Texte intégral
JEAN-BAPTISTE MARTEAU
Bonjour Nathalie DELATTRE,
NATHALIE DELATTRE
Bonjour,
JEAN-BAPTISTE MARTEAU
Ministre déléguée chargée du tourisme. Roland Garros, ce sera un événement important, là aussi.
NATHALIE DELATTRE
Tout à fait, c'est le tourisme sportif.
JEAN-BAPTISTE MARTEAU
Le tourisme sportif. Vous êtes l'invitée politique de la matinale et vous répondez aux questions de Caroline MOTTE, c'est parti.
CAROLINE MOTTE
Bonjour madame la ministre, alors on va bien sûr parler des enjeux du tourisme avec vous, mais d'abord les tensions entre la France et l'Algérie. L'Elysée a rappelé son ambassadeur, hier, et a annoncé l'expulsion de 12 agents en représailles. Il y a une mesure similaire de la part d'Alger, est-ce que c'est une crise diplomatique ?
NATHALIE DELATTRE
Ecoutez, c'est une réponse de fermeté surtout, parce qu'effectivement nous avons une très bonne diplomatie. À un moment, nous avons des engagements réciproques avec l'Algérie. L'Algérie ne joue pas dans les règles et nous devons avoir cette réponse par rapport à ses obligations qu'elle doit remplir. Nous avons aussi de grosses inquiétudes via la famille de Boualem SANSAL, nous souhaitons aussi être écoutés, c'est important. Donc, fermeté.
CAROLINE MOTTE
On ne risque pas l'escalade ?
NATHALIE DELATTRE
Nous sommes toujours les premiers, nous sommes un pays de médiation, nous faisons beaucoup d'efforts, mais à un moment donné, quand nos droits sont piétinés, il faut répondre.
CAROLINE MOTTE
La semaine dernière, Laurent WAUQUIEZ avait proposé d'enfermer les personnes dangereuses sous OQTF à Saint-Pierre-et-Miquelon. Eh bien, l'archipel a riposté avec humour, je ne sais pas si vous avez vu cette campagne touristique. Elle vante la qualité de vie et les richesses de Saint-Pierre-et-Miquelon. Est-ce qu'ils ont raison de se défendre avec ce biais humoristique ?
NATHALIE DELATTRE
En tout cas, nous avons fait la même chose au ministère du Tourisme. Nous avons eu à déplorer une campagne de French bashing et nous avons répondu en détournant. Je crois que c'est une bonne occasion de faire parler du territoire, de nos territoires. Je trouve ça très original et nous relayerons, bien évidemment.
CAROLINE MOTTE
Il a eu tort, Laurent WAUQUIEZ, de faire cette proposition. Ça vous a choqué, vous, ou pas ?
NATHALIE DELATTRE
C'est plus que maladroit. Je crois qu'effectivement, le territoire est à la hauteur de la réponse qu'il faut donner.
CAROLINE MOTTE
Vous avez suivi, hier, la conférence tenue par François BAYROU. Est-ce que c'est une cure d'austérité qui ne dit pas son nom en termes de finances publiques ?
NATHALIE DELATTRE
Non, c'est une cure de vérité. Je crois que nous l'avons expliqué depuis des mois. Notre pays est très endetté. Ces 3 300 milliards de dettes, c'est 50 000 euros par habitant, quel que soit son âge. Donc, par rapport à ça, nous savons que nous dépensons plus que ce que nous recevons. Nous ne pouvons pas augmenter les impôts. Nous sommes le pays le plus taxé au monde, donc, il faut trouver des solutions. Et donc, effectivement, François BAYROU a une méthode depuis son arrivée, qui est notamment d'économiser sur les dépenses de l'État. C'est ce que nous avons fait pour ce projet de loi de finances 2025, qui est la loi 2025. C'est ce que nous allons faire en 2026. Et puis, nous allons regarder quels sont les postes que nous pouvons améliorer, comme le combat contre la fraude. C'est effectivement 13 milliards, cette année, récupérés, 15 milliards pour l'année prochaine. Nous devons produire plus parce que nous fabriquons moins que ce que nous commandons. Nous devons travailler plus nombreux, avoir des réactions sur un engagement très fort sur les jeunes et les seniors. Moi, j'étais à Bordeaux ce week-end, sur l'hôtel-restauration, 60% des entreprises nous dit qu'elles ont dû freiner leur activité par manque de personnel. Donc, on voit bien l'impact sur l'économie française. Mais nous devons investir dans le tourisme.
CAROLINE MOTTE
Mais cette préparation du budget de 2026, on l'a vu, elle est inévitablement liée à ce retour d'une menace de motion de censure. Est-ce que vous, vous pensez que ce Gouvernement dont vous faites partie peut passer ce cap budgétaire ?
NATHALIE DELATTRE
Bien, nous avons effectivement déjà passé une première fois ce cap budgétaire. Cette méthode, elle permet d'être plus transparente parce que nous avons dû le faire suite à la désolation, la première censure. Nous avons dû le faire en précipitation et pas assez ouvertement et en transparence, et notamment par rapport aux parlementaires. Donc, la méthode va permettre de remettre tout le monde autour de la table. Nous venons de le faire avec les partenaires sociaux. Les parlementaires vont pouvoir faire partie de cette discussion bien en amont, en amont de l'étude en hémicycle comme ça peut se faire au mois de septembre. Donc, c'est une construction petit pas par petit pas.
CAROLINE MOTTE
C'est une méthode de François BAYROU qui essaye quand même de gagner du temps. Il y a un certain immobilisme dans ce Gouvernement.
NATHALIE DELATTRE
Non, ce n'est pas gagner du temps. Je crois que nous avons à regarder quelles sont les dépenses essentielles. Nous dépensons trop par rapport à ce que nous engrangeons dans nos recettes. Nous avons d'excellents services publics. Nous devons faire demain des économies et des choix. Donc, il faut se reposer la question des missions essentielles que nous devons couvrir, et notamment par exemple l'Europe. On voit bien que dans cette actualité très tendue, nous avons, dans l'Europe, la défense. Nous ne pouvons pas désarmer, aujourd'hui. Bien au contraire, il y a donc, des postes que nous devons conserver et d'autres sur lesquels nous devons regarder comment réduire nos dépenses, mais aussi comment accroître nos recettes. Comme je vous le disais, le tourisme fait partie de cette augmentation.
CAROLINE MOTTE
Justement, on en vient à votre portefeuille au sein du gouvernement. Vous êtes donc, chargée du tourisme. On vit, en ce moment à l'échelle internationale, une période de troubles politiques, de troubles économiques avec le repli sur soi des États-Unis. Quelles répercussions ont ces tensions sur notre économie touristique ?
NATHALIE DELATTRE
Pour l'instant, c'est plutôt une opportunité. C'est comme ça que le décrit le secteur touristique et la filière. C'est vrai que beaucoup de pays se détournent des États-Unis depuis le vote TRUMP et se reportent sur la France. L'hospitalité à la française attire puisque 2024 a été l'année de tous les records. Nous avons accueilli plus de 100 millions de visiteurs étrangers. Nous sommes le pays le plus visité au monde. Nous avons eu un accroissement de recettes, plus 71 milliards de recettes, plus 12% par rapport à 2023. Et là, nous avons une accélération. Nous avons de très bons chiffres pour Pâques, pour les ponts de mai. Nous avons eu un très bon chiffre pour la fin de l'année et les vacances d'hiver parce que nous avons su séduire, mais aussi cette désaffection des Etats-Unis.
CAROLINE MOTTE
Il y a un désamour, en fait. Il y a un désamour des Français pour les États-Unis. Est-ce que c'est regrettable ?
NATHALIE DELATTRE
Nous avons su attirer des Brésiliens, des Japonais, des Canadiens. Par exemple, j'étais en Guadeloupe-Martinique pendant quatre jours pour faire le point avec nos ultramarins sur leur politique touristique. Eh bien, nous avons plus de 31% de plus de Canadiens qui arrivent. Donc, c'est une opportunité, effectivement, pour la France et pour son rayonnement.
CAROLINE MOTTE
Et sur notre économie touristique, à proprement parler, on est après les Jeux Olympiques, après un été qui était quand même exceptionnel. Est-ce qu'il perdure encore cet effet post-JO ?
NATHALIE DELATTRE
Oui, oui, effectivement. Nous constatons l'héritage des Jeux Olympiques. Vous savez, c'est 5 milliards de téléspectateurs qui ont vu les images de Paris, mais de la France entière, puisque nous avons promotionné tous les sites et qui ont manifesté leur envie de France. Nous avons eu aussi les commémorations du débarquement. Nous avons eu aussi la réouverture de Notre-Dame. Donc, tout ça constitue un héritage sur lequel nous prospérons. Et nous avons de très bons chiffres pour l'instant. Mais vous savez, la filière touristique est un secteur qui est très sensible aux variations macroéconomiques, à l'inflation, au pouvoir d'achat, au taux de change. Donc, j'ai réuni et je réunis régulièrement la filière pour que nous puissions surveiller. Mais encore une fois, aujourd'hui, ce tourisme se porte bien et c'est aussi un levier de croissance pour la France.
CAROLINE MOTTE
Vous l'avez dit, on reste le pays le plus touristique du monde, avec 100 millions de visiteurs par an en France. Mais si on compare avec notre voisin espagnol, 94 millions. Leurs recettes sont supérieures, c'est-à-dire qu'un touriste dépense plus en Espagne qu'en France. Comment ça s'explique ?
NATHALIE DELATTRE
Écoutez, par une offre accrue en hôtellerie, c'est vrai que nous devons investir parce que nous devons rénover notre offre, nous devons améliorer notre offre…
CAROLINE MOTTE
Elle est vieillissante, cette offre ?
NATHALIE DELATTRE
Nous devons avoir une offre plus haut de gamme. Nous sommes les leaders du plein air, par exemple, en Europe. Nous savons que nos touristes ont envie d'avoir cette offre hôtelière, donc, nous devons être aux côtés de l'hôtellerie pour investir. Nous devons aussi mieux faire connaître nos offres touristiques parce que nous avons des pépites patrimoniales, nous sommes un pays gastronomique, eunotouristique. Nous devons mieux le faire savoir parce qu'effectivement, l'Espagne arrive à communiquer un marketing beaucoup plus agressif que le nôtre. Donc, nous devons gagner en agressivité commerciale.
CAROLINE MOTTE
Une dernière question, il y a aussi une pénurie de main-d'oeuvre dans ce secteur. Ça freine peut-être aussi l'activité touristique, non ?
NATHALIE DELATTRE
Oui, c'est ce que je vous disais quand je vous parlais de Bordeaux. Nous voyons bien que nous avons ce problème de ressources humaines. C'est tout le sens du Tour de France que j'ai fait, il y a quelques jours, avec Nina METAYER, notre meilleur chef pâtissier au monde, pour expliquer les atouts des métiers du tourisme, les valoriser pour attirer des jeunes ou des moins jeunes. Ça peut être une reconversion professionnelle dans ce secteur pour faire en sorte qu'ils puissent rapporter plus à la France.
CAROLINE MOTTE
Merci, merci beaucoup.
NATHALIE DELATTRE
Merci
source : Service d'information du Gouvernement, le 24 avril 2025