Interview de Mme Annie Genevard, ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire, à Ici Radio Besancon le 15 octobre 2025, sur la suspension de la réforme des retraites, sa présence au gouvernement et la dermatose nodulaire contagieuse bovine.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Annie Genevard - Ministre de l'agriculture, de l'agro-alimentaire et de la souveraineté alimentaire

Texte intégral

JOURNALISTE
7 h 47 La ministre Franc-Comtoise de l'Agriculture, Annie GENEVARD, est l'invitée d'ici matin, au lendemain du discours de politique générale du Premier ministre, Sébastien LECORNU, qui propose de suspendre la réforme des retraites.

MARION STREICHER
Bonjour, Annie GENEVARD,

ANNIE GENEVARD
Bonjour,

MARION STREICHER
Vous avez défendu cette réforme des retraites adoptée en 2023. Selon vous, Sébastien LECORNU a-t-il fait le bon choix ?

ANNIE GENEVARD
Eh bien, je l'ai défendu et je pense, je continue de penser qu'une réforme du système de nos retraites est indispensable pour assurer sa durabilité et son maintien. La France est très attachée à la retraite par répartition, mais sans doute faudra-t-il apporter des modifications pour sauver notre système de retraite et aussi pour l'améliorer par rapport à la pénibilité et la retraite des femmes. Le Premier ministre, compte tenu de la situation politique de notre pays, compte tenu de la censure du Rassemblement national et de la France insoumise, a bien été conduit à remettre cette question dans le débat public. Cela dit, suspension ne veut pas dire abrogation. Dès les prochaines semaines, il y aura une conférence sociale sur les retraites et le travail…

MARION STREICHER
Et d'en discuter.

ANNIE GENEVARD
Qui examinera cette question. Et si elle est conclusive, eh bien, il y aura une transposition dans la loi, sinon, ce sera le débat de la prochaine présidentielle.

MARION STREICHER
Mais, madame GENEVARD, cette suspension, c'est un gage au PS qui l'a réclamé en échange d'un vote, donc, de non-censure. " Une décision incompréhensible ", ce sont les mots de Bruno RETAILLEAU, patron du parti LR, qui accuse Sébastien LECORNU, lui, d'être l'otage des socialistes. Est-ce que vous partagez son point de vue ?

ANNIE GENEVARD
La suspension est moins coûteuse pour les finances publiques et pour l'économie du pays que la censure et la dissolution. Le rapport est de 1 à 3. Bien sûr, cette suspension a un coût et elle aura un coût de deux, trois milliards. Mais la dernière censure, je vous rappelle que depuis un an, je suis au ministère depuis un peu plus d'un an. Censure, les trois gouvernements qui sont tombés. Chaque fois, c'est de l'incertitude, de l'instabilité politique, économique. La France se met en danger vis à vis des marchés financiers. Donc, il nous faut absolument retrouver de la stabilité.

MARION STREICHER
L'instabilité, vous dites, excusez-moi, je vous coupe. Vous dites " Ça suffit ". C'est bien ce qu'il faut comprendre.

ANNIE GENEVARD
Je pense qu'il est indispensable de redonner à notre pays de la stabilité. Du reste, les Français sont épuisés par le spectacle que donnent les querelles politiques. Le monde économique, les entreprises, les petites entreprises, les commerçants, les artisans sont très inquiets parce que, comme toujours, quand il y a de l'instabilité, il n y a pas de visibilité et ce sont moins d'investissement dans les entreprises, moins de recrutement, moins d'emplois. Donc, il faut absolument stabiliser le bateau. Et je rappelle que de toute façon, nous n'échapperons pas à une réforme des retraites étant donné le nombre croissant des retraités et le nombre, sans cesse diminué, des cotisants. Donc, c'est un sujet qui reste complètement devant nous et ça sera le rôle de la conférence sociale des travaillés.

MARION STREICHER
Annie GENEVARD. Vous êtes une figure du parti Les Républicains. Vous avez accepté votre reconduction dans ce Gouvernement LECORNU 2, contre la décision du bureau politique de votre parti. Pour quelles raisons ?

ANNIE GENEVARD
J'ai fait ce choix difficile, en responsabilité, en conscience et finalement par devoir. J'ai été sollicitée par le Premier ministre, par les agriculteurs, pour rester en responsabilité. Et c'est le sens de la décision que j'ai prise. Le monde agricole est un monde qui connaît, en permanence, des difficultés. Et c'est une question de loyauté à mes engagements, mes convictions, question de loyauté à l'égard des agriculteurs. Il y a des crises, il y a des enjeux considérables à venir avec la PAC, avec le changement climatique. Le capitaine ne quitte pas le navire en pleine tempête.

MARION STREICHER
Mais du coup, pas de loyauté envers votre parti ?

ANNIE GENEVARD
Alors, je reste évidemment attachée à mon parti.

MARION STREICHER
Vous en êtes exclue aujourd'hui ? Suspendue ?

ANNIE GENEVARD
Non, il n'y a pas d'exclusion, il n'y a pas de suspension. Je ne sais pas du tout ce qui sera décidé.

MARION STREICHER
Donc, vous ne savez pas, vous-même, si vous êtes ministre LR ou pas ? Est-ce que vous avez encore cette étiquette finalement ?

ANNIE GENEVARD
Mais bien sûr, j'ai toujours cette étiquette et je souhaite la garder. Vous savez, ça fait 30 ans que je suis engagée dans ma formation politique, je ne lui ai jamais fait défaut. Et je rappelle que les Républicains ont décidé d'apporter leur soutien au Gouvernement. Mais texte par texte, la seule question qui s'est posée, c'est la question de la participation au Gouvernement. Moi, je vous ai expliqué pourquoi vis-à-vis du monde agricole auquel je demeure, évidemment, très fidèle. C'est ce qui a motivé mon choix. Quelques fois, on est placé devant des cas de conscience. C'est un cas de conscience. Donc, en conscience, j'ai décidé de rester. Le courage parfois, c'est de rester quand tout invite à partir. Je vais prendre des risques en acceptant de rester. Je savais que je prenais un risque, mais j'ai mon parti. Mais mon utilité, aujourd'hui, est plus grande à la tête du ministère de l'Agriculture.

MARION STREICHER
Justement, Annie GENEVARD, vous êtes ministre de l'Agriculture. Il y a beaucoup de dossiers sur votre bureau. Nous n'en évoquerons qu'un, la dermatose nodulaire contagieuse qui touche la Franche-Comté. Deux foyers à Ecleux, ce petit village du Nord-Jura. Suspicion d'un troisième foyer ou confirmation ce matin ? Quelles sont les dernières informations que vous avez à ce sujet ?

ANNIE GENEVARD
Je vais aller dans le Jura ce vendredi. Nous avons effectivement l'apparition de la dermatose nodulaire contagieuse bovine dans le Jura. C'est une maladie animale extrêmement grave qui est classée, au niveau européen, parmi les plus graves risques sanitaires pour le cheptel bovin. Cette affaire, je la gère au jour le jour. Chaque jour, il y a un travail de ma part, en direct, qui est fait par rapport à la lutte contre la dermatose, et ce depuis le 29 juin.

MARION STREICHER
C'est ce que vous dites aux éleveurs qui nous écoutent, aux éleveurs d'Ecleux notamment. Ces deux éleveurs qui voient leur cheptel décimer.

ANNIE GENEVARD
Je dis aux éleveurs d'Ecleux que d'abord, ils ont évidemment toute ma sympathie parce que ce qu'ils vivent est très difficile, très douloureux. Je mesure pleinement le traumatisme que représente le dépeuplement d'un cheptel touché par la dermatose. C'est la raison pour laquelle je vais aller dans le Jura les rencontrer. Cette maladie, nous savons la gérer désormais. Vous voyez, j'avais quitté le ministère. Un nouveau ministre, un nouveau cabinet, du temps pour connaître les dossiers, pour s'adapter. Moi, je suis au travail immédiatement en responsabilité pour gérer tout ce qu'il y a.


source : Service d'information du Gouvernement, le 16 octobre 2025