Texte intégral
ADRIEN GINDRE
Bonjour Sophie PRIMAS.
SOPHIE PRIMAS
Bonjour.
ADRIEN GINDRE
Dans un peu plus d'une heure, procession à Rome pour transporter le cercueil du Pape. Samedi, ce seront les obsèques en présence notamment du Président français, des ministres Bruno RETAILLEAU et Jean-Noël BARROT. En France, les drapeaux seront mis en berne, ce qui fait réagir notamment à gauche Alexis CORBIERE qui dit que la République n'a pas à manifester une préférence pour un culte. Qu'est-ce que vous lui répondez ?
SOPHIE PRIMAS
Je crois que nous ne manifestons pas une préférence pour un culte. Le Pape était d'abord un chef d'État, le chef d'État du Vatican. Il avait une place dans la politique et la diplomatie internationale qui n'étaient pas neutres. Son action en Ukraine, par exemple, a été très reconnue. Son action pour demander, parcourir le monde à la recherche de la paix, professer la paix, chercher les voies de Concorde était tout à fait imminente, tout à fait partie prenante de sa personnalité. Je crois que c'est cela auquel on rend hommage aujourd'hui.
ADRIEN GINDRE
Je voudrais vous lire une phrase. "Je n'aurais certainement pas pris une telle décision. Elle ne correspond pas à la distinction qu'il faut faire entre convictions spirituelles et choix politiques et nationaux." Vous savez qui a dit ça ?
SOPHIE PRIMAS
Non.
ADRIEN GINDRE
C'était François BAYROU, en 2005, pour la mort du Pape Jean-Paul II.
SOPHIE PRIMAS
Écoutez, là, la décision a été prise par le Président de la République. Je crois que l'émotion que suscite le décès du Pape est partagée, qu'on soit croyant ou pas croyant. Et je crois que même pour des femmes et des hommes de gauche, le message du Pape, encore une fois, même s'ils ne sont pas croyants, était un message universel, tourné vers les plus modestes, les plus pauvres. Je pense que c'est cela qu'il faut honorer et regarder aujourd'hui.
ADRIEN GINDRE
Autre actualité, la fille de François BAYROU, qui a accordé une interview à nos confrères de Paris Match, dans laquelle elle révèle avoir été victime de violences physiques à l'époque où elle suivait un camp d'été organisé par Bétharram. Elle assure ne pas en avoir parlé à son père à l'époque. Je précise d'ailleurs que l'entourage de François BAYROU indique qu'il a appris lui-même hier seulement l'existence de ces violences. Est-ce que vous considérez que ce témoignage disculpe définitivement François BAYROU des accusations qui l'accusaient d'avoir été informé de violences à l'époque ?
SOPHIE PRIMAS
D'abord, encore une fois, j'ai lu cet article rapidement hier soir et ce matin. C'est effroyable. Ma première pensée va à la fille de François BAYROU, mais aussi à toutes les victimes de Bétharram. Le système que l'on découvre à Bétharram est un système sectaire assez effrayant. Elle dit elle-même que ce système reposait sur la culpabilité des enfants, des jeunes qui étaient là, le fait qu'ils avaient envie de se cacher et surtout de ne pas dire ce qui se passait, de protéger finalement cet univers pour se protéger eux-mêmes, pour travailler sur la culpabilité. Le Premier ministre s'exprimera dans une audition à l'Assemblée nationale le 14 mai. Je le laisse libre de ces pensées, mais j'ai aussi une pensée pour lui parce que finalement, découvrir cet enfer qu'a vécu sa fille au travers de ce reportage, dont elle dit elle-même d'ailleurs qu'elle l'avait prévenue, mais qu'elle ne lui avait pas dit le contenu, ça doit être assez éprouvant dans une relation père-fille que l'on comprend être malgré tout proche.
ADRIEN GINDRE
Venons-en à ce qui est l'actualité politique du Gouvernement. Le Premier ministre est, aujourd'hui, en déplacement avec les ministres Bruno RETAILLEAU et Gérald DARMANIN à la prison de Saint-Quentin-Fallavier, c'est dans l'Isère, après toute une série d'attaques tous ces derniers jours contre des établissements et des surveillants pénitentiaires dont les affaires, les biens, les domiciles ont pu être visés. Est-ce que le soutien que l'État exprime aujourd'hui signifie que l'État reconnaît ne pas pouvoir agir, ne pas pouvoir empêcher ces attaques ?
SOPHIE PRIMAS
Non, c'est tout le contraire. C'est exactement le contraire. Je crois que c'est très important que de façon symbolique et puissante, à la fois le Premier ministre, mais aussi Gérald DARMANIN et Bruno RETAILLEAU aillent ensemble dire leur soutien aux personnels pénitentiaires, mais aussi…
ADRIEN GINDRE
Un soutien faute d'action… Comment mettre fin à ces attaques ?
SOPHIE PRIMAS
Non, pas faute d'action, c'est une action qui va être compliquée parce qu'évidemment le personnel pénitentiaire est nombreux, mais elle est tout à fait déterminée. Je pense que Bruno RETAILLEAU et Gérald DARMANIN sont en train de réfléchir à des dispositifs particuliers. Mais en attendant, Bruno RETAILLEAU, le ministre de l'Intérieur, a demandé effectivement une protection particulière, une surveillance particulière des centres pénitentiaires, des maisons d'arrêt, de tous les centres de rétention, et une surveillance en particulier du personnel pénitentiaire. Il faut que nous soyons très attentifs et que nous fassions bloc face à cela parce qu'on voit bien que cette réaction, qui est une réaction extrêmement violente, j'allais dire presque du milieu, c'est une réaction aux dispositions qui ont été prises de façon législative il y a peu de temps sur la loi sur le narcotrafic, très probablement, on n'en est pas encore 100 % sûrs. Mais on voit bien la concomitance des faits et on voit bien la violence aussi avec laquelle répond le milieu à ces décisions qui sont, au contraire, des décisions d'action.
ADRIEN GINDRE
Je voudrais également qu'on parle de la préparation du budget pour que vous nous aidiez à mieux comprendre une déclaration de votre consœur Amélie De MONTCHALIN, ministre des Comptes publics, qui ce week-end disait "Je pense, à titre personnel, qu'on ne peut pas indéfiniment mettre à contribution les actifs pour financer les nouvelles dépenses sociales liées au vieillissement." Alors je vais vous poser la question d'ailleurs très simple, est-ce que cette déclaration signifie que le Gouvernement envisage la suppression de l'abattement fiscal de 10 % dont bénéficient les retraités ?
SOPHIE PRIMAS
Comme vous l'a dit Amélie De MONTCHALIN, nous regardons tout, nous ne nous interdisons rien. Et aujourd'hui, aucune décision n'est prise. Donc nous sommes dans le moment où nous regardons, en particulier vous parlez d'une niche fiscale, toutes les niches fiscales. Nous évaluons combien elle coûte, combien elle rapporte, leur intérêt social, économique, et nous sommes dans ce moment qui est un moment de diagnostic où nous refusons de choisir, et nous regardons de façon la plus neutre possible. Il y aura ensuite des choix qui seront faits. Ces choix seront exprimés par le Premier ministre aux alentours des orientations, aux alentours du 14 juillet. C'est la feuille de route qui a été donnée. En attendant, rien, absolument rien n'est écarté, mais rien n'est décidé, et que chacun participe au redressement des comptes publics, que chacun réalise que peut-être on peut faire autrement, on peut faire différemment, on peut faire plus justement socialement, on peut faire plus efficacement. Tout cela est sur la table.
ADRIEN GINDRE
Une question qui concerne les alternants également. On savait déjà que c'était une disposition qui était connue qu'embaucher un alternant allait coûter plus cher dans certains cas. Ce matin, nos confrères des Echos donnent des détails. D'après leurs informations, il en coûtera 750 euros aux employeurs qui vendront embaucher un alternant qui prépare un diplôme de licence ou au-delà. Est-ce que ces informations sont exactes ?
SOPHIE PRIMAS
Ces informations sont confirmées. Vous savez qu'il y avait des négociations après le vote du projet de loi de finances 2025 qui prévoyait un retrait de l'État. Il faut savoir que l'apprentissage a été multiplié par 3 dans notre pays depuis 2018, depuis la réforme sur la formation. Donc c'est un très grand succès, mais c'est un très grand succès qui dépasse les capacités financières, aujourd'hui, de l'État. Il y a eu plusieurs hypothèses, plusieurs discussions avec les partenaires sociaux. C'est cette hypothèse-là, d'une petite contribution sur l'apprentissage à partir de Bac+3 qui a été choisie. Je crois que c'est une solution qui satisfait les partenaires sociaux.
ADRIEN GINDRE
Cela rapportera combien ? Nos confrères des Echos disent "entre 93 et 140 millions d'euros."
SOPHIE PRIMAS
Voilà, ce sera à peu près la maille.
ADRIEN GINDRE
Une dernière question. Hier, nos confrères de Bloomberg assuraient que le chef de l'État aurait consulté son cercle proche en vue d'une dissolution dès l'automne afin de profiter notamment de sa popularité boostée par le retour des grands sujets internationaux. Je précise que l'Elysée a démenti cette information, mais cette dissolution vous paraît-elle possible ou souhaitable ?
SOPHIE PRIMAS
Mais la censure, la dissolution... La dissolution n'est possible qu'à partir du 8 juillet, vous savez, parce que c'est la date qui correspond à un an en arrière. Mais la censure et la dissolution sont des armes qui ne nous appartiennent pas, au Gouvernement ; elles appartiennent au Parlement et au Président de la République pour la dissolution. Nous travaillons. Nous avons toujours cette épée de Damoclès au-dessus de la tête, mais ce qui nous importe, c'est préparer le budget 2026, de travailler à des réformes, de protéger le personnel pénitentiaire. Voilà, c'est ce qui nous importe. Donc on regarde devant.
ADRIEN GINDRE
Ça c'est pour le possible ; pour le souhaitable, vous ne vous êtes pas prononcée.
SOPHIE PRIMAS
Pour le souhaitable ? Non, je pense qu'un peu de stabilité… Vous savez, on a vu dans vos sujets précédents que le monde était en train de connaître des croissances très inférieures à celles qui étaient projetées aux États-Unis, dans le monde entier. Je pense que le monde économique a besoin de stabilité, mais les Français aussi ont besoin d'un peu de stabilité.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 24 avril 2025