Interview de Mme Rachida Dati, ministre la culture, à RTL le 14 mai 2025, sur les annonces d'Emmanuel Macron lors de l'émission de télévision notamment l'utilisation du référendum et la location de places de prison à l'étranger, et la lutte contre les violences sexuelles et sexistes dans le cinéma.

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Média : RTL

Texte intégral

THOMAS SOTTO
Il est 8h15, l'interview d'Amandine BEGOT au cœur d'une actualité très politique et très présidentielle ce matin. Après le RN et Sébastien CHENU tout à l'heure, vous avez choisi, Amandine, d'inviter une voix de la majorité, Rachida DATI, ministre de la Culture et électron libre du Gouvernement. Bonjour et bienvenue à vous.

RACHIDA DATI
Ça commence bien.

AMANDINE BEGOT
Bonjour Rachida DATI.

THOMAS SOTTO
Quoi ?

RACHIDA DATI
Électron libre, non. Je suis dans une solidarité gouvernementale.

AMANDINE BEGOT
Et bienvenue sur RTL.

RACHIDA DATI
Merci.

AMANDINE BEGOT
On est ravi de vous avoir ce matin. Un peu plus de trois heures d'émission donc hier soir et à l'arrivée, pas ou peu d'annonce sur le référendum, par exemple, ce ne sera pas pour tout de suite, le Président l'a dit, et on ne sait pas trop sur quoi. Qu'est-ce qu'il attend ?

RACHIDA DATI
Le référendum, c'est un outil constitutionnel, enfin c'est dans la Constitution. Je trouve qu'on l'utilise aussi quand on est en situation de gravité. Ce n'est pas une consultation. Je veux dire que ce n'est pas une votation, comme on peut en connaître parfois. Le président de la République a été très clair sur l'utilisation du référendum. Il a dit soit en cas de situation de blocage, et on peut y arriver, soit si ça ne va pas assez vite. Et donc, je trouve que ça a du sens. Sur les textes, c'est vrai qu'il laisse une vraie liberté à son Premier ministre et une vraie liberté, ce qui est normal d'ailleurs, à l'Assemblée, au Parlement, pour légiférer sur des textes majeurs.

AMANDINE BEGOT
Sauf que cette histoire de référendum, il en avait déjà parlé le 31 décembre, lors de ses vœux, redonner la parole aux Français. On est cinq mois plus tard, on a l'impression qu'on tourne un peu en rond. Et pourtant, Emmanuel MACRON l'a montré, par exemple avec la reconstruction de Notre-Dame et il l'a dit d'ailleurs hier, quand il veut, il peut. Quel est le problème aujurd'hui ? Il ne veut pas ou il ne peut pas ?

RACHIDA DATI
Vous avez un Gouvernement qui présente des textes sur lesquels évidemment on porte aussi des réformes, et puis vous avez quand même un Parlement qui légifère. Il faut laisser d'abord… le temps parlementaire doit prospérer.

AMANDINE BEGOT
Sauf que le temps, il passe, et ces référendums, si ce n'est pas à l'automne, après on est d'accord, ce sera trop tard. Il y aura les municipales, la présidentielle…

RACHIDA DATI
D'accord. Mais est-ce qu'aujourd'hui on est en situation de blocage sur des sujets ?

AMANDINE BEGOT
Donc il n'y a pas besoin de référendum d'après vous ?

RACHIDA DATI
Je vous interroge, est-ce qu'il y a une situation de blocage ? Peut-être sur la fin de vie, on peut avoir une situation de blocage, ça peut exister aussi de l'obstruction parlementaire pour ne pas faire avancer un sujet. Et donc là, le Président, et il l'a rappelé hier, il prendra ses responsabilités. Et donc le fait de pouvoir venir le dire, et dire pourquoi on fait un référendum, les Français doivent aussi savoir que, quand on utilise le référendum, ce n'est pas une consultation. La consultation, elle existe, il y a des sondages, il y a des études d'opinion, il y a des consultations de Français. Le référendum…

AMANDINE BEGOT
Sauf qu'il avait dit qu'il voulait redonner la parole aux Français. Il a peur de quoi ? Que ce soit un référendum pour ou contre MACRON ?

RACHIDA DATI
Ah ben ce n'est pas quelqu'un qui a peur, je veux vous dire, c'est quand même un Président qui est là depuis huit ans. C'est un point de stabilité dans un pays qui doute, avec un pays qui se cherche. D'ailleurs, c'est un pays qui se cherche. Vous avez vu, ça se traduit au Parlement, à l'Assemblée Nationale, qui est très fracturé. Et donc, c'est un point de stabilité. Et hier, de venir s'exprimer devant les Français, de débattre aussi avec des interlocuteurs qui étaient quand même assez vifs, qui n'ont rien lâché. Il s'est exprimé, il a rendu compte aussi de son action. Je veux vous dire, moi je sais ce que c'est, quand j'étais adolescente, là où j'habitais, le chômage de masse, ça a toujours été un sujet majeur. Les Français étaient très impactés par le chômage de masse. Aujourd'hui, ça n'est plus le cas. Nous n'avons plus ce chômage de masse. Il a réindustrialisé la France. C'était aussi notre point faible.

AMANDINE BEGOT
Il y a actuellement une inquiétude économique avec les fermetures d'usines, les fermetures de sites.

RACHIDA DATI
Mais bien sûr qu'il y a une inquiétude. Attendez. La France se réindustrialise. Plus de 2 millions de créations d'emplois. Nous connaissons un contexte de mutation, de transformation rapide. La France s'adapte. La France ne s'est jamais autant modernisée, autant réindustrialisée. Il avait anticipé. Il a quand même surmonté… La France, grâce aussi aux décisions qu'il avait pu prendre, a surmonté quand même des crises assez inattendues.

AMANDINE BEGOT
Rachida DATI, soyez concrète.

RACHIDA DATI
Attendez. Des crises inattendues, le Covid, la crise en Ukraine. Regardez le conflit israélo-palestinien. Tout ça, c'est un pacte

AMANDINE BEGOT
Oui. Mais par exemple, nos voisins s'en sont mieux sortis.

RACHIDA DATI
Non. Donnez-moi des exemples.

AMANDINE BEGOT
L'Espagne, le Portugal.

RACHIDA DATI
Ah bon ! L'Espagne ?

AMANDINE BEGOT
Ouais. Aujourd'hui, ils vont beaucoup mieux

RACHIDA DATI
Ah ben chômage de masse. Vous avez vu les réformes qui sont en blocage ? Vous avez vu l'état de leur Parlement ? Ils sont en blocage institutionnel.

AMANDINE BEGOT
Mais leur finance publique, ça va mieux. Ça va permettre…

RACHIDA DATI
Non, pas du tout. Donnez-moi des chiffres. Oui, c'est assez marrant, les journalistes. Vous dites : "Ça va toujours mieux ailleurs". Donnez-moi des chiffres. Voilà.

AMANDINE BEGOT
Mais leur Alors tiens, je voudrais un truc très concret.

RACHIDA DATI
Non mais ce que je vous dis est très concret.

AMANDINE BEGOT
Vous avez été ministre de la Justice, Rachida DATI. Vous avez été ministre de la Justice.

RACHIDA DATI
Oui.

AMANDINE BEGOT
L'idée de louer des places de prison à l'étranger, pour désengager nos prisons, ça vous semble jouable ou pas ?

RACHIDA DATI
Non mais ça peut exister. Le sujet, en France, que nous avons, c'est la surpopulation carcérale. Moi-même, comme garde des Sceaux, j'ai connu ça. Il y a deux moyens de lutter contre la surpopulation carcérale, à mon sens. J'adore ce domaine judiciaire. Je n'ai pas été magistrat par hasard. Je le suis encore statutairement. C'est, évidemment, le sujet de la surpopulation carcérale et comment on peut l'enrayer ? Soit on construit des places de prison. Et c'est le cas.

AMANDINE BEGOT
Ça prend du temps et…

RACHIDA DATI
Et ça prend du temps parce qu'effectivement, tout le monde veut qu'on construise des places de prison. Mais jamais dans sa commune. C'est très compliqué. Il faut négocier. Il y a des procédures. Il y a 5 000 places de prison qui ont déjà été livrées. Il y en a 5 000 qui sont en cours de livraison. Et évidemment, il y aura 5 000 places qui seront, j'allais dire, avec une structure plus allégée.

AMANDINE BEGOT
Ça doit être accéléré, a dit le Président hier soir…

RACHIDA DATI
Ce sont souvent des centres de… Non. Ce sont des centres de semi-liberté, par exemple. Le centre de semi-liberté, vous allez travailler la journée. Vous avez une formation, une activité. Et vous dormez en prison. Évidemment, les contraintes sont moins lourdes que le vrai centre pénitentiaire. Mais aussi, ce dont on ne parle jamais. Et moi, j'y crois. Alors, moi, j'ai vu un débat au sein de ma famille politique. Certains n'y sont pas favorables. Je suis favorable à l'aménagement des peines. Lorsque j'étais garde des Sceaux, je l'ai multiplié par cinq. C'est l'élargissement de l'éligibilité…

AMANDINE BEGOT
Les places de prison à l'étranger, vous dites oui ou non ? C'est ça ma question.

RACHIDA DATI
Non mais attendez. Mais oui, mais c'est de trouver… le sujet de la surpopulation carcérale, il y a des gens qui restent en prison. D'autres, il faut exécuter les peines de prison quand elles sont prononcées. Et d'autres, ils sont incarcérés. Et effectivement, au bout d'un moment, pour éviter aussi la récidive, on peut aménager la peine, de dire : "C'est une libération conditionnelle, c'est un bracelet électronique, c'est une assignation à résidence". En contrepartie, il y a une formation, il y a des soins, il y a un travail. Et donc, tout ça, ça s'inscrit dans une politique pénale globale et une politique pénitentiaire. Donc il ne faut se priver d'aucune solution.

AMANDINE BEGOT
Rachida DATI, Gérard DEPARDIEU a été condamné hier à 18 mois de prison avec sursis pour avoir agressé deux femmes sur le tournage des "Volets Verts". Il a fait appel de sa décision. Il n'y aura donc aucun procès. Et il est toujours considéré, présumé, innocent. Mais dès hier, il y a un certain nombre de femmes, à gauche notamment, qui ont salué cette décision. Et vous, Rachida DATI ?

RACHIDA DATI
Je crois qu'il a fait appel. Donc, moi, je vais laisser la justice suivre son cours. Mais plus globalement, au-delà du cas de Gérard DEPARDIEU, il faut qu'il y ait une prise de conscience.

AMANDINE BEGOT
Et vous m'aviez dit, c'est un grand acteur, un grand talent. Ça, c'était le 17 janvier 2024, ici même. Vous le pensez toujours ?

RACHIDA DATI
Oui, mais ça n'est pas une excuse. Pendant très longtemps, on a considéré le talent, la domination. C'est-à-dire que le talent de génie, vous pouvez vous donner un droit à l'emprise, à la domination. Et donc, même à un droit de propriété, pour ne pas dire un droit de cuissage, pour reprendre des expressions qui, j'espère, aujourd'hui, n'existent pas, n'existeraient plus. Donc il faut évidemment une vraie prise de conscience. Mais il faut aussi des mesures coercitives. C'est comme la loi sur la parité. Pendant longtemps, on avait dit, non, il faut laisser faire les choses en politique. La parité va évidemment progresser. Elle ne progressait plus. Et donc la loi sur la parité, ça a permis de féminiser aussi…

AMANDINE BEGOT
Et pourquoi comme mesures coercitives, très concrètement ?

RACHIDA DATI
Les mesures coercitives, par exemple, sur les lieux de tournage, moi, j'ai demandé à ce qu'il y ait des référents de lutte contre les violences faites aux femmes, sexuelles, sexistes. Plus globalement, les luttes contre les violences sexuelles et sexistes. Un référent sur tous les tournages. Il faut un coordinateur d'intimité dès lors où c'est demandé par quelqu'un quel que soit…

AMANDINE BEGOT
Et ça vous choque qu'il puisse continuer, Gérard DEPARDIEU, à faire des films ? Il est en tournage en ce moment. Ça vous choque ou pas ? Pardon.

RACHIDA DATI
Ça, c'est évidemment, la justice peut décider qu'il n'exerce plus.

AMANDINE BEGOT
Mais vous, à titre personnel ?

RACHIDA DATI
Moi, je vais vous dire, je suis ministre de la Culture. Aujourd'hui, les situations personnelles, quand elles ont été traitées par la justice, moi, mon rôle, c'est de lutter contre ces violences sexuelles et sexistes sur les femmes. Plus globalement, y compris sur les mineurs. Puisque j'ai décidé aussi qu'il y ait un référent mineur. Aujourd'hui, ça existe jusqu'à l'âge de 16 ans. Je l'ai élargi jusqu'à l'âge de 18 ans. Il faut prendre des mesures coercitives pour que ces crimes et ces délits, ce n'est pas une idée, ce n'est pas un état d'esprit, c'est un crime et un délit, il faut que ça cesse.

AMANDINE BEGOT
En matière de violences sexuelles et sexistes, le festival de Cannes, qui a ouvert hier, a pris cette année toute une série de mesures pour encadrer les choses. Et puis, il y a ce nouveau dress code, notamment sur le tapis rouge. Fini, les tenues transparentes ou les robes trop dénudées. Vous trouvez ça normal ? Ça ne vous choque pas qu'on dise aux femmes comment s'habiller ?

RACHIDA DATI
Non, mais ce n'est pas valable que pour les femmes. Je me rappelle de Timothée CHALMET.

AMANDINE BEGOT
Robes trop dénudées…

RACHIDA DATI
Il était effectivement quasi torse nu la dernière fois. Non, ça s'adresse à tout le monde. Moi, je trouve que c'est un festival très prestigieux, qui demande aussi de la dignité de l'événement, et puis aussi, j'allais dire, de l'élégance.

AMANDINE BEGOT
On peut être élégant avec des robes un peu transparentes.

RACHIDA DATI
Mais ils n'ont pas interdit…

AMANDINE BEGOT
Si. La transparence, par exemple, c'est interdit.

RACHIDA DATI
Par rapport à la nudité, voilà. Donc moi, je suis choquée par rien. Ils ne vont pas venir faire une police du vêtement en bas de la montée des marches. Voilà. Et puis, l'histoire des traînes longues, pour avoir fait la montée des marches, comme ministre de la Culture, c'est vrai que souvent, vous bloquez l'arrivée des uns et des autres. Souvent, il y a une traîne qui fait 22 escaliers. Après tout, il y a aussi des aspects pratiques à tout cela.

AMANDINE BEGOT
Bon, vous serez à Cannes vendredi. Et après, votre objectif, c'est toujours la mairie de Paris ?

RACHIDA DATI
On ne va pas recommencer ?

AMANDINE BEGOT
Je ne sais pas, je vous pose la question.

RACHIDA DATI
… ministre de la Culture.

AMANDINE BEGOT
Oui.

RACHIDA DATI
Là, il y a monsieur VIZOREK qui est arrivé.

ALEX VIZOREK
Bonjour madame DATI.

AMANDINE BEGOT
D'accord. Et juste, vous ne redoutez pas…

RACHIDA DATI
Et je ne suis pas un ministre irréfléchi, parce que je vous écoute la dernière fois. Voilà.

ALEX VIZOREK
C'était drôle, tout le monde a ri.

RACHIDA DATI
Ah bah oui, ça, c'est sûr. Un mot sur moi, je pense que ça fait beaucoup rire.

ALEX VIZOREK
Eh ben j'en ai plein qui arrive.

AMANDINE BEGOT
J'ai une question, pardon, excusez-moi. Sur la mairie de Paris, c'est sérieux. Vous ne redoutez pas de pouvoir être empêchée ?

RACHIDA DATI
Moi, je ne redoute rien. Je vois ce que vous voulez dire.

AMANDINE BEGOT
Votre mise en examen.

RACHIDA DATI
Oui, et alors, c'est un combat.

AMANDINE BEGOT
Il y aura un procès avant les élections ou pas ? Non, je vous pose la question.

RACHIDA DATI
Vous êtes procureure ? Non. Vous êtes magistrat ? Non. Vous connaissez le dossier ? Non. Voilà. Et ben moi, je vous réponds. Toute ma vie, ça a été un combat. Un combat de plus ou de moins, ça ne m'effraie pas. Mais je suis déterminée…

AMANDINE BEGOT
Et vous voterez ce week-end ?

RACHIDA DATI
Oui.

AMANDINE BEGOT
Pour les LR. Vous avez fait votre choix ? Bruno RETAILLEAU ?

RACHIDA DATI
Oui.

AMANDINE BEGOT
Laurent WAUQUIEZ ? Bruno RETAILLEAU.

RACHIDA DATI
J'ai fait un choix.

AMANDINE BEGOT
Non. Vous avez répondu oui à Bruno RETAILLEAU.

RACHIDA DATI
Non, j'ai dit j'ai fait un choix.

AMANDINE BEGOT
Donc Laurent WAUQUIEZ.

RACHIDA DATI
C'est normal. Si je vais voter, c'est que je vais choisir. Voilà.

AMANDINE BEGOT
Merci Rachida DATI.

RACHIDA DATI
Merci.

AMANDINE BEGOT
Et Alex effectivement arrive.

THOMAS SOTTO
Vous restez avec nous.

RACHIDA DATI
Ah ! Je reste. Ben comme ça, je vais pouvoir me le faire si…


source : Service d'information du Gouvernement, le 15 mai 2025