Déclaration à la presse de M. Emmanuel Macron, président de la République, sur le Salon du Bourget et le conflit entre l'Iran et Israël, au Bourget le 20 juin 2025.

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Circonstance : Salon du Bourget

Texte intégral

C'est le plus grand salon du monde pour l'aéronautique. Et c'est la plus grande édition du plus grand salon du monde. Donc c'est vraiment une fierté, si je puis dire, au carré, que les Françaises et les Français peuvent avoir. C'est un salon, évidemment, qui est tiré par nos grands groupes, qui sont souvent, d'ailleurs, des acteurs du civil et du militaire, mais aussi par nos ETI, nos PME, partout sur le territoire. Je veux saluer cette mobilisation et cette excellence de la France et de l'Europe. Il y a eu plus de 100 délégations qui sont venues sur ce salon et qui sont en train de venir, le public aujourd'hui qui y arrive. Donc c'est une grande fierté et un immense succès.

Ceci s'accompagne d'abord, évidemment, d'une consolidation de notre place. Je le dis à la fois sur le civil et le militaire, il y a eu des commandes très importantes passées sur le civil à Airbus, à nos grands aviateurs et toutes nos filières aéronautiques pour consolider la place qui est la nôtre et des commandes très structurantes. On continue aussi sur le plan militaire à déployer. On est arrivé avec l'A400M qui, depuis 10 ans maintenant, augmente dans nos armées. On signera, on confirmera tout à l'heure la signature d'un projet important aussi pour Dassault sur le spatial. Donc, c'est à la fois vraiment, je dirais, un salon de maturité pour nos grands industriels, de confirmation de commandes très lourdes.

A côté de ça, c'est aussi un salon qui marque les ruptures technologiques parce que vous l'avez vu, à la fois la multiplicité des drones, très innovants. Il y a 2-3 ans, c'était un secteur qui était marginal, ici dans ce salon. Le spatial, je l'évoquais, j'y reviendrai tout à l'heure, avec aussi la très haute altitude, avec des projets très structurants qu'on va signer. Voilà, un projet de rupture qui est très important.

Et puis, c'est la montée aussi, je dirais, de toute la partie défense qui correspond à l'état du monde, à ses désordres, ses déséquilibres, avec de plus en plus de pays qui s'équipent. Ce salon qui a toujours eu une composante de défense, on le voit, une composante qui croît chaque année davantage et qui, cette année, est sans doute encore plus forte que les autres.

Tout ça doit conduire les Françaises et les Français à être extrêmement fiers d'avoir vraiment un secteur aéronautique si fort, d'avoir le plus beau salon du monde en la matière, d'avoir aussi un secteur spatial qui est au cœur de tous les défis, et d'avoir aussi des armées françaises et des industriels qui portent tous ces enjeux. Je vais maintenant répondre à vos questions.


Journaliste
Eutelsat a annoncé hier soir une montée de l'État au capital. Est-ce que l'objectif affiché est de concurrencer Starlink ? Est-ce que la France et l'Europe ont les moyens de ne plus dépendre d'Elon Musk ?

Emmanuel MACRON
Oui, c'est un enjeu de souveraineté, c'est un enjeu industriel, c'est un enjeu que nous soutenons. Il a été annoncé hier une augmentation de capital à laquelle l'État français souscrira. Nous souhaitons qu'aujourd'hui, tous les partenaires financiers et industriels français souscrivent aussi à hauteur de leur participation actuelle. On souhaite aussi mobiliser beaucoup d'autres partenaires européens et internationaux.

Pourquoi ? Parce que Eutelsat est une très grande entreprise de services satellitaires, qu'elle a des constellations aujourd'hui à la fois GEO et LEO, c'est-à-dire en orbite basse, et qu'en fait, Eutelsat est le seul acteur qui est non américain et non chinois et qui dispose de ces constellations en orbite basse et d'une telle offre. C'est un enjeu de souveraineté pour nous tous. C'est ce que, depuis des mois, nous expliquons aussi à nos partenaires, c'est de rejoindre cette offre s'ils ne veulent pas dépendre. On a vu ce qui se passait en Ukraine. On a vu aussi, il y a quelques mois, quand nous avons subi le cyclone à Mayotte. On veut accélérer le déploiement des points de contact au sol. On veut accélérer les lancements à court terme. On veut déployer le plus vite possible le projet IRIS² qui est le plus grand projet spatial européen et qui a, vous le savez, dans son cœur, d'ailleurs, justement Eutelsat.

C'est aujourd'hui un combat de souveraineté, un combat industriel, un combat aussi au cœur de nos enjeux de recherche que nous poussons. L'État a confiance dans l'Eutelsat et accompagnera cette augmentation de capital. Je souhaite qu'il y ait un maximum de nos grands partenaires qui l'accompagnent, parce que c'est un enjeu stratégique.

Journaliste
Bonjour Monsieur le Président. Comme vous entendez, Donald Trump a envisagé d'engager les Américains militairement dans la guerre en Israël et l'Iran. Est-ce que ça vous inquiète ? Est-ce que vous l'appelez à privilégier plutôt la voie de la négociation ?

Emmanuel MACRON
Il a aussi parlé de négociation. Je l'ai dit depuis le premier jour. Personne ne doit négliger le risque que représente un Iran doté de l'arme nucléaire. C'est un vrai risque, c'est une vraie menace. La France, d'ailleurs, ne l'a jamais négligée. C'est pour ça que nous avons été au cœur, il y a 10 ans, de la négociation du JCPOA, que nous avons été parmi les négociateurs les plus exigeants et que nous n'avons jamais quitté ce cadre. Oui, le nucléaire iranien est une menace et il ne faut aucun laxisme en la matière.

Deuxièmement, personne ne peut sérieusement penser que cette menace, on y répond avec les opérations qui sont en cours uniquement. Pourquoi ? Parce qu'il y a des centrales qui sont extrêmement protégées, parce que nul ne sait aujourd'hui totalement dire où est l'uranium enrichi à 60 %. C'est un programme dont il faut reprendre le contrôle aussi par l'expertise technique et la négociation.

C'est pourquoi, depuis plusieurs jours, la France a une voix claire, simple. 1), rien ne justifie les frappes sur les infrastructures énergétiques et les populations civiles. Rien. 2), il faut absolument prioriser le retour à la négociation de fond qui inclut le nucléaire pour aller vers le zéro enrichissement, le balistique pour limiter les activités et les capacités iraniennes, et le financement de tous les groupes terroristes de déstabilisation de la région qu'a procédé l'Iran depuis plusieurs années. C'est d'ailleurs ce que je prône depuis 2018, de manière constante. Donc, je suis cohérent en la matière.

C'est pour ça que j'ai demandé au ministre de l'Europe et des Affaires étrangères de réenclencher ce travail. Il est à Genève dans les prochaines heures. Il va d'abord se coordonner avec ses homologues britanniques et allemands et à 15 heures, ils verront donc le ministre des Affaires étrangères iranien pour faire une offre de négociation complète, diplomatique et technique.

Journaliste
Quand vous entendez Donald Trump vous êtes inquiet ?

Emmanuel MACRON
Je ne suis pas dans le commentaire. La situation est objectivement aujourd'hui une source d'inquiétude parce qu'il y a la question du nucléaire iranien, parce qu'aujourd'hui, encore une fois, au Proche et Moyen-Orient, on bombarde des populations civiles et parce que cette situation porte en elle des risques d'escalade qui sont dommageables pour la région et pour la sécurité internationale.

Il faut tous être extrêmement vigilants, sérieux, et traiter la situation, comme je viens de le rappeler, en se remettant autour d'une table maintenant de discussion, et ne pas oublier non plus la situation à Gaza, qui exige aujourd'hui, pour des raisons humanitaires mais sécuritaires également, un cessez-le-feu le plus rapide, une reprise de l'aide humanitaire et une reprise du travail politique.

Journaliste
Sur l'Iran, Monsieur le Président, est-ce que vous reprendriez les mots du chancelier allemand, Monsieur Merz, qui disait, je cite, qu'Israël fait le sale boulot pour nous tous en Iran ? Et juste une deuxième question, est-ce que vous comptez réunir d'une manière ou d'une autre les partis politiques en France, comme vous l'avez fait sur la guerre en Ukraine, pour les tenir informés de l'évolution de la situation, par exemple sous format Saint-Denis ?

Emmanuel MACRON
Je pense qu'aujourd'hui, je l'ai dit, la France considère que la sécurité d'Israël est une véritable question stratégique pour nous et que l'Iran constitue un risque existentiel pour Israël. Pour autant, je considère qu'aujourd'hui, les frappes qui se poursuivent, les frappes qui touchent les infrastructures énergétiques ou civiles et qui touchent les populations civiles doivent absolument être arrêtées. Rien ne les justifie.

Je considère aujourd'hui que, et j'aurai l'occasion, d'ailleurs, dans les prochaines heures, prochains jours, de parler à nouveau au Premier ministre Netanyahou, il faut qu'on puisse reprendre le travail politique et diplomatique. C'est la voie que nous portons.

Ensuite, sur la question du traitement des formations politiques, je souhaite que le Gouvernement, et j'en ai parlé ce matin avec le Premier ministre, puisse organiser sur ce sujet un débat, conformément à l'article 50-1 de notre Constitution, et en effet, dès que les choses commenceront à se stabiliser, je rassemblerai sur un format de type Saint-Denis, une formation politique, pour échanger avec elle à la fois sur l'Iran, Gaza, mais également l'Ukraine. Je vais d'abord passer le cap du sommet de l'OTAN la semaine prochaine.

Journaliste
Vous avez réévoqué il y a deux jours une initiative française. Aujourd'hui, vous parlez d'une offre diplomatique complète. Est-ce que vous pouvez nous dire concrètement, qu'est-ce qui serait à même de faire arrêter les frappes et de passer à la table des négociations ?

Emmanuel MACRON
Que l'Iran manifeste sa volonté de rejoindre la plateforme des négociations que nous allons mettre sur la table.

Journaliste
Vous allez parler tout à l'heure à Sophie Adenot, qu'est ce que vous pensez d'elle

Emmanuel MACRON
Oui, comme j'ai pu le dire, nous, nous proposons une solution diplomatique, et donc, ce que nous mettons sur la table, c'est une solution diplomatique qui traite,  1) c'est une reprise du travail de l'AIEA pour aller vers le zéro enrichissement, avec une capacité d'aller sur tous les sites. 2), c'est un encadrement des activités balistiques. 3), c'est un encadrement du financement des proxys dans la région. Et 4), c'est véritablement aussi la libération des otages et avec, derrière, une reprise des échanges diplomatiques. Donc, il y a une offre qui sera travaillée par nos ministres et qui sera déposée sur la table en début d'après-midi.

Sur Sophie Adenot, je serai heureux de la retrouver. Au début de mon premier mandat, elle pilotait les hélicoptères que j'utilisais, donc j'ai appris à la connaître. Je crois que c'est vraiment une fierté pour nos armées d'avoir une femme aussi engagée qui a aussi fait cet investissement, une fierté qu'elle ait été sélectionnée ainsi dans les programmes internationaux et américains. Et donc, je serai tout à l'heure très heureux de la retrouver pour aussi défendre, si je puis dire, son implication et les grands programmes que nous attendons. Merci beaucoup.