Texte intégral
Messieurs les ministres,
Messieurs les préfets,
Madame le maire
Monsieur le professeur,
Mesdames, Messieurs,
Je suis très honoré que m'ayez convié à venir célébrer avec vous la pose de la première pierre du nouveau bâtiment de l'Institut Gustave-Roussy. Mes remerciements s'adressent à son Président, le Préfet Jean-Pierre DUPORT, à son directeur, le Professeur Thomas TURSZ, et, à travers eux, à leurs prédécesseurs qui ont oeuvré au développement de cet Institut Ce nouveau bâtiment de près de 25.000 m2 permettra d'améliorer la qualité de l'accueil et la prise en charge de 11.000 nouveaux malades par an, en regroupant, sur un même site, les activités de diagnostic et de soins ce qui facilitera le développement de la médecine ambulatoire. Fort de son organisation couvrant tout le champ de 1a cancérologie, de son expérience de la recherche clinique et de ses huit unités INSERM et CNRS, votre Institut est le premier centre européen de lutte contre le cancer .
En me rendant ici, je souhaite d'abord témoigner de ma solidarité à, tous les malades du cancer et parmi eux, en particulier, les enfants.
Nous sommes auprès d'eux dans leur combat. Le cancer est l'affaire de tous.
Deuxième cause de mortalité en France, le cancer est la principale préoccupation de nos compatriotes en matière de santé. Elle l'est d'autant plus que, depuis vingt ans, le nombre de cancers ne cesse d'augmenter. On compte aujourd'hui 700.000 malades du cancer. 250.000 nouveaux cas sont, diagnostiqués chaque année. Le cancer est donc une réalité grave pour les Français, soit parce qu'ils sont directement touchés par la maladie, soit parce que ce sont des proches, des amis, des collègues qu'elle affecte. Chaque jour, le cancer bouleverse des destinées. Chaque année, le cancer emporte 150.000 vies. Et, lorsque le cancer est vaincu - ce qui est le cas une fois sur deux -, c'est toujours au prix de traitements lourds, accompagnés de souffrances et de changements profonds dans la vie personnelle, familiale et professionnelle.
Mais la médecine avance. Les thérapeutiques gagnent en efficacité. Ces progrès sont dus à l'action des infirmières et des infirmiers, des soignantes et des soignants, des médecins, des chercheurs, des personnels administratifs et des bénévoles des associations, qui tous ont fait du cancer la cible de leur engagement. Ici, en ce lieu symbolique du combat contre la maladie, je souhaite leur rendre hommage.
Le combat contre le cancer est d'abord mené par les malades eux-mêmes. Longtemps, les personnes atteintes d'un cancer se sont senties exclues de la société. Trop peu était fait pour les aider à vivre et à travailler avec la maladie, malgré la maladie. Et, lorsque l'hospitalisation devenait nécessaire, l'accompagnement était trop rare. Trop souvent, en particulier, le malade restait seul face à la souffrance.
C'est pourquoi, en 1998, le Gouvernement a veillé à ce que tout soit entrepris pour alléger les souffrances psychologiques et physiques des malades. Dans notre société, la souffrance est inacceptable. La lutte contre la douleur doit faire partie de la prise en charge de tout malade, quel que soit son âge. Tel est le sens des deux plans triennaux qui ont été mis en oeuvre pour lutter contre la douleur et développer les soins palliatifs. Un nouveau plan de lutte contre la douleur , d'un montant de 155 millions de francs pour l'année 2002, va être annoncé à la, mi-décembre par le ministre délégué à la Santé, Bernard KOUCHNER. La maladie de l'enfant est plus insupportable encore. Il nous a donc paru essentiel de permettre aux parents de se rapprocher de leur enfant malade. C'est pourquoi, en juin 2000, le Gouvernement a créé un congé " enfant malade " assorti d'une allocation de présence parentale, dont le coût prévu est de 200 millions de francs par an.
C'est dans une perspective semblable - penser la place du malade au sein de notre société - que la Ligue contre le Cancer a pris la remarquable initiative, en 1998, d'organiser les Etats généraux du cancer. Pour la première fois, des malades et des anciens malades, leurs familles, toutes celles et tous ceux qui étaient concernés se sont exprimés publiquement, faisant part de leurs souffrances et de leurs difficultés, en un mot de leur vécu. Profondément marqué par ces témoignages ,j'ai demandé, en clôture des Etats généraux de la santé de juin 1999, que soit consacrée la reconnaissance des droits de la personne malade. Tel est l'objet d'un projet de loi déjà examiné en première lecture par l'Assemblée nationale et dont mon objectif est qu'il soit définitivement adopté avant la fin de la session parlementaire.
Ce projet de loi doit beaucoup aux associations de malades en charge d'affections graves. Il réaffirme avec force les droits qui doivent être reconnus à toute personne malade: droit au respect de la dignité, à la non-discrimination, à la confidentialité, au respect du secret médical, de l'intimité et de la vie privée ; droit à être informé, au respect du consentement et à l'accès direct au dossier médical. Ce dernier droit est primordial: le droit à la connaissance est utile à la participation active des malades à leur traitement et donc à leur lutte contre la maladie. Cette connaissance doit passer, autant que possible, par un dialogue avec le médecin traitant permettant l'information, l'explication et, finalement, la décision. Le temps du dialogue est devenu aussi important que le temps, opératoire. C'est dans cet esprit que des consultations consacrées à l'annonce du diagnostic et à l'information qui l'accompagne seront prochainement mises en place. Affirmer les droits de la personne malade, c'est donc lui permettre d'être partie prenante dans la relation qui la lie à ses soignants; c'est renforcer le lien soigné-soignant. Cette évolution marque aussi un progrès de la démocratie, car elle rend chacun davantage responsable de sa santé, donc de lui-même et de son avenir. En ce sens, elle marque la naissance d'une authentique démocratie sanitaire.
Mesdames, Messieurs,
Dans un lieu comme celui-ci, où chacun pense à la fragilité de la vie, et côtoie la mort, comment ne pas évoquer la si lourde question de l'accompagnement des derniers instants de la vie ? Les lois de notre .démocratie, les principes de plusieurs courants de pensée condamnent l'euthanasie. Mais des hommes et des femmes la revendiquent. Soit, en tant que praticien, comme une réponse à la détresse ultime d'un patient; je sais en particulier que les réanimateurs, en l'état actuel de la loi, sont placés dans une situation extrêmement difficile et il faudra qu'une réponse spécifique leur soit apportée. Soit, pour eux-mêmes, comme l'expression de la liberté irréductible de chaque individu. J'écoute avec beaucoup d'attention les propos tenus - avec pudeur, mais aussi avec force et conviction - par les uns et les autres. Je m'interroge. Je le fais devant vous avec le sentiment que ce sujet, dont la gravité ne supporte pas la polémique, appelle et sans doute exige, au sein de notre société, une réflexion apaisée et respectueuse des sensibilités de chacun. Nous devons examiner ensemble comment l'engager.
Je vous ai livré, en tant qu'homme, une part des interrogations que m'inspirent ce lieu et le combat qui y est conduit. Je voudrais maintenant, en tant que Premier ministre, évoquer devant vous l'ambitieux plan de lutte contre le cancer que le Gouvernement a décidé de mettre en oeuvre.
Avec l'aide des professionnels, plusieurs ministres de mon gouvernement - Martine AUBRY, puis Elizabeth GUIGOU, ministres de l'Emploi et de la Solidarité, Bernard KOUCHNER et Dominique GILLOT, ministres délégués à la Santé- ont mené une réflexion globale sur le cancer dont l'objectif était l'élaboration d'un plan national de lutte contre le cancer.
Annoncé en février 2000, ce plan poursuit cinq objectifs.
* Réduire les risques du cancer par une prévention adaptée. Un nombre important de cancers peuvent en effet être évités. Le Gouvernement a donc décidé de sensibiliser nos concitoyens aux risques que certaines pratiques leur font courir - je pense en particulier au tabac, responsable de 60.000 décès chaque année. Améliorer l'information de nos concitoyens, c'est contribuer à réduire ces risques.
* Le deuxième objectif est de généraliser les programmes de dépistage performants. Ainsi, le dépistage du cancer- du sein est dès maintenant généralisé. Les dépistages du cancer du colon et du cancer du col utérin le seront en 2003.
* Favoriser la qualité de la prise en charge est le troisième objectif.
* Le quatrième est l'amélioration des conditions de vie des malades.
* Il faut enfin poursuivre et organiser l'effort de recherche.
Je ne détaillerai pas l'ensemble de ce plan que vous connaissez pour avoir largement contribué à son élaboration. Je souhaiterais toutefois m'arrêter sur deux de ses objectifs. La qualité de la prise en charge des patients, tout d'abord. La recherche, ensuite.
Pour être améliorée, la prise en charge doit être organisée au sein de réseaux et, devenir véritablement pluridisciplinaire et coordonnée. La mise en place de réseaux de soins incluant les sites de référence, les sites à orientation cancérologique, les sites de proximité et les médecins traitants est nécessaire. La réorganisation de la cancérologie, reconnue comme une priorité d'action dans toutes les régions, est en cours depuis 1998. Elle sera achevée en 2004. Au sein de ces réseaux, les pratiques doivent être harmonisées et la prise en charge, je l'ai dit, pluridisciplinaire; radiothérapeutes, oncologues, chirurgiens et médecins traitants doivent travailler ensemble pour qu'en l'état actuel de l'art, un cancer soit aussi bien traité en tout point du .territoire national, à l'hôpital comme en clinique, c'est-à-dire avec des traitements similaires et évalués. A ces spécialistes doivent s'associer, d'une part, les équipes de soins palliatifs et de lutte contre la douleur auxquelles 380 millions de francs ont été attribués entre 1999 et 2001 et, d'autre part, des psychologues à l'installation desquels 30 millions de francs sont affectés sur les années 2001 et 2002.
Pour améliorer la prise en charge des patients, nous avons aussi décidé de soutenir l'accès aux thérapeutiques innovantes dans le domaine du cancer. Les bouleversements qu'a connus la biologie cellulaire commencent à porter leurs fruits et de nouvelles molécules vont sans doute modifier le pronostic de certains cancers. Il en est ainsi de l'Herceptine .pour le cancer du sein et du Maptera pour le lymphome. Ces avancées constituent un espoir pour l'avenir. Il est donc de notre devoir d'agir vite et de renforcer la mise en place d'un système permettant à tous ceux qui en ont besoin de bénéficier de ces nouvelles molécules, dont le coût élevé ne peut pas constituer un obstacle à leur utilisation, mais une incitation au respect de leur bon usage.
Tel est l'objectif des contrats bi-annuels pour les thérapeutiques innovantes que nous venons de mettre en place au titre des budgets 2001-2002. Un milliard de francs a été affecté à ces contrats en 2001, dont 500 millions de francs pour les seules thérapeutiques anti-cancéreuses.
En 2002, les contrats bénéficieront d' 1,82 milliard de francs, dont 540 millions pour les médicaments du cancer. Au- total, c'est plus d'un milliard de francs qui est spécifiquement consacré en 2001 et en 2002 aux nouveaux traitements du cancer. Jamais un tel effort n'avait été entrepris. Ainsi sera financé, au sein d'équipes choisies pour leur expertise, l'accès des patients à ces nouvelles molécules. Une diffusion plus large en sera réalisée dans l'avenir immédiat si l'évaluation effectuée par ces centres est concluante.
D'autres initiatives sont prises pour améliorer- l'offre de soins, en particulier dans le domaine de l'imagerie médicale et de la radiothérapie. Ainsi, 94 nouvelles autorisations d'imagerie par résonance magnétique ont été accordées en 2001, tandis que Bernard KOUCHNER vient d'annoncer que les indices de la carte sanitaire seront élargis et les décisions déléguées aux régions. En outre, dix nouvelles autorisations de tomographie à émission de positons ont été accordées au titre de l'année 2001, en attendant qu'une expertise propre à chaque cancer menée sur le terrain permette de préciser les besoins réels dans cette nouvelle technique. Enfin, quarante nouvelles installations de radiothérapie devraient être autorisées en 2002, suivant les recommandations des professionnels. Les équipes hospitalières seront renforcées. Une nouvelle nomenclature des actes de radiothérapie va prochainement être mise en place.
C'est à la frontière de la médecine de soin et de la recherche que se situe l'initiative prise, au profit des malades, par l'Institut Curie, l'Institut Gustave-Roussy et l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris. Vous avez eu raison de réagir contre le brevet Myriad-Genetics. Il est inacceptable que soient brevetés et exploités commercialement les produits du corps humain. j'ajoute que non seulement ces tests ne détectent pas toutes les mutations, mais, surtout, qu'il est inadmissible qu'une entreprise privée constitue une banque de données sur les personnes à risque du cancer du sein. Cela est absolument contraire aux règles éthiques et de confidentialité que nous appliquons en France. C'est dans le respect de ces règles que sera rédigé le projet de loi transposant la directive européenne relative à la protection des inventions biotechnologiques.
La recherche est le second objectif du plan de lutte contre le cancer ,sur lequel je veux insister. Les sciences de la vie sont une priorité du ministère de la Recherche. A cet effet, sur une initiative de Roger-Gérard SCHWARTZENBERG, plus de 14,7 milliards de francs ont (été engagés sur le Budget civil de la Recherche et du Développement technologique pour l'année 2001, soit 24,8 % des crédits publics de recherche. Sur ces derniers, 8,6 milliards de francs concernent directement la recherche biomédicale.
Grâce à ces moyens, nous voulons en particulier faire avancer la génomique. Prévenir le cancer, mieux établir son pronostic, déterminer et suivre son traitement, tel est le sens du programme " Carte d'identité tumorale " qu'a engagé la Ligue contre le Cancer, en partenariat avec le ministère de la Recherche. C'est la première dimension de la génomique fonctionnelle appliquée au cancer, développée en collaboration avec le génopole d'Evry. Il convient d'identifier des gènes de susceptibilité, dont la mutation provoque ou favorise la survenue du cancer. Dans le même temps, il convient de développer la pharmacogénomique, c'est-à-dire identifier de nouvelles cibles thérapeutiques. Pour pouvoir établir cette " carte d'identité tumorale ", il est nécessaire d ' opérer une collecte des tumeurs dans des conditions techniques et éthiques irréprochables. Telle est la raison de la création des centres de ressources biologiques et plus particulièrement des " banques hospitalières de tumeurs ".
Ce programme hospitalier de 10 millions de francs, engagé par Bernard Kouchner, vient compléter le programme de recherche lancé par Roger-Gérard SCHWARTZENBERG avec L'INSERM à hauteur de 14 millions de francs. Dans ce vaste programme, l'Institut Gustave-Roussy doit, grâce aux, moyens et aux compétences dont il dispose et en collaboration avec le Génopole d' Evry et 1'Institut Fédératif de Recherche, constituer un des pôles majeurs de la recherche " génomique et cancer ", qui sera une priorité du sixième programme
Mesdames, Messieurs,
En venant ici, je savais que l'Institut Gustave-Roussy était un lieu d'excellence.
Un des rares endroits dans le monde où se concentrent avec une telle intensité le talent des femmes et des hommes, la qualité de la recherche scientifique, la puissance des moyens techniques. Cette Excellence, le Gouvernement se tient à vos côtés pour la porter plus haut encore.
Mais en vous voyant ici tous réunis, en pensant au travail si exigeant que vous accomplissez jour après jour, en songeant aux malades que vous prenez en charge et que vous accompagnez, je me dis aussi que l'Institut Gustave-Roussy, grâce à vous tous, est un lieu de vie et un lieu d'espoir. Cet espoir, Mesdames et Messieurs, c'est toute une société qui le porte avec vous.
(source http://www.igr.fr, le 23 janvier 2002)
Messieurs les préfets,
Madame le maire
Monsieur le professeur,
Mesdames, Messieurs,
Je suis très honoré que m'ayez convié à venir célébrer avec vous la pose de la première pierre du nouveau bâtiment de l'Institut Gustave-Roussy. Mes remerciements s'adressent à son Président, le Préfet Jean-Pierre DUPORT, à son directeur, le Professeur Thomas TURSZ, et, à travers eux, à leurs prédécesseurs qui ont oeuvré au développement de cet Institut Ce nouveau bâtiment de près de 25.000 m2 permettra d'améliorer la qualité de l'accueil et la prise en charge de 11.000 nouveaux malades par an, en regroupant, sur un même site, les activités de diagnostic et de soins ce qui facilitera le développement de la médecine ambulatoire. Fort de son organisation couvrant tout le champ de 1a cancérologie, de son expérience de la recherche clinique et de ses huit unités INSERM et CNRS, votre Institut est le premier centre européen de lutte contre le cancer .
En me rendant ici, je souhaite d'abord témoigner de ma solidarité à, tous les malades du cancer et parmi eux, en particulier, les enfants.
Nous sommes auprès d'eux dans leur combat. Le cancer est l'affaire de tous.
Deuxième cause de mortalité en France, le cancer est la principale préoccupation de nos compatriotes en matière de santé. Elle l'est d'autant plus que, depuis vingt ans, le nombre de cancers ne cesse d'augmenter. On compte aujourd'hui 700.000 malades du cancer. 250.000 nouveaux cas sont, diagnostiqués chaque année. Le cancer est donc une réalité grave pour les Français, soit parce qu'ils sont directement touchés par la maladie, soit parce que ce sont des proches, des amis, des collègues qu'elle affecte. Chaque jour, le cancer bouleverse des destinées. Chaque année, le cancer emporte 150.000 vies. Et, lorsque le cancer est vaincu - ce qui est le cas une fois sur deux -, c'est toujours au prix de traitements lourds, accompagnés de souffrances et de changements profonds dans la vie personnelle, familiale et professionnelle.
Mais la médecine avance. Les thérapeutiques gagnent en efficacité. Ces progrès sont dus à l'action des infirmières et des infirmiers, des soignantes et des soignants, des médecins, des chercheurs, des personnels administratifs et des bénévoles des associations, qui tous ont fait du cancer la cible de leur engagement. Ici, en ce lieu symbolique du combat contre la maladie, je souhaite leur rendre hommage.
Le combat contre le cancer est d'abord mené par les malades eux-mêmes. Longtemps, les personnes atteintes d'un cancer se sont senties exclues de la société. Trop peu était fait pour les aider à vivre et à travailler avec la maladie, malgré la maladie. Et, lorsque l'hospitalisation devenait nécessaire, l'accompagnement était trop rare. Trop souvent, en particulier, le malade restait seul face à la souffrance.
C'est pourquoi, en 1998, le Gouvernement a veillé à ce que tout soit entrepris pour alléger les souffrances psychologiques et physiques des malades. Dans notre société, la souffrance est inacceptable. La lutte contre la douleur doit faire partie de la prise en charge de tout malade, quel que soit son âge. Tel est le sens des deux plans triennaux qui ont été mis en oeuvre pour lutter contre la douleur et développer les soins palliatifs. Un nouveau plan de lutte contre la douleur , d'un montant de 155 millions de francs pour l'année 2002, va être annoncé à la, mi-décembre par le ministre délégué à la Santé, Bernard KOUCHNER. La maladie de l'enfant est plus insupportable encore. Il nous a donc paru essentiel de permettre aux parents de se rapprocher de leur enfant malade. C'est pourquoi, en juin 2000, le Gouvernement a créé un congé " enfant malade " assorti d'une allocation de présence parentale, dont le coût prévu est de 200 millions de francs par an.
C'est dans une perspective semblable - penser la place du malade au sein de notre société - que la Ligue contre le Cancer a pris la remarquable initiative, en 1998, d'organiser les Etats généraux du cancer. Pour la première fois, des malades et des anciens malades, leurs familles, toutes celles et tous ceux qui étaient concernés se sont exprimés publiquement, faisant part de leurs souffrances et de leurs difficultés, en un mot de leur vécu. Profondément marqué par ces témoignages ,j'ai demandé, en clôture des Etats généraux de la santé de juin 1999, que soit consacrée la reconnaissance des droits de la personne malade. Tel est l'objet d'un projet de loi déjà examiné en première lecture par l'Assemblée nationale et dont mon objectif est qu'il soit définitivement adopté avant la fin de la session parlementaire.
Ce projet de loi doit beaucoup aux associations de malades en charge d'affections graves. Il réaffirme avec force les droits qui doivent être reconnus à toute personne malade: droit au respect de la dignité, à la non-discrimination, à la confidentialité, au respect du secret médical, de l'intimité et de la vie privée ; droit à être informé, au respect du consentement et à l'accès direct au dossier médical. Ce dernier droit est primordial: le droit à la connaissance est utile à la participation active des malades à leur traitement et donc à leur lutte contre la maladie. Cette connaissance doit passer, autant que possible, par un dialogue avec le médecin traitant permettant l'information, l'explication et, finalement, la décision. Le temps du dialogue est devenu aussi important que le temps, opératoire. C'est dans cet esprit que des consultations consacrées à l'annonce du diagnostic et à l'information qui l'accompagne seront prochainement mises en place. Affirmer les droits de la personne malade, c'est donc lui permettre d'être partie prenante dans la relation qui la lie à ses soignants; c'est renforcer le lien soigné-soignant. Cette évolution marque aussi un progrès de la démocratie, car elle rend chacun davantage responsable de sa santé, donc de lui-même et de son avenir. En ce sens, elle marque la naissance d'une authentique démocratie sanitaire.
Mesdames, Messieurs,
Dans un lieu comme celui-ci, où chacun pense à la fragilité de la vie, et côtoie la mort, comment ne pas évoquer la si lourde question de l'accompagnement des derniers instants de la vie ? Les lois de notre .démocratie, les principes de plusieurs courants de pensée condamnent l'euthanasie. Mais des hommes et des femmes la revendiquent. Soit, en tant que praticien, comme une réponse à la détresse ultime d'un patient; je sais en particulier que les réanimateurs, en l'état actuel de la loi, sont placés dans une situation extrêmement difficile et il faudra qu'une réponse spécifique leur soit apportée. Soit, pour eux-mêmes, comme l'expression de la liberté irréductible de chaque individu. J'écoute avec beaucoup d'attention les propos tenus - avec pudeur, mais aussi avec force et conviction - par les uns et les autres. Je m'interroge. Je le fais devant vous avec le sentiment que ce sujet, dont la gravité ne supporte pas la polémique, appelle et sans doute exige, au sein de notre société, une réflexion apaisée et respectueuse des sensibilités de chacun. Nous devons examiner ensemble comment l'engager.
Je vous ai livré, en tant qu'homme, une part des interrogations que m'inspirent ce lieu et le combat qui y est conduit. Je voudrais maintenant, en tant que Premier ministre, évoquer devant vous l'ambitieux plan de lutte contre le cancer que le Gouvernement a décidé de mettre en oeuvre.
Avec l'aide des professionnels, plusieurs ministres de mon gouvernement - Martine AUBRY, puis Elizabeth GUIGOU, ministres de l'Emploi et de la Solidarité, Bernard KOUCHNER et Dominique GILLOT, ministres délégués à la Santé- ont mené une réflexion globale sur le cancer dont l'objectif était l'élaboration d'un plan national de lutte contre le cancer.
Annoncé en février 2000, ce plan poursuit cinq objectifs.
* Réduire les risques du cancer par une prévention adaptée. Un nombre important de cancers peuvent en effet être évités. Le Gouvernement a donc décidé de sensibiliser nos concitoyens aux risques que certaines pratiques leur font courir - je pense en particulier au tabac, responsable de 60.000 décès chaque année. Améliorer l'information de nos concitoyens, c'est contribuer à réduire ces risques.
* Le deuxième objectif est de généraliser les programmes de dépistage performants. Ainsi, le dépistage du cancer- du sein est dès maintenant généralisé. Les dépistages du cancer du colon et du cancer du col utérin le seront en 2003.
* Favoriser la qualité de la prise en charge est le troisième objectif.
* Le quatrième est l'amélioration des conditions de vie des malades.
* Il faut enfin poursuivre et organiser l'effort de recherche.
Je ne détaillerai pas l'ensemble de ce plan que vous connaissez pour avoir largement contribué à son élaboration. Je souhaiterais toutefois m'arrêter sur deux de ses objectifs. La qualité de la prise en charge des patients, tout d'abord. La recherche, ensuite.
Pour être améliorée, la prise en charge doit être organisée au sein de réseaux et, devenir véritablement pluridisciplinaire et coordonnée. La mise en place de réseaux de soins incluant les sites de référence, les sites à orientation cancérologique, les sites de proximité et les médecins traitants est nécessaire. La réorganisation de la cancérologie, reconnue comme une priorité d'action dans toutes les régions, est en cours depuis 1998. Elle sera achevée en 2004. Au sein de ces réseaux, les pratiques doivent être harmonisées et la prise en charge, je l'ai dit, pluridisciplinaire; radiothérapeutes, oncologues, chirurgiens et médecins traitants doivent travailler ensemble pour qu'en l'état actuel de l'art, un cancer soit aussi bien traité en tout point du .territoire national, à l'hôpital comme en clinique, c'est-à-dire avec des traitements similaires et évalués. A ces spécialistes doivent s'associer, d'une part, les équipes de soins palliatifs et de lutte contre la douleur auxquelles 380 millions de francs ont été attribués entre 1999 et 2001 et, d'autre part, des psychologues à l'installation desquels 30 millions de francs sont affectés sur les années 2001 et 2002.
Pour améliorer la prise en charge des patients, nous avons aussi décidé de soutenir l'accès aux thérapeutiques innovantes dans le domaine du cancer. Les bouleversements qu'a connus la biologie cellulaire commencent à porter leurs fruits et de nouvelles molécules vont sans doute modifier le pronostic de certains cancers. Il en est ainsi de l'Herceptine .pour le cancer du sein et du Maptera pour le lymphome. Ces avancées constituent un espoir pour l'avenir. Il est donc de notre devoir d'agir vite et de renforcer la mise en place d'un système permettant à tous ceux qui en ont besoin de bénéficier de ces nouvelles molécules, dont le coût élevé ne peut pas constituer un obstacle à leur utilisation, mais une incitation au respect de leur bon usage.
Tel est l'objectif des contrats bi-annuels pour les thérapeutiques innovantes que nous venons de mettre en place au titre des budgets 2001-2002. Un milliard de francs a été affecté à ces contrats en 2001, dont 500 millions de francs pour les seules thérapeutiques anti-cancéreuses.
En 2002, les contrats bénéficieront d' 1,82 milliard de francs, dont 540 millions pour les médicaments du cancer. Au- total, c'est plus d'un milliard de francs qui est spécifiquement consacré en 2001 et en 2002 aux nouveaux traitements du cancer. Jamais un tel effort n'avait été entrepris. Ainsi sera financé, au sein d'équipes choisies pour leur expertise, l'accès des patients à ces nouvelles molécules. Une diffusion plus large en sera réalisée dans l'avenir immédiat si l'évaluation effectuée par ces centres est concluante.
D'autres initiatives sont prises pour améliorer- l'offre de soins, en particulier dans le domaine de l'imagerie médicale et de la radiothérapie. Ainsi, 94 nouvelles autorisations d'imagerie par résonance magnétique ont été accordées en 2001, tandis que Bernard KOUCHNER vient d'annoncer que les indices de la carte sanitaire seront élargis et les décisions déléguées aux régions. En outre, dix nouvelles autorisations de tomographie à émission de positons ont été accordées au titre de l'année 2001, en attendant qu'une expertise propre à chaque cancer menée sur le terrain permette de préciser les besoins réels dans cette nouvelle technique. Enfin, quarante nouvelles installations de radiothérapie devraient être autorisées en 2002, suivant les recommandations des professionnels. Les équipes hospitalières seront renforcées. Une nouvelle nomenclature des actes de radiothérapie va prochainement être mise en place.
C'est à la frontière de la médecine de soin et de la recherche que se situe l'initiative prise, au profit des malades, par l'Institut Curie, l'Institut Gustave-Roussy et l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris. Vous avez eu raison de réagir contre le brevet Myriad-Genetics. Il est inacceptable que soient brevetés et exploités commercialement les produits du corps humain. j'ajoute que non seulement ces tests ne détectent pas toutes les mutations, mais, surtout, qu'il est inadmissible qu'une entreprise privée constitue une banque de données sur les personnes à risque du cancer du sein. Cela est absolument contraire aux règles éthiques et de confidentialité que nous appliquons en France. C'est dans le respect de ces règles que sera rédigé le projet de loi transposant la directive européenne relative à la protection des inventions biotechnologiques.
La recherche est le second objectif du plan de lutte contre le cancer ,sur lequel je veux insister. Les sciences de la vie sont une priorité du ministère de la Recherche. A cet effet, sur une initiative de Roger-Gérard SCHWARTZENBERG, plus de 14,7 milliards de francs ont (été engagés sur le Budget civil de la Recherche et du Développement technologique pour l'année 2001, soit 24,8 % des crédits publics de recherche. Sur ces derniers, 8,6 milliards de francs concernent directement la recherche biomédicale.
Grâce à ces moyens, nous voulons en particulier faire avancer la génomique. Prévenir le cancer, mieux établir son pronostic, déterminer et suivre son traitement, tel est le sens du programme " Carte d'identité tumorale " qu'a engagé la Ligue contre le Cancer, en partenariat avec le ministère de la Recherche. C'est la première dimension de la génomique fonctionnelle appliquée au cancer, développée en collaboration avec le génopole d'Evry. Il convient d'identifier des gènes de susceptibilité, dont la mutation provoque ou favorise la survenue du cancer. Dans le même temps, il convient de développer la pharmacogénomique, c'est-à-dire identifier de nouvelles cibles thérapeutiques. Pour pouvoir établir cette " carte d'identité tumorale ", il est nécessaire d ' opérer une collecte des tumeurs dans des conditions techniques et éthiques irréprochables. Telle est la raison de la création des centres de ressources biologiques et plus particulièrement des " banques hospitalières de tumeurs ".
Ce programme hospitalier de 10 millions de francs, engagé par Bernard Kouchner, vient compléter le programme de recherche lancé par Roger-Gérard SCHWARTZENBERG avec L'INSERM à hauteur de 14 millions de francs. Dans ce vaste programme, l'Institut Gustave-Roussy doit, grâce aux, moyens et aux compétences dont il dispose et en collaboration avec le Génopole d' Evry et 1'Institut Fédératif de Recherche, constituer un des pôles majeurs de la recherche " génomique et cancer ", qui sera une priorité du sixième programme
Mesdames, Messieurs,
En venant ici, je savais que l'Institut Gustave-Roussy était un lieu d'excellence.
Un des rares endroits dans le monde où se concentrent avec une telle intensité le talent des femmes et des hommes, la qualité de la recherche scientifique, la puissance des moyens techniques. Cette Excellence, le Gouvernement se tient à vos côtés pour la porter plus haut encore.
Mais en vous voyant ici tous réunis, en pensant au travail si exigeant que vous accomplissez jour après jour, en songeant aux malades que vous prenez en charge et que vous accompagnez, je me dis aussi que l'Institut Gustave-Roussy, grâce à vous tous, est un lieu de vie et un lieu d'espoir. Cet espoir, Mesdames et Messieurs, c'est toute une société qui le porte avec vous.
(source http://www.igr.fr, le 23 janvier 2002)