Texte intégral
JEAN-JACQUES BOURDIN
Notre invitée, ce matin, Élisabeth BORNE, ministre d'État, ministre de l'Éducation Nationale, de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche, bonjour,
ÉLISABETH BORNE
Bonjour,
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous. Alors évidemment, je vais vous parler recrutement des enseignants, je vais vous parler de fermeture de classe, je vais vous parler de lecture, beaucoup, beaucoup de sujets d'université aussi, à travers le cas de Fabrice BALANCHE, mais je voudrais commencer sur ce que vous avez dit, ça fait du bruit, sur LCP lundi, vous parliez d'orientation, effectivement c'est important pour tous les enfants et pour tous les parents, l'orientation. Alors, vous avez dit, "Un élève doit se préparer très jeune et réfléchir à la façon dont on se projette dans une formation et dans un métier, demain, réfléchir à son orientation professionnelle, presque depuis la maternelle", ça a choqué, depuis la maternelle ?
ÉLISABETH BORNE
Alors, je voudrais rassurer vos auditeurs, on ne va pas orienter les élèves dès la maternelle, donc manifestement, mes propos n'étaient pas clairs, donc ce que j'ai voulu dire, c'est que l'orientation c'est un sujet global et on doit veiller à ne pas prédéterminer, conditionner les choix. Et on sait qu'il y a beaucoup de biais dans l'orientation qui sont très forts et qui apparaissent très tôt, par exemple, au niveau de l'entrée en CP, où pour les maths, et le même chez les filles et chez les garçons, au bout d'un trimestre, les filles décrochent et l'écart se creuse tout au long de la scolarité. Donc, ce que je veux dire, c'est qu'on doit préparer, veiller à ce que les élèves puissent d'abord découvrir leurs capacités, qu'ils puissent prendre confiance en eux, qu'on leur donne l'envie d'apprendre et que ça permette, le moment venu, d'avoir les choix les plus éclairés et avec le moins de biais.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais leur donner l'envie d'apprendre, ça me paraît essentiel, effectivement, à l'école, c'est le but, Élisabeth BORNE.
ÉLISABETH BORNE
Absolument, c'est notre responsabilité.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, l'orientation, ça, ça viendra plus tard.
ÉLISABETH BORNE
Oui, en tout cas, veillons à ne pas fermer des portes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça a choqué, vous comprenez que ça a choqué, votre propos ?
ÉLISABETH BORNE
Je pense que les propos étaient, manifestement, pas clairs.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Voilà, vos propos n'étaient pas clairs, très bien. Vous avez rétabli, je fais quand même un petit rapport avec l'étude rendue par MCKINSEY, sur l'évolution du métier de l'enseignant. Évidemment, dans le primaire, les élèves doivent être sensibilisés aux opportunités de la société numérique, ainsi qu'à ses risques. Vous êtes d'accord avec ce type ?
ÉLISABETH BORNE
Vous savez, l'utilisation des réseaux sociaux pour les jeunes a un impact qui n'est pas du tout positif sur la scolarité des élèves. Peut-être que vous avez vu, effectivement, l'étude sur la lecture.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, je vais y revenir.
ÉLISABETH BORNE
Je pense que d'apprendre aux jeunes, d'abord, je souhaite…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Un apprentissage au numérique des élèves.
ÉLISABETH BORNE
Non, qu'ils ne soient pas les alertés sur les risques du numérique, sur le fait que toutes les informations ne sont pas vraies sur les réseaux sociaux, et apprendre de la distance par rapport au numérique.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'un élève de 8ème, de 9ème, de 10ème, moi je parle à l'ancienne, de cours élémentaires, de CE2, peut être sensibilisé au numérique déjà ?
ÉLISABETH BORNE
Le souhait, c'est qu'il passe le moins de temps possible sur les écrans, et le plus de temps possible à lire des livres.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vais y revenir sur la lecture. Parcoursup, franchement, bientôt remplacé, clairement.
ÉLISABETH BORNE
Parcoursup évolue, et on essaie de l'améliorer d'année en année, en étant conscients qu'au moment où on fait ses choix, c'est un moment de stress pour les familles, pour les jeunes, et donc il faut améliorer le dispositif, donner plus d'informations.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour les enfants, déstressons les parents, déstressons les enfants.
ÉLISABETH BORNE
C'est bien ce qu'on s'efforce de faire, je pense qu'on donne de l'information sur les chances que vous avez de pouvoir accéder à une formation en fonction de la filière que vous avez de vos notes. On a de toute façon besoin d'un outil, parce qu'il y a des centaines de milliers de jeunes, il y a même près d'un million de jeunes qui sont inscrits sur Parcoursup cette année, et qui font beaucoup de vœux, on doit avoir 10 millions de vœux, donc il faut bien un outil pour pouvoir rapprocher tous ces vœux de toutes les formations qui existent. Absolument.
JEAN-JACQUES BOURDIN
On peut remplacer Parcoursup ?
ÉLISABETH BORNE
Je ne suis pas sûr que ce soit nécessaire en soi de remplacer Parcoursup, qu'il faille sans cesse améliorer l'outil qui permet aux jeunes de bien choisir et d'avoir le maximum de possibilités et d'avoir les choix les plus éclairés possibles, ça c'est clair.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Franchement, Parcoursup ça vous va ou pas ? Est-ce que ça fonctionne comme vous voulez ?
ÉLISABETH BORNE
C'est toujours mieux que le dispositif d'avant dans lequel on était tiré au sort, vous voyez.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais c'est incomplet.
ÉLISABETH BORNE
C'est perfectible certainement, et on s'y emploie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, la lecture menacée, j'ai vu l'enquête IPSOS sur les adultes, enquête IPSOS pour le Centre National du Livre, moins d'un Français sur deux lit tous les jours, enfin c'est assez catastrophique, ça baisse d'ailleurs le nombre de lecteurs. Alors, en ce qui concerne les jeunes, les 15-24 ans passent plus de 5 heures par jour sur les écrans, 2 heures quand on a de 1 à 6 ans, et 3 heures 30 de 7 à 12 ans sur les écrans, mais c'est considérable. Et en CP, qu'est-ce que je dis en CP, non en CM2, un élève sur trois éprouve des difficultés de lecture. Est-ce que vous allez renforcer l'apprentissage à la lecture à l'école élémentaire ?
ÉLISABETH BORNE
Alors, on prend de nombreuses initiatives pour encourager la lecture, vous savez, à la fois des concours de lecture à voix haute, des rencontres avec des auteurs, il y a la démarche Un Livre pour les vacances qui avait été lancée par Jean-Michel BLANQUER, donc tous les élèves de CM2 qui ont un livre pour les vacances. Et puis cette année, on va lancer une opération Cet été je lis, on va s'efforcer de donner envie de lire à tous les jeunes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais comment ? Une opération "Cet été je lis", c'est-à-dire ?
ÉLISABETH BORNE
Avec beaucoup de partenaires, par exemple, dans les stations-services sur les autoroutes, on va proposer des livres aux jeunes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Gratuits ? Des livres gratuits seront offerts ?
ÉLISABETH BORNE
Pas gratuits mais pas chers, et on veut aussi leur prêter des livres, vous savez, sur les centres de documentation des établissements, qu'on puisse prêter des livres, pour le coup gratuitement, pour tout l'été. Au-delà de ça, il y a un travail avec tous les ministères concernés pour voir quelles nouvelles initiatives on peut prendre et ça fera l'objet d'annonces prochainement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah, vous allez prendre de nouvelles initiatives ?
ÉLISABETH BORNE
Oui, je vous confirme.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour améliorer l'apprentissage de la lecture ?
ÉLISABETH BORNE
Pour donner envie de lire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous en faites quoi ?
ÉLISABETH BORNE
Vous verrez le moment venu.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais Élisabeth BORNE vous avez réfléchi. Quelques pistes.
ÉLISABETH BORNE
Il y a deux sujets, il y a à la fois comment on s'assure que les jeunes passent moins de temps sur les écrans, c'est notamment la généralisation de la pause numérique. Vous savez qu'on a une centaine de collèges qui sont dans cette expérimentation. Et puis, par ailleurs, comment on encourage à acheter des livres, à aller vers les librairies de proximité. Donc, c'est des sujets sur lesquels on travaille, notamment avec la ministre de la Culture.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, depuis la rentrée 2024, effectivement, expérimentation de la pause numérique au collège, 50 000 élèves qui sont concernés. Apparemment, ça a l'air de bien fonctionner. Les élèves déposent leur portable en arrivant et ne l'utilisent pas en pause ou en récréation. C'est bien cela, Élisabeth BORNE ?
ÉLISABETH BORNE
C'est bien cela. On range son portable en arrivant au collège et donc, on le récupère en quittant le collège.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il avait été promis de généraliser cette opération en janvier dernier. Est-ce qu'elle va être généralisée ?
ÉLISABETH BORNE
Moi, je souhaite qu'elle soit généralisée. Et on est à la rentrée prochaine. On est en train d'en discuter avec les conseils départementaux puisque ce sont les conseils départementaux qui financent les casiers ou les sacs dans lesquels on peut ranger son portable pour la journée. Mais donc, je suis confiante sur le fait qu'on puisse généraliser cette expérimentation à la rentrée prochaine.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, à la rentrée prochaine, ce sera généralisé. Les élèves devront laisser leur portable à l'entrée dans des casiers à l'entrée du collège.
ÉLISABETH BORNE
Dans des casiers, dans des sacs. On va laisser chaque conseil départemental choisir la bonne réponse. Mais en tout cas, l'objectif, c'est bien de généraliser à la rentrée prochaine.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, généraliser à la rentrée prochaine, c'est très important parce que ça suscite débat auprès des parents, évidemment, et des enseignants, et puis les départements qui disent, mais ça coûte cher, donc vous allez aider les départements.
ÉLISABETH BORNE
Il y a beaucoup d'adhésions des parents, des professeurs.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, je sais.
ÉLISABETH BORNE
Et par ailleurs, on voit que dans les collèges où on a fait cette expérimentation, le climat scolaire est plus apaisé, donc, je pense que ça vaut la peine de généraliser.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, les groupes de besoins au collège en 6ème et 5ème seront créés ?
ÉLISABETH BORNE
Ils sont maintenus. Le décret a été publié dimanche dernier.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Signé, voilà.
ÉLISABETH BORNE
Absolument.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Signé, en français et en mathématiques, et en 4ème et 3ème bientôt ?
ÉLISABETH BORNE
En 4ème et en 3ème, on démarre à la prochaine rentrée une heure de soutien, d'approfondissement, en maths ou en français, par semaine, et donc du coup, on poursuit l'accompagnement des élèves en 4ème et en 3ème.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, parlons des profs, on a parlé des élèves, des parents, mais parlons des profs, avec une crise des vocations. On est bien d'accord, c'est difficile de trouver des enseignants. Rentrée dernière, dans 56 % des collèges et lycéens, c'est un chiffre syndical. Il manquait au moins un prof, c'est un chiffre syndical. Vous le confirmez ?
ÉLISABETH BORNE
A priori, on était à 99,5 % de professeurs de poste qui étaient pourvus à la rentrée, mais on sait que tout au long de l'année, il peut y avoir des maladies, il peut y avoir des problèmes, et donc, la situation n'est pas satisfaisante. Ça renvoie à un problème d'attractivité du métier, et c'est pour ça que j'ai annoncé qu'on allait revoir les modalités de recrutement et de formation initiale des professeurs. Quand on est passé à un recrutement au niveau du Master 2, on a eu 45 % de candidats de moins pour les postes de professeurs des écoles. Donc, c'est important de revoir ce mode de recrutement. On va mettre en place, à partir de la rentrée 2026, des formations, des licences pluridisciplinaires dans lesquelles les étudiants pourront avoir des cours de français, de maths, d'histoire-géo, de SVT, donc toutes les matières qu'ils auront à enseigner dans le premier degré, et on recrutera à la fin de la licence. Ensuite, il y aura deux années de Master professionnalisant dans lequel on pourra continuer à approfondir les compétences disciplinaires et, en même temps, on apprendra le métier de professeur. C'est important de savoir gérer une classe, de savoir prendre en charge des élèves, notamment en situation de handicap. Et vous savez que 4 professeurs sur 5 nous disent qu'ils ne sont pas suffisamment préparés à ces gestes métiers qui sont fondamentaux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, ça veut dire quoi ?
ÉLISABETH BORNE
Je précise qu'ils seront rémunérés, les étudiants, 1 400 euros net la première année du Master.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire qu'au bout de Bac 3, on pourra enseigner ?
ÉLISABETH BORNE
Non, on n'obtiendra pas. Quand on est recruté…
JEAN-JACQUES BOURDIN
On aura une année de professionnalisation ?
ÉLISABETH BORNE
On a deux années de professionnalisation avec un tiers de stage la première année du Master et 50 % la deuxième année. Donc on se prépare progressivement à rentrer dans ce métier.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'on ne va pas baisser le niveau des enseignants ?
ÉLISABETH BORNE
Non, précisément non. Vous voyez, on est en train de définir une filière, un parcours qui est beaucoup plus clair qu'aujourd'hui pour devenir professeur. Moi, ce que je constate, c'est qu'il y a beaucoup de jeunes qui, après la terminale, ont envie de s'orienter vers ce très beau métier. Mais aujourd'hui, il n'y a pas de parcours clair pour devenir professeur des écoles.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce métier est encore mal payé, vous en convenez ?
ÉLISABETH BORNE
Ce métier pour lequel on a revalorisé les débuts de carrière et les fins de carrière, mais sur lequel il y a tout un milieu de carrière où on n'est pas augmenté pendant très longtemps. Et donc, on a aussi engagé des discussions avec les organisations syndicales. Moi, je souhaite qu'on débouche d'ici l'été sur la façon dont on a un parcours de carrière plus attractif sur ce milieu de carrière.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, une revalorisation plus rapide ?
ÉLISABETH BORNE
Absolument, qu'on puisse avoir des promotions plus rapides sur ce milieu de carrière.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. La commission d'enquête en cours sur les violences commises dans les établissements privés sous contrat avec l'État. Vous avez vu le travail. L'enseignement privé, est-ce que les contrôles sont suffisants ? Est-ce qu'il va y avoir un travail gouvernemental sur la question ?
ÉLISABETH BORNE
J'ai annoncé un plan "Brisons le silence, agissons ensemble", qui vise à systématiser les remontées d'informations sur les faits de violences dans les établissements qui vise aussi à mieux recueillir la parole des élèves et à augmenter les contrôles. On passe de 80 inspecteur qui étaient dédiés à cette tâche à 200 en deux ans. Et on veut contrôler 40 % des établissements privés sous contrat dans les deux ans qui viennent. Je pense que c'est important qu'on ait ces contrôles et qu'on puisse surtout s'assurer que les faits qui sont révélés, et on a beaucoup de témoignages d'anciens élèves qui sont dramatiques, dans lesquels on voit qu'on a des personnes dont la vie a pu être brisée, que ces faits ne puissent pas se reproduire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, ce sont, je le rappelle, des établissements privés sous contrat avec l'État.
ÉLISABETH BORNE
Donc du coup on doit les contrôler, ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent.
JEAN-JACQUES BOURDIN
ÉLISABETH BORNE.
ÉLISABETH BORNE
Je viens de recevoir le rapport qui a été fait sur l'institution Bétharram. Je suis en train d'en prendre connaissance et je communiquerai très prochainement sur le contenu et les suites données à ce rapport.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire, Bétharram pourrait être fermé ?
ÉLISABETH BORNE
Non, à priori, ce n'est pas le rapport. En tout cas, il y a un certain nombre de recommandations. Je le rendrai public en toute transparence.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, il va y avoir des sanctions ?
ÉLISABETH BORNE
Il y a des recommandations, il y a des enquêtes administratives.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Des recommandations, ça veut dire sanctions parfois. Je connais votre langage.
ÉLISABETH BORNE
Si elles ne sont pas suivies, évidemment il y aura des réactions, mais à ce stade, je le rendrai public très prochainement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, le cas Fabrice BALANCHE, il était avec nous ce matin à 7 h 10. Je rappelle qui est Fabrice BALANCHE. Il est agrégé de géographie, professeur à l'université Paris-Lyon 2. Il enseignait le 1er avril, quand tout à coup, ont fait irruption dans sa classe, une quinzaine de militants propalestiniens, islamo-gauchistes apparemment, qui sont venus perturber son cours, et il est parti. Il est parti parce qu'il ne pouvait plus donner cours. Alors, est-ce que vous allez vous porter partie civile ?
ÉLISABETH BORNE
Je vous confirme, c'est inacceptable ce qui s'est passé le 1er avril, avec effectivement des individus cagoulés, masqués, qui sont rentrés, qui ont obligé le professeur à quitter son amphi. L'université, c'est un lieu où on doit avoir la liberté d'enseigner. Avec Philippe BAPTISTE, ministre de l'Enseignement supérieur et de la recherche, on y est très attaché. L'université a accordé la protection fonctionnelle à Fabrice BALANCHE. Elle a aussi fait un signalement au procureur. Et moi, je souhaite que le ministère puisse se constituer partie civile, je vous le confirme.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous allez vous constituer partie civile ?
ÉLISABETH BORNE
Oui, absolument.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Absolument. Dans le cas de Fabrice BALANCHE, que vous soutenez sa réserve.
ÉLISABETH BORNE
C'est une façon d'exprimer que la liberté d'enseigner doit être garantie, et qu'on ne peut pas menacer un professeur, comme ça s'est produit lors de cette séance le 1er avril à l'université de Lyon.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, ÉLISABETH BORNE, vous l'avez dit, je vais employer vos mots : "Je n'ai aucune leçon à recevoir de personne sur les sujets liés à la laïcité" Vous pensez à qui en prononçant cette phrase, ÉLISABETH BORNE ?
ÉLISABETH BORNE
Je pense qu'on ne va pas entretenir la polémique.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais ça parle…
ÉLISABETH BORNE
Certains pensaient que je pouvais faire preuve de naïveté, donc je dis non, je ne suis pas naïf sur ces sujets. Je dois être l'une des premières à avoir soutenu la Fédération française de foot qui avait un règlement intérieur qui interdisait le port du hijab dans les compétitions. Donc, il y a une proposition de loi qui a été adoptée au Sénat et qui pourra être prochainement examinée à l'Assemblée nationale pour généraliser cette interdiction à toutes les fédérations. Interdiction du port de signes religieux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous soutenez cette proposition de loi ?
ÉLISABETH BORNE
Je vous confirme.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous la soutenez clairement ?
ÉLISABETH BORNE
Oui, sans ambiguïté.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pourquoi y a-t-il eu cette polémique ?
ÉLISABETH BORNE
Je ne sais pas, ce n'est pas de mon fait.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, ce n'est pas de votre fait, c'est du fait de quelqu'un d'autre. Du Premier ministre ?
ÉLISABETH BORNE
Non, je ne pense pas du tout.
JEAN-JACQUES BOURDIN
De qui ? Alors, de Bruno RETAILLEAU ?
ÉLISABETH BORNE
Ce n'est pas très intéressant. Ce qui est important, c'est que tout le gouvernement soutient cette proposition de loi qui sera examinée prochainement à l'Assemblée nationale après avoir été adoptée au Sénat.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'il y a de l'entrisme islamique dans des lycées musulmans ?
ÉLISABETH BORNE
De l'entrisme islamique, on est très vigilant, notamment dans les établissements hors contrat pour qu'il n'y ait pas, comme on a pu le voir dans un certain nombre d'établissements, des livres qui ne sont pas conformes aux valeurs de la République. Dans ce cas-là, on peut décider de la fermeture de l'établissement. C'est ce qu'on a fait dans un certain nombre de cas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est ce que vous allez faire dans d'autres établissements ?
ÉLISABETH BORNE
De façon générale, on s'assure que les valeurs de la République sont respectées, y compris dans les établissements hors contrat.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour les maires accompagnatrices de sorties scolaires, Bruno RETAILLEAU est favorable à l'interdiction du port du voile. Vous aussi ?
ÉLISABETH BORNE
Je pense qu'il faut…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a des différences au sein d'un même Gouvernement, mais c'est votre différence.
ÉLISABETH BORNE
Donc, moi, je dis qu'il faut revenir à ce qu'est la laïcité dans notre pays, c'est la liberté de croire ou de ne pas croire. Et c'est la neutralité de l'État et de ses agents qui ne doivent pas porter des signes religieux de façon ostensible, quels qu'ils soient et en l'occurrence, les accompagnatrices ne sont pas des agents du service public.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je parlais de sport. Nous parlions de sport. Le sport à l'école, c'est très important. Sixième rentrée 2025, des tests d'aptitude physique seront passés par les élèves de sixième, c'est ça ?
ÉLISABETH BORNE
Donc, là aussi, il y a une expérimentation qui a été lancée à la dernière rentrée. C'est important de pouvoir mesurer l'état physique, l'état de santé des élèves.
JEAN-JACQUES BOURDIN
2025, c'est généralisé à la prochaine rentrée.
ÉLISABETH BORNE
C'est généralisé, alors, si des collèges ou des professeurs ne veulent pas le faire, ce ne sera pas obligatoire. On souhaite que ce soit généralisé. Vous savez, ça renvoie aussi au sujet des écrans dont on parlait. On voit que les élèves sont trop sédentaires, que leur capacité musculaire, que leur forme physique, en général, peut ne pas être bonne. Dans ce cas-là, c'est important de le détecter et de pouvoir leur conseiller.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et on fait quoi après ?
ÉLISABETH BORNE
D'abord, c'est pour le professeur d'EPS de pouvoir savoir la situation, la santé, la forme physique de ses élèves. C'est aussi avec tous les partenaires du monde sportif de pouvoir les orienter, leur conseiller des pratiques sportives adaptées.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, parce qu'on propose soi-disant trente minutes de sport quotidiennement à l'école. C'est un établissement sur deux qui respecte cette volonté ministérielle.
ÉLISABETH BORNE
On va également former nos professeurs pour que ça soit 100 % des établissements qui le mettent en œuvre.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est une question de formation des professeurs uniquement.
ÉLISABETH BORNE
Je pense qu'il faut les outiller pour qu'ils puissent répondre à ce souhait, à cette volonté de développer trente minutes d'activité physique. C'est important parce qu'on voit qu'en effet, les élèves, les enfants sont trop sédentaires, ne font pas assez d'activités physiques.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Élisabeth BORNE, vous avez été Premier ministre. Élisabeth BORNE, la France ne tiendra pas ses objectifs de réduction de déficit. C'est François BAYROU qui dit cela. Pourquoi ? La guerre commerciale a bon dos ?
ÉLISABETH BORNE
La France naturellement fait le maximum, et je peux vous assurer qu'on en discute autour du Premier ministre pour tenir l'objectif de déficit qui a été fixé. Ensuite, avec les décisions qui ont été prises par Donald TRUMP, évidemment ça peut avoir des conséquences très fortes sur l'économie mondiale. C'est pour ça que l'Europe a une réponse qu'elle met en œuvre à partir d'aujourd'hui et progressivement, et se prépare à un nouveau train de réponses. L'objectif, c'est plutôt de sortir de cette guerre commerciale qui est néfaste pour tout le monde. Mais, en effet, on peut avoir un risque de décrochage de l'activité économique, de ralentissement, et donc, on devra en tenir compte, oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a une petite rumeur qui court au-delà de 2027. Quel rôle souhaitez-vous pour Emmanuel MACRON ? Je vous dis ça parce qu'il y a la petite rumeur qui dit : "Ah, il pourrait se représenter en 2032'. Ce qui est vrai d'ailleurs, il pourrait.
ÉLISABETH BORNE
Oui, enfin factuellement il pourrait, et ce n'est pas moi qui vais savoir ce que le président de la République doit faire en 2032.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous le souhaiteriez ?
ÉLISABETH BORNE
Franchement, je pense que ce n'est pas le moment de se poser ce genre de questions.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 10 avril 2025