Interview de Mme Sophie Primas, ministre déléguée, porte-parole du Gouvernement, à CNews - Europe 1 le 9 avril 2025, sur les nouveaux droits de douane américains, les relations avec l'Algérie, les zones à faibles émissions (ZFE), la parité femmes-hommes dans les communes de moins de 1 000 habitants, le budget 2026 et l'aide active à mourir.

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Média : CNews - Europe 1

Texte intégral

SONIA MABROUK
Bonjour Sophie PRIMAS.

SOPHIE PRIMAS
Bonjour Sonia MABROUK.

SONIA MABROUK
Et bienvenue à la Grande interview sur CNews et Europe 1. Vous êtes la porte-parole du Gouvernement. Beaucoup de sujets à vous soumettre et tout d'abord, bien sûr, un cran de plus dans la guerre commerciale, les nouveaux droits de douane américains sont entrés en vigueur ce matin, il y a quelques heures, une soixantaine de pays ciblés. Il y a le choc, bien sûr, madame PRIMAS, des titans entre USA et Chine. Et côté UE, les exportations européennes sont taxées à 20 %. La riposte européenne se prépare. Emmanuel MACRON dit encore espérer que TRUMP revienne sur sa décision. Est-ce que l'heure est encore à la désescalade en ce moment ?

SOPHIE PRIMAS
L'heure est à la fois à la préparation de cet affrontement commercial et en même temps à la main tendue et à la volonté de négociation. Personne n'a à gagner dans cette guerre commerciale, d'ailleurs pas plus les États-Unis que l'Europe ou que le reste du monde. On voit bien que le séisme de cette guerre commerciale attaque toutes les bourses mondiales, que toute l'économie mondiale est en cause dans ses principes et dans sa croissance. Et donc l'idée n'est pas, encore une fois, de nous-mêmes escalader mais c'est d'être prêts, d'être forts par rapport aux États-Unis, d'être unis en Europe et d'avoir une réponse coordonnée, ce qui évidemment n'est pas simple mais qui en même temps est un signal, un peu comme pour ce qui s'est passé pour la Défense, d'une conscience européenne qui se consolide.

SONIA MABROUK
Vous pensez que c'est un moment d'opportunité malgré ce que nous subissons ?

SOPHIE PRIMAS
Eh bien écoutez, en tout cas, les discussions, vous savez que quand les réunions européennes avec Benjamin HADDAD, avec Jean-Noël BARROT, avec le Président de la République ont lieu, en fait on sent qu'il y a une unité européenne qui est en train de se reconstituer, une conscience européenne, à la fois de notre puissance et de notre capacité à agir ensemble. Ça, ça serait effectivement peut-être la petite opportunité de cette situation mais nous ne voulons pas d'escalade avec les États-Unis.

SONIA MABROUK
J'ai bien noté. On attend que l'Europe prépare et précise sa réponse, ce sera à partir du 15 avril sur les volailles, les jus de fruits, le riz, le maïs. On notera que le bourbon américain est absent. C'est là où justement on essaie de ne pas attaquer frontalement les Américains ?

SOPHIE PRIMAS
On essaie à la fois d'avoir une sélection de biens et de services qui sont une sélection de biens et de services qui vont toucher les États-Unis de façon importante et qui préservent le plus possible les intérêts des différents pays européens. Vous avez cité le bourbon, évidemment nous sommes très préoccupés par toute la filière vin et spiritueux en France qui est une priorité, d'autant plus qu'on a des difficultés avec la Chine également.

SONIA MABROUK
Vous parlez, Sophie PRIMAS, de préoccupations, d'inquiétudes évidemment de nos entreprises françaises, de nos industries. Il y a eu une réunion hier à Bercy avec les différentes filières. Que dit le Gouvernement, ce matin, aux entreprises françaises qui investissent aux États-Unis ? Vous leur dites de suspendre encore leurs investissements comme l'a dit le Président en sachant que cette consigne présidentielle apparemment n'est pas du tout suivie.

SOPHIE PRIMAS
Oui mais il faut faire un peu preuve de patriotisme, regarder. On ne dit pas d'annuler l'ensemble des investissements mais d'attendre un petit peu pour regarder comment cette ambiance commerciale est en train de se mettre en place. Vous avez vu qu'il y a des propos très injurieux et très durs encore une fois du Président TRUMP cette nuit sur les États qui se mettraient à plat ventre devant lui pour négocier. Nous ne sommes pas à plat ventre, nous serons debout avec notre force, mais nous voulons dire aussi aux entreprises…

SONIA MABROUK
On est debout en disant "désescalade s'il vous plaît monsieur TRUMP".

SOPHIE PRIMAS
Oui, on est debout en disant qu'on est prêt à riposter. D'ailleurs, on va riposter. Aujourd'hui même, il y aura un vote à l'Union Européenne pour déterminer la première salve de réponse mais nous disons aussi à nos investisseurs européens, attendez un tout petit peu pour aller investir aux États-Unis. Ça fait partie aussi du rapport de force que nous devons faire avec les États-Unis.

SONIA MABROUK
Alors lui est comparé à Donald TRUMP de chez WISH. Entendez par là, une mauvaise contrefaçon. C'est ainsi en tous les cas que les élus de Saint-Pierre-et-Miquelon ont jugé la proposition en choc de Laurent WAUQUIEZ dans le JDNews d'enfermer les OQTF sur ce territoire français. Marine Le PEN aussi dénonce la proposition de Laurent WAUQUIEZ en rappelant que les OQTF doivent revenir chez eux. Comment vous avez réagi en découvrant la une du JDNews et cette proposition, Sophie PRIMAS ?

SOPHIE PRIMAS
J'étais un petit peu surprise évidemment comme beaucoup. J'étais dans l'hémicycle et du coup, la Une circulait dans l'hémicycle avec un peu d'incrédulité, je dois le dire. Moi, ce que je veux dire c'est que Saint-Pierre-et-Miquelon c'est la France. Je ne sais pas pourquoi ce territoire… Enfin je comprends que ce territoire qui est hors de la zone Schengen a été choisi par Laurent WAUQUIEZ pour porter sa mesure. Je ne trouve pas ça très habile de mettre ce territoire de cette façon à l'honneur. Saint-Pierre-et-Miquelon c'est un beau territoire dans lequel la France a une grande histoire, une vieille histoire avec le Canada. Enfin bon, c'est un beau territoire.

SONIA MABROUK
Laurent WAUQUIEZ oublie que c'est la France ?

SOPHIE PRIMAS
Il pense que c'est la France mais en dehors de l'espace Schengen et en fait finalement un petit peu à côté. C'est une mesure qui n'est pas du tout envisagée par le Gouvernement donc je ne vais pas plus la commenter. On sait qu'on est dans une période de compétition à l'intérieur du groupe LR, donc vont fleurir beaucoup de propositions parfois un peu chocs pour essayer de bouger les esprits. On va dire que c'en est une, pas la plus habile pour Saint-Pierre-et-Miquelon.

SONIA MABROUK
Pourtant, vous avez cité l'un des arguments justement mis en avant par Laurent WAUQUIEZ, le fait que cet archipel ne soit pas soumis aux règles de Schengen, Laurent WAUQUIEZ qui, j'allais dire, décrit aussi les conditions météorologiques de cette zone qui ne donne pas envie d'y rester mais je pose la question différemment, alors quelle est la solution du Gouvernement, Sophie PRIMAS, alors que le ministre des Affaires étrangères a affirmé qu'une nouvelle phase s'ouvrait avec le régime algérien ? Est-ce que vous pouvez nous dire, ce matin, ce que la France a obtenu en échange de ce voyage ministériel par exemple sur la liste des OQTF ?

SOPHIE PRIMAS
Alors je ne vais pas rentrer dans les discussions parce que je n'en ai pas mandat d'abord. Et puis vous savez que les relations diplomatiques sont ce qu'elles sont ; elles se font dans la discrétion mais dans l'efficacité. Le rapport de force qui a été bâti par Bruno RETAILLEAU en France avec une volonté très forte justement de mettre un rapport de France entre l'Algérie et la France sur la question des OQTF a évidemment durci les relations. On est aujourd'hui arrivé à une solution où on a durci les relations.

SONIA MABROUK
Une solution ?

SOPHIE PRIMAS
Pardon, les solutions… Et aujourd'hui, nous arrivons dans une période où il faut bien reprendre langue pour pouvoir négocier effectivement avec l'Algérie, quelles sont les possibilités à la fois sur les OQTF, et d'ailleurs, à partir de demain, les préfets et les consuls vont reprendre langue pour parler justement des OQTF de façon précise et individuelle. Les accords de 94 seront respectés avec l'Algérie. Et nous reprenons langue avec l'Algérie pour Boualem SANSAL, pour nos entreprises qui travaillent en Algérie. D'ailleurs, certaines ont connu des contrats dès hier.

SONIA MABROUK
Voilà pour les contrats, dont acte, mais si je vous entends bien c'est une reprise de contact, c'est-à-dire notre mansuétude – je parle là de l'attitude du ministre ou plutôt du quai d'Orsay – pour l'instant nous n'avons rien sur la table sur les individus sous OQTF, sur la libération de Boualem SANSAL et sur l'ultimatum, je vous le rappelle…

SOPHIE PRIMAS
Nous sommes en train de négocier en fait maintenant entre les consuls et les préfets de département pour que la reprise des OQTF se fasse dans le cadre des accords de 94.

SONIA MABROUK
Que répondez-vous de nouveau à Laurent WAUQUIEZ ou encore Éric CIOTTI hier à votre place, Sophie PRIMAS ? Les deux ont dénoncé – Éric CIOTTI en particulier – une soumission de la part de l'exécutif français et un désaveu de la ligne de fermeté de Bruno RETAILLEAU.

SOPHIE PRIMAS
Ce sont des effets de manche quand on est dans l'opposition et qu'on n'est pas en face d'un pays pour négocier. Nous avons commencé une riposte graduée, vous savez, sur les visas, sur les délivrances de visas avec l'Algérie, ça a porté ses fruits.

SONIA MABROUK
Beaucoup y ont vu un pistolet à eau.

SOPHIE PRIMAS
Oui, la preuve, c'est qu'aujourd'hui, le Président TEBBOUNE a réouvert la porte de la négociation de son propre chef. Nous sommes aujourd'hui en train de négocier dans le détail et nous allons obtenir des résultats. Donc je dis à monsieur CIOTTI, je dis à monsieur WAUQUIEZ que nous sommes en train de travailler. C'est moins efficace, peut-être, que ce qu'ils disent depuis les bancs de l'hémicycle. Mais en réalité, je pense qu'au bout du compte, on aura de l'efficacité sur les points qui sont importants, y compris pour Bruno RETAILLEAU et en même temps, retrouver une relation qui doit être bonne avec l'Algérie.

SONIA MABROUK
Ça fait deux fois que vous citez Bruno RETAILLEAU, qui est au centre quand même beaucoup des critiques et de l'attention à la fois médiatique et politique. Bruno RETAILLEAU dit que sur le dossier algérien, il jugera sur les faits. Vous pouvez affirmer ce matin que la ligne de Bruno RETAILLEAU est la même que celle de Jean-Noël BARROT et donc la même que celle d'Emmanuel MACRON ?

SOPHIE PRIMAS
C'est celle du Gouvernement, c'est-à-dire sous l'autorité du Président de la République, puisque le Président de la République est également partie prenante dans les relations internationales, évidemment. Et d'ailleurs, les relations se sont faites d'abord avec lui, entre le Président TEBBOUNE et le président MACRON, et ensuite avec Jean-Noël BARROT au Quai d'Orsay. Eh oui, c'est la ligne du Gouvernement, c'est-à-dire à la fois une grande détermination. Nous voulons que les OQTF algériens, dont nous avons fait la liste, repartent en Algérie dans le cadre des accords de 1994. Nous voulons que nos entreprises françaises retrouvent un courant d'affaires avec l'Algérie. Nous voulons la libération de Boualem SANSAL et nous sommes en train de négocier dans ce sens. Mais pour négocier, il faut à un moment reprendre langue.

SONIA MABROUK
D'accord, c'est-à-dire que c'est la diplomatie qui va reprendre ses droits.

SOPHIE PRIMAS
C'est la diplomatie qui reprend et c'est des relations entre les présidents.

SONIA MABROUK
Alors, un sujet important, et on poursuit notre entretien sur CNews et Europe 1, Sophie PRIMAS, ce sont les fameuses zones à faibles émissions, mais à grande exclusion, qui sont examinées en ce moment à l'Assemblée. Tandis qu'une grande partie des députés veulent leur suppression pure et simple. Pourquoi tenez-vous à maintenir un tel dispositif ? Et je vais le dire autrement, en reprenant une célèbre réplique : pourquoi vous hésitez à arrêter d'emmerder les Français ?

SOPHIE PRIMAS
Alors, vous tapez juste parce que je suis d'une circonscription où repose le Président POMPIDOU, donc je suis assez pompidolienne dans l'idée. Merci de ce petit clin d'œil. Les zones à faibles émissions, elles sont d'abord un engagement européen, qui est l'engagement de l'Europe de réduire les émissions de particules et d'avoir une protection de notre population par rapport à un fléau qui est une mauvaise qualité de l'air, qui provoque des maladies. On estime, un rapport d'ailleurs d'un sénateur à l'époque, sénateur LR, aujourd'hui rapporteur du budget au Sénat, Jean-François HUSSON, montrait que c'était environ 8 milliards par an de dégâts sanitaires auprès des Français. Donc il faut que nous agissions. Est-ce que la mécanique des zones à faibles émissions est la bonne ? Probablement non, parce qu'elle organise en réalité une forme de partition sociale, partition professionnelle aussi. Moi, je suis d'un territoire dans les Yvelines, assez lointain. Les artisans qui ont des camionnettes diesel, ils se lèvent déjà à 4 h du matin pour éviter les embouteillages, pour venir travailler dans Paris. Si en plus, ils ne peuvent pas rentrer, évidemment, ça fait monter une colère très, très importante. Donc l'idée aujourd'hui qui va être dans la loi de simplification, c'est à la fois de dire que Paris et Lyon continuent et font à leur rythme en fonction des seuils de déclenchement des particules fines. Donc ça, c'est très important. Et puis, on renvoie aux collectivités locales ensuite la possibilité de mettre en place, avec les mécanismes qu'ils souhaitent, des zones de protection sanitaire.

SONIA MABROUK
Donc liberté pour une quarantaine d'agglomérations, mais pas pour le Grand Paris, la métropole de Lyon. En réalité…

SOPHIE PRIMAS
Avec déjà des dérogations, je veux insister sur le fait que déjà, le système, c'est beaucoup plus…

SONIA MABROUK
Mais pourquoi pas la suppression pure et simple ? Vous venez de dire, madame PRIMAS, que pour vous, quand même, c'était une forme, c'est une exclusion d'ailleurs, sociale. Est-ce qu'on est tenu en réalité par une directive européenne et par une facture qu'on va devoir payer ?

SOPHIE PRIMAS
Alors, il y a eu des engagements, il y a eu en plus des engagements européens, à peu près 3 milliards. Mais il ne faut pas regarder ces 3 milliards-là. Il faut aussi regarder les 8 milliards que ça coûte à la santé publique et surtout la vie des gens…

SONIA MABROUK
Et l'aveuglement idéologique et l'autoritarisme technocratique, parfois, d'imposer une telle mesure ?

SOPHIE PRIMAS
C'est ce que je viens de vous dire, Sonia MABROUK. C'est là-dessus qu'il faut qu'on travaille. C'est là-dessus qu'il faut absolument que les mécanismes ne soient pas des mécanismes de partition sociale. C'est la raison pour laquelle nous réengageons à partir de septembre, par exemple, le leasing social. C'est par exemple aussi, nous avons une réflexion aujourd'hui sur comment est-ce qu'on peut rendre acceptable la transformation de son véhicule. Vous savez, il y a des formes de rétrofit. On peut changer son moteur, on peut changer le carburant, etc. Ce sont des solutions qui coûtent peu cher et qui, si on les aidait, seraient accessibles aux plus modestes.

SONIA MABROUK
J'entends madame la porte-parole et je sais que vous luttez contre la déconnexion des responsables politiques, mais parfois, très honnêtement, en écoutant certains propos, on se dirait peut-être qu'il faudrait un stage dans votre commune ou peut-être, je ne sais pas, ailleurs.

SOPHIE PRIMAS
Ou peut-être, il faut remettre le cumul des mandats. Ça serait une bonne idée.

SONIA MABROUK
Très bien. Eh bien voilà, vous militez pour…

SOPHIE PRIMAS
Je me suis battue contre la fin du cumul des mandats pour ces raisons, des raisons de déconnexion. Et aussi, j'en parlais tout à l'heure, des raisons peut-être de comportement dans l'hémicycle. Je pense qu'un maire député ne se comporte pas comme j'en vois certains se comporter.

SONIA MABROUK
Et peut-être que la ministre Agnès PANNIER-RUNACHER n'aurait pas dû dire cela : "Les moins riches ont aussi des voitures."

SOPHIE PRIMAS
Je ne vais pas commenter les commentaires.

SONIA MABROUK
C'est important parce que ça soigne le mépris de classe. Vous vous désolidarisez de ces propos ?

SOPHIE PRIMAS
Je ne sais pas, mais en tous les cas, ce qui est important, c'est rendre... Ces propos ont été peut-être maladroits. Et en tous les cas, ce n'est pas une question de classe. L'appartenance, si on a une voiture plus ou moins polluante, ce n'est pas une question de classe, naturellement.

SONIA MABROUK
Cela me fait penser à un autre sujet. C'est la parité femmes-hommes dans les petites communes de moins de 1 000 habitants. Ça part d'une bonne idée. Je pense que nos téléspectateurs et auditeurs qui nous écoutent disent évidemment, on est pour cette parité. Mais à la fin, c'est une pratique. Enfin, comment dire, c'est une décision qui est impraticable. Bonnes intentions et à la fin, on se lie les poings ?

SOPHIE PRIMAS
D'abord, il faut dire que c'est partie d'une demande très forte de l'Association des maires ruraux de France. Vous savez, jusqu'à présent, on fait ce qu'on appelle le tir au pigeon, c'est-à-dire que vous avez une liste et puis les gens choisissent, ils barrent sur la liste ceux qui ne veulent pas et ils laissent ceux qui veulent. Ce qui conduit parfois à ce que le maire qui se présente, le maire entre guillemets naturel, ne soit pas élu. Parce qu'un maire, c'est aussi celui qui dit non. Donc de temps en temps, dans une petite commune, il y a des inimitiés qui s'exercent. Parfois, le maire n'est pas élu. Il y a aussi cette question de parité. Le Premier ministre dit souvent qu'il ne faut pas que les femmes qui habitent dans des communes de moins de 1 000 habitants…

SONIA MABROUK
Nous sommes tous d'accord, mais vous voyez aussi la contrainte. Quand Yaël BRAUN-PIVET dit : "On l'a fait, on va voir les conséquences."

SOPHIE PRIMAS
Oui, parce qu'elle est très attachée à la parité. Mais en réalité, on a passé une disposition dans cette loi qui est très importante, c'est-à-dire que vous pouvez ne pas présenter de liste complète. C'est-à-dire que si vous êtes tout seul, vous pouvez vous présenter quand même tout seul. Si vous êtes trois, il faut au moins une femme, mais vous pouvez n'être que trois sur une liste de 9 ou de 13.

SONIA MABROUK
Sophie PRIMAS, deux questions importantes pour conclure. D'abord, le budget. Vous avez d'ores et déjà prévenu que ce serait un casse-tête, un cauchemar. Une lettre de cadrage a été envoyée aux ministres. Ce n'est pas même un budget, c'est trois budgets : 2026, 2027 et 2028. On sait que la croissance va baisser à 0,7, même 0,6.

SOPHIE PRIMAS
On est en train d'estimer cela.

SONIA MABROUK
Les efforts vont être très importants pour les contribuables ?

SOPHIE PRIMAS
Les efforts vont être importants, mais surtout, nous avons entamé une grande réforme de l'État. Vous savez que c'est l'objectif du Premier ministre, c'est de se dire quelles sont les missions obligatoires de l'État, comment nous les exerçons, comment nous évaluons cet exercice et comment nous pouvons à la fois les simplifier ? Vous savez qu'on a un grand champ de simplification en chantier également, et comment nous pouvons réduire les dépenses sans obérer évidemment…

SONIA MABROUK
Pas de tabou donc ? Les aides sociales…

SOPHIE PRIMAS
Aucun tabou, les aides sociales, c'est 50 %, les collectivités, c'est 30 %.

SONIA MABROUK
Le niveau des équipes dans la fonction publique.

SOPHIE PRIMAS
Comment on peut rendre le service public de façon plus efficace.

SONIA MABROUK
Je voudrais conclure sur un sujet qui normalement mériterait des heures parce qu'il a des conséquences importantes pour notre société : l'aide active à mourir, l'euthanasie. Je suppose que vous entendez évidemment tous ces spécialistes, ces experts qui alertent sur la rupture anthropologique, qui alertent aussi sur la relation tellement importante entre le patient et le médecin et finalement sur ce serment d'Hippocrate auquel on apporte un coup de canif. Qu'est-ce que vous dites ? Qu'est-ce que la femme politique, qu'est-ce que la citoyenne engagée pense d'un tel texte ?

SOPHIE PRIMAS
Alors d'abord, je suis très heureuse que le Premier ministre ait choisi de faire deux textes : un texte sur les soins palliatifs parce que pour le coup, ça c'est du service public plus, plus, plus, c'est-à-dire la possibilité pour tous les Français d'avoir accès aux soins palliatifs. L'aide active à mourir, ça pose effectivement des questions anthropologiques, ça pose des questions de conscience, ça pose des questions de conditions, ça pose des questions de liberté d'exercice pour les médecins. Pour vous dire, je ne sais pas encore ce que je voterais si jamais j'étais de nouveau parlementaire sur ce texte-là. Il faut d'abord regarder quelles seront les conditions, quels seront l'encadrement des conditions.

SONIA MABROUK
Intéressant, vous ne savez pas.

SOPHIE PRIMAS
Alors, je ne sais pas, c'est une question très difficile. Moi, je suis en contact avec un professeur qui s'appelle le professeur Claude GRANGE, qui a monté, il y a 27 ans, les soins palliatifs à Houdan dans mon territoire, qui a fait un film avec Costa GAVRAS récemment, voilà, magnifique. Et discuter avec lui, c'est très enrichissant parce que lui, il a vécu ça. Il a vécu cette relation dont vous parlez, entre un médecin et quelqu'un qui est en soins palliatifs, quelqu'un qui demandait des aides à mourir et qui, finalement, disent "non, je veux finir ma vie sans souffrir", parce que c'est ça la difficulté, sans souffrir, sans être dans une position d'indignité. C'est très difficile. Donc, il faut regarder jusqu'au bout du texte, quelles seront les conditions d'encadrement.

SONIA MABROUK
Si je peux me permettre, Sophie PRIMAS, c'est très rare qu'à ce micro, depuis tant d'années, les politiques doutent. Et je trouve que c'est heureux sur un sujet aussi important.

SOPHIE PRIMAS
C'est un sujet…

SONIA MABROUK
La décision et le doute.

SOPHIE PRIMAS
Oui, c'est le doute. Et le doute vous oblige à écouter, vous oblige à lire, vous oblige à vous renseigner. Et c'est ça qui fait la beauté de la politique, en réalité.

SONIA MABROUK
Merci, Sophie PRIMAS. C'est votre grande interview. Je vous dis à bientôt, avec plaisir.

SOPHIE PRIMAS
À bientôt. Merci.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 10 avril 2025