Interview de Mme Juliette Méadel, ministre déléguée, chargée de la ville, à France Info TV le 1er juillet 2025, sur la rénovation des bâtiments et le risque de motion de censure contre le gouvernement Bayrou.

Prononcé le 1er juillet 2025

Intervenant(s) : 

Média : France Info TV

Texte intégral

ALIX BOUILHAGUET
Bonjour Juliette MEADEL.

JULIETTE MEADEL
Bonjour.

ALIX BOUILHAGUET
Aujourd'hui, seize départements, dont le bassin parisien, ont basculé en vigilance rouge. Canicule, 68 resteront en vigilance orange. Un dôme de chaleur qui s'abat sur la France. Est-ce qu'on est prêt, notamment quand on vit en ville ?

JULIETTE MEADEL
On est prêt quand on a la chance de vivre dans les villes où les maires ont lancé les opérations un euro pour la piscine. C'est-à-dire que, par exemple, à Allonnes, le maire Gilles LEPROUST a déclenché cette opération hier. Ça ne vous coûtera qu'un euro pour aller à la piscine. D'autres, par exemple, Philippe RIO à Grigny, ouvrent les services publics avec des espaces plus climatisés pour tout le monde. Il y a des tas de choses qu'on doit faire. Et cette mobilisation, le Gouvernement est sur le pont. Vous voyez, tous les soirs, on est en réunion de crise. Les maires aussi, il y en a d'extraordinaires, prennent des mesures très utiles. Moi, je souhaiterais que ce type de mesures soit prise partout.

ALIX BOUILHAGUET
Le budget pour un plan de rénovation thermique des bâtiments, un plan pour végétaliser, peindre en blanc, faire circuler l'eau, a été totalement renié. Les spécialistes disent qu'il faut quarante ou cinquante milliards d'euros. Comment est-ce que la ville peut s'adapter ? Et puis, où trouver les sous quand on est en disette budgétaire ?

JULIETTE MEADEL
Mais les villes et les mairies, vous avez raison de le dire, n'ont pas forcément toujours des ressources. Mais quand même, en situation d'urgence, il y a des choses que l'on peut faire. Quand on ouvre, par exemple, les parcs et jardins, ce n'est pas une opération à quarante milliards. Quand on offre la piscine à des horaires parfois nocturnes, ce n'est pas une opération à quarante milliards. Et je vous le dis encore une fois, des maires le font. Le patron de VILLE & BANLIEUE, Gilles LEPROUST, le fait dans sa ville à Allonnes. Ce n'est pas une ville riche. C'est une question aussi de bonne gestion et d'anticipation des difficultés. Les pouvoirs publics, vous savez, c'est le Gouvernement, mais c'est aussi les élus locaux. Et beaucoup d'élus locaux font des choses remarquables. J'étais hier encore à Angers, où il y a des îlots de fraîcheur, des espaces verts, qui ont été précisément aménagés pour faire face à la canicule. Donc on peut agir et on est loin de l'impuissance.

ALIX BOUILHAGUET
Est-ce qu'il faut un grand plan climatisation ? C'est la nouvelle proposition faite par Marine LE PEN.

JULIETTE MEADEL
Écoutez, la climatisation, tout le monde sait très bien. Ce n'est pas la peine d'avoir un doctorat en écologie pour savoir que c'est très contre-productif, précisément en termes de coûts carbone. Donc un plan climatisation, c'est difficile. En revanche, il y a d'autres techniques. Il y a précisément des techniques de refroidissement, les îlots de fraîcheur qui sont construits dans les villes, précisément l'hydratation et puis la solidarité. Repérer les personnes les plus fragiles, nous ne sommes pas tous égaux face à la chaleur. Les personnes âgées, les personnes fragiles aujourd'hui sont repérées précisément par les mairies pour éviter qu'elles ne soient livrées elles-mêmes et que l'on revive le drame de la canicule que nous avions vécue en 2014.

ALIX BOUILHAGUET
Il y a un projet de loi transpartisane, qui est une proposition de loi signée par sept groupes parlementaires. Je ne sais pas si elle a déjà été déposée, mais qui vise à adapter les logements en forte chaleur. Elle vise notamment à intégrer le confort d'été dans les critères de décence obligés pour louer un logement. Ça, c'est une bonne chose ?

JULIETTE MEADEL
C'est une bonne chose à construire avec les bailleurs sociaux et avec tout le secteur de la construction immobilière. Vous savez, en ce moment, la construction ne va pas très fort. Donc il faut effectivement avoir des normes qui nous protègent de la chaleur et vérifier aussi quelle est la faisabilité sur le plan technique et économique.

ALIX BOUILHAGUET
Vous menez la guerre aux bailleurs sociaux pour un meilleur entretien des bâtiments. Ça fait aussi partie d'avoir des bâtiments plus performants et notamment en période de chaleur. Vous leur dites et vous leur avez dit : " Si vous n'êtes pas à la hauteur de cet entretien, de ces rénovations, il n'y aura pas de subvention à partir du 30 juillet ". C'est dans un mois, vous en êtes où ? Est-ce que vous avez repéré les mauvais coucheurs ?

JULIETTE MEADEL
Oui, d'abord j'ai repéré les mauvais coucheurs, mais ils sont très peu nombreux et ce que je veux vous dire, c'est que ce n'est pas du tout une guerre que je mène. C'est juste du bon pilotage ou de la bonne gestion de l'argent public. Et puis, vous savez, aménager des logements sociaux, les parties communes, tout ça, c'est l'affaire des bailleurs, des maires et de l'État. Je ne mène de guerre à personne. Je veux juste que les habitants des quartiers vivent dans de bonnes conditions. Et ça fonctionne très bien, puisque j'avais, au début du mois de mars, un bailleur social sur deux qui rencontrait des difficultés avec des problématiques de déchets, des problématiques aussi très très lourdes d'entretien et de sur-entretien qui n'étaient pas assurés par exemple dans les caves. Et aujourd'hui, il n'y a plus que 15% de difficultés qui ont été répertoriées par les services de l'État et les mairies. Donc ça progresse bien.

ALIX BOUILHAGUET
Donc ça veut dire qu'au 30 juillet, est-ce que vous allez enlever des subventions à certains bailleurs ?

JULIETTE MEADEL
Évidemment qu'il y a un risque. Aujourd'hui, je ne peux pas vous donner les copies finales, mais nous saurons à la fin du mois de juillet, quels sont les bailleurs sociaux qui n'ont pas fait les efforts qui étaient attendus et à quels endroits précisément la fameuse aide publique leur sera retirée. Vous savez, je veux quand même dire une chose, parce que je les vois tous les jours, je vis avec eux, les agents des bailleurs sociaux, ceux qui entretiennent, les gardiens, font un travail extraordinaire. Et ce n'est pas toujours facile. Regardez, en ce moment, on est en pleine canicule. Vous savez, entretenir les parties communes dans un quartier en pleine canicule, c'est difficile. Donc moi, je dis d'abord aux bailleurs, je vous soutiens, c'est de l'accompagnement renforcé, et les meilleurs seront évidemment mis en avant et ceux qui n'ont pas fait ce qu'il faut, évidemment, seront sanctionnés.

ALIX BOUILHAGUET
Cet après-midi, François BAYROU affronte une motion de censure. On voit que les socialistes l'ont lâché, que son conclave sur les retraites est un échec. Il s'y prend bien, François BAYROU, il a la bonne méthode ?

JULIETTE MEADEL
Pour moi, il a exactement la méthode qu'il faut, et je vous le dis vraiment en toute objectivité, parce que le pays, sur les retraites, le pays est bloqué.

ALIX BOUILHAGUET
Vous êtes sa ministre.

JULIETTE MEADEL
Bien sûr, mais je ne suis pas sa ministre pour rien, j'y suis parce que je crois dans le dialogue social et que je pense que la seule méthode, c'était de donner les clés aux partenaires sociaux. C'était une méthode risquée, et je suis d'ailleurs entrée dans son Gouvernement sur cet accord-là, sur le fait qu'il donnerait les clés aux partenaires sociaux. Qu'est-ce qu'on voit aujourd'hui ? On voit une CFDT qui a fait des efforts considérables, qui a été extrêmement constructive. Sur le MEDEF, je m'interroge, comment se fait-il que, alors que la proposition qui est faite par la CFDT semble raisonnable, la question de la pénibilité ne soit pas davantage intégrée ? Donc je m'interroge, que fait le MEDEF ? Moi, je souhaiterais, comme ministre qui croit dans la démocratie sociale, que les partenaires sociaux qui gèrent précisément les cotisations sociales, soient les décideurs de la réforme des retraites. Quand ils disent non, quand le MEDEF dit non, il bloque, donc il se sort du processus décisionnel. Je trouve que c'est un recul pour le pays en général.

ALIX BOUILHAGUET
Le pari de François BAYROU, c'était le pari inverse de celui de Michel BARNIER, c'était celui de faire alliance, en quelque sorte, avec les socialistes. Or, ce dimanche, François BAYROU s'est vanté, finalement, d'avoir pu gouverner pendant six mois sans les socialistes. Pourquoi est-ce qu'il n'a jamais considéré que quelque part, il était lié par une vraie obligation de discussion ?

JULIETTE MEADEL
Alors, là, je ne vous suis pas du tout. Le Premier ministre a énormément discuté avec le parti socialiste, et on est un certain nombre de ministres de gauche à avoir aussi discuté, pris notre part de ces discussions. Le dernier projet de la loi de finances pour 2025, elle est aussi le fruit d'une négociation où les 4 000 postes dans l'Éducation nationale, où le déremboursement d'un certain nombre de médicaments a été annulé, et où toute une série d'avances sociales…

ALIX BOUILHAGUET
Mais vous voyez bien que là, ça a déraillé. Les socialistes, ils ont lâché. Les socialistes, ils disent : " Aujourd'hui qu'on n'aura plus d'indulgence et qu'on veut que François BAYROU quitte Matignon ". C'est aussi clair que ça.

JULIETTE MEADEL
La ligne du parti socialiste d'aujourd'hui n'est pas tout à fait la même, ça ne vous a pas échappé, il y a un congrès qui est passé par là, que celle d'il y a six mois. Autant il y a six mois, on était dans une démarche constructive, autant aujourd'hui, on se demande quelle est la boussole du parti socialiste. La boussole du parti socialiste, ça devrait être de faire tenir le pays et de pousser pour que les partenaires sociaux se mettent d'accord. Je ne les entends pas.

ALIX BOUILHAGUET
Ce n'est pas le cas, et aujourd'hui, c'est encore le Rassemblement National qui fait la pluie le beau temps. François BAYROU est revenu exactement à la case départ, la case Michel BARNIER.

JULIETTE MEADEL
La case, c'est que les partenaires sociaux ont encore le dossier entre les mains. Il leur reste quand même quelques jours pour trouver une solution.

ALIX BOUILHAGUET
Ça, ce n'est pas de la méthode COUÉ ?

JULIETTE MEADEL
Vous savez, la politique de temps en temps, c'est aussi d'être obstiné. S'ils refusent de décider, c'est le Parlement qui décidera, mais au moins, on aura essayé, et je pense qu'ils ont encore une chance, ces partenaires sociaux, de faire la démonstration qu'ils savent être responsables pour le pays.

ALIX BOUILHAGUET
On entend votre appel. Merci à vous Juliette MEADEL.

JULIETTE MEADEL
Merci à vous.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 9 juillet 2025