Interview de M. Philippe Tabarot, ministre des transports, à France 2 le 28 octobre 2025, sur les problèmes concernant la circulation des trains et la sûreté dans les transports publics.

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Média : France 2

Texte intégral

GILLES BORNSTEIN
Bonjour à tous, bonjour Philippe TABAROT. Tout est rentré dans l'ordre ce matin à la SNCF. Les trains circulent. Concernant la piste privilégiée, on parle de l'ultra gauche. Est-ce que vous confirmez ?

PHILIPPE TABAROT
Il y a eu trois phénomènes qui se sont déroulés ces 36 dernières heures sur le réseau ferroviaire français. À la fois une panne d'alimentation entre Bordeaux et Toulouse, qui est probablement due à la vétusté de notre réseau ferroviaire qui a besoin d'investissement. C'est la raison pour laquelle je me bats depuis un certain nombre d'années pour qu'on monte le niveau d'investissement qui est d'environ 3,2 milliards aujourd'hui, à 4,5 milliards demain, notamment avec les mannes des autoroutes dont les échéances se termineront très bientôt.

GILLES BORNSTEIN
Ce n'était pas tout-à-fait ma question.

PHILIPPE TABAROT
Deuxième aspect, on y vient, puisqu'il y a eu beaucoup de problèmes sur le réseau hier, comme vous avez pu le constater, et j'ai, avant tout, une pensée pour toutes les personnes qui ont été impactées dans cette période, notamment de vacances scolaires. Le deuxième point, ça a été du vol de cuivre, comme on en a très régulièrement également sur le réseau et autour de Bollène qui a posé un certain nombre de problèmes. C'est près de 10 000 intrusions sur le réseau que nous avons tout au long de l'année. Et le troisième événement, ce sont ces trois événements qui ont créé cette pagaille. C'est un incendie volontaire qui s'est déroulé au sud de Valence. L'ultra gauche, écoutez, c'est une des pistes. Le procureur aura l'occasion…

GILLES BORNSTEIN
Une des pistes ou la piste privilégiée ?

PHILIPPE TABAROT
Écoutez, c'est au procureur de le dire, c'est au garde des Sceaux, ministre de l'Intérieur. Ce que je sais, c'est qu'il y a eu des conséquences qui ont été très fortes. C'est vrai que depuis un certain nombre de mois, certains opposants à des projets, notamment d'aménagement, que ce soit routier et ferroviaire, souhaitent mettre la panique dans notre pays et utiliser ce genre de moyens pour faire entendre leur voix avec les conséquences que ça peut avoir, qui sont totalement inacceptables parce que le réseau ferroviaire, c'est le patrimoine également des Français. Ce sont 28.000 kilomètres de voies que nous devons entretenir et qui nous appartiennent.

GILLES BORNSTEIN
28.000 kilomètres de voies, le tour de la Terre, c'est 40.000 kilomètres. C'est dire ce que ça fait. J'ai regardé Paris-San Francisco, c'est 9.000 kilomètres. Ça fait les voies SNCF en France, c'est trois fois Paris-San Francisco. Comment on fait pour les sécuriser ?

PHILIPPE TABAROT
C'est très compliqué. À la fois, il y a des moyens qui sont mis importants, une centaine de millions d'euros par SNCF Réseau tout au long de l'année, à la fois avec des techniques très modernes, comme des trackers GPS, avec des drones de plus en plus, avec des alarmes.

GILLES BORNSTEIN
Mais on peut sécuriser 28.000 kilomètres de voies ?

PHILIPPE TABAROT
Sécuriser totalement, bien sûr que non. Et puis, vous le voyez très régulièrement, notamment avec 10.000 intrusions par an. Par contre, avec les techniques qui existent aujourd'hui, on a la possibilité quand même de protéger un certain nombre de points névralgiques. Et c'est ça l'objectif, demain. Risque zéro, non. Par contre, à la fois ça et puis élucider les affaires. Et pouvoir incarcérer, ce qui est le cas notamment pour un vol de cuivre en Bourgogne il y a quelque temps. Les personnes qui ont clairement souhaité voler et vendre le cuivre, ou bien mener des actions beaucoup plus vindicatives auprès du réseau.

GILLES BORNSTEIN
Il y a un patron à la SNCF, parce que Jean-Pierre FARANDOU est parti, Jean CASTEX n'est pas encore là ?

PHILIPPE TABAROT
Il y a un intérim qui est réalisé par monsieur TREVISANI, qu'il le fait très bien. Et nous attendons avec impatience l'arrivée d'un grand président pour la SNCF, qui sera monsieur Jean CASTEX, le 3 novembre prochain.

GILLES BORNSTEIN
Aujourd'hui, il y a un président intérimaire.

PHILIPPE TABAROT
Il y a un président intérimaire. Par contre, il y avait à mes côtés tout au long de la journée hier, qui a été, je ne vous le cache pas, une journée pénible pour le ministre des Transports que je suis, mais ce n'est pas bien grave, pour les usagers des transports en commun et pour toutes les équipes de SNCF Réseau qui ont été remarquables, qui ont travaillé jour et nuit pour pouvoir permettre, aujourd'hui, qu'on revienne à la normale et que les 15 000 trains qui vont circuler dans notre pays, comme tous les jours, puissent le faire dans de bonnes circonstances et dans de bonnes conditions.

GILLES BORNSTEIN
Un homme a été mis en examen pour avoir tenté de violer une femme dans le RER C en 2024. On a compté près de 3 400 victimes de violences sexuelles dans les transports en commun. Ça fait, en gros, 10 par jour. Est-ce que les trains et les bus sont des zones de non-droit ?

PHILIPPE TABAROT
J'ai été le premier à soulever ce sujet, puisque j'ai été en tant que sénateur, puis en tant que ministre, auteur d'une loi, la loi dite TABAROT, sur la sûreté dans les transports, qui a permis de donner un arsenal supplémentaire aux agents, notamment de police ferroviaire, qui peuvent faire des palpations, qui peuvent aller dans un cadre un petit peu plus large que la seule emprise ferroviaire, qui peuvent avoir un droit d'éviction pour certains indésirables dans les transports en commun. Et j'ai notamment, à l'époque des débats parlementaires, signalé…

GILLES BORNSTEIN
Droit d'éviction, ça veut dire qu'on a le droit de lui demander de quitter ?

PHILIPPE TABAROT
Bien sûr, et des juges ont la possibilité de donner des peines complémentaires un petit peu et d'interdire certaines personnes de transports en commun. Toutes ces dispositions, je les ai fait voter. Certaines ont été censurées par le Conseil constitutionnel, parce que des députés, notamment dans l'extrême-gauche ou la gauche de l'hémicycle, ont attaqué ces dispositions. Moi, j'avais eu ce débat à l'époque, notamment concernant les femmes. Et c'est le sujet qui nous préoccupe plus particulièrement ici, puisque 86 % des femmes ont dit se sentir en situation d'insécurité, ont été victimes de violences sexuelles ou sexistes ces dernières années. C'est la raison pour laquelle je souhaite qu'on puisse continuer à mettre en place un certain nombre de dispositions qui ont été retoquées, à l'époque. Je pense à un numéro d'alarme. Je pense également à la possibilité pour les femmes de pouvoir, très rapidement, se rapprocher des agents de la police ferroviaire. Et puis, j'aimerais, si vous me le permettez, avoir un mot pour la dame qui est intervenue, qui a eu un grand courage. Elle va être récompensée par Valérie PECRESSE avec une médaille d'Île-de-France. Je souhaite, moi, la proposer à l'Ordre national du mérite dans quelques jours au président de la République, parce qu'on décore souvent des personnes qui font des choses exceptionnelles dans le monde du cinéma, dans le monde du sport. Mais là, les héros du quotidien, il faut penser à eux. Et cette dame est une héros du quotidien.

GILLES BORNSTEIN
Très rapidement, il nous reste très peu de temps. Vous avez été suspendu des Républicains. Est-ce que vous vous considérez toujours membre des Républicains ?

PHILIPPE TABAROT
Je me sens républicain, je me sens de droite et je ne m'en porte pas plus mal d'avoir été suspendu. J'ai souhaité simplement, dans l'intérêt du pays, continuer ma mission pour les transports. C'est une défiance vis-à-vis de personnes. Je pense que la droite n'est jamais aussi efficace qu'elle est aux responsabilités. Et vous voyez qu'on a besoin d'un ministre des Transports qui soit aux affaires, comme on dit, et qui puisse essayer de gérer des situations comme celles qu'on a connues hier dans notre pays.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 29 octobre 2025