Texte intégral
MONSIEUR LE MINISTRE,
MONSIEUR LE PRESIDENT, CHER JEAN LEONETTI,
MONSIEUR LE DELEGUE GENERAL, M. VINCENT
MONSIEUR LE PRESIDENT DU CENTRE NATIONAL DE L'EXPERTISE HOSPITALIERE, M. PAIRE
MESDAMES ET MESSSIEURS,
CHERS AMIS,
C’est avec beaucoup de plaisir que j’ai accepté de venir ouvrir ce colloque sur l’avenir des EHPAD dans le cadre de la loi HPST.
C’est pour moi l’occasion de faire le point avec vous sur les nombreuses réformes en cours et aussi de vous faire part de ma vision de l’avenir du secteur des EHPAD ainsi que, plus largement, de la prise en charge des personnes âgées.
Vous avez positionné, avec raison, le débat dans le cadre général de la loi HPST. C’est une grande loi qui ouvre des perspectives très importantes, en particulier pour le secteur médico-social.
La première de ces innovations, c’est bien sûr le décloisonnement que permet le rassemblement, dans une même main, de l’ensemble des compétences sanitaires, médico-sociales et relatives aux soins de ville. De ce point de vue, l’ARS est une promesse, une condition nécessaire, mais encore faudra-t-il la mettre en œuvre sur le terrain, notamment à travers les plans régionaux de santé.
Ces plans devront nous faire passer d’une conception de la santé centrée sur le curatif, à un dispositif visant à promouvoir la santé comme « un état de bien être » selon la définition de l’OMS. De ce point de vue, la prise en charge de nos ainés, qui suppose une coordination accrue des acteurs, sera au cœur des problématiques des ARS.
Ce plan régional de santé, territorialisé, se voit complété dans la loi par un schéma régional médico-social, concerté avec l’ensemble des acteurs. Ceux-ci devront se saisir de cet outil afin d’en faire une véritable expression des besoins des populations en terme d’accompagnement médico-social.
De façon très concrète la loi HPST apporte une autre innovation majeure : les appels à projet.
Il s’agit de sortir de la mécanique antérieure qui déconnectait la définition des besoins, la programmation des moyens financiers et l’avis des Comités Régionaux Organisations Sociales et Médico Sociales (CROSM). Les promoteurs n’avaient, ainsi, ni visibilités, ni garanties de financement.
La logique d’appel à projet permettra, au contraire, une fois les besoins établis et les moyens financiers déterminés sur une base pluriannuelle, de sélectionner les meilleurs projets et de les financer immédiatement.
La loi HPST a aussi consacré le principe de la fongibilité asymétrique.
Derrière ce terme qui peut sembler barbare, il s’agit d’abord de garantir que l’ensemble des crédits médico-sociaux votés par le parlement soient bien consacrés aux établissements et services pour personnes âgées et personnes handicapées.
Mais il s’agit aussi d’organiser, pour des raisons démographiques évidentes, les transferts de moyens du sanitaire vers le médico-social chaque fois que cela sera possible. Le rapport du président Larcher à souligné toute l’importance de cette démarche et je ne doute pas que les directeurs d’ARS auront à cœur de la mettre en œuvre.
La Loi HPST va également faciliter le développement des Groupements de Coopération Sociale et Médico-Sociale et je sais le soutien que la Fédération Hospitalière de France (FHF) et le CNEH apportent à ces structures de coopération.
Sous réserve de la décision du conseil constitutionnel sur la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, vous savez que ces groupements pourront demain gérer également des pharmacies à usage intérieur. C’est une avancée importante qui vient compléter la démarche d’expérimentation de la gestion des médicaments dans les EHPAD que nous avons lancé.
Chaque fois que possible le pharmacien d’officine doit rester l’interlocuteur privilégié de l’EHPAD. Mais l’établissement doit être libre de choisir une autre solution lorsque cela se révèle nécessaire.
Vous savez l’importance que j’attache à cette lutte contre le mauvais usage des médicaments et je sais, monsieur le président, monsieur le délégué général que je peux compter sur la FHF et les gestionnaires d’établissements pour œuvrer à la réussite de cette expérimentation. Vous reviendrez je crois en détail sur ce point cette après midi.
Je veux le redire ici : notre démarche sur cette question des médicaments en EHPAD n’est pas une démarche de santé publique. Comme Ministre et comme médecin, je ne peux pas accepter que 20% des hospitalisations des personnes de plus de 80 ans soient d’origine iatrogène.
Mais s’il se trouve que cette démarche de santé publique permet de réduire les coûts pour la collectivité, et bien comme citoyens nous ne pouvons que nous en réjouir !
Je souhaite également vous dire quelques mots sur les autres réformes en cours sur le secteur des EHPAD et plus largement des personnes âgées dépendantes.
Tout d’abord, le décret sur la tarification des EHPAD : des concertations approfondie ont été menées et une dernière réunion est prévue vendredi avec le directeur général de l’action sociale. La concertation a permis de rapprocher les points de vue et je souhaite que ce texte puisse matérialiser les avancées attendues par le secteur. Aussi, je réunirai les fédérations dans le courant du mois de janvier pour une consultation finale sur ce décret.
C’est également le déploiement en 2010 de 140 unités d’hébergement renforcées et de 600 Pôles d’Activité et de Soins Alzheimer. Il s’agit là de mesures phares du plan Alzheimer et nous y consacrerons 95M€.
Ce qui se joue au travers de ces nouvelles unités c’est justement l’émergence des EHPAD de demain :
Ma conviction c’est que les établissements de demain auront majoritairement pour mission d’accompagner les malades d’Alzheimer ou de troubles apparentés.
Mais plus encore, je crois qu’il faudra dépasser le plus vite possible la conception de l’EHPAD classique pour aller vers de véritables plates formes de services. Elles devront associer dans une même organisation :
- services à domicile avec les SSIAD, mais aussi aide à distance utilisant pourquoi pas les géronto technologies,
- structure de répits pour un hébergement temporaire, de jour ou de nuit,
- hébergement permanent avec une forte orientation Alzheimer
Il ne suffit pas de le dire, il faut le réaliser. Et c’est pourquoi je demanderai aux ARS de lancer – peut être au début 2010, dans quelques régions pilotes – des appels à projets innovants permettant de faire émerger quelques établissements de référence. Il va de soi que le secteur public à toute sa place dans cette démarche innovante
Naturellement, je ne veux pas éluder le débat sur la convergence tarifaire qui suscite je le sais le plus d’interrogations, voire d’opposition.
J’ai conscience qu’il n’est jamais facile d’entrer dans un dispositif de convergence notamment pour les établissements qui sont au-dessus des normes d’allocation des crédits. Cependant, je crois que ce dispositif est nécessaire pour instaurer plus d’équité entre établissements : si 10% des établissements sont concernés, soit environ 650 établissements, cela signifie que 9 établissements sur 10 bénéficieront d’une hausse de leurs dotations budgétaires de 30% en moyenne, ce qui représente encore cette année, 300 M€ de crédits supplémentaires et près de 10 000 emplois.
Le dispositif sera appliqué car il figure dans la loi. Je souhaite toutefois qu’il le soit avec souplesse : des mécanismes permettant de contractualiser avec les services de l’Etat ont été prévus par les textes. Ils seront appliqués à chaque fois que cela sera possible afin que la convergence ne se traduise pas par des diminutions brutales de budget.
Dans chaque cas il conviendra d’explorer toutes les solutions qui permettent aux établissements concernés d’améliorer le service rendu soit en maintenant soit en accroissant leurs moyens. Le passage au tarif global de soins, la labellisation d’UHR, de PASA - que j’évoquais à l’instant - sont autant de pistes à explorer.
Vous évoquerez sans doute dans vos travaux la question du financement de la dépendance et plus particulièrement du reste à charge en établissement.
Ce reste à charge est devenu une difficulté, voir une angoisse, pour nombre de nos concitoyens. Je veux ici réaffirmer la volonté du gouvernement d’apporter des solutions concrète et lisible à nos ainés. Le débat aura lieu sur ce point au printemps et je crois que l’idée d’une aide unique, fonction du revenu et permettant de mieux solvabiliser les résidents, devra être étudiée avec attention.
Je ne voudrais pas terminer mon propos sans vous dire un mot de la démarche qui me tient le plus à cœur, celle de la bientraitance.
Je veux que ma démarche soit bien comprise : il ne s’agit en aucun cas de montrer du doigt ou de stigmatiser les établissements ou les professionnels. Je n’ignore nullement que la grande majorité d’entre eux font preuve d’un dévouement admirable que je veux saluer ici.
Mais il nous faut être sans faiblesse face aux dérapages qui peuvent survenir. Au delà de la lute contre la maltraitance - que je mènerai sans faiblir – il nous faut, par la formation et l’évaluation, promouvoir une véritable culture de la bientraitance.
Cela passe aussi par la diffusion – y compris auprès du grand public d’indicateurs fiables d’évaluations
Je me félicite des initiatives que la FHF a prises en ce sens, et je souhaite que les travaux qui se sont engagés à ma demande, avec les fédérations d’établissements, l’administration centrale et l ANESM (Agence nationale d’évaluation sociale et médico sociale) puissent aboutir au plus vite. Je proposerai s’il le faut un projet de loi pour donner toute sa portée à l’action qui consiste à rendre publique les résultats de ces évaluations.
Les missions de l’ANESM s’en trouveront renforcées. Naturellement cette jeune institution ne trouvera sa pleine efficacité qu’en coopérant autant que nécessaire, dans le respect des compétences de chacun, avec la Haute autorité en Santé.
Au-delà de la diffusion des évaluations, il s’agira aussi de rendre plus simple et plus lisible notre mille feuille médico-social. Aussi j’ai demandé que soit examinée – dans le cadre des ARS et avec des départements volontaires- l’idée d’une expérimentation de décentralisation de certaines missions de gestion. Ce serait l’occasion de recentrer les services de l’Etat sur leur mission prioritaire.
L’année 2010 sera, à n’en pas douter une année essentielle pour la prise en charge de nos ainés.
Au delà des réformes financières ou techniques - qui sont indispensables - je crois que ce qui nous unit, c’est la volonté de mettre la personne âgée au centre de nos préoccupations.
Ma conviction est que l’on juge une société à la manière dont elle accompagne les plus fragiles. De ce point de vue, nous avons en commun une noble tâche et je sais pouvoir compter sur vous……
Je vous remercie.
Source http://www.fhf.fr, le 15 janvier 2010