Texte intégral
En ce moment de turbulences géopolitiques et économiques, le Conseil européen de jeudi a permis de continuer à promouvoir la priorité de la France depuis le discours de la Sorbonne en 2017, à savoir la construction d'une Europe plus forte, plus unie et plus souveraine. Cet objectif transparaît des sujets prioritairement discutés par le Conseil européen.
Nous avons d'abord abordé les questions géopolitiques en rappelant notre soutien à l'Ukraine, alors même que la Russie intensifie les bombardements contre les civils et les infrastructures de ce pays. Nous devons non seulement poursuivre notre soutien économique et militaire à l'Ukraine, en accélérant notamment le décaissement du prêt dit ERA financé par les intérêts générés par les avoirs gelés de la Russie en Europe, mais également continuer de faire monter la pression sur la Russie. Nous sommes proches de la finalisation d'un dix-huitième paquet de sanctions, qui frappera en particulier le secteur énergétique de la Russie par le biais d'un embargo sur le pétrole brut et les produits pétroliers raffinés, d'un abaissement du prix plafond de ces produits ainsi que d'un renforcement de la lutte contre la flotte fantôme qui permet à la Russie de contourner ces sanctions en mer Baltique et en mer du Nord.
Nous avons aussi eu l'occasion d'évoquer le Moyen-Orient et de rappeler la position de la France : la demande d'un cessez-le-feu à Gaza, de la libération inconditionnelle de tous les otages, d'un accès à l'aide humanitaire pour les civils présents à Gaza et d'une relance du dialogue politique susceptible de mener à une solution à deux États. C'est tout le but de l'initiative diplomatique lancée par la France, avec l'Arabie Saoudite, pour engager une dynamique de reconnaissance mutuelle entre Israéliens, Palestiniens et habitants de la région.
S'agissant de l'Iran, notre position est très claire : ce pays ne doit pas se doter de l'arme nucléaire. À nous, Européens, d'accompagner les efforts diplomatiques en cours, comme nous l'avons fait ces vingt dernières années, pour aboutir par la négociation à un cadre de sécurité durable permettant le désarmement de l'Iran, avec le soutien de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) et de nos partenaires.
Nous avons aussi abordé les questions économiques, avec l'ambition de renforcer la compétitivité du continent européen, soumis à une pression commerciale exercée par nos partenaires et concurrents. Il y a un an, le rapport Draghi a souligné le risque de décrochage industriel, économique et technologique de l'Europe par rapport aux Šefčovičtats-Unis et à la Chine. Nous avons besoin de simplifier nos textes réglementaires, d'unifier davantage le marché unique - notamment par l'Union de l'épargne et des investissements, que la Commission européenne doit commencer à mettre en oeuvre dans les prochains mois - et de poursuivre notre effort de décarbonation avec pragmatisme afin de ménager la compétitivité de nos entreprises.
Nous avons bien sûr parlé de défense. Les instruments européens existants dans ce domaine ont été renforcés ces dernières semaines. Je pense notamment à l'adoption du règlement européen portant création de l'instrument Safe, dans le cadre duquel la Commission européenne contractera des prêts, à hauteur de 150 milliards d'euros, pour financer des investissements communs visant à renforcer une base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE) autonome. Dans certains domaines comme le cyber, les drones, les frappes en profondeur et les satellites, nous sommes en effet dépendants de nos partenaires, notamment américains - il suffit de voir le rôle que joue Starlink en Ukraine. Ces 150 milliards seront utilisés en respectant un principe très clair, celui de la préférence européenne, qui est toujours défendue par la France quand il s'agit d'instruments de défense et qui constituera un critère d'éligibilité pour obtenir les financements. Ce même principe de soutien à notre industrie de défense nous guide aussi dans les négociations en cours sur l'instrument Edip, doté de 1,5 milliard d'euros, qui constituera un précédent très important pour l'avenir.
Le Conseil européen a aussi été l'occasion d'évoquer les sujets migratoires. En la matière, nos priorités sont la mise en oeuvre rapide du pacte sur la migration et l'asile, qui permettra notamment une première sélection des demandeurs d'asile aux frontières extérieures de l'Union européenne, et le renforcement des outils européens visant à maîtriser nos frontières communes. Je pense par exemple à la proposition de règlement "retour", qui doit permettre de mieux expulser à l'échelle des Vingt-sept, ainsi qu'à des instruments un peu plus éloignés des questions migratoires tels que la conditionnalité pour l'octroi des visas, l'aide au développement, ou encore les accords commerciaux, qui permettent d'instaurer un rapport de force avec les pays de transit et de départ. Là encore, il s'agit de mettre en avant le poids des Vingt-sept et la force du marché unique pour défendre nos intérêts collectifs et le droit international.
Enfin, nous avons abordé les questions commerciales, qui sont au coeur de l'actualité. À ce sujet, nous avons défendu une position très claire : l'Union européenne ne peut pas accepter un accord asymétrique avec les États-Unis. Il s'agit là d'un test de crédibilité géopolitique pour les Européens. Les droits de douane imposés par l'administration américaine sont totalement injustifiés et ne reposent pas sur une analyse crédible des relations commerciales entre les États-Unis et l'Europe. Les chiffres mis en avant par les Américains n'incluent pas les services, alors que nous sommes nous-mêmes importateurs et consommateurs de services américains, notamment numériques.
En ce moment même, une négociation est menée par la Commission européenne, sous l'égide du commissaire Šefčovič. Nous cherchons tous la désescalade : l'objectif est de revenir à une situation qui bénéficie à tous, sans gagnants ni perdants. Jeudi soir, lors de sa conférence de presse à l'issue du Conseil européen, le président de la République a rappelé que nous n'accepterions pas une situation asymétrique. Ainsi, si les États-Unis imposent des droits horizontaux de 10% sur tous les biens qu'ils importent, nous devrons réagir, soit en activant les contre-mesures dont discutent actuellement la Commission européenne et les Šefčovičtats membres, soit en imposant nous-mêmes des droits de douane réciproques de 10 %.
Encore une fois, au-delà de la question commerciale, il s'agit d'un test pour l'Europe, qui doit montrer sa capacité à défendre ses intérêts, sa souveraineté et son modèle. C'est cette même exigence qui justifie notre position sur tous les sujets.
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R - Nous n'augmentons pas notre budget de défense parce que quelqu'un d'autre nous le demande.
Fondamentalement, nous vivons dans un environnement plus conflictuel, plus dangereux : la Russie mène à nos portes une guerre d'agression contre l'Ukraine et fait peser une menace sur toutes les démocraties en conduisant des attaques cyber contre nos infrastructures, des sabotages et des opérations d'ingérence comme celles que nous avons pu observer en Roumanie, en Moldavie et même dans notre propre pays. Ce faisant, la Russie met en péril toute l'architecture de sécurité européenne. À cela s'ajoutent d'autres menaces que nous connaissons depuis de nombreuses années, telles que le terrorisme et l'instabilité à nos frontières.
Se pose aussi la question de l'avenir de la garantie de sécurité américaine et de la relation transatlantique à plus long terme. Bien avant l'entrée en fonction de l'administration Trump, on voyait déjà, sous l'administration Obama, le regard des Américains dévier vers l'Asie, tandis que les Européens étaient accusés de se comporter comme des passagers clandestins et que rien n'était entrepris pour faire respecter la ligne rouge en Syrie.
Tout cela nous pousse à réarmer et à prendre notre indépendance. Ainsi, pendant les deux mandats d'Emmanuel Macron, nous avons doublé le budget militaire de la France. Nous devrons continuer dans cette voie, car il s'agit là d'un effort générationnel, tant en augmentant nos budgets nationaux de défense qu'en favorisant l'émergence d'une industrie de défense européenne autonome, c'est-à-dire qui ne dépende pas des autres, en particulier des Américains. C'est tout le but des instruments développés en ce moment, sous l'impulsion de la France, tels que Safe, Edip ou d'autres dont nous pourrons discuter lors des négociations du prochain cadre financier pluriannuel européen (CFP) : ils visent à renforcer les coopérations industrielles et à diminuer notre dépendance à des partenaires extérieurs, que ce soit en matière d'usage, de technologie ou de règles d'exportation, dans tous les domaines que j'ai évoqués tout à l'heure - cyber, drones, frappes en profondeur, etc.
La souveraineté et l'indépendance ne se décrètent pas. Elles se construisent patiemment en agissant pour améliorer notre compétitivité, en soutenant nos entrepreneurs, ceux qui innovent et qui prennent des risques, en approfondissant notre marché unique, en simplifiant nos règles et en investissant massivement dans la défense du continent européen. C'est ce que nous faisons progressivement, loin des incantations et des grands discours, pour construire une Europe plus autonome, capable de défendre ses intérêts et son modèle sans dépendre des autres. C'est cela, la voix de la France.
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R - Vous l'avez dit, la Commission européenne a annoncé la possibilité d'exclure certaines dépenses relatives à la défense nationale du champ des dépenses prises en compte dans les calculs du déficit excessif. Il s'agit de donner plus de respiration et de marges de manoeuvre fiscales aux États qui souhaitent investir dans ce domaine. C'est aussi l'objet du programme Safe, qui permet aux pays européens d'emprunter à des taux préférentiels. La France, qui doit montrer l'exemple, utilisera cet instrument, comme beaucoup de ses partenaires.
Il faut aussi mobiliser les institutions financières, telles que la Banque européenne d'investissement (BEI), dont nous avons modifié le mandat. Cette institution doit maintenant prendre ses responsabilités et soutenir le secteur de la défense, que les entreprises soient duales ou non. De même, il faut utiliser au maximum tous les instruments créés par l'Union européenne en matière d'investissement et d'innovation - je pense notamment à l'European Innovation Council. J'en appelle à la mise en commun de l'argent public, qui peut servir de levier pour les acteurs privés tels que les PME et les start-up, qui ont besoin de fonds propres pour se développer.
La question des ressources propres sera fondamentale dans le débat sur le prochain CFP. J'ai eu l'occasion d'échanger à plusieurs reprises avec le commissaire européen Serafin, qui a formulé certaines propositions qu'il dévoilera lors de la présentation de la première architecture du CFP, dans les deux prochaines semaines, et que nous soutiendrons. L'idée est de réfléchir à la façon de taxer des entreprises ou même des particuliers étrangers qui arriveraient en Europe - je pense notamment à l'instauration d'une autorisation de voyage européenne sur le modèle de l'Esta américain, à la création d'une taxe sur les petits colis, ou encore, bien sûr, à la taxation des services numériques défendue par la France. La taxe sur les hauts revenus, que vous avez évoquée, ne fait pas partie des pistes de réflexion suivies au niveau européen, mais elle est discutée dans le cadre du G20. Quoi qu'il en soit, nous devons poursuivre la réflexion sur les ressources propres de l'Union, par exemple sur le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF), afin de commencer à réduire la contribution des États membres - à ce propos, nous nous attendons à un ressaut du prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne dès cette année, compte tenu du retard de décaissement des fonds de cohésion - et à rembourser l'emprunt NextGenerationEU.
Nous sommes toujours très mobilisés sur la question des prisonniers de guerre. Dans une dizaine de jours, à Rome, les ministres Jean-Noël Barrot et Laurent Saint-Martin participeront à une conférence internationale sur la reconstruction de l'Ukraine, au cours de laquelle ce sujet sera évoqué.
S'agissant de la situation à Gaza, j'ai rappelé la position de la France, que l'on retrouve dans les conclusions du Conseil européen. J'ajoute que la Commission européenne a lancé une étude sur le respect, ou non, par Israël de l'article 2 de l'accord d'association entre ce pays et l'Union européenne, qui traite de la question des droits humains. La haute représentante Kaja Kallas rendra ses conclusions mi-juillet : ce sera l'occasion, pour les États membres, de débattre des prochaines étapes.
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R - Le Conseil européen, dans ses conclusions, s'est félicité du fait que la BEI ait modifié son mandat et commencé à financer des projets de défense. Il faut à présent aller plus loin, s'agissant d'un secteur qui, historiquement, a un peu souffert d'une mauvaise réputation auprès des investisseurs pour des raisons de normes éthiques. Il était très compliqué, notamment pour les PME et les start-up, de se financer auprès des fonds de pension, des fonds d'investissement et des fonds de capital-risque. Nous avons besoin de cet écosystème. Il incombe à nos investisseurs institutionnels de jouer un rôle moteur pour entraîner des financements privés.
Il ne m'appartient pas de dresser la liste des priorités au sein du secteur de la défense, d'autant qu'elles sont connues. J'en mentionnerai une, qui est un peu le parent pauvre du débat, alors même qu'elle est, comme l'a rappelé le président de la République au Bourget, un instrument de souveraineté fondamental : le spatial.
Compte tenu du risque de dépendance auquel nous expose la concurrence des acteurs privés américains, au premier rang desquels SpaceX et Starlink, il faut investir dans les petits lanceurs et les constellations de satellites, notamment en orbite basse, dans le cadre du projet LEO-PNT, et se donner vraiment les moyens de déployer Iris2 dans les temps pour offrir des solutions européennes souveraines. Nous avons réussi à le faire avec Galileo, qui équipe nos iPhones : il n'y a donc aucune fatalité. Il est fondamental que nous soyons au rendez-vous de cette course, ce qui suppose de soutenir tant nos PME que nos grands acteurs industriels comme ArianeGroup et Eutelsat.
Pour ce faire, il faut promouvoir la préférence européenne, dans le cadre d'Edip, de Safe et du prochain CFP, qui sera l'occasion de rehausser considérablement nos ambitions dans la défense et le spatial. Nous défendons toujours l'adoption de critères d'éligibilité pour renforcer la préférence européenne. C'est un enjeu non seulement pour nos industriels, qui ont besoin de visibilité pour embaucher, ouvrir des usines et investir, mais aussi pour la réduction de nos dépendances en matière de normes d'usage, d'exportations et de maîtrise du savoir-faire technologique. C'est vraiment une question d'autonomie stratégique.
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R - En matière d'accès au financement, les institutions financières ont un rôle à jouer, mais nous avons, en France, fait évoluer progressivement la culture sur ce point, ce qui a eu pour effet d'augmenter le nombre d'appels d'offres destinés aux PME et aux start-up, notamment dans l'intelligence artificielle et le quantique. Les acteurs de ces secteurs ne nous demandent pas des subventions ou des dons, mais de la commande publique, ce qui leur permet aussi de commencer à alimenter leur historique et d'acquérir une crédibilité. Nous avons changé d'état d'esprit ; nos partenaires et la Commission européenne doivent en faire autant.
Les instruments comme Safe inciteront les pays européens à travailler ensemble. Certains ont de gros acteurs industriels, qui peuvent monter des projets avec d'autres, mais ils seront aussi encouragés à travailler avec de plus petites entreprises, par exemple des pays baltes ou d'Ukraine - un pays d'ailleurs explicitement mentionné dans le programme Safe et qui a montré de réelles capacités d'innovation, notamment dans le secteur des drones, ce qui représente de véritables opportunités de coopération pour nos entreprises et nos industries.
Mobilité militaire et recours aux fonds de cohésion sont liés. La révision à mi-parcours de la politique de cohésion a introduit une flexibilité en matière de préfinancement, au profit notamment du secteur de la défense. Pour ma part, je ne vois aucune contradiction entre la cohésion de nos territoires et l'investissement dans la sécurité et la défense - au contraire ! Plusieurs présidents de région se sont emparés du sujet. Le secteur de la défense offre des opportunités à nos industries et permet de renforcer l'emploi ainsi que la compétitivité de nos territoires. Quant à la mobilité militaire, elle exige des projets d'infrastructures territoriaux qui peuvent être financés par les fonds de cohésion.
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R - Monsieur Dessigny, votre propos confus et laborieux recèle de nombreuses contradictions. Vous reprochez à l'Union européenne de ne pas s'ouvrir davantage à des partenaires externes pour le commerce international, mais vous êtes les premiers à vous opposer à tous les accords commerciaux négociés tant par la France que par l'Union européenne. Nous continuerons à diversifier les partenariats, sans jamais cesser - la France n'a jamais dit autre chose - de protéger nos intérêts, notamment ceux de nos entreprises et de nos agriculteurs, et de garantir la réciprocité des normes et des standards.
Nous ne signons rien de façon "précipitée" - je suis un peu surpris d'entendre ce mot dans votre bouche. Nous sommes conscients, par exemple, du risque de déversement en Europe de produits chinois forclos du marché américain et des risques afférents pour nos industries. Nous devons parvenir à une position équilibrée, tout en parlant à tout le monde et en multipliant les échanges avec les uns et les autres.
Vous nous reprochez de ne pas être dans le club de ceux qui défendent des solutions européennes en matière d'immigration, alors même que votre formation politique s'est opposée au pacte sur la migration et l'asile, que soutiennent les pays membres du rassemblement dont vous parlez. Je pense notamment à l'Italie de votre amie Mme Meloni, qui demande au contraire la mise en oeuvre et le renforcement des outils européens en la matière ; elle obtient des résultats grâce à la coopération européenne, et non en adoptant des solutions nationales ni en recourant à l'externalisation de la gestion des flux migratoires en Albanie, par exemple, comme vous le répétez souvent.
Telle est la voix que nous portons avec nos partenaires en plaidant pour la mise en oeuvre du pacte sur la migration et l'asile, l'accroissement des capacités d'expulsion dans le cadre de la proposition de règlement "retour" et le renforcement des instruments externes tels que la conditionnalité des visas, l'aide au développement et les accords commerciaux. À un moment donné, vous devrez choisir entre une position nationale, sans instruments européens, et la voix que porte la France en Europe, qui consiste à dire que nous avons besoin de ces outils pour protéger nos concitoyens, maîtriser nos frontières et lutter contre l'immigration illégale. Sur ce sujet, il faut faire preuve d'un minimum de cohérence.
Madame Le Grip, BITD euro-atlantique et BITD européenne ne sont pas forcément contradictoires. Toutes deux produisent aux standards Otan afin d'assurer l'interopérabilité des armées. Lorsque nous investissons en Européens, nous nous y conformons. Ce qui compte, c'est que les instruments européens, financés par le contribuable européen, soutiennent la BITDE. Quant à ce que font les États membres avec leur budget propre, cela relève de leur souveraineté...
Le programme Safe a ceci de remarquable que, tout en étant utilisé par les États membres, il inclut des critères de préférence européenne. Cela démontre que beaucoup de nos partenaires européens ont évolué et s'inquiètent eux aussi de notre dépendance en matière d'usage - bien illustrée par le bridage des frappes en profondeur en Russie - et d'exportation des armements, notamment dans le cadre de la réglementation américaine de contrôle des exportations en matière de défense (Itar). Le Lituanien Andrius Kubilius, commissaire européen à la défense, a soulevé la question à plusieurs reprises. Si nos partenaires européens sont les héritiers de cultures diverses à ce sujet, ils sont de plus en plus nombreux à rejoindre notre position.
S'agissant des directives CSRD et CS3D, notre objectif est de poursuivre la décarbonation de notre continent, mais avec pragmatisme, en accompagnant les acteurs économiques et non en renforçant la concurrence américaine ou chinoise. Nous avons décrété une pause pour simplifier ces textes, réduire le nombre d'indicateurs - passé d'un millier à environ 200 pour ce qui concerne la directive CS3D - et relever le seuil des entreprises assujetties, au profit des PME et ETI, afin que ces dispositions s'appliquent pour l'essentiel aux grands groupes, qui ont les moyens de publier les informations demandées.
S'agissant enfin des négociations tarifaires, monsieur Sother, la Commission européenne a été très claire : les réglementations numériques européennes relèvent de notre État de droit, donc de notre souveraineté, et il n'est pas question de les intégrer dans une négociation avec les Américains. La conformité au règlement sur les services numériques (DSA) et au règlement sur les marchés numériques (DMA) est une ligne rouge. Sur le plan quantitatif, nous n'accepterons aucun accord asymétrique.
Si, par exemple, les États-Unis maintiennent des droits horizontaux de 10%, nous serons dans notre bon droit si nous répliquons en appliquant les contre-mesures élaborées par la Commission.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 juillet 2025