Texte intégral
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Merci Johanna, bonjour à tous, bonjour Roland LESCURE.
ROLAND LESCURE
Bonjour.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Merci d'avoir accepté notre invitation.
ROLAND LESCURE
Merci à vous.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Regardez pour commencer cette une des Echos aujourd'hui : "Budget : la semaine de tous les dangers". Le projet de loi de financement de la sécurité sociale fait son retour à l'Assemblée demain. Le Premier ministre et vous-même recevez les Socialistes et les Communistes à Matignon tout à l'heure. Est-ce que vous êtes prêts à saisir la perche tendue hier par le patron des députés PS qui finalement n'exclut plus une adoption du budget par le 49.3 ?
ROLAND LESCURE
Non, je pense que le sujet n'est pas là aujourd'hui.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
La méthode est un sujet.
ROLAND LESCURE
Oui, et justement la méthode inédite qu'a choisie le Premier ministre c'est de ne pas avoir recours au 49.3.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Donc aujourd'hui vous dites on ne recourra pas au 49.3.
ROLAND LESCURE
Qu'est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire ne pas avoir recours au 49.3, ce n'est pas écrire la fin du film avant qu'il soit joué.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Vous ne l'emploierez pas ?
ROLAND LESCURE
Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que chacun doit prendre ses responsabilités et effectivement négocier de manière à trouver un compromis. Si vous dites 49.3, au fond vous déresponsabilisez tout le monde. Donc pas de 49.3, on est tous responsables, on fait tous les pas les uns vers les autres qui permettent in fine de faire du compromis, ça se fait dans tous les pays du monde et moi je suis intimement persuadé aujourd'hui, parce qu'il y a une majorité de députés qui le veulent, que c'est possible. Donc non seulement c'est indispensable, on a besoin d'un budget de la sécu, sinon ce sont des déficits très importants qui s'élargissent encore l'année prochaine, on a besoin d'un budget de la sécu et on est capable de l'atteindre.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Et s'il n'y a pas de compromis, on sait qu'il y a un vote le 9, comment on fait ?
ROLAND LESCURE
On fait que le compte de la sécu part à la dérive.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Et donc on fait comment si jamais il n'y a pas d'accord, Monsieur le Ministre ?
ROLAND LESCURE
C'est très simple, aujourd'hui, le déficit de la sécurité sociale c'est 23 milliards d'euros, ça fait beaucoup d'argent. On était à dix il y a deux ans et si on n'avait pas de budget de la sécu, moi je ne me mets pas dans cette hypothèse, on serait sans doute au-delà de trente. Donc la raison pour laquelle je dis ça aujourd'hui, c'est que nous avons besoin de ce budget et la bonne nouvelle c'est qu'on a une majorité de députés qui est prête aujourd'hui à le voter à condition de trouver des compromis. Et donc je ne me mets pas dans une hypothèse dans laquelle on n'en a pas, je me mets dans une hypothèse dans laquelle on va aller trouver ces compromis.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Par une loi spéciale éventuellement ? Il y en a qui disent : " Il faut se donner du temps, ne nous mettons pas le 9, le 15 décembre comme des ornières ".
ROLAND LESCURE
Trop facile, trop facile. En fait on a des délais constitutionnels qui sont définis, qui poussent le Parlement à décider dans les temps de manière à ce que le 1er janvier on ait un budget, en fait deux budgets, le budget de l'État et le budget de la sécurité sociale. Donc le 9 c'est le budget de la sécu, il nous reste une dizaine de jours pour le négocier. En fait les débats ont déjà été très largement ouverts par l'examen à l'Assemblée, puis au Sénat, vous l'avez dit, on retourne à l'Assemblée. Donc moi je suis intimement persuadé que sur tous les sujets qui sont ouverts, les prélèvements, les économies de dépenses, on va arriver à converger. On est dans la dernière ligne droite, moi j'avais parlé de course de haies, on est dans une des dernières haies, c'est souvent les plus difficiles à sauter, on est un peu épuisé, il faut plutôt accélérer que ralentir pour gagner la course.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Est-ce que vous êtes prêt à lâcher du lest sur certains sujets ? Par exemple le président de la commission des affaires sociales qui nous dit : " Il faut une clarification de la part du Gouvernement sur les éléments sur lesquels on peut discuter et avoir un compromis ", celui que vous demandez. Est-ce que vous pourriez par exemple lâcher du lest sur l'élargissement à la hausse des franchises médicales ?
ROLAND LESCURE
Ça fait partie des paramètres et je ne veux surtout pas, je vais vous décevoir, mais négocier sur un plateau. Les négociations elles ont lieu avec ceux qui votent.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Et en même temps on a besoin de savoir sur quoi ça pourrait bouger.
ROLAND LESCURE
Bien sûr, les paramètres aujourd'hui sont les prélèvements, est-ce qu'on paye un peu plus pour notre sécu ? Les dépenses, est-ce qu'on dépense un peu moins ? Parmi les dépenses il y a ce qu'on appelle l'indexation des prestations sociales sur l'inflation. La bonne nouvelle c'est qu'on a gagné le combat contre l'inflation, l'inflation est en dessous de 1% en France. Malgré tout si vous gelez c'est zéro, si vous indexez c'est 0,9% ou 1% ou à peu près. Et puis les franchises. Donc tout ça, ça fait partie des discussions qui vont avoir lieu.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Il peut y avoir un geste sur ce point.
ROLAND LESCURE
Mais quand vous dites le Gouvernement va lâcher du lest, le Gouvernement aujourd'hui il fait partie des négociations. Évidemment puisque c'est le nôtre.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Il facilite. C'est vous qui donnez un peu le tempo.
ROLAND LESCURE
On a mis un budget sur la table. Donc c'est un point de départ. Et le Gouvernement il est là pour effectivement orchestrer, si je puis dire, les négociations entre les différents groupes, être capable de faire proposer en tout cas des solutions techniques pour avancer sur tel ou tel sujet.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Mais quand on parle de la hausse de la CSG sur les revenus du patrimoine qui passe à 2 plutôt que 2,7 milliards, ça, ça vous convient ?
ROLAND LESCURE
Ça, ça fait partie des choses qu'on doit discuter.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Ça vous convient ?
ROLAND LESCURE
Je ne veux pas donner l'impression qu'on est absent de ces négociations. On joue un rôle très important. Mais j'allais dire, ce qui me convient importe guère, la question c'est est-ce que je suis capable de faire converger des positions qui aujourd'hui sont en désaccord vers des positions d'accord ?
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Alors on parle projet de loi de finances, on parle projet de loi de finances de la sécurité sociale, c'est un peu compliqué pour les Français. Mais le Sénat a rejeté samedi par exemple la surtaxe sur les bénéfices des grandes entreprises. Vous en attendiez beaucoup, quatre milliards d'euros pour 2026. Est-ce que vous le regrettez ?
ROLAND LESCURE
Moi j'avais même proposé, et ça avait été voté d'ailleurs à l'Assemblée, qu'on aille jusqu'à six. Un ministre de l'Économie qui propose une hausse des impôts sur les entreprises, d'abord ce n'est pas commun, il ne le fait pas de gaieté de coeur. Mais je l'avais fait, et je continue à penser que c'est une bonne manière de boucler le budget, parce que je considérais que ça faisait partie du compromis. Et je considère encore que ça doit faire partie du compromis. Au fond, il faut que tout le monde contribue au redressement des comptes. Les grandes entreprises qui font des bénéfices sont peut-être plus à même de payer que celles qui n'en font pas. Et c'est la logique de cette mesure, et j'espère qu'elle sera maintenue dans le cadre des discussions entre le Sénat et l'Assemblée. Mais on va voir ça dans les jours qui viennent.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
On doit avancer Roland LESCURE, on va parler de pouvoir d'achat. La fédération des pétroliers anticipe une hausse du prix de l'essence jusqu'à six centimes par litre en janvier. En fait, ce serait la répercussion à la pompe d'une réglementation pour financer la transition écologique. Est-ce que vous regrettez ces hausses annoncées à la pompe ?
ROLAND LESCURE
Non, moi je regrette que là-dessus, on raconte absolument n'importe quoi. Et Jean-Michel BARDELLA, le premier, il a lancé cette polémique déplacée en racontant absolument n'importe quoi. Et depuis deux jours, les gens ont commencé à le réaliser.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
La fédération des pétroliers également a alerté des polémiques.
ROLAND LESCURE
Oui, je vois bien d'ailleurs que l'un relaie les discours des autres. Si Jordan BARDELLA veut être le porte-voix des industries pétrolières, j'allais dire qu'il le fasse.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Il n'y aura pas d'augmentation à la pompe en janvier ?
ROLAND LESCURE
En fait, aujourd'hui, on est plutôt, depuis maintenant deux ans, sur un prix à la pompe qui baisse. Donc ça, je n'ai pas entendu Jordan BARDELLA s'en féliciter. Ce qu'on fait, les fameux certificats d'économie d'énergie, on fait payer les industries qui polluent pour dépolluer. Aujourd'hui, les chiffres de vente de véhicules sont sortis. Pour le mois de novembre, on a un véhicule sur quatre qui est un véhicule électrique.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Sur le pouvoir d'achat, sur l'augmentation à la pompe, Monsieur le Ministre, en janvier. Il y aura des augmentations compensées ?
ROLAND LESCURE
Et justement, ça ne sera pas du fait du Gouvernement. Si les industries pétrolières veulent répercuter, c'est leur choix. Une hausse de ce qu'on appelle les certificats d'énergie qui permettent aujourd'hui à des gens qui n'en ont pas les moyens d'acheter des véhicules électriques, de rénover leur maison, c'est leur choix. Mais ce n'est pas un impôt. Ça ne va pas dans ma poche.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Il n'y aura pas qu'à la pompe que ça va avoir des répercussions. ENGIE, EDF ont annoncé qu'ils allaient répercuter leurs obligations sur les prix.
ROLAND LESCURE
Mais là encore, depuis un an, les prix de l'énergie en France, ils ont eu tendance à baisser. Le prix de l'électricité a baissé. Le prix du gaz a baissé. Donc moi, je sais ce qu'on a eu aujourd'hui. C'est des prix en baisse.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Combien ?
ROLAND LESCURE
Ça dépend des tarifs que vous avez, des contrats que vous avez. Mais globalement, sur l'électricité, on est un peu au-delà de 10%. Sur l'essence, on est à 1,60 euro aujourd'hui. On était à plus de deux euros pendant la crise de l'Ukraine. Vous vous souvenez ?
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Donc c'est normal que les fournisseurs d'énergie répercutent dans leurs prix. C'est ça que vous dites ?
ROLAND LESCURE
Non. Ce que je veux dire, c'est qu'aujourd'hui, on a plutôt une inflation au plus bas. Ça fait longtemps qu'on n'avait pas eu une inflation en dessous de 1, et on est parmi les plus bas d'Europe. Donc je voudrais qu'on se félicite du fait que le combat contre l'inflation, il a été gagné. Par ailleurs, on a une politique de soutien aux ménages peu aisés pour la transition énergétique. Ça, on devrait s'en féliciter aussi. Et c'est l'objet de cette politique qui, je le répète, n'est ni un impôt ni une taxe.
CYRIL ADRIAENS-ALLEMAND
Merci beaucoup d'être passé par les 4V ce matin.
ROLAND LESCURE
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 2 décembre 2025