'ai aucune raison de ne pas croire en la parole de François BAYROU.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le 26 mars, vous avez rendez-vous. Vous avez rendez-vous pour participer avec Manuel VALLS à une soirée. Le collectif Agir Ensemble qui organise cette soirée pour la République. C'est un meeting. La France contre l'islamisme. Alors, parlons justement de l'islamisme. Dites-moi, est-ce que vous allez interdire définitivement le port du voile et de tout signe religieux dans les compétitions sportives ?
BRUNO RETAILLEAU
Moi, je le souhaite. Je le souhaite. Vous savez, lorsque je suis arrivé au ministère, on m'a rendu un rapport qui est classifié, qui est confidentiel. Ce rapport, je vais le déclassifier. Alors, je ne peux pas le déclassifier en l'état parce qu'il y a des noms, il y a des informations qui relèvent du secret, mais ce rapport est alarmant.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Que dit ce rapport ?
BRUNO RETAILLEAU
Il porte sur la stratégie des frères musulmans, qui est une stratégie de l'entrisme. Il y a eu une stratégie avec le djihadisme, le terrorisme. Une stratégie avec le séparatisme où on voulait séparer les mécréants des bons croyants. Mais là, l'entrisme. Les frères musulmans, c'est qu'ils ont un agenda avec un discours qui est très lisse, où généralement, ils reprennent nos valeurs. Ils sont pour la liberté, pour l'égalité. Mais derrière cet agenda, ils veulent qu'un jour tout bascule et que la charia s'applique sur notre territoire. Et l'entrisme, nous dit-on, c'est d'abord les clubs de sport, les associations sportives. Pas que, les associations culturelles. Et donc, il y a un danger.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc interdiction du port du voile dans toutes les compétitions sportives bientôt.
BRUNO RETAILLEAU
Bien sûr. Je le souhaite.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous le souhaitez ? Qui décide de cela ?
BRUNO RETAILLEAU
J'avais d'ailleurs initié avec un ami qui est sénateur, Michel SAVIN. Le texte a été voté. Ce texte, il a été ce qu'on appelle bleui. C'est-à-dire qu'il y a eu une réunion interministérielle à Matignon pour savoir quelle serait la ligne du Gouvernement. Ce matin, je vous la rappelle, cette ligne qui était votée dans cette PPL au Sénat il y a quelques jours.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Hier, vous avez eu cette discussion avec François BAYROU.
BRUNO RETAILLEAU
Exactement. Et c'est cette ligne-là qui a prévalu. La ligne, c'est qu'on doit interdire le port du voile dans les compétitions sportives.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, par la loi.
BRUNO RETAILLEAU
Voilà. Des compétitions liées, notamment avec les fédérations sportives, en ce qu'elles ont une mission de service public.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Par la loi, donc.
BRUNO RETAILLEAU
Par la loi, bien sûr. Puisqu'aujourd'hui…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y aura une loi interdisant…
BRUNO RETAILLEAU
Il faut une loi. En tout cas, moi, j'y suis favorable. Et si j'y suis favorable, c'est parce que je pense que le sport est un creuset, un peu comme l'école. On l'a fait à l'école. Mais le sport doit rester un espace de neutralité. Et les visées religieuses, politiques, ne doivent pas avoir leur place sur des terrains de sport, là où on peut se comprendre, où on peut partager une même émotion, quelle que soit sa croyance, quelle que soit sa croyance religieuse, ou même politique.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Même chose pour les accompagnants en sorties scolaires, par la loi, interdiction du port du voile ?
BRUNO RETAILLEAU
Ça, ça a toujours été une conviction personnelle. Le Gouvernement ne l'a pas tranchée. J'ai toujours indiqué que les sorties scolaires, c'était l'école hors les murs. Ma réflexion, c'est que dans les murs, l'école, on interdit le voile. Et il me semblerait que l'école hors les murs, on pourrait aussi le faire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le Gouvernement y pense ? Est-ce que vous allez mettre ça sur la table ?
BRUNO RETAILLEAU
Le Gouvernement n'y pense pas. Il y a des divergences au sein du Gouvernement. Et pour l'instant, autant je peux dire sur le sport que la ligne que je pousse est une ligne qui est désormais gouvernementale, autant là, c'est une ligne qui est personnelle. Mais ce que je veux dire, c'est que la question du voile, le voile, je voudrais vraiment que les Françaises et les Français le sachent, ce n'est pas seulement un bout de tissu. Le voile, c'est un étendard. Le voile, c'est la soumission de la femme par rapport aux hommes. Il y a aujourd'hui des femmes qui meurent en Orient pour s'être dévoilées. Voilà. Toutes les femmes qui portent le voile ne sont pas des islamistes. Écoutez-moi bien, tous les islamistes, tous sans exception, veulent voiler les femmes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bruno RETAILLEAU, vous, le 22 mars, la fin de la semaine, il y a une manifestation organisée par LFI, samedi prochain contre le racisme et le fascisme. Et vous êtes représenté sur les affiches. La France insoumise vous désigne. Vous êtes raciste et fasciste. Vous avez vu ?
BRUNO RETAILLEAU
Bien sûr, je l'ai vu.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez vu ces accusations ?
BRUNO RETAILLEAU
Après j'ai vu aussi la première affiche. Pascal PRAUD et Cyril HANOUNA. Scandaleuse, absolument scandaleuse, puisque cette affiche reprenait…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais qu'allez-vous alors devant tout cela ? Qu'allez-vous faire ?
BRUNO RETAILLEAU
Ah ! Non mais il y a une liberté de manifestation.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. Vous n'allez pas interdire cette manifestation.
BRUNO RETAILLEAU
Non. Nous n'interdisons les manifestations que lorsqu'il y a des sérieux indices de trouble à l'ordre public, etc.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
BRUNO RETAILLEAU
Pour l'instant, nous n'en avons pas et je pense que la France Insoumise serait trop heureuse qu'on prenne cette décision. Simplement, ce que je dis, c'est que s'il y a bien un parti aujourd'hui qui est en dehors du champ de l'arc républicain, comme l'on dit, c'est bien les Insoumis. Souvenez-vous que les Insoumis, j'ai d'ailleurs attaqué une députée qui avait banalisé la chasse aux juifs, vous savez, Amsterdam, il y a quelques mois. Vous savez que les Insoumis jouent dangereusement avec l'antisémitisme puisque sous prétexte d'anti sionisme, ils draguent le vote musulman et ils font prospérer précisément l'antisémitisme en France. Encore une fois, écoutez-moi bien, on parlait tout à l'heure de Boualem SANSAL. Vous savez que Rima HASSAN, Manon AUBRY n'ont pas voté alors qu'il y a eu au Parlement européen une résolution qui demandait pour des motifs humanitaires, pas politiques, pour des motifs humanitaires, la libération de Boualem SANSAL. Elles ne l'ont pas votée Encore une fois, l'apologie du terrorisme. Les Insoumis ont déposé un texte, une proposition de loi pour abolir le délit d'apologie du terrorisme.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien oui, mais Bruno RETAILLEAU, parti antirépublicain, est-ce que vous allez demander la dissolution de LFI ?
BRUNO RETAILLEAU
Non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est un parti anti Républicain. Non.
BRUNO RETAILLEAU
Non, parce que nous ne l'obtiendrons pas. Je parle sur le plan politique. Mais c'est aux Français de faire, à mon avis, leur jugement. Je pense que pour beaucoup d'entre eux, ils l'ont fait.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, ils l'ont fait. Quand on vous accuse de fascisme, d'être un fasciste, d'être un raciste, vous n'avez pas envie de répliquer là ? Vous n'avez pas envie de répondre ?
BRUNO RETAILLEAU
De la part des Insoumis, ça ne me fait rien, croyez-moi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour vous, ça ne fait rien.
BRUNO RETAILLEAU
Une critique, pour moi, les insoumis, c'est comme une boussole inversée. Quand ils montrent dans une direction la bonne direction, c'est l'inverse, c'est 180 degrés.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon le football. Cinq associations groupes ultras de plusieurs clubs sont en voie de dissolution. Est-ce que vous allez les dissoudre ? Il y a deux groupes de Saint-Étienne, un groupe de Nantes, un de Strasbourg et un du Paris Football Club. Est-ce que vous allez les dissoudre ?
BRUNO RETAILLEAU
Je vais m'expliquer puisqu'aujourd'hui, on est dans une procédure contradictoire. C'est normal. La procédure contradictoire permet à chacun de faire valoir ses arguments. Un, le foot, le sport, ce sont des joueurs, c'est un public, ce sont des supporters. Donc moi je n'ai rien contre les supporters. Simplement, je veux que demain, dans les matchs de foot, notamment parce que c'est le foot qui est concerné, un père, une mère puisse venir avec ses enfants sans craindre des violences. Je ne veux pas que les stades soient des zones de non-droit. Or, je veux dire aux Français qui m'écoutent ce matin que chaque week-end, pour des matchs de foot, on mobilise 30% des forces de l'ordre, 30% des forces de l'ordre sur le territoire national sont affectés à cette sécurisation. En six ans, le nombre d'heures, de policiers et de gendarmes affectés à la sécurisation des matchs de foot, s'est accru de 86%. Est-ce que les Français paient des impôts pour sécuriser des matchs de foot ? Non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, est-ce que vous êtes favorable à la dissolution de ces groupes ultras ?
BRUNO RETAILLEAU
Nous dissoudrons si nous avons les bons arguments. Aujourd'hui, nous avons une procédure.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous les avez les bons arguments ?
BRUNO RETAILLEAU
Nous avons des arguments et…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes favorable à la dissolution, franchement ?
BRUNO RETAILLEAU
Moi, je suis favorable à la dissolution pour peu qu'on puisse dissoudre et que je ne sois pas annulé par la justice. Simplement, nous visons tout particulièrement les ultras qui commettent des violences et qui, dans ces violences d'ailleurs, visent nos forces de l'ordre. Ça, j'y accorde vraiment une importance particulière parce que je suis le patron des policiers et des gendarmes et je n'admets pas qu'on puisse les blesser en prenant prétexte justement du sport. Ça n'est pas une zone de non droit et je ferai respecter le droit. Voilà. Et si je dois dissoudre pour le faire respecte, eh bien nous dissoudrons. Aujourd'hui, c'est un certain nombre de clubs ultras sont engagés devant la commission consultative dans cette procédure contradictoire et on verra bien au bout du bout, s'ils prennent des positions et s'ils ne se justifient pas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bruno RETAILLEAU, j'ai trois, quatre questions pour terminer. Crépol, le meurtre de Thomas, est-ce que c'est un raid anti blanc ? Vous, ministre de l'Intérieur, est-ce que vous avez les informations nécessaires pour répondre à cette question ?
BRUNO RETAILLEAU
Les informations précises, je ne les ai pas, mais je sais qu'il y a aussi un racisme anti-blanc. Vous savez, le racisme, il n'est certainement pas l'apanage de telle ou telle couleur de peau. Et Crépol, c'est aussi, je connais bien Marie-Hélène THORAVAL qui est une maire extrêmement courageuse. Je m'y suis rendu d'ailleurs il y a quelques semaines et j'ai rencontré les familles. C'est terrible pour les familles, elles souffrent encore.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Délit d'homicide routier, ça aussi, c'est terrible pour les familles Est-ce que vous allez créer ce délit d'homicide routier ?
BRUNO RETAILLEAU
J'y suis très favorable. J'ai rencontré Franck ALLENO il y a quelques semaines.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Yannick ALLENO.
BRUNO RETAILLEAU
Yannick. Pardon. J'en ai parlé il y a quelques jours d'ailleurs au ministre des Relations avec le Parlement pour que l'on puisse trouver…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Une loi est en préparation ?
BRUNO RETAILLEAU
Ah ! Mais non. Il suffit désormais... On a déjà un premier texte, il faut que ça passe désormais à l'Assemblée nationale. Vous me disiez la même chose sur la loi immigration. Le problème de l'agenda de l'Assemblée nationale, c'est que c'est extrêmement compliqué. J'ai demandé, moi, au ministre chargé des Relations avec le Parlement, Patrick MIGNOLA, de tout faire pour trouver un créneau. Très franchement, je pense qu'en une heure et demie, deux heures, le texte, il est voté. On a un accord. On a un consensus.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Deux autres questions. Sur le narcotrafic. On va beaucoup en parler. On en a beaucoup parlé avec Gérald DARMANIN notamment Vous conduisez d'ailleurs ces textes avec Gérald DARMANIN, vraiment en étroite collaboration.
BRUNO RETAILLEAU
Puisque je vous rappelle que quand j'étais au Sénat, c'est moi qui avais déclenché la commission d'enquête sur le narcotrafic. D'où elle se fie de ce texte.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Sur le narcotrafic alors axé aux correspondances des trafiquants sur les messageries privées comme Signal ou Whatsapp. Là, vous dites oui.
BRUNO RETAILLEAU
Bien sûr. Je dis oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous défendez absolument cela. Un amendement.
BRUNO RETAILLEAU
Je dis oui parce que Dieu sait s'il faut être extrêmement précautionneux. Mais je pense que désormais avec un amendement, il n'y a pas ce qu'on appelle de porte dérobée, il n'y a pas d'atteinte au chiffrement, il n'y a pas d'atteinte à la confidentialité. Et on peut... attendez, pas pour n'importe quoi, pour le terrorisme et pour la très haute criminalité, je pense qu'on peut avoir recours à ce déchiffrage. Pourquoi ? Aujourd'hui, le temps de grand papa où on faisait des écoutes téléphoniques, c'est terminé. On n'obtient plus rien puisque ces terroristes et les grands criminels, qui font partie des mafieux, etc. ont migré massivement précisément sur ces messageries cryptées. Et donc ça réduit à néant les renseignements de nos forces de police ou de gendarmerie. Il faut vraiment dans des conditions très resserrées, et c'est ce que prévoit cet amendement, sans porter atteinte encore une fois aux chiffrements ou même à la confidentialité, mais est-ce qu'on veut ou non donner des outils à nos forces de police et de gendarmerie quand on lutte contre le terrorisme ? Moi je vais vous dire, AMRA, ça a duré neuf mois, sa cavale. Si on avait eu accès au déchiffrage, on aurait réduit sans doute par deux ou trois. Nous avons eu, nous n'avons pas pu déjouer, je vous le dis aussi, c'est la première fois que je le dis, ce sont mes services qui m'ont confié, qui m'ont fait cette confidence, nous aurions pu déjouer des attaques mortelles, terroristes si nous avions pu avoir accès à ce genre de techniques.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Déjouer certaines attaques mortelles.
BRUNO RETAILLEAU
Bien sûr.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Lesquelles ?
BRUNO RETAILLEAU
Je n'en dirais pas plus.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Certains actes terroristes commis auraient pu être déjoués.
BRUNO RETAILLEAU
Oui, parce que malheureusement…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le dernier à Mulhouse par exemple.
BRUNO RETAILLEAU
Pas le dernier à Mulhouse.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Lesquelles ?
BRUNO RETAILLEAU
Je ne le dirais pas. Mais je vais vous dire pourquoi on le sait. Tout simplement parce que quand malheureusement, il y a une victime, il y a évidemment un tueur, un terroriste. On a le téléphone ensuite, on analyse le téléphone et on voit bien dans ce téléphone que sur des messageries cryptées, il y avait des éléments qui, si on y avait eu accès, nous auraient permis d'anticiper.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous n'allez pas me dire ?
BRUNO RETAILLEAU
Non, je ne le dirai pas parce que ça fait partie du secret.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai une dernière question.
BRUNO RETAILLEAU
Mais je le dis et je comprends qu'il peut y avoir des réticences parce qu'on se dit : " Mais ça va être une écoute de masse ". C'est faux. Il n'y aura pas d'écoute massive. Et il y aura un contrôle d'une commission indépendante qui s'appelle la CNCTR, qui comprend des magistrats, des parlementaires. Donc tout ça est très encadré. Soit on lutte à armes égales ou soit on a une guerre de retard et c'est le cas aujourd'hui. On a une guerre de retard.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai une dernière question. Rima HASSAN était à votre place ici même il y a quelques jours, sur Sud Radio. Elle a parlé de légitimité du Hamas. Vous avez dit, vous avez réagi : " Je ferai un signalement à la procureure de la République de Paris ". Il est fait ce signalement ?
BRUNO RETAILLEAU
Et je l'ai fait. Bien sûr, puisque dans l'interview, ici, je m'en souviens très bien, à quelques phrases près, elle a rapproché cette légitimité et le terrorisme. Ça me paraît être un acte constitutif d'un délit d'apologie du terrorisme. J'ai donc fait... avec l'article 40 du code de procédure pénale, j'ai saisi l'autorité judiciaire. Je n'ai pas eu de retour pour l'instant, mais on la voit bien jouer avec le feu en permanence depuis le 7 octobre. C'est terrible quand on a vu les images du 7 octobre, quand on a vu ces enfants, ces femmes, etc. Je ne comprends pas comment on peut encore aujourd'hui dire cela quand on est élue. Elle est parlementaire européen.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, merci beaucoup Bruno RETAILLEAU.
BRUNO RETAILLEAU
Merci Jean-Jacques BOURDIN.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 20 mars 2025