Interview de M. Laurent Marcangeli, ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification, à Sud Radio le 26 mars 2025, sur le droit de grève à la SNCF, la simplification administrative, la réforme des retraites, les négociations salariales, le point d'indice et les polices municipales.

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Média : Sud Radio

Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Notre invité, ce matin, Laurent MARCANGELI, qui est ministre de la Fonction publique et de la simplification. Bonjour,

LAURENT MARCANGELI
Bonjour,

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous. Alors, avant de parler simplification et lutte contre la bureaucratie. Et Dieu sait si nos patrons de PME qui nous écoutent, qui sont très nombreux à nous écouter, sont attentifs à ces questions-là. Je voudrais commencer avec la SNCF, de l'avis de grève déposée par le syndicat SUD-Rail du 17 avril au 2 juin. Il couvre les vacances scolaires et les jours fériés du mois de mai. Faut-il, comme en Italie, interdire les grèves et les transports pendant les vacances et les jours fériés ? On va y arriver ou pas ?

LAURENT MARCANGELI
Moi, je suis toujours particulièrement subjugué par les dates choisies. Mais là encore une fois, j'ai l'impression vraiment que la recherche, c'est emmerder au maximum les Françaises et les Français. En tant que ministre, en tant que responsable politique. Je suis véritablement, encore une fois, choquée de voir que c'est cette date qui sont choisis. On va pénaliser au final, qu'est-ce qu'on va pénaliser ? On va pénaliser la famille qui veut prendre ses vacances et qui veut partir pendant quelques jours. Je ne trouve pas que ce soit très juste. Donc, la même.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Que fait-on ? Sanctuariser certains jours dans l'année ?

LAURENT MARCANGELI
L'interdiction de la grève, Vous savez très bien qu'il y a un problème l'ordre constitutionnel, monsieur BOURDIN.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.

LAURENT MARCANGELI
Le droit de grève est reconnu comme un principe fondamental reconnu par les lois de la République. Donc ce n'est pas facile de dire yakafokon, mais en revanche je pense qu'il faut mettre le paquet sur ce qu'on appelle le service minimum. Vous savez très bien, c'est ce qui avait été notamment décidé sous Nicolas SARKOZY en 2007, avec une efficacité qui peut être considérée comme relative, mais qui a quand même fait ses preuves. Et puis ensuite, je crois qu'il faut aussi en appeler à un moment à l'esprit de responsabilité dans ce pays sur ce sujet comme sur ce sujet comme sur d'autres.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire, esprit de responsabilité ?

LAURENT MARCANGELI
C'est-à-dire de se dire que quand on est un délégué syndical, on n'en est pas moins un père de famille qui parfois a envie de partir en vacances avec sa femme et ses enfants.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Laurent MARCANGELI, il va falloir aussi prendre des mesures, peut-être. Est-ce que vous êtes favorable à la sanctuarisation de certains jours dans l'année ?

LAURENT MARCANGELI
Oui, à titre personnel, bien sûr. Bien sûr que je suis. Mais encore une fois, la faisabilité de la chose, vous savez très bien, on sort à chaque fois à des principes constitutionnels, notamment concernant le droit de grève.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a peut-être des façons de contourner la Constitution pour impliquer, pour imposer un genre d'interdiction de la grève pendant certaines périodes. Et les Français comprendraient, peut-être.

LAURENT MARCANGELI
Sur le contournement de la Constitution, vous savez, je pense que c'est un peu compliqué.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Trouver un texte qui permettrait de trouver une solution.

LAURENT MARCANGELI
Pour que les choses soient bien claires pour celles et ceux qui nous écoutent, je considère que décider de faire un préavis de grève pour les départs en vacances, c'est un peu scandaleux, c'est carrément scandaleux. Mais encore une fois, je veux dire, nous sommes…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que c'est du chantage de la part de certains syndicats ?

LAURENT MARCANGELI
C'est une tactique qui consiste à obtenir ce qu'on a par une forme de menace, oui.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, bien. La simplification, parlons-en. Où est-ce qu'on en est ? Commission spéciale, en séance le 8 avril, c'est ça ?
Est-ce que c'est du chantage de la part de certains syndicats ?

LAURENT MARCANGELI
Tout à fait.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Le 8 avril en séance, bien. Moins de bureaucratie. Il faut moins de bureaucratie, vous êtes d'accord ?

LAURENT MARCANGELI
La France est obèse de sa bureaucratie. Pas de bonne administration. J'apporte toujours la distinction. L'administration, il la faut. Il la faut pour tous les services publics. Mais en revanche, nous avons, au cours des dernières années, créé ce que j'appelle de la mauvaise graisse. C'est-à-dire un excès de règles, un excès de législation, bavardes. Parfois qui se contredisent les unes avec les autres.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais tous les gouvernements successifs ont fait cela. On t'a accepté. On fait ? Non, ont accepté. Cette superposition de la bureaucratie.

LAURENT MARCANGELI
Les parlementaires aussi, parfois, ne s'aperçoivent pas, je parle en connaissance de cause, je l'ai été pendant plus de 7 ans dans ma vie, qu'on vote un certain nombre de lois qui sont parfois bavardes. Ensuite, vous avez également les règlements, les administrations qui ont créé, par décret, un certain nombre de lourdeurs administratives. Et puis aussi, vous avez un sujet qui, moi, m'intéresse. C'est celui de la surtransposition de nos normes par rapport à ce qui est décidé à Bruxelles. Donc, quand vous faites l'amas de tout cela, et l'addition de tout cela, vous apercevez effectivement qu'il y a de la lourdeur, et ça crée une forme d'obésité dont je suis chargé d'être le régulateur.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, est-ce que des commissions, des comités, des agences de l'État vont être supprimées ?

LAURENT MARCANGELI
À ce stade, nous avons, lundi soir, examiné l'article 1er du projet de loi simplification de la vie économique. Et à ce stade, en commission, une trentaine de comités ont été supprimés par la commission en charge d'examiner le texte.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Trentaine sur combien ?

LAURENT MARCANGELI
Il y avait, à peu près, 100 propositions de suppression. Vous avez, aujourd'hui, 360 et quelques comités qui existent dans notre pays. Il y en avait 700 en 2017. On est passé à un peu plus de 300, donc, on a quand même fait un effort de suppression et de régulation. Et donc là, vous avez eu une trentaine de suppressions lundi soir.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que la commission nationale du débat public va être supprimée ?

LAURENT MARCANGELI
Alors, elle n'a pas été supprimée par la commission spéciale.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes favorable à sa suppression ou pas ?

LAURENT MARCANGELI
Alors, je suis venu ici, ce matin, pour vous parler en toute vérité.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, bah oui, heureusement !

LAURENT MARCANGELI
Je ne vais pas aujourd'hui, parce que je suis membre du Gouvernement, oublier ce que je pensais lorsque j'étais parlementaire ou élu local. Ceci étant dit, encore une fois, ce n'est pas l'avis qui a été rendu au sein du Gouvernement sur la demande de suppression. Moi, à titre personnel, je suis d'abord favorable à... Une première chose, ça va être examiné. C'est-à-dire qu'on va relever le seuil d'intervention. C'est-à-dire que vous savez, aujourd'hui, vous avez des projets sur lesquels la CNDP est obligatoirement saisie.

JEAN-JACQUES BOURDIN
La commission nationale du débat public.

LAURENT MARCANGELI
Tout à fait. Ce qui est proposé par le Gouvernement dans un premier temps, c'est de faire en sorte qu'elle n'intervienne pas sur des projets d'une certaine taille, mais qu'elle intervienne sur des projets plus importants dans leur taille. Ça, c'est la première chose que le Gouvernement propose. Mais moi, à titre personnel, Laurent MARCANGELI, je pense qu'effectivement, une suppression ne me dérangerait pas.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, vous êtes favorable à la suppression de la commission nationale du débat public.

LAURENT MARCANGELI
Je ne sais pas si je porterais ça, parce que c'est une décision…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous porterez ça ?

LAURENT MARCANGELI
Non, parce que vous le savez très bien, vous avez des arbitrages qui sont rendus.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, vous me direz…

LAURENT MARCANGELI
Je vous rassure, je ne proposerais pas ma démission pour cela.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non. Oui, parce que beaucoup proposent la démission dès qu'ils sont…

LAURENT MARCANGELI
Pas avec cette saison.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est bien de proposer ça. Vous regardez ça comment quand un ministre propose sa démission ?

LAURENT MARCANGELI
Oh, ben écoutez, ça peut arriver.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, ça peut arriver, j'en ai eu.

LAURENT MARCANGELI
Je fais partie de ceux qui, lorsqu'ils la proposent, l'exécutent.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, l'exécutent. Un ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne ?

LAURENT MARCANGELI
Jean-Pierre CHEVENEMENT.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, c'est pour ça que je vous rappelle cela. Bien, dites-moi, et les normes ? Alors, combien allez-vous supprimer de normes ?

LAURENT MARCANGELI
On supprime, dans l'article 2, une trentaine de paperasseries d'autorisation préalable qui, aujourd'hui, sont autant de freins à, je dirais, la bonne santé, et notamment la santé mentale, je le dis parce qu'aujourd'hui, il faut vous dire une chose, c'est que l'amas de normes, il y a un rapport parlementaire qui a chiffré ça à 84 milliards d'euros. L'amas de normes, c'est 8 heures de travail pour une PME. C'est-à-dire que c'est un emploi presque pour une journée. L'amas de normes, c'est quand il y a des contrôles pour nos TPE et nos PME. Ces TPE, ces PME ne peuvent plus fonctionner le temps du contrôle et doivent même embaucher quelqu'un en supplément pour pouvoir…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Exactement, non seulement il y a les normes, il y a effectivement le temps du contrôle, mais il y a aussi les factures impayées, factures de l'État, factures publiques, qu'elles ne paient pas, que les factures sont payées avec retard aux PME, qui n'ont pas de trésorerie pour assumer tout cela.

LAURENT MARCANGELI
Et je peux même vous parler aussi d'un certain nombre de sujets qui concernent les collectivités territoriales. J'ai été maire d'Ajaccio pendant des années, au niveau de la commande publique, vous avez des obligations qui pèsent sur les collectivités territoriales, mais c'est également valable pour l'État, pour les hôpitaux, l'achat de matériel, par exemple de mobilier, surévalué par rapport au prix du marché. Il suffit d'aller sur Internet et comparer les prix de ce qu'on achète, le prix du stylo, le prix de la chaise de bureau qui est décuplé, et on est obligé de passer par là lorsqu'on est une collectivité territoriale ou qu'on est l'État.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous avez supprimé des commissions, des conseils, par exemple, le Conseil économique, social et environnemental régional, les fameux CESER, l'Observatoire national de la politique de la ville, le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie. Le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, je me demande franchement à quoi ça sert. Je ne sais pas moi, la conférence de prévention étudiante.

LAURENT MARCANGELI
Alors, il y en a 3 sur 4 qui ont été supprimés par la commission SURE. Je ne sais pas si le troisième que vous avez cité l'a été, mais je vous confirme que les CESER, les conseils environnementaux régionaux ont été supprimés par la commission, que le Conseil pour la vie étudiante l'a été également. Je peux même vous annoncer avec perte et fracas que nous avons également supprimé dans le cadre de cette commission un comité qui était en charge d'organiser les JO de 2024. Il n'avait pas été supprimé.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il n'avait pas été supprimé.

LAURENT MARCANGELI
Non.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il continue à siéger.

LAURENT MARCANGELI
Et il y a des gens qui ont voté contre ça.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non.

LAURENT MARCANGELI
Oui.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais ce n'est pas… Dites-moi, le Sénat a introduit un Haut conseil à la simplification. Vous avez vu ça ?

LAURENT MARCANGELI
Oui.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors si j'ai bien compris, un Haut conseil à la simplification pour supprimer les Hauts conseils.

LAURENT MARCANGELI
Je ne suis pas trop favorable à la création de ce Haut conseil. J'ai déjà eu l'occasion de le dire publiquement. Je pense qu'il y a justement des instances qui existent et qui peuvent être, à un moment, chargées de cela. Et d'ailleurs, je l'ai dit aussi en commission il y a deux jours, quand on propose une suppression, je pense qu'il faut aussi toujours avoir derrière l'idée de fusionner un certain nombre de comités ou d'instances existantes. Parce que la stratégie du Gouvernement, c'est la suivante. Quand il y a redondance, quand ça ne se réunit pas, et quand ça nuit à la lisibilité de l'action publique, on supprime. Et dorénavant, je vous le dis, les instances, tous les trois ans, on va avoir à regarder si les instances se sont réunies, si elles ne font pas redondance. Et si c'est redondant et que ça ne se réunit pas, eh bien on supprimera. Ça ne s'est jamais fait avant.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous êtes favorable à la proposition de loi transpartisane instaurant un moratoire de cinq ans pour l'application des ZFE ?

LAURENT MARCANGELI
Oui, parce qu'à titre personnel, encore une fois, même si je ne suis pas concerné sur mon territoire par les ZFE, je vois ce que ça propose pour des Françaises et des Français qui n'ont pas d'autre choix que d'avoir des voitures qui ont un certain âge et qui n'ont pas d'autre choix que d'utiliser des voitures pour pouvoir se rendre sur leur lieu de travail ou accompagner leurs enfants à l'école.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Laurent MARCANGELI, j'aime bien votre franchise. Alors, je vais vous poser d'autres questions. Vous êtes proche d'Edouard PHILIPPE puisque vous êtes à Horizon. Vous êtes membre d'Horizon, le mouvement d'Edouard PHILIPPE, qui prône la retraite à 67 ans. On est bien d'accord, 67 ans.

LAURENT MARCANGELI
Il n'a pas dit qu'il allait proposer, mais il a expliqué qu'il fallait aller vers, qu'au regard de ce qui se passait dans des pays voisins, il fallait cesser d'être dans le déni, un déni très français, de dire aux Françaises et aux Français vous allez voir, ça va bien se passer, vous pourrez travailler moins. Parce que ce n'est pas la marche que le monde a prise.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que le conclave est hors sol, comme le dit Edouard PHILIPPE ? Ce n'est pas moi encore, c'est Edouard Philippe.

LAURENT MARCANGELI
Je ne me permettrais pas de dire ça.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon ? Il a eu tort de le dire ?

LAURENT MARCANGELI
Non, il n'a pas eu tort. Il s'exprime en tant que responsable politique, chef d'une formation. C'est mon ami et son expérience de l'État lui donne le droit de dire ce qu'il pense. Moi, j'ai participé à la séance de lancement de ce dialogue qui doit avoir lieu. Je rappelle quand même que les conditions dans lesquelles le Premier Ministre a pris ses responsabilités étaient quand même assez inédites. Il y avait eu un renversement de Gouvernement, ça n'était pas rêvé depuis 1962. Il y a eu un débat très âpre en 2023. J'y ai participé en tant que président de groupe à l'Assemblée Nationale concernant la réforme proposée par Elisabeth Borne et son Gouvernement. Il y avait un dialogue social qui était, disons-le, un peu difficile lorsqu'on a repris nos responsabilités. François BAYROU, avec le soutien de son Gouvernement, a décidé de lancer une discussion notamment sur les retraites. Je ne peux pas aujourd'hui vous dire que c'est hors sol.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et de dire qu'on ne reviendra pas sur les 64 ans ? On ne reviendra pas à 62 ans ?

LAURENT MARCANGELI
C'est le Premier Ministre qui l'a dit. Moi, si vous voulez…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous auriez dit la même chose ? Est-ce que vous auriez dit la même chose ?

LAURENT MARCANGELI
Non, parce que moi, en ce qui me concerne, j'ai dit depuis le début, il y a le dialogue entre les partenaires sociaux. C'est ce qui avait été décidé. Ils se mettent d'accord ou pas. Et ensuite, le politique prendra la parole. Donc, une fois que les discussions auront cessé, je dirai ce que je pense. Mais, monsieur BOURDIN, tout le monde sait ce que je pense.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes favorable à une part de capitalisation ?

LAURENT MARCANGELI
Je suis favorable à une grande réforme. Moi, j'ai toujours regretté que la réforme de 2020 ait été interrompue. Je pense qu'elle allait dans le bon sens. Je pense qu'elle allait dans le sens de l'histoire, dans le sens de la démographie. Ce qui m'intéresse, moi, c'est d'avoir un système par répartition qui est soutenable, soutenable économiquement. Vous avez un rapport de la Cour des comptes qui démontre aujourd'hui, très simplement, qu'à horizon 2045, notre système dérape.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, une part de capitalisation, comme ça existe dans la fonction publique, d'ailleurs.

LAURENT MARCANGELI
Bien sûr, il y a une part de capitalisation. Et de ne pas y avoir de totem par rapport à cela. Pour une bonne et sainte raison, c'est que je suis pour la liberté. Les Françaises et les Français qui souhaitent demain mettre de l'argent de côté pour leur retraite par capitalisation, on ne peut pas les blâmer. C'est un choix individuel. Après, si c'est obligatoire, ça pose une autre question. Mais en revanche, le fait d'agir de cette manière ne me semble pas être scandaleux.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous allez ouvrir des négociations salariales dans la fonction publique ?

LAURENT MARCANGELI
Il y a un dialogue social. Il y a un agenda social qui est lancé. Il ne faut pas se payer de mots, aujourd'hui. Ce n'est pas autonomique avec ce que je vous dis depuis le début de notre entretien. Il y a beaucoup trop de fonctionnaires qui sont mal payés dans ce pays.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, il faut ouvrir un dialogue salarial. Des négociations salariales.

LAURENT MARCANGELI
Je ne peux pas accepter, aujourd'hui, de voir des femmes et des hommes qui exercent des fonctions qui sont parfois difficiles et marger à 1500-1600 euros par mois.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous allez ouvrir des négociations salariales ?

LAURENT MARCANGELI
Nous sommes tenus par certaines difficultés économiques. Cela ne vous a pas échappé. Ceci étant dit, je crois qu'il faut aujourd'hui avoir une réflexion de moyen et long terme sur la rémunération de nos agents publics.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous allez ouvrir des négociations salariales ?

LAURENT MARCANGELI
Il y a des discussions. De toute façon, chaque année, vous avez une discussion qui tourne autour du point d'indice.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous allez augmenter le point d'indice ?

LAURENT MARCANGELI
Je ne peux pas vous répondre pour le moment.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est favorable à l'augmentation du point d'indice ?

LAURENT MARCANGELI
C'est trop large le point d'indice. C'est indifférencié sur toute la fonction publique. Je pense qu'il faut avoir un regard particulier sur les bas salaires de la fonction publique parce qu'aujourd'hui, il y a une pauperisation

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous allez augmenter les bas salaires de la fonction publique ?

LAURENT MARCANGELI
A titre personnel, je pense que ce ne serait pas du luxe de mieux payer nos agents publics qui sont les moins bien payés. A titre personnel, encore une fois.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Les agents publics qui gagnent quoi ? Un peu au-dessus du SMIC ?

LAURENT MARCANGELI
Qu'est-ce que vous faites avec 1 500 euros, aujourd'hui ? Qu'est-ce que vous faites ?

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, on ouvre des négociations salariales centrées sur les salaires les plus bas de la fonction publique.

LAURENT MARCANGELI
On ne peut pas, aujourd'hui, dire à un jeune qui a fini ses études de rentrer dans la fonction publique. Tu vas être payé jusqu'à la fin de ta carrière 1 500, 1 700 euros par mois.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, il faut augmenter ?

LAURENT MARCANGELI
Sur le moyen long terme, je ne peux pas vous dire si ça sera fait cette année, mais il faudra rendre les métiers de la fonction publique plus attirants. Par plus attirants, on n'attrape pas les mouches avec du vin.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous allez le proposer ?

LAURENT MARCANGELI
Je proposerais d'avoir une réflexion autour de la rémunération des agents publics. Ça me paraîtrait pas criminel, mais pas très bien de ne pas le faire.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et la suppression des catégories ABC ?

LAURENT MARCANGELI
Non, ça, ce n'est pas à l'ordre du jour.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'était l'idée de l'un de vos prédécesseurs.

LAURENT MARCANGELI
C'était l'idée de Stanislas GUERINI. Il y avait aussi celle de la rémunération au mérite, qui me paraissait ne pas être scandaleuse, mais j'ai pris l'engagement vis-à-vis des organisations syndicales de ne pas le remettre sur la table.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'il y a de plus en plus de revendications religieuses dans la fonction publique ?

LAURENT MARCANGELI
Moi, je n'ai pas été confronté directement, mais je me suis laissé dire que ça arrive. Et je rappelle quand même que le principe de neutralité est un voisin très proche de la laïcité, et que normalement, un agent public n'a pas à manifester, dans le cadre de ses fonctions, une opinion religieuse ou politique.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et il doit être sanctionné dans ces cas-là ?

LAURENT MARCANGELI
Bien sûr.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a des référents laïcités dans le service public ?

LAURENT MARCANGELI
Tout à fait. C'est un principe auquel je suis particulièrement attaché.

JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai une dernière question sur les polices municipales. Est-ce que vous défendez l'armement de toutes les polices municipales ?

LAURENT MARCANGELI
Oui.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a beaucoup de maires. Je prends l'exemple de Grenoble par exemple, qui ne le souhaite pas.

LAURENT MARCANGELI
Il a même dit que ça ne l'intéressait pas, tout ça. Il n'y a qu'à voir ce qui se passe à Grenoble. Moi, je suis assez choqué de voir des élus qui sont encore dans le déni, ou pas, de monsieur PIOLLE. Il est un peu le premier représentant de ces élus qui vous disent que les policiers municipaux ne sont pas capables d'être armés. Je le dis aujourd'hui, les policiers municipaux exercent une fonction difficile. Ils sont en première ligne souvent lorsqu'il se passe des choses graves. On l'a vu à Mulhouse encore dernièrement. Je tiens à rendre encore hommage à ce policier municipal qui a fait preuve de sang-froid. Il n'a pas utilisé son arme. Il a stoppé le terroriste sans l'utiliser. Et moi, j'ai armé la police municipale à Ajaccio. Et aujourd'hui, je dis qu'il serait bon que nos policiers municipaux soient armés dans toute la France parce qu'ils exercent une fonction particulièrement difficile.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Élargir les prérogatives des policiers municipaux, des polices municipales ?

LAURENT MARCANGELI
Ça, c'est une réflexion de long terme que nous devons avoir. Vous savez qu'il y a ce qu'on appelle un Beauvau des policiers municipaux qui est en cours. D'abord, il faut revaloriser également leur carrière parce que voyez-vous, aujourd'hui, il y a certains grades de la fonction publique territoriale qui ne correspondent pas à ce qu'est un policier municipal. Et ça, c'est une réforme qui est difficile à mettre en oeuvre et que nous devons prendre à bras le corps. Et ensuite, effectivement, je pense qu'en complément de la police nationale qui ne doit pas être débordée et de la gendarmerie, il doit y avoir, aujourd'hui, une action de la police municipale qui doit être élargie. Parce que ces agents, ils ont les compétences, ils ont le savoir et ils ont l'expérience pour pouvoir le faire. En tout cas, moi, c'est ce que je vois sur le terrain chez moi.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 28 mars 2025