Texte intégral
BRUCE TOUSSAINT
Bonjour Adrien GINDRE.
ADRIEN GINDRE
Bonjour Bruce.
BRUCE TOUSSAINT
Il est 7 h 36, votre invitée Catherine VAUTRIN, ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles.
ADRIEN GINDRE
Bonjour Catherine VAUTRIN.
CATHERINE VAUTRIN
Bonjour Adrien GINDRE.
ADRIEN GINDRE
En effet aujourd'hui, seize départements en vigilance rouge canicule, 68 en orange, on l'a vu tout à l'heure, jusqu'à quarante degrés attendus à Nîmes notamment. Est-ce qu'on doit s'attendre à vivre une journée record Catherine VAUTRIN ?
CATHERINE VAUTRIN
C'est effectivement une journée particulièrement chaude et la vigilance rouge a un sens, c'est que cela concerne tout le monde. C'est-à-dire qu'on trouve tout ce qui fait très chaud, que c'est difficile à supporter et donc, ce qui est très important c'est que chacun d'entre nous soit vigilant. Le rouge ça veut dire que tout le monde, pas exclusivement les personnes vulnérables, doit faire attention.
ADRIEN GINDRE
Avec pour les plus vulnérables un risque pour la santé précisément, est-ce que vous avez déjà des remontées sur le nombre de passages aux urgences ? Est-ce qu'on a déjà constaté une augmentation ?
CATHERINE VAUTRIN
Alors, pour l'instant nous n'avons pas de remontée significative mais nous savons très bien qu'il y a toujours un décalage de quelques jours, puisque c'est ce que les professionnels appellent décompenser. Et donc, nous sommes pour l'instant totalement dans la prévention en expliquant combien il est important de boire, même sans avoir soif. Et ça c'est vrai pour chacune et chacun d'entre nous. C'est très important également de pouvoir s'hydrater, de se mouiller, de manger frais, de rester plutôt autant que possible au frais. Ce qui veut dire aller passer quelques heures dans la journée autant que possible dans des endroits soit climatisés, soit frais. C'est vraiment ce qui permet de supporter ces chaleurs très fortes.
ADRIEN GINDRE
Vous parlez d'effets retardés. Hier votre collègue Agnès PANNIER-RUNACHER disait : "Une vague de chaleur ça peut provoquer plusieurs milliers de morts". Est-ce que c'est aussi ce à quoi il faut s'attendre, redouter pour cette vague de chaleur ?
CATHERINE VAUTRIN
Vous savez depuis la canicule de 2003 où nous avons beaucoup appris, nous avons mis en place des dispositifs avec bien évidemment une organisation qui est prête. Évidemment dans les établissements recevant des personnes âgées, dans les hôpitaux. On est prêt à accueillir nos concitoyens. Nous multiplions les messages de vigilance précisément pour éviter qu'il y ait des décès mortels. Il y a aussi quelque chose de très important qui sort, hasard du calendrier ou rendez-vous… Un décret sur les conditions de travail pour les employeurs.
ADRIEN GINDRE
On va en parler mais vous venez de dire quelque chose de très important. Vous dites "Nous sommes prêts". Hier Christophe PRUDHOMME qui est le porte-parole des médecins urgentistes disait chez nos confrères de LCI : "Les hôpitaux ne sont pas prêts". On est à l'os aujourd'hui. Est-ce que vous, vous avez la certitude, la conviction que vous pouvez ce matin affirmer à 100 % la présence de nos hôpitaux ?
CATHERINE VAUTRIN
Alors, moi, ce que je peux affirmer ce matin c'est que dès le mois d'avril nous avons mis en place les organisations pour la canicule. Que le 16 juin mon ministre auprès Yannick NEUDER a réuni l'ensemble des Agences régionales de santé. Nous avons fait également un suivi avec une conférence pas plus tard qu'hier. Vous avez vu que nous avons eu un comité interministériel de crise. Et tous les plans sont prêts à être déroulés. Quand l'hiver vous entendez parler du plan blanc quand il y a la grippe, nous avons le même principe quand il fait très chaud au sud.
ADRIEN GINDRE
Donc il y a des soignants en plus qui ont été rappelé ?
CATHERINE VAUTRIN
Il y a une organisation des services qui permet autant que de besoin de renforcer. Aujourd'hui, quand il n'y a pas de patients dans les lits ça n'est pas utile. Mais pour autant le plan est prêt de façon à ce que si nous avons besoin nous puissions monter en fonction des besoins de la population.
ADRIEN GINDRE
Alors parlons du travail. On va le prendre de manière très rapide…
CATHERINE VAUTRIN
Peut-être si vous me voulez bien on rappelle quand même que si on ne se sent pas bien, premier réflexe au médecin. Si on a un malaise, le 15. Ce sont des mesures extrêmement importantes que chacun doit avoir en tête.
ADRIEN GINDRE
Et vous disiez tout à l'heure chacun doit bien sûr être attentif à ses proches. Alors le travail on va le prendre de deux points de vue. Il y a le point de vue du salarié et le point de vue de l'employeur. Le point de vue du salarié d'abord. Est-ce qu'aujourd'hui on a le droit de ne pas aller travailler en raison de la chaleur ?
CATHERINE VAUTRIN
Alors vous savez que dans le droit du travail il y a ce qu'on appelle une disposition de droit commun. Qui fait que si vous considérez que ce que vous devez faire dans votre travail peut nuire à votre santé parce que les conditions de travail sont nocives. Vous devez prendre contact avec votre employeur et vous pouvez faire usage de ce que l'on appelle le droit de retrait. Ça, ça existe dans le droit du travail et c'est quelque chose qui s'applique parfaitement. Et puis il y a le décret que nous avons mis en place pour renforcer en fait l'action des employeurs qui doivent dans un contexte de forte chaleur comme aujourd'hui adapter d'une part les horaires. C'est particulièrement vrai pour tous ceux et toutes celles qui travaillent avec des activités très exposées au soleil. Je pense notamment aux bâtiments. Il y a également une adaptation des postes de travail y compris au sein de l'entreprise. Il peut y avoir des bureaux qui sont des bureaux totalement plein sud dans lesquels il fait extrêmement chaud.
ADRIEN GINDRE
Donc c'est extérieur comme intérieur.
CATHERINE VAUTRIN
C'est toutes les conditions de travail. C'est aussi des équipements parce qu'on sait qu'il y a des équipements qui peuvent permettre aux salariés d'avoir moins de difficultés avec la chaleur. Du style des maillots qui se mouillent, qui restent un peu mouillés pendant une heure quand vous travaillez dehors et qui donne un peu de fraîcheur. Et puis il y a évidemment l'obligation de fournir de l'eau. Ça c'est plutôt à l'extérieur. Quand vous êtes dans un endroit où il n'y a pas d'eau potable, l'employeur doit donner au moins trois litres d'eau fraîche par jour à ses salariés.
ADRIEN GINDRE
Si ce n'est pas fait, qu'est-ce qui se passe ?
CATHERINE VAUTRIN
Vous savez, il y a ce que l'on appelle les inspecteurs du travail qui sont des professionnels qui sont là pour à la fois aider les entreprises de façon à les conseiller, mais qui sont aussi là pour vérifier comment s'appliquent les conditions de travail.
ADRIEN GINDRE
Mais dès aujourd'hui ?
CATHERINE VAUTRIN
Mais tout le temps.
BRUCE TOUSSAINT
Madame VAUTRIN, est-ce qu'aujourd'hui il y a une sorte de recommandation de la part du Gouvernement, j'allais dire une recommandation de bon sens compte tenu de ces températures extrêmes pour les salariés ?
CATHERINE VAUTRIN
Mais Bruce TOUSSAINT, vous avez parfaitement raison. On a fait preuve de beaucoup de bon sens au moment du Covid. Quand on a des journées exceptionnelles comme aujourd'hui, c'est la même chose et on comprend parfaitement. Je vais prendre l'exemple qui parle à tout le monde qui est celui du bâtiment. On comprend très bien que dans le bâtiment c'est probablement plus facile de travailler de 6 h ou 5 h du matin jusqu'à peut-être 14 h ou même peut-être un peu moins et de s'arrêter parce qu'en pleine chaleur, ce n'est pas raisonnable. Vous avez tout à fait raison, c'est le bon sens de chacun qui est à l’œuvre. Mais c'est aussi la nécessité de se dire : "Je dois être vigilant. Je n'attends pas d'être assoiffé parce que si je suis assoiffé, je commence à me déshydrater" et ça c'est vraiment majeur.
ADRIEN GINDRE
Dans la manière dont on prépare ces épisodes, vous avez peut-être entendu Marine LE PEN et Éric CIOTTI qui disent qu'il faut un grand plan climatisation, notamment dans les hôpitaux, les écoles, les maisons de retraite, les transports publics qui, disent, qu'ils ne sont pas assez équipés. Est-ce qu'il faut le faire ?
CATHERINE VAUTRIN
Alors moi, je les entends, je dirais que le plan est beaucoup plus large que ça. C'est tout le sujet des îlots de fraîcheur dans nos villes, ce qui est un sujet absolument majeur. Nous avons déjà dans les maisons de retraite commencé, d'ailleurs c'est un des enseignements de la canicule, à mettre en place des pièces rafraîchies de façon à ce que les personnes âgées puissent y passer plusieurs heures. Mais le pays doit s'équiper. Moi je suis élue locale. Je peux vous dire qu'à chaque fois que nous construisons ou que nous réhabilitons une école, on a évidemment des réflexions sur la conception de l'école par rapport à la chaleur. Il y a vingt ans, on construisait plein sud pour ne pas payer le chauffage. Je peux vous dire qu'aujourd'hui, on regarde plutôt comment on se protège du soleil. Le réchauffement climatique a évidemment, c'est une certitude, on le voit bien, il y a donc aujourd'hui des nécessités d'adapter l'équipement de notre pays et ça c'est ce qu'on partage, l'État, les collectivités depuis la région jusqu'aux communes. Et je voudrais souligner d'ailleurs le travail des communes qui sont vraiment des partenaires, qui appellent les personnes âgées, qui font avec leur plan communauté de sauvegarde, c'est un sujet absolument majeur.
ADRIEN GINDRE
Sur la durée de cet épisode, on a entendu tout à l'heure Météo FRANCE dire la vigilance rouge sera reconduite demain. À combien de jours de canicule faut-il s'attendre ? Est-ce que demain sera le dernier jour de l'épisode ?
CATHERINE VAUTRIN
Écoutez, vous savez, moi je ne suis pas Météo FRANCE, donc je reste prudente. Mais de ce que nous savons à ce stade, la journée de demain devrait être difficile, après l'arrivée par la façade atlantique d'une période de rafraîchissement.
ADRIEN GINDRE
Un petit mot très rapide, il se trouve qu'aujourd'hui, autre hasard du calendrier, entrent en vigueur les nouveaux formulaires d'arrêt de travail. Qu'est-ce qui va changer ?
CATHERINE VAUTRIN
Ils deviennent infalsifiables. Le gros sujet des arrêts maladie, il y a deux mots, il y a arrêt et maladie. Et ce que nous constatons, c'est que nous avons 6 % d'augmentation par an d'arrêts maladie depuis 2019. Et si je compare janvier-avril 2024, janvier-avril 2025, plus 6,7 % avec des fraudes importantes. Dans un système comme le nôtre, basé sur, finalement, la solidarité intergénérationnelle, frauder, c'est trahir. On ne peut pas laisser frauder.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 9 juillet 2025