Texte intégral
ORIANE MANCINI
Bonjour Véronique LOUWAGIE.
VERONIQUE LOUWAGIE
Bonjour.
ORIANE MANCINI
Merci d'avoir accepté notre invitation, ministre déléguée chargée du Commerce, de l'Artisanat, des Petites et Moyennes Entreprises et de l'Économie sociale et solidaire, ça fait beaucoup de choses. On a parlé d'abord du budget. Et on l'a entendu, mardi, François BAYROU tirait une nouvelle fois la sonnette d'alarme sur le piège dangereux de la dette. Est-ce qu'on n'avait pas plus besoin de pistes concrètes d'économie que d'un énième signal d'alarme ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Avant de prendre des décisions pour aller dans un sens de pistes d'économie, il faut faire le constat. Je pense qu'effectivement, nous avons besoin de transparence, il y a un devoir de vérité l'égard des Français, devoir de vérité, nous devons aux Français par respect. Également pour constituer un socle solide pour prendre des décisions raisonnables et des décisions responsables. La situation du budget doit nous amener, effectivement, à décider et à atteindre l'objectif qui a été déterminé : un déficit qui ne dépassera pas 3% en 2029. Je rappelle qu'aujourd'hui, en 2024, c'est un déficit de 5,4%, l'objectif 2026 : 4,6%. Et nous devons sortir effectivement de cette spirale de la dette, aujourd'hui, qui nous met en difficulté. Notre dette a atteint 3 300 milliards. Nous empruntons chaque année 300 milliards d'Euros. 300 milliards d'Euros pour financer notre déficit et pour financer également les remboursements d'emprunts qui arrivent à échéance. Donc, nous devons sortir de cette spirale. Il faudra prendre des décisions. Des décisions qui devront être courageuses, effectivement. Le ministre de l'économie, Éric LOMBARD, a évoqué 40 à 50 milliards.
ORIANE MANCINI
C'est quoi, pour vous, les pistes prioritaires pour trouver ces 40 à 50 milliards ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Eh bien, il ne faut pas déterminer, comme ça, des pistes prioritaires. Je crois que tout doit être ouvert. Parce qu'à partir du moment où vous déterminez, dès maintenant, des pistes prioritaires, une fois que nous avons bâti le constat, vous vous limitez. Je crois qu'il ne faut pas établir de limite. Il faut effectivement, probablement, recentrer l'État sur ses missions régaliennes. Il faut travailler sur toute la sphère étatique. Nous parlons souvent de tout ce qui concerne les agences d'État, les opérateurs de l'État qui ont vu effectivement leurs dépenses augmenter. Au niveau des opérateurs de l'État, c'est à peu près…
ORIANE MANCINI
Si ça va suffire, pour trouver 40 à 50 milliards ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Non, ça ne suffira pas. Je crois que c'est la raison pour laquelle il ne faut pas déterminer dès maintenant des pistes prioritaires. Toutes les pistes doivent être ouvertes, dont, probablement, celles qui comptent les opérateurs. Il faut probablement et sûrement travailler, également, sur la sphère sociale. Je rappelle que la sphère sociale, c'est quasiment la moitié de nos dépenses, sur les 1 700 milliards. Donc, vous ne pouvez pas agir sur les dépenses publiques sans vous concentrer ou prendre une part sur la question de la sphère sociale. Après, il faut se poser la question.
ORIANE MANCINI
Juste sur la sphère sociale, qu'elle part. Par exemple, la Cour des comptes lance une piste et de faire payer les dépenses de santé, en fonction des revenus. Ça, pour vous, ce serait une solution ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Écoutez, je ne suis pas sûre que ce soit la meilleure des solutions, parce que nous avons un dispositif, aujourd'hui, de protection sociale qui est basé sur la solidarité, qui est une protection sociale auxquelles les Français sont très attachés. Pour autant, cela peut être une piste. Je crois qu'encore une fois, rien ne doit être tabou. Tout doit être mis sur la place. Il faut…
ORIANE MANCINI
Y compris, par exemple, moins rembourser des médicaments ? Ça, ‘est une piste pour remettre sur la table ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Il y a déjà un mécanisme de franchise qui existe au niveau des médicaments, qui a été augmenté. Je crois qu'il est important aussi de responsabiliser les Français. Aujourd'hui, un certain nombre de Français ne connaissent pas le coût des prestations de santé dont ils bénéficient. Quand vous allez à l'hôpital, que vous passez quelques journées à l'hôpital, quelquefois dans des dispositifs de soins intensifs qui coûtent très cher, c'est quand même difficile d'imaginer le coût de ces prestations. Donc, il doit y avoir une question de responsabilisation qui doit être mise sur la table. Pour autant, il faut aider aussi les plus fragiles. Il faut trouver, je dirais, le juste curseur pour atteindre cette responsabilisation dont nous avons besoin, mais également, prendre en compte tout ce qui concerne la solidarité. Il y a la question des arrêts de travail, par exemple, qui est une dépense qui a énormément augmentée. Il faut véritablement, je dirais, arrêter dans cette spirale d'augmentation du coût des arrêts de travail et travailler sur un dispositif qui contribue à les réduire. Il y a la question des jours de carences également, par exemple, qui doivent être mis sur la table. Mais au-delà des jours de carence, aujourd'hui, le nombre d'arrêt de travail a énormément augmenté, le nombre de jour également. Donc, il faut se poser la question : pourquoi, en quelques années, comme ça, nous connaissons des augmentations de cette nature. Voilà. Donc, des réponses doivent être apportées aussi en ce sens.
ORIANE MANCINI
Est-ce qu'il faut également faire contribuer les retraités à cet effort ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Ecoutez. Je pense qu'il doit y avoir, encore une fois, un dispositif de solidarité, qui doit exister. Effectivement, aujourd'hui, nous voyons, le niveau de revenu des retraités a augmenté plus que le niveau des revenus des actifs. Donc, il faut se poser la question, les retraités, et nous ne pouvons que nous en réjouir, enfin, les Français vivent de plus en plus longtemps, donc, il y a aussi cet élément à prendre en compte. Nous savons également, par exemple, vous évoquiez tout ce qui concerne les dépenses de santé. Les dépenses de santé sont plus importantes au niveau des retraités, en fonction de l'âge. Donc, il faut prendre en compte tous ces curseurs. Et je crois que chacun.
ORIANE MANCINI
Et sur les retraités, on les fait contribuer ou pas ? Parce que Les Républicains ne sont pas favorables à ce qu'on s'attaque aux retraités. Est-ce que là, vous dites... Vous nous dites, toutes les pistes sont ouvertes. Est-ce que la contribution des retraités, c'est une piste aussi à ouvrir ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Toutes les pistes sont ouvertes. Sur les retraités, il y a plusieurs pistes qui doivent être mises sur la table. Elles doivent être examinées. Il y a la piste de l'abattement, de l'exonération de 10 % qui a été une exonération qui existe au titre des frais professionnels pour les actifs. Il y a également la question de l'indexation. Est-ce qu'il revient effectivement de continuer à indexer la retraite sur l'inflation ou sur un autre élément qui peut être, par exemple, le pouvoir d'achat.
ORIANE MANCINI
Pour vous, il faut ouvrir cette piste ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Je crois, encore une fois, que toutes les pistes doivent être mises sur la table.
ORIANE MANCINI
Ça risque de vexer Les Républicains. Laurent WAUQUIEZ, par exemple, il est opposé, lui, à ce qu'on désintègre les pensions des retraités.
VERONIQUE LOUWAGIE
Moi, je dis : " Toutes les pistes sont à vérifier sur la table. " La situation est telle que nous ne pouvons pas nous exonérer de répondre à cet objectif de diminution de déficit. Nous préparons l'avenir, nous préparons la situation de nos enfants et de nos petits-enfants. Je rappelle qu'aujourd'hui, un enfant qui née, née avec une dette de 50 000 Euros. Est-ce que nous pouvons nous satisfaire de cette situation, avec, effectivement, si nous ne faisons rien, un niveau de cette dette qui va augmenter. Donc, effectivement, toutes les pistes doivent être mises sur la table.
ORIANE MANCINI
Y compris, pérenniser la contribution des revenus dont la Droite souhaitait caresse exceptionnel ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Moi, je suis sur la situation des dépenses, car pour répondre à une question de déficit, vous avez deux manières d'agir, effectivement : sur les recettes et sur les dépenses. Sur les recettes, vous avez deux manières d'agir : générer de la croissance, créer de la valeur. Et là, je suis tout à fait favorable. Il faut, effectivement, enclencher un certain nombre de pistes, encore de manière plus importante pour générer de la croissance. En revanche, je ne suis pas du tout favorable pour augmenter les impôts. Nous avons déjà, en France, un taux de prélèvement obligatoire, un des plus élevé d'Europe et du monde. Et je rappelle que les prélèvements obligatoires pénalisent les ménages et les entreprises. Donc, pour moi, il faut agir sur créer de la valeur, générer de la croissance et agir sur les dépenses publiques. Aujourd'hui, nous avons un taux de dépense publique très important.
ORIANE MANCINI
Puisque vous parlez de croissance, avec les incertitudes que fait poser Donald TRUMP, avec la question des droits de douane, ses revirements, ses poses, est-ce que vous pensez que les prévisions de croissance pourront tenir ou est-ce qu'il va falloir anticiper une baisse de ces prévisions de croissance ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Écoutez. En matière de prévision de croissance, il y a déjà une baisse qui a été prise en compte. Je rappelle qu'en automne, le budget avait été bâtit sur une prévision de croissance de 1,1%, qui a été revu à 0,9%, et en ce moment, revu à 0,7%. Il faut, effectivement, travailler sur cette période. Je rappelle le niveau de l'agenda que nous connaissons aujourd'hui. Une suspension de mesure de droits de douane qui était prévue initialement à 20% sur l'ensemble des produits. Mais c'est une suspension pour 90 jours. C'est une mesure un peu, je dirais, d'apaisement. Mais ce n'est pas le grand virage, parce que, par ailleurs, nous avons tout de même des droits de douane qui s'appliquent, je rappelle quand même, à hauteur de 25 % sur tout ce qui concerne l'acier, l'aluminium, l'automobile, et 10 % sur l'ensemble des autres mesures. Donc, il nous faut profiter de cette période pour, je dirais, faire pression, négocier encore plus fort avec les États-Unis, de manière importante, et continuer à parler d'une voix unie au niveau européen. Et il nous faut pousser, effectivement, pour qu'il y ait moins d'impacts possible sur la croissance, sur la valeur que nous devons générer.
ORIANE MANCINI
Vous avez l'impression que les Européens, ils vont réussir à parler d'une voix unie. Giorgia MELONI est aujourd'hui à Washington. Elle reçoit demain, à Rome, JD Vance. Est-ce que vous avez l'impression que les Européens restent unis ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Écoutez. Jusqu'à maintenant, et là, on peut s'en réjouir, parce que dès le début, dès les premières annonces de Donald TRUMP, l'Europe a parlé d'une voix unie. Et la France a beaucoup poussé, d'ailleurs, d'avoir…
ORIANE MANCINI
Mais est-ce qu'elle agit de manière unie ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Oui, elle a agi d'une manière unie. Et d'ailleurs, Donald TRUMP ne s'y est pas trompé, parce qu'il n'a pas établi de droits de douane différents d'un pays à l'autre, au niveau européen. Nous avons effectivement des droits de douane qui s'appliquent pour toute l'Europe. Et jusqu'à maintenant, effectivement, et ça, on peut s'en réjouir, il y a une réponse à la fois unie, d'une seule voix, au niveau européen et également, avec une réponse qui a été proportionnée : ne pas s'inscrire dans une escalade. Et la France le poussait beaucoup. Et ça, je crois que c'est très important. Il faut continuer à négocier, il faut faire pression pour, effectivement, profiter de ces 90 jours pour avoir des avancées et peut-être obtenir des réductions des droits de douane.
ORIANE MANCINI
Vous, qui êtes ministre du Commerce et des PME, est-ce que vous voyez déjà les conséquences de ces fluctuations de Donald TRUMP sur les droits de douane sur nos PME, sur certaines entreprises ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Dire que je vois les conséquences à ce stade, non. En revanche, je mesure les incertitudes des entreprises. Nous avons d'ailleurs, à Bercy, aux côtés d'Éric Lombard, reçu les entreprises. J'ai, moi-même tenu le Conseil national du commerce. Tous les acteurs du commerce que j'ai reçus en milieu de semaine. Il y a plusieurs situations, en fait. Alors, il y a des secteurs d'activité qui sont beaucoup plus concernés, qui sont concernés par les droits de douane de 25%, par exemple. Vous avez les entreprises aussi qui exportent, qui sont directement concernées. Vous avez des entreprises qui n'exportent pas forcément, mais qui sont des sous-traitants, qui sont dans une chaîne de valeur, d'une chaîne d'exportations, qui, aujourd'hui, ne savent peut-être pas qu'elles sont dans cette chaîne de valeur.
ORIANE MANCINI
Et il n'y a pas de conséquences ? Il n'y a pas, par exemple, des entreprises qui ont recours au chômage partiel, des entreprises qui sont obligés de licencier, parce que Donald TRUMP, ce qu'il a fait, ça a des conséquences sur leur emploi ?
VERONIQUE LOUWAGIE
A ce stade, il ne m'est pas remonté un certain nombre d'éléments de cette nature. En revanche, il y a des inquiétudes. Et là, j'évoquais tout ce qui concernait directement les États-Unis. Mais il y a des inquiétudes également sur tous les flux de produits asiatiques qui ne pourraient pas se diriger vers les États-Unis, compte tenu, je dirais, des droits de douane relativement important qui ont été établis entre la Chine et les États-Unis, et un risque, effectivement, de déferlement de ces produits vers l'Europe.
ORIANE MANCINI
Comment on se prémunit de ce risque ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Pardon ?
ORIANE MANCINI
Comment on se prémunit de ce risque ? Pour le déferlement des produits chinois sur le marché européen.
VERONIQUE LOUWAGIE
C'est une situation qui était déjà examinée avec beaucoup d'attention au niveau européen, parce que nous avons un mécanisme, aujourd'hui, d'exemption de droit de douane sur les colis de faible valeur, jusqu'à 150 Euros. Sur lequel, déjà, l'Europe avait agi dès début février. Sous la pression de la France, d'ailleurs, le 5 février dernier, la Commission européenne a pris une décision de revenir et d'anticiper de deux ans cette réflexion sur l'exemption des droits de douane, qui était normalement prévue jusqu'en 2028. Il a été envisagé de revoir ça dès 2026 et d'envisager également la mise en place de frais de gestion non discriminatoires pour financer les services douaniers. Donc, c'est un point où l'Union européenne avait déjà apporté beaucoup d'attention. Ce point est revenu avec une autre dimension au regard des droits de douane. Et nous devons travailler, effectivement, sur une réflexion s'il ne faut pas baisser, s'il faut probablement baisser, d'ailleurs, ce seuil d'exemption des droits de douane pour effectivement apporter une contrepartie à ce flux de produits asiatiques. De mon côté, j'ai demandé à la DGCCRF d'établir un certain nombre de contrôles sur toutes les plateformes qui participent à faire rentrer des produits sur le sol européen et là sur le sol français. J'ai demandé également qu'un grand nombre de produits et même de ces plateformes soient contrôlés en termes de qualité. Parlons de tout ce qui est sécurité sanitaire, respect des normes de ces produits, c'est important. Et avec ma collègue, Amélie de MONTCHALIN, nous allons établir un nouveau protocole entre les douanes et la DGCCRF pour faire en sorte d'adapter le niveau de contrôle qui doit être opéré au regard de ces nouveaux flux qui arrivent.
ORIANE MANCINI
Et le nouveau protocole, ce sera pour quand ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Il est en cours d'établissement, c'est pour quelques semaines.
ORIANE MANCINI
Est-ce que le projet de loi de simplification qui a été voté au Sénat, qui est examiné en ce moment à l'Assemblée, pas en ce moment parce qu'en ce moment, c'est les vacances parlementaires, mais qui a été examiné avant, qui sera examiné après les vacances, il peut permettre de faire des économies ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Oui. Alors simplifier, simplifier, ça n'est pas une fin en soi. Derrière la simplification, l'intérêt effectivement, c'est de faire des économies. Et puis comme je le disais tout à l'heure, de créer de la richesse, de créer de la valeur et de participer à la croissance. Je rappelle, il y a eu d'ailleurs un rapport du Sénat en juin 2023 qui chiffrait le coût de la bureaucratie à quasiment 3% du PIB, avec aujourd'hui 44 millions d'Euros et c'était indiqué dans ce rapport qui constitue l'ensemble de nos normes. Donc, c'est un coût pour les entreprises. Et tout ce qui fait qu'au niveau des entreprises, le chef d'entreprise ne peut pas se concentrer sur son coeur de métier est un coût. Finalement, c'est une des dépenses les plus importantes. Le projet de loi de simplification va apporter des réponses sur, je dirais, le stock, à la fois par exemple sur les artisans pour leur simplifier l'accès à la commande publique. La commande publique, c'est 200 milliards d'euros. Donc, tout ce qui va faciliter l'accès à la commande publique au niveau de nos artisans va faciliter aussi tout ce qui concerne l'économie. Des modes de facilitation également pour les start-ups. Des dispositifs qui vont faciliter aussi la vie des commerçants, notamment en matière de baux commerciaux, en faisant en sorte qu'il y ait une mensualisation des loyers plutôt qu'une trimestrialisation. Donc, cela fera des sorties moindres de trésorerie au niveau des commerçants. Limiter également les dépôts de garantie à trois mois, alors qu'aujourd'hui nous pouvons avoir des dépôts de garantie qui sont beaucoup plus longs. Et ça, c'est deux milliards de trésorerie qui va aller directement, je dirais, chez les commerçants. Il y a des dispositifs de simplification aussi qui concernent les très petites entreprises, en matière bancaire, en matière d'assurance, en matière d'énergie. Et puis il y a un dispositif pour agir sur le flux, notamment au travers du test PME, qui est un test qui permettra de mesurer préalablement à l'adoption d'une norme l'impact sur la vie des entreprises de cette norme. C'est-à-dire mesurer les coûts directs et indirects d'une norme, d'un projet de loi, d'un arrêté ou d'un décret, pour éviter des situations où, ensuite, les entreprises doivent subir, finalement, un certain nombre d'impacts techniques ou administratifs.
ORIANE MANCINI
On va parler de la TVA pour les microentreprises. Le budget prévoyait une baisse du seuil d'exemption de la TVA pour ces microentreprises. Le Gouvernement l'a suspendue jusqu'au 1er juin. Vous avez mené des concertations qui ont montré des divergences. Est-ce que, du coup, la date du 1er juin, c'est toujours la date limite de la suspension ? Ou est-ce que vous prévoyez de la repousser ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Alors, vous avez raison de dire que ces concertations n'ont pas conduites à un consensus. En fait, il y a trois catégories. Une catégorie au travers des fédérations, des organisations professionnelles qui considèrent que le seuil de 25 000 doit être maintenu. Il y a une autre catégorie qui considère qu'il faudrait rester sur le régime antérieur. Puis il y a une troisième catégorie qui retient un flux différent entre ces 25 000 et les seuils de 85 000 que nous pouvons avoir avec des dates d'application qui pourraient être progressives. Mais il ressort deux points saillants : un, c'est que le seuil de franchise de 25 000 correspond tout à fait à une situation qui pourrait s'appliquer aux bâtiments compte tenu d'un certain nombre de dispositifs de concurrence qui ne sont pas considérés comme loyaux. Et deux, c'est que le seuil de 25 000 ne correspond pas du tout à tout ce qui s'applique au métier de service à la personne et que le seuil de 37 500 qui existait pourrait s'appliquer. C'est la raison pour laquelle nous nous dirigeons plutôt dans cette voie qui pourrait être un seuil de 37 500 pour l'ensemble et un seuil de 25 000 pour le bâtiment.
ORIANE MANCINI
Donc, fini le seuil unique qui a été voté, il y aura deux seuils.
VERONIQUE LOUWAGIE
Pour autant, c'est ce que propose le Gouvernement, nous ne pouvons pas pour des modalités, je dirais, d'application dans le projet de loi simplification utiliser ce vecteur législatif pour travailler sur ce point.
ORIANE MANCINI
Donc, ça ne fera pas un amendement du Gouvernement dans le projet de loi simplification ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Non, ça ne peut pas l'être puisque c'est considéré en fait, ce serait un cavalier législatif. Donc il nous faut travailler sur une disposition législative. Je recevrai les parlementaires tout début mai pour travailler avec eux sur un dispositif qui pourra permettre d'évoluer et de prendre en compte, je dirais, l'orientation du Gouvernement qui leur sera proposée. Donc, tout début mai, je réunirai les parlementaires et nous pourrons travailler sur ce dispositif pour donner une réponse avant le 1er juin.
ORIANE MANCINI
Donc, ça veut dire que vous espérez une proposition de loi ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Écoutez, nous allons voir avec les parlementaires si une proposition de loi peut être retenue dans ce cadre ou si nous retenons un autre dispositif, mais ce sera avec eux que nous travaillerons cela.
ORIANE MANCINI
Mais est-ce que ça veut dire que le 1er juin ça reste la date ou est-ce que vous pourriez repousser la suspension et ce qui est en cours actuellement, au-delà, pour laisser le temps aux parlementaires d'écrire cette proposition de loi ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Vous savez, j'ai lancé une grande concertation à la demande d'Éric LOMBARD en coordination avec ma collègue Amélie de MONTCHALIN. Cette concertation, je l'ai bâtie avec les acteurs, les fédérations, les organisations professionnelles, en concertation également avec les parlementaires et je veux terminer cette concertation avec les parlementaires, début mai, et prendre une décision avec eux. C'est le mode un petit peu de fonctionnement du Gouvernement.
ORIANE MANCINI
Mais juste début mai, 1er juin, c'est très court.
VERONIQUE LOUWAGIE
Oui, c'est court, mais nous avons réagi très rapidement. Nous avons donné une première échéance qui était le mois de février pour reporter, donc, jusqu'au 1er mars, dans un premier temps, alors que la loi avait été adoptée mi-février. Le 28 février, j'ai donné les conclusions de cette concertation. Nous avons repoussé jusqu'au 1er juin. Nous avons réagi très rapidement en regard de délai.
ORIANE MANCINI
Mais vous souhaitez la fin du seuil unique, en tout cas, qui est deux seuils différents.
VERONIQUE LOUWAGIE
Oui, c'est ce qui ressort. Ce sont les deux points saillants qui ressortent des concertations et je suis très attentive et très respectueuse de faire un état des lieux de ce qui ressort des concertations. C'est une question de respect à l'égard de tous les acteurs.
ORIANE MANCINI
Quelques questions d'actualité pour terminer. La tension qui monte entre la France et l'Algérie, et l'Algérie qui cible nommément Bruno RETAILLEAU. Est-ce qu'il a eu raison d'afficher une telle fermeté, Bruno RETAILLEAU ? Est-ce que sa méthode a été la bonne ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Écoutez, sa méthode est celle de sa vision. Et je crois que, quand il fait état de fermeté, je ne peux que le rejoindre. Au demeurant, ce qui se passe au niveau de l'Algérie, de relations entre l'Algérie et la France, résulte de faits que l'on peut, je dirais, regretter, tout simplement parce qu'il y a une procédure judiciaire qui est en cours, et derrière c'est l'indépendance de la justice qui doit être préservée, qu'on ne peut que défendre. Et c'est vrai que pour autant, on ne peut que regretter la manière et la réponse un petit peu disproportionnée des autorités algériennes, et souhaiter finalement que les relations, les discussions repartent, le dialogue se rétablisse de manière très importante et très rapidement, et en qualité de ministre du Commerce, je ne peux que le souhaiter, parce que derrière il y a aussi des relations économiques, des flux économiques entre les deux pays, et tout ça est un peu mis à l'arrêt, donc je souhaite effectivement que le dialogue reprenne rapidement.
ORIANE MANCINI
C'est-à-dire que là, ça a des conséquences sur le commerce à l'heure actuelle ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Oui, j'ai été saisie de quelques entreprises qui effectivement ont des flux, des contraintes qui sont plutôt à l'arrêt.
ORIANE MANCINI
Et que vous disent Jean-Noël BARROT, Bruno RETAILLEAU à ce sujet ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Je crois que tout le monde souhaite aujourd'hui que le dialogue reparte, reprenne. Le dialogue avait d'ailleurs repris fin mars, il est arrêté là, au regard de ce qui s'est passé, et du renvoi d'un certain nombre de diplomates, mais je pense que la réponse est disproportionnée du côté des autorités algériennes, et que très vite il faut susciter, faire en sorte que ce dialogue reparte.
ORIANE MANCINI
Dans la bataille pour la course à la présidence des LR, vous êtes plutôt WAUQUIEZ ou RETAILLEAU ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Alors écoutez, moi, j'ai décidé de rester un petit peu en dehors, d'avoir une certaine neutralité.
ORIANE MANCINI
Pourquoi ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Écoutez, je suis membre du Gouvernement, un Gouvernement dans lequel Bruno RETAILLEAU est ministre de l'Intérieur. J'étais députée il y a encore quelques mois avec comme président Laurent WAUQUIEZ, nous avons deux personnalités, deux talents.
ORIANE MANCINI
Vous n'arrivez pas à choisir ou vous ne voulez pas exprimer votre choix ?
VERONIQUE LOUWAGIE
J'ai l'embarras du choix, j'ai l'embarras du choix.
ORIANE MANCINI
Vous ne l'avez pas encore fait.
VERONIQUE LOUWAGIE
Non. Je ne le ferai pas, je l'ai dit d'ailleurs, et à Bruno RETAILLEAU et à Laurent WAUQUIEZ, je leur ai dit pourquoi. Je souhaitais aussi continuer à faire, je dirais, le pont entre le Gouvernement d'un côté, le parti, Les Républicains, le groupe parlementaire, la Droite Républicaine, et j'ai un certain nombre de textes apportés, par exemple tout ce qui concerne le texte sur la simplification économique de la vie des entreprises, d'autres textes que j'aurais également apportés, tout ce qui concerne, par exemple, le seuil de franchise de TVA, qui concerne plus particulièrement les micro-entrepreneurs. Moi, je suis, je dirais, engagée pour conduire une politique économique ambitieuse au service des Français, à côté des chefs d'entreprise, des artisans, des commerçants, mais avec les membres du Gouvernement, avec les parlementaires. Je suis très attentive aux liens à établir avec les parlementaires. Je l'ai été pendant douze ans, donc ça me donne une approche, un oeil en tout cas important à cette relation, et je souhaite poursuivre dans cette relation. C'est la raison pour laquelle je souhaite rester, je dirais, avec une neutralité.
ORIANE MANCINI
Merci Véronique LOUWAGIE.
VERONIQUE LOUWAGIE
Merci à vous.
ORIANE MANCINI
Merci beaucoup d'avoir été notre invitée. On passe tout de suite au Club des Territoires
source : Service d'information du Gouvernement, le 25 avril 2025