Texte intégral
ALEXANDRE PEYROUT
Bonjour à tous et bonjour Serge PAPIN,
SERGE PAPIN
Bonjour Alexandre PEYROUT,
ALEXANDRE PEYROUT
Merci d'être notre invité, ce matin, dans les 4V. Avant de parler de ces chiffres sur l'accord du Mercosur, chiffre inquiétant que vous venez de nous dévoiler ce matin, on va parler de l'autre actualité de la nuit, c'est évidemment l'accord du Mercosur qui a été décalé, dont la signature, a été décalé, cette nuit, au mois de janvier. C'est la présidente de la Commission, Ursula VON DER LEYEN, qui l'a annoncé. Est-ce que c'est une bonne chose ?
SERGE PAPIN
Ecoutez, si l'accord a été décalé, c'est qu'il n'y a pas d'accord. Pour l'instant, le président de la République s'est exprimé. Il a dit : " Le compte n'y est pas ". Et pourquoi le compte n'y est pas ? C'est parce que, ce qu'on appelle les conditions miroirs, c'est-à-dire la réciprocité, …
ALEXANDRE PEYROUT
Clause miroir.
SERGE PAPIN
Clause miroir, pardon, il ne peut pas y avoir deux poids, deux mesures. C'est-à-dire qu'on ne peut pas demander des normes à l'agriculture française et à l'élevage français qui sont de respecter l'environnement ne pas utiliser de pesticides dangereux, ne pas utiliser par exemple d'hormones ou d'antibiotiques dans l'élevage, alors même que les pays du Mercosur les utilisent. Donc, il ne peut pas y avoir de poids. Il faut qu'on ait cette clause miroir, ce qui n'est pas simple parce que ça veut dire que pour ces pays-là qui vont exporter vers l'Europe, s'il y a l'accord, ça veut dire qu'ils aient deux types de production, c'est-à-dire qu'ils aient une production pour leur marché intérieur qui soit plus permissif et une production pour l'Europe qui respecterait nos normes. Donc, pour l'instant, il faut qu'il y ait ces garanties-là.
ALEXANDRE PEYROUT
On a bien vu quand même que cet accord a provoqué la colère des agriculteurs à l'instant. Votre collègue Maud BREGEON, la porte-parole du Gouvernement, dit que le Gouvernement ne tolérera plus aucun blocage sur les routes. Cela veut dire que les agriculteurs ont intérêt à très vite rentrer chez eux ?
SERGE PAPIN
Non, cela veut dire qu'il y a des enjeux. Non, je ne crois pas qu'il y ait des menaces. Mais il y a des enjeux. Ecoutez, on est à la veille des fêtes de Noël. Je suis aussi ministre du Tourisme, j'ai eu des discussions, bien sûr, avec les responsables des stations et les maires des communes de montagne, que ce soit dans les Pyrénées ou que ce soit dans les Alpes. Donc pour ces fêtes, ça semble naturel que des gens veuillent se rendre dans des lieux de vacances. Il y a un enjeu économique. Il y a un enjeu aussi pour les salariés aussi des stations. Donc voilà, c'est cette question-là aussi qui est en jeu.
ALEXANDRE PEYROUT
Alors, on en vient à cette étude que vous venez nous dévoiler ce matin, des chiffres exclusifs qui sont très inquiétants pour la santé des enfants français. A une semaine de Noël, la DGCCRF a mené une grande analyse des jouets présents, notamment sur les plateformes de e-Commerce. 90% d'entre eux, vous nous le disent ce matin, était non conforme. Pire, 60% de ces jouets seraient dangereux. Une question claire est ce que la semaine prochaine, les petits Français pourront jouer sereinement avec leurs cadeaux sous le sapin ?
SERGE PAPIN
Non mais ça confirme que le modèle de ces plateformes, c'est le non-respect des normes. Alors, c'est d'autant plus dangereux quand il s'agit de jouets. Alors évidemment, j'invite au discernement des parents qui ont acheté des jouets. Tous les jouets d'ailleurs qui ont fait l'objet de ce contrôle, ensuite, ont été détruits. Ça, c'est une bonne chose. Par contre, si les jouets qui ont été achetés, il faut bien sûr dire aux parents : « Faites attention ! » Je suis allée en voir des jouets. Il y a, par exemple, un plastique qui est destiné aux enfants. Il est friable comme une chips. Rendez-vous compte ? Donc, un enfant peut l'ingérer.
ALEXANDRE PEYROUT
Est-ce que les enfants en danger ?
SERGE PAPIN
Ils sont classés dangereux. Voilà, alors s'il y a de l'ingestion, il peut y avoir une ingestion de plastique toxique.
ALEXANDRE PEYROUT
Mais est-ce qu'il n'y a pas un problème de contrôle, si on se rend compte aujourd'hui, que 60% des jouets sur les plateformes qui peuvent arriver chez nous en France sont dangereux ? Est-ce que l'État contrôle assez ce qui arrive sur notre sol ?
SERGE PAPIN
Il ne faut pas inverser la charge de la preuve. Ces plateformes doivent respecter nos normes. On ne va pas mettre un douanier derrière chaque livraison. C'est comme si on mettait un agent de la DCCRF dans chaque magasin physique. Donc, c'est à eux de respecter. On a un code, on est un État de droit, on a ce qu'on appelle un code de la consommation. Les mises en marché de produits sur notre territoire national doivent respecter ce code de la consommation. Ce qu'elles ne font pas aujourd'hui.
ALEXANDRE PEYROUT
Quand on apprend cette semaine, selon un rapport parlementaire, que 82 colis sur un million venant d'Asie sont contrôlés à leur entrée dans l'Union Européenne, est-ce qu'il n'y a quand même pas un problème de contrôle ?
SERGE PAPIN
Encore une fois, même si on contrôlait 100 fois plus, d'accord ? Ça ne ferait que 1 % des contrôles. C'est impossible. Donc, il faut que ces plateformes-là, ce qui n'est aujourd'hui pas le cas, respectent nos normes et notre code de la consommation. Et si elles ne le font pas, il faut les suspendre. C'est aussi simple que ça.
ALEXANDRE PEYROUT
Justement, vous parlez de suspension. Il y a le tribunal judiciaire qui doit rendre aujourd'hui sa décision concernant la suspension pour 3 mois de la plateforme chinoise SHEIN. Suspension qui avait été demandée par le Gouvernement après la découverte sur cette plateforme de poupées pédopornographiques. Qu'est-ce que vous attendez, vous, de cette décision ?
SERGE PAPIN
Et d'armes…
ALEXANDRE PEYROUT
Et d'armes, effectivement. Ce qu'on attend, c'est le juge qui prendra sa décision. Moi, j'attends clairement une suspension. S'il n'y a pas suspension, le combat va continuer. Évidemment, ça serait un signe important s'il y avait cette suspension, bien sûr.
ALEXANDRE PEYROUT
Ces plateformes se sont développées, notamment par leur coût très peu élevé par rapport aux produits en France, aux produits made in France. Comment est-ce qu'on développe un made in France accessible aujourd'hui ?
SERGE PAPIN
Alors, il y a plein d'exemples, déjà, de made in France accessibles. J'ai su aller visiter…
ALEXANDRE PEYROUT
Pas assez selon les consommateurs.
SERGE PAPIN
Il y a deux conditions pour qu'on puisse avoir du made in France abordable. Il faut que les entreprises qui produisent soient productives, donc, il faut qu'elles aient des outils qui soient modernes. Et puis, en même temps, il leur faut des volumes. Alors, on a une dynamique qui est en train de se mettre en place. Vous parliez des jouets, on a parlé des jouets des plateformes. Moi, je vous parlais des jouets français qui sont produits, par exemple, dans le Jura. Je suis allé visiter SMOBY. SMOBY, c'est un exemple. Il progresse, d'ailleurs, de 10 %. Il vend des jouets durables, accessibles parce que, j'ai été frappé en visitant l'usine, il a des machines-outils, la robotisation qui permet d'avoir des coûts de production très compétitifs. Et derrière, donc, il a des volumes.
ALEXANDRE PEYROUT
Ça reste moins compétitif que les plateformes chinoises.
SERGE PAPIN
Si, c'est comparable. Non, mais en prix, c'est comparable par rapport à ce qu'il fait. Je vais vous donner un exemple, il ne vend pas que des jouets, il vend des petits sauts de plage. Voyez, il était 2,99 euros à la vente. Donc, il est aussi compétitif. On fabrique des vélos.
ALEXANDRE PEYROUT
Donc, c'est quoi ? C'est une question d'habitude de consommation de la part des Français ?
SERGE PAPIN
Oui, parce qu'on a laissé trop penser que le Made in France, c'était des produits de niche, que c'était réservé à l'élite. Alors que là, plein de... Vous savez, quand je suis allé voir au salon du Made in France, qui s'est tenu il y a quelques jours, 120 000 personnes sont venues visiter ce salon. Toutes les entreprises que j'ai vues, m'ont dit : « Mais monsieur le ministre, dites que les produits que l'on fait, ce sont des produits pour le quotidien des Français ». Donc, il faut qu'on change l'image. Et regardez, on fait des vélos en France qui sont aussi compétitifs que les vélos chinois à Machecoul en Loire-Atlantique, par exemple.
ALEXANDRE PEYROUT
Alors, l'autre actualité du jour, c'est cette commission mixte paritaire qui va débuter dans un peu plus d'une heure, maintenant, à l'Assemblée nationale, 7 députés, 7 sénateurs qui doivent se mettre d'accord sur le budget de l'État, la partie s'annonce très serrée. Est-ce que vous, vous y croyez ce matin, Serge PAPIN ?
SERGE PAPIN
Alors, d'abord…
ALEXANDRE PEYROUT
Ça n'a pas l'air très enthousiaste.
SERGE PAPIN
Si, je vais vous dire. Moi, j'ai vu beaucoup de chefs d'entreprise, y compris hier. Donc, ils ont besoin d'un budget. Bien sûr, on sait que ce budget, il est imparfait. On sait que ce budget, c'est un budget promis. Mais il nous faut un budget. Et avoir un budget, c'est mieux, beaucoup mieux, que de ne pas l'avoir.
ALEXANDRE PEYROUT
Il y en aura un, peut-être avec la loi spéciale.
SERGE PAPIN
Il y a des points… Non ! Il y a des points de convergence. Moi, j'ai noté qu'il y avait des points de convergence entre les députés et les sénateurs. J'ai lu des choses de ce point de vue-là. Donc, on a des rapprochements qui peuvent se faire. J'espère que la CMP sera conclusive. J'espère qu'ensuite, il pourra y avoir un vote à l'Assemblée qui permettrait d'avoir un budget. Vous savez pourquoi c'est important aussi d'avoir un budget ? Il y a une entreprise qui se profite. Je rappelle que la France a la plus grande croissance des pays d'Europe. On va finir l'année à plus 0,9. On fait trois fois la croissance de l'Allemagne. Et là, maintenant, on s'apprête à redémarrer l'année 2026. Les entreprises, elles sont prêtes à embaucher, elles sont prêtes à investir mais il leur faut un budget.
ALEXANDRE PEYROUT
Une dernière question Serge PAPIN. Si ce budget n'est pas adopté, s'il n'est pas voté, ça sera un échec pour Sébastien LECORNU. Est-ce qu'il devra partir ?
SERGE PAPIN
Non, ce n'est pas un échec. Je vais vous dire une chose. Il y a une loi spéciale qui est prévue. Il faut bien qu'il y ait la continuité de l'État. Et on va perdre du temps. Mais on rediscutera du budget en début d'année. Il faut bien que ce pays ait un budget. Et je rappelle qu'on a un demi-budget. On a un budget de la sécurité sociale. Donc ça, c'est plutôt un succès.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 19 décembre 2025