Texte intégral
Merci beaucoup, Monsieur le président de la République. Cher Prabowo SUBIANTO,
Mesdames, Messieurs les ministres,
Messieurs les ambassadeurs,
Mesdames, Messieurs, en vos grades et qualités,
je tiens d'abord à vous remercier, Monsieur le président, ainsi que le peuple indonésien, pour votre accueil ici même à Jakarta, dans cette magnifique visite d'État qui a commencé ce matin, et nous aurons l'occasion de nous rendre demain ensemble dans la province de Java, vous l'avez dit, la province de Java Centre, pour partager un repas avec les cadets de l'Académie militaire, un de vos grands projets, et je suis fier de pouvoir voir cette réalisation, et aussi les cadets qui ont appris le français, et rendre hommage aussi à l'exceptionnel patrimoine culturel indonésien à Borobudur.
Visite d'État exceptionnelle, oui, parce que l'Indonésie l'est et impressionne le monde par sa diversité, et comment ne pas l'être dans un pays archipel qui a réussi à unir dans une même communauté de destins plus de 17 000 îles. Et dans le monde que nous partageons, qui est en effet marqué par l'instabilité, les menaces, les appels au repli sur soi, l'identité indonésienne, attachée à la tolérance et à l'ouverture aux autres cultures, ne peut qu'être inspirante. C'est sans doute pour cette raison que nous partageons la même approche des grandes crises internationales, et Monsieur le président y est revenu à l'instant. D'abord et avant tout, je dois dire que nous partageons une même volonté d'indépendance, d'autonomie, nous y reviendrons, et elle irrigue beaucoup de notre relation bilatérale. Mais nous partageons aussi la même vision du droit international, une vision qui ne souffre pas de double standard.
Et c'est pourquoi nous défendons l'un et l'autre une paix durable et robuste en Ukraine, en commençant par un cessez-le-feu immédiat. Et c'est pourquoi nous sommes l'un et l'autre engagés aussi pour mettre un terme au conflit au Proche-Orient et reprendre le chemin de la paix afin de garantir la sécurité pour tous, palestiniens et israéliens. Je me permets de revenir sur ce point, car je sais toute l'émotion suscitée par cette guerre et les questions parfois sur la position de l'Europe et de la France. Et je veux le dire ici, la France ne connaît pas le double standard. C'est pourquoi nous avons condamné les attaques terroristes conduites par le Hamas le 7 octobre 2023, reconnu le droit d'Israël à se défendre.
Mais nous avons aussi, dès le mois d'octobre 2023, demandé à un cessez-le-feu, organisé dès novembre 2023 la première conférence humanitaire pour Gaza, et sans relâche oeuvré pour que la paix puisse revenir, l'aide humanitaire s'installer. Et c'est pourquoi nous sommes aussi mobilisés pour retrouver un processus qui pourra nous conduire à deux États, à une reconnaissance mutuelle et à une paix durable. Et c'est exactement la position que vous venez de tenir, monsieur le Président, celle qui consiste à dire qu'aujourd'hui, seule la solution politique permettra de retrouver la paix et la construire dans la durée. Nous organiserons prochainement avec l'Arabie saoudite, une conférence sur Gaza, New York, pour donner un nouvel élan à la reconnaissance d'un État palestinien et à la reconnaissance de l'État d'Israël et son droit à vivre en paix, en sécurité dans cette région. Et je veux remercier le président Prabowo pour les mots extrêmement clairs qu'il vient d'avoir, son engagement et la disponibilité qu'il vient de témoigner. Merci beaucoup.
Au-delà évidemment de ces deux conflits, c'est aussi la même vision que nous portons, et vous l'avez rappelé, pour la stabilité du monde, la défense de nos biens communs, et en particulier les océans. La France aura, vous le savez, dans quelques semaines, à organiser à Nice la Conférence des Nations unies sur les océans. Main dans la main, nous agissons aussi pour bâtir un partenariat de souveraineté.
Nous n'oublions pas que l'Indonésie est un pays qui s'est battu pour son indépendance, qui a aussi, dès 1945, ouvert une voie et, 10 ans plus tard, établi une doctrine et en quelque sorte porté une vision singulière du multilatéralisme, peut-être avant l'heure. Ce combat se poursuit aujourd'hui en construisant ensemble des projets dans tous les secteurs pour renforcer cette autonomie stratégique.
Au fond, je dirais que ce qui nous unit, c'est que nous ne voulons la guerre avec personne, mais nous ne voulons dépendre de personne. C'est pourquoi nous croyons dans le partenariat renforcé entre l'Indonésie et la France, mais aussi entre l'ASEAN et l'Europe.
Pour servir cette vision, ce partenariat de souveraineté, ces équilibres, nous avons consolidé ces dernières années, dans la défense et la sécurité, un lien inédit. Je suis heureux que la lettre d'intention signée aujourd'hui puisse ouvrir une nouvelle perspective avec des commandes nouvelles de Rafale, de Scorpène, de frégates légères, avec aussi des exercices conjoints consolidés, vous avez rappelé l'importance des exercices récents, des formations conjointes, et là aussi, une intimité plus forte entre nos armées, avec ces échanges d'informations dont nous avons décidé le principe à l'instant.
Cette indépendance, cette politique de souveraineté nécessite aussi de renforcer la résilience des chaînes de valeur avec des projets dans de nombreux domaines qui ont été signés aujourd'hui, le secteur des métaux critiques, le développement de capacités énergétiques décarbonées, mais aussi des projets en matière satellitaire, en matière d'agroalimentaire.
Vous le savez, la France est aussi un partenaire important de la transition énergétique de votre pays. Nous avons déjà déployé 450 millions d'euros en prêt sur notre engagement de 500 millions d'euros en appuyant la connectivité électrique dans l'ASEAN. Je suis heureux que nous ayons pu conclure aujourd'hui dans l'énergie solaire et dans l'hydrogène des projets importants. Nous souhaitons aussi continuer en matière de transport pour avancer dans la décarbonation de votre économie.
Je pourrais égrener ainsi de nombreux secteurs. Nous l'avons vu dans la coopération du secteur équin. Dans le satellite, il y a une très grande diversité de partenariats qui sont noués. Je voudrais insister aussi sur le caractère exceptionnel des partenariats culturels que nous avons conclus aujourd'hui et que nous parachèverons demain.
En matière de littérature, en matière de coopération scientifique et muséale, en matière de musique et de cinéma, nous allons conclure de nombreux partenariats qui viennent consacrer la reconnaissance de la vitalité culturelle de votre pays et de notre volonté d'être un partenaire de premier plan pour développer.
Je souhaite aussi que tout ça puisse se traduire par des investissements d'entreprises indonésiennes en France. Nous avons pu en accueillir lors de Choose France et j'aurai l'occasion dans un instant d'échanger avec des investisseurs indonésiens pour avancer dans cette direction.
Cette feuille de route est aussi en train de prendre une dimension régionale. Je l'évoquais dans son principe via l'Association des Nations d'Asie du Sud-Est, l'ASEAN. Je m'entretiendrai cet après-midi avant notre dîner d'État avec le secrétaire général de cette organisation. Et projet après projet, nous construisons ce partenariat. De même, l'Union européenne, qui a vocation à renforcer ses liens avec l'ASEAN et l'Indonésie, à ce titre, je veux ici redire, Monsieur le Président, que je soutiens pleinement la conclusion d'un accord de partenariat global entre l'Europe et l'Indonésie.
Je tiens enfin à rendre hommage à l'agenda de justice sociale que vous portez via une mesure très concrète et fondamentale, l'accès à un repas à la cantine scolaire, Nos efforts convergent au niveau international. Nous avions lancé en plein Covid, cette initiative avec le programme alimentaire mondial, et nous allons développer à vos côtés, accompagner cette initiative extrêmement importante. Je suis heureux aussi que nous puissions mettre à votre service notre expertise dans le secteur agroalimentaire pour soutenir votre ambition en la matière.
Malgré la distance, au fond, mon message est simple, Monsieur le président. La France est à vos côtés et nous partageons à de multiples égards une certaine idée de l'ordre du monde.
Cette visite marque à ce titre une nouvelle étape de notre histoire commune, par des partenariats nouveaux, mais aussi par une vision partagée des équilibres dont nous avons besoin. C'est pourquoi, en effet, j'ai souhaité inviter Monsieur le président Prabowo à être présent le 14 juillet, à ce que vos troupes puissent défiler aux côtés des nôtres et à ce qu'en cette année anniversaire de nos relations diplomatiques, vous puissiez être l'invité d'honneur de notre fête nationale. Je vous remercie d'avoir accepté cette invitation.
Merci, en tout cas, pour l'amitié que vous nous portez ; croyez en la nôtre en retour. C'est ce chemin de confiance qui, je l'espère, nous permettra de bâtir, entre nos deux pays, entre nos deux régions, encore davantage de coopération et un chemin possible d'équilibre dans ce monde si incertain.
Merci, Monsieur le président.