Texte intégral
JEFF WITTENBERG
Bonjour Catherine VAUTRIN.
CATHERINE VAUTRIN
Bonjour Jeff WITTENBERG.
JEFF WITTENBERG
Merci d'être avec nous ce matin.
CATHERINE VAUTRIN
Merci à vous.
JEFF WITTENBERG
Et la première question qu'on a envie de vous poser, parce qu'on vient d'entendre le journal de 7h30, c'est est-ce que François BAYROU a une baguette magique ? Comment va-t-il faire pour parvenir à un accord, pour parvenir à mettre d'accord les partenaires sociaux ce matin, à Matignon, alors qu'ils se sont quittés hier soir au cours du conclave sur un constat d'échec ?
CATHERINE VAUTRIN
Moi, je commencerais par dire que le Premier ministre a d'abord du respect pour le travail qui a été fait. Quatre mois de travail avec trois organisations représentant les syndicats de salariés, deux organisations patronales et des éléments d'accords très importants. Ces éléments, d'accord, le Premier ministre les a rappelés ce matin. Le premier, c'est l'équilibre du système par l'âge, qui était vraiment un point très important, les fameux 64 ans, l'avancée du calcul pour les mères de famille. On sait que la retraite des femmes est plus faible que celle des hommes. C'était également l'âge du taux plein qui était un point extrêmement important et une volonté d'accord sur la gouvernance. Il reste donc un sujet.
JEFF WITTENBERG
La pénibilité.
CATHERINE VAUTRIN
L'usure professionnelle. Et donc là, deux lectures. D'un côté, la réparation. Ceux qui ont travaillé la nuit, ceux qui ont été, c'est d'actualité, exposés à des températures extrêmes. Et puis d'un autre côté, la prévention.
JEFF WITTENBERG
Donc est-ce qu'il va y avoir un bougé du Gouvernement ? Est-ce qu'il va amener des propositions ? Je précise que Marylise LÉON, la numéro 1 de la CFDT, vient de dire à l'instant qu'elle va aller à cette réunion mais qu'on ne négocie plus. C'était déjà la réunion de la dernière chance hier. Qu'est-ce que, encore une fois, François BAYROU a proposé qui pourrait débloquer la situation ?
CATHERINE VAUTRIN
Je pense que c'est toujours important… Nous étions partis d'une situation en janvier qui était une situation tendue avec des organisations syndicales et patronales qui ont accepté de travailler ensemble. S'arrêter si près du but, cela mérite une dernière tentative. Et je comprends l'engagement.
JEFF WITTENBERG
Mais c'était déjà la dernière tentative, madame VAUTRIN, hier.
CATHERINE VAUTRIN
Oui mais c'était sans le Gouvernement. Puisque nous avons respecté…
JEFF WITTENBERG
Donc c'est un peu un échec du dialogue social. C'est le Gouvernement qui en prend la main sur la politique.
CATHERINE VAUTRIN
Nous avons jusqu'à maintenant respecté le fait… Souvenez-vous, en janvier, on disait : "Pas de tabou, pas de totem sans le Gouvernement". On a accompagné toutes les demandes de chiffrage, de documentation. On a repris le rapport de la Cour des comptes. Il y a eu le rapport du Conseil d'orientation des retraites. Tous ces éléments donnaient des éléments qui permettaient de travailler. Aujourd'hui, c'est logique qu'on se dise si près du but, le Gouvernement accompagne
JEFF WITTENBERG
Franchement, entre nous, est-ce que vous y croyez ? Est-ce qu'il peut y avoir, encore une fois, ces miracles qui feraient que les mêmes qui n'étaient pas d'accord hier soir le seraient ce matin ?
CATHERINE VAUTRIN
Je pense que quand il y a dialogue, il y a toujours une possibilité de solution.
JEFF WITTENBERG
Même si madame LÉON dit : "On ne négocie pas".
CATHERINE VAUTRIN
Allons voir dans quelles conditions le dialogue va se mettre en place.
JEFF WITTENBERG
Est-ce que vous pensez, vous, que ce sont les syndicats qui en demandent trop, ou le patronat, si j'ose dire, qui n'en lâche pas assez notamment sur la pénibilité ? Et j'ajoute, pardon, si on ne revient pas sur l'âge de 64 ans qui est quand même la pierre angulaire de cette réforme, comment espérer un accord puisque c'est quand même la demande principale des syndicats ?
CATHERINE VAUTRIN
La nécessité, c'est vraiment de reconnaître qu'effectivement il y a des carrières qui génèrent une usure physique plus importante. Et c'était tout le travail qui a été mené sur des critères autour de l'ergonomie de la fonction. Et donc c'est là où il faut trouver la différence entre d'un côté, qu'est-ce qu'on fait en mesure de prévention. Les organisations patronales sont très engagées sur la prévention. Les organisations salariales voudraient un peu plus de reconnaissance parce que là, évidemment, il y a un lien, bien sûr, avec le départ lié à votre usure. C'est là où il faut réussir à trouver quelque chose.
JEFF WITTENBERG
Vous seriez présente à cette réunion, Catherine VAUTRIN ?
CATHERINE VAUTRIN
Écoutez, les modalités d'organisation des réunions sont en train de se mettre en place. L'une à 10h, l'une à 11h. Voilà ce que je sais à 7h et demie.
JEFF WITTENBERG
Et à 7h et demie, au moment où l'on se parle, on en reste pour l'instant à la réforme d'Élisabeth BORNE, celle de 2023.
CATHERINE VAUTRIN
Ah ! Ça, c'était très clair. Le Premier ministre, au mois de janvier dernier…
JEFF WITTENBERG
Il n'y aura pas de nouveau texte à l'Assemblée.
CATHERINE VAUTRIN
Avait dit : "Il y a un accord, évidemment on le transpose. Il n'y a pas d'accord, nous restons sur le texte de 23". Donc vous voyez la volonté du Premier ministre qui a entendu cette demande à propos du texte de 23 et qui dit : "Je réunis encore une fois l'ensemble des partenaires."
JEFF WITTENBERG
Donc vous y croyez encore ? Vous gardez un peu d'optimisme ?
CATHERINE VAUTRIN
Le terme optimiste est évidemment un terme important, mais je pense que la place au dialogue permet toujours d'avancer.
JEFF WITTENBERG
Mais si François BAYROU a voulu conclave, c'est aussi parce qu'il considère que cette réforme de 2023, qui est donc pour l'instant maintenue, elle était imparfaite. Vous, vous pensez qu'elle est juste la réforme de 2023 ? C'est la question.
CATHERINE VAUTRIN
Moi, je vous rappelle que quand le Premier ministre propose cela, nous sommes début janvier, nous n'avons pas de projet de loi de finances de la Sécurité sociale, nous n'avons pas de projet de loi de finances et c'était l'un des éléments qui nous a permis, au début de l'année, de mettre en place ces éléments. Vous savez combien la France a besoin de stabilité, surtout dans le contexte dans lequel nous sommes ? Et ces éléments ont permis de voter le budget, de voter le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Il n'en reste pas moins vrai que nous avons des enjeux financiers majeurs. Je rappelle que le projet de loi de financement de la Sécurité sociale 650 milliards d'euros, 22 milliards de déficit.
JEFF WITTENBERG
Et madame VAUTRIN, derrière tout cela, des enjeux politiques puisque, par exemple, la France insoumise n'a pas attendu bien longtemps. Dès cette nuit, le parti de Jean-Luc MÉLENCHON a annoncé qu'il souhaitait que toute la gauche dépose une motion de censure contre votre Gouvernement, puisque le conclave a pour l'instant échoué, a échoué. Puisque le conclave est terminé. Il y a une réunion de la dernière chance à Matignon. Vous vous attendez à cette motion de censure. Est-ce que François Bayrou n'est pas aujourd'hui en sursis ? Et est-ce que ce n'est pas pour cela qu'il tente d'ailleurs cette réunion ce matin ?
CATHERINE VAUTRIN
Vous savez, la motion de censure, elle était déjà dans l'air la semaine dernière. Donc aujourd'hui, notre sujet, c'est vraiment celui de l'équilibre des comptes. Je rappelle que le sujet des retraites, 2030, 6 milliards et demi de déficit. Et ça, c'est un sujet qui concerne chaque Française et chaque Français.
JEFF WITTENBERG
Et Catherine VAUTRIN, vous avez été parmi les noms cités pour Matignon. Est-ce que vous considérez très franchement qu'aujourd'hui François BAYROU est menacé dans son poste de Premier ministre, puisqu'il avait fait de la réussite de ce conclave sur les retraites, un peu la condition de la réussite de sa méthode ? Donc l'échec du conclave, c'est un peu aussi le sien.
CATHERINE VAUTRIN
Le conclave aujourd'hui est évidemment un échec dans le sens où il n'a pas fait l'objet d'une conclusion acceptée par les partis, mais il a fait l'objet d'un bougé avec des avancées. L'idée, c'est de regarder comment nous pouvons transformer ces bougés. C'est cela qui nous préoccupe ce matin et c'est pour cela que le Premier ministre souhaite faire une réunion supplémentaire.
JEFF WITTENBERG
Cette réforme des retraites telle qu'elle est aujourd'hui, la réforme BORNE de 2023, elle est rejetée à la fois par une majorité de députés, par une majorité de Français, quel Gouvernement pourra tenir sans l'abroger, sans la réformer, cette réforme ?
CATHERINE VAUTRIN
Vous savez, le discours que nous devons avoir avec les Français, c'est aussi de regarder les chiffres. Les chiffres sont têtus et les chiffres démontrent qu'aujourd'hui, nous ne sommes pas en capacité de financer notre système de retraite parce que la richesse produite par rapport à ce que coûte le système de retraite ne permet pas de le financer tel qu'il est. Donc pérenniser les retraites, c'est forcément bouger, c'est forcément faire des efforts. Et nous devons cette vérité aux Français.
JEFF WITTENBERG
Mais vous lancez un appel aux syndicats ce matin, et notamment la CFDT.
CATHERINE VAUTRIN
Moi, d'abord, je les remercie de la capacité qui a été la leur de travailler.
JEFF WITTENBERG
Mais pour l'avenir ?
CATHERINE VAUTRIN
Et aujourd'hui vous savez, l'appel, il est pour l'ensemble de celles et ceux qui étaient à la table de négociation. Respect pour ce que vous avez fait. Et quelque part, ce respect, si on arrive à le transformer ensemble, on est dans une logique de gagnant-gagnant.
JEFF WITTENBERG
Madame VAUTRIN, une autre question, un autre sujet immédiat vous occupe, vous concerne. C'est la question des dépenses de santé. Parce que le comité d'alerte qui est censé s'occuper de cette question, vous a précisément alerté le 18 juin, avec notamment une explosion des dépenses d'arrêt maladie, un coût des médicaments toujours plus grand. Est-ce que ce sont des mesures à préparer pour vous, pour resserrer encore les dépenses de santé dans le pays. ? Et comment ça va se traduire ?
CATHERINE VAUTRIN
Vous avez tout à fait raison. Si on donne les chiffres, les dépenses de santé, c'est 266 milliards prévus pour l'exercice 25. C'est 3,4 % de plus que l'année 24. Et en fait, cette augmentation-là, telle que les chiffres se déroulent depuis le début de l'année, ne suffit pas. On parle d'une augmentation potentielle qui dépasse les 0,5 % et c'est la raison pour laquelle il y a cette alerte. Première alerte…
JEFF WITTENBERG
Conclusion. Oui mais au-delà de l'alerte, madame, parce qu'il nous reste peu de temps…
CATHERINE VAUTRIN
Conclusion, efforts sur les arrêts maladie. On a 7 % d'augmentation entre janvier-avril 25 comparé à janvier-avril 24. Médicaments, un accord avec les professionnels sur…
JEFF WITTENBERG
De nouveau des remboursements, madame VAUTRIN ?
CATHERINE VAUTRIN
C'est un accord avec le prix, sur le prix des médicaments avec les industriels. C'est ça le sujet. L'accord n'est pas signé, il doit être signé. C'est le sujet sur lequel on doit travailler. Troisièmement, bien évidemment, les soins de ville qui sont également un élément concerné. Donc vous le voyez.
JEFF WITTENBERG
Que ferez-vous sur les soins de ville ?
CATHERINE VAUTRIN
Très concrètement, c'est évidemment les arrêts de travail, c'est la prévention. Toute prévention permet d'éviter des dépenses de santé.
JEFF WITTENBERG
Eh bien on verra cela donc dans les prochains jours. Merci beaucoup Catherine VAUTRIN d'avoir réagi en direct ce matin à cet échec du conclave pour l'instant et à cette réunion qui va avoir lieu tout à l'heure à Matignon, vous serez sans doute présente. Merci beaucoup.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 26 juin 2025