Déclaration de M. Emmanuel Macron, président de la République, sur les relations entre la France et le Royaume-Uni, à Londres le 8 juillet 2025.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Visite d'État au Royaume-Uni : première journée ,Dîner d'État

Texte intégral

Your Majesties, your Royal Highnesses, your Excellencies, honourable ministers, my Lords, aldermen, sheriffs, chief commoner, ladies and gentlemen, dear friends.

Your words of welcome are an honour to my wife and myself and touch us deeply. I would now like to say how much I appreciate how you're welcoming us to Windsor, a sign of your great courtesy and a testament to your friendship with France. Could there be a better symbol of the longevity and solidity of your nation than this palace? Built long ago by the Normans as a fortress. It was put to its original use again during the Blitz, when it protected Princess Elizabeth and her younger sister, Margaret.

Et si vous me l'autorisez Votre Majesté, c'est à la Reine Elisabeth II que vont mes premières pensées ce soir. Les Français ont porté à votre mère, la Reine, une admiration et une affection authentiques, qui fut, je le crois, réciproque. Car elle parlait notre langue, comme vous, Sir, aimait notre culture, nos chevaux, et qu'aucun autre pays n'a eu le privilège de la recevoir aussi souvent que le nôtre. To you, she was your queen. To us, she was The queen. Permettez-moi d'ajouter que l'attachement de mes compatriotes s'adresse aussi à votre personne. Votre combat pour l'environnement et la biodiversité, au nord comme au sud de notre planète, votre détermination à valoriser la qualité des produits agricoles, votre résolution à défendre et renouveler les métiers et savoir-faire issus de la tradition, si utile, d'ailleurs, à la reconstruction de Notre-Dame, que vous venez d'évoquer, et, avant elle, à ce même château dans lequel nous nous trouvons, sont en France autant de motifs de plébiscite pour vos engagements.

Et sachez, Votre Majesté, que quand vous êtes monté à la Tribune européenne pour défendre les fromages au lait cru, vous avez définitivement gagné tous les cœurs français. Face à ceux qui préfèrent la fadeur aseptisée, à toute forme de prise de risque, à la table de leur repas comme à celle des nations, notre commune défense du Camembert ou du Roquefort devient le manifeste bactériologique, si je puis dire, d'une certaine idée de la civilisation. Plus sérieusement, c'est une " élégance, une constance, une habitude du cœur ", comme disait Tocqueville, que nous aimons en vous. Cette affection que nous portons à la couronne anglaise n'est pas le moindre des paradoxes d'un peuple français, je le rappelais tout à l'heure à Westminster, qui aime les monarchies sincèrement tant qu'elles sont chez les autres.

Votre ancêtre, la reine Victoria, a d'ailleurs toujours son portrait solennel dans un salon de l'Élysée, et l'avenue Georges V est une des plus belles de Paris. La profondeur des liens qui unissent nos peuples, sans équivalent dans l'histoire, est le fruit des siècles d'échanges, d'inspirations croisées, mais aussi d'alliances sans cesse bousculées, de rivalités sans cesse réinventées. Au fond, nous vivons comme dans un bon roman de Jane Austen, où les plus grandes hostilités révèlent en effet des attractions paradoxales. Miss Elizabeth Bennet passe des centaines de pages à se plaindre de l'arrogance de Mr Darcy, et vous savez comment finit le roman. Quant à nos deux peuples, nous avons été, au cours de l'histoire, des ennemis si fidèles, si dévoués, que nous ne pouvions pas ne pas devenir amis. Mieux, frères, par le sang, par l'espoir, par la gloire. L'épreuve des tranchées d'abord, le sacrifice des alliés, la résistance, ensuite, changèrent tout. Jamais la France n'oubliera que l'appel du Général de Gaulle, il y a 85 ans, galvanisait le courage de la résistance depuis les ondes de la BBC, et que rien n'aurait été possible sans la couronne, le cabinet de guerre de Winston Churchill et la ville de Londres qui lui donnèrent asile.

Cette fidélité à nos histoires intimement intriquées, cette disposition à se tenir debout et côte à côte quand nos valeurs, c'est-à-dire nos existences, sont menacées telle est la force de l'Alliance franco-britannique. Aujourd'hui encore, face à l'agression en Ukraine lancée par la Russie, face aux risques multiformes de déstabilisation de l'Europe, face à la crise au Moyen-Orient, nous sommes aux avant-postes de la défense de la sécurité de notre continent et de ses valeurs démocratiques. Ensemble, le Royaume-Uni et la France, puissances de paix et de progrès, ont la capacité d'entraîner les nations en Europe et ailleurs. À l'avant-veille du sommet franco-britannique, que nous tiendrons avec Monsieur le Premier ministre, je suis venu à Londres ambitieux et confiant pour l'avenir de notre relation.

People are the real wealth of nations. Et les 300 000 Français de notre côté de la Manche, les 150 000 Britanniques de notre côté sont la sève de cette relation et le rappel constant que nous ne devons jamais laisser la Manche s'élargir entre nous, car c'est bien notre richesse que cette densité de liens d'investissement, d'entreprenariat, de recherche, de science, d'éducation, de création. Sans oublier cette amicale rivalité sportive qui nous a réunis l'été dernier encore lors des Jeux olympiques et des Jeux paralympiques. Et je dois avouer qu'un des plus grands compliments qu'on nous ait fait fut de nous dire que les Jeux de Paris 2024 étaient à la hauteur des très beaux Jeux de Londres de 2012. D'autres compétitions mettront prochainement aux prises nos athlètes, la Coupe du monde de rugby féminin, qui sera organisée en Angleterre le mois prochain, et en 2027, le Grand départ Grande-Bretagne du Tour de France et du Tour de France femmes, qui passera par les nations écossaise, galloise et anglaise.

Et je voudrais annoncer ce soir, je l'ai évoqué cet après-midi à Westminster, en ce lieu, un projet longuement mûri, dont vous m'avez souvent reparlé, sur lequel, à plusieurs reprises, vous m'avez écrit. Nous avons décidé, en effet, de conclure un débat qui dure depuis au fond 70 ans, et de prêter à la Grande-Bretagne un joyau emblématique de notre histoire, la tapisserie de Bayeux. Cette tapisserie, que le mystère des siècles a appelée ainsi alors qu'il s'agit en fait d'une broderie, est le récit de la conquête de l'Angleterre, brodée en effet point par point par les femmes normandes du XIe siècle. D'aucuns prétendent que ce fut, en fait, plutôt brodé de votre côté de la Manche, mais je laisserai les spécialistes revenir sur la controverse. Mais c'est une véritable bande dessinée d'étoffe rapportant l'épopée du Duc Guillaume le Conquérant, ce même Guillaume de Normandie qui posa les fondations du palais où nous nous trouvons ce soir. And according to the Norman historical chronicles, the crown of England was granted to Duke William by his cousin, King Edward the Confessor. And when Duke William saw the throne occupied by the anglo-saxon earl Harold, he decided to take it back from the man he considered as a traitor. This makes the tapestry not only the story of a military saga, but a spiritual world that depicts punishment of perjury. No spoiler alert needed. You can soon discover the rest of the story yourself on the walls of the British museum.

And for the first time in 900 years, the Bayeux tapestry will follow the same path as the warriors whose stories it tells and land on British soil. Either they were never made or they were lost, but the final scenes of the tapestry are missing. I see that as even more powerful symbol. In the great mural of franco-british history, the end has yet to be written, so it is up to us to do it. Yes, our story is built on these conquests and these rivalries. That is the beauty of our unique relationship. And when our museums talk to each other, when your Poppies bloom among our Bleuets, when Paddington travels to France and Asterix to Britain, when British humour and French irony converge, when our common sense and sensibility overcome our pride and prejudice, we are unstoppable. And when we come together around one table, then everything is possible.

Churchill wrote in his notes as he prepared food supplies for his troops this wise political maxim: “the stomach governs the world” Honor where honor is due. I would like to end my toast first of all, your Majesty, to say that now you created the “entente amicale” and this “entente amicale” will be launched in Windsor in 2025 and we want to believe in this new era. And I would like to end my toast by raising my glass in honor of your Majesty, of her Majesty Queen Camilla and your family. I raise it in honor of the United Kingdom of this “entente amicale” that unites our two fraternal peoples in an unwavering alliance.

Long live the United Kingdom of Great Britain and Northern Ireland. Long live France. Long live Franco British friendship.