Interview de M. Claude Goasguen, vice-président et porte-parole de Démocratie libérale, dans "Le Journal du Dimanche" du 20 janvier 2002, sur l'éventualité d'une réforme du Conseil constitutionnel.

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Intervenant(s) : 
  • Claude Goasguen - Vice-président et porte-parole de Démocratie libérale

Média : Le Journal du Dimanche

Texte intégral

Si, effectivement, sur l'article 1er, nous avons été un certain nombre à nous abstenir parce qu'il n'y a aucune raison de ne pas célébrer le souvenir de ceux, anciens combattants aussi, qui sont tombés en Indochine et dans tous les combats après 1945, et si, je le répète, nous restons favorables à l'établissement d'une journée du souvenir, sans exclusive, pour tous ceux qui sont tombés dans les guerres coloniales après 1945, en revanche, sur l'article 2, nous ne posons plus de questions. Car fixer au 19 mars la date anniversaire de cette journée du souvenir, c'est se mettre en contradiction avec le titre même de la proposition de loi. En effet, les accords d'Evian, dont on propose la célébration, ne concernaient ni la Tunisie ni le Maroc, mais essentiellement l'Algérie.

Je voudrais rappeler deux choses.
D'abord, après le 19 mars, le cessez-le-feu a été appliqué par la France et par la France seule, puisque c'est à partir de cette date que l'armée de libération nationale, qui était hors des frontières, est entrée en Algérie et que les massacres ont commencé. La prise d'Alger par l'armée de libération nationale, c'est le 3 août 1962. Par conséquent, laisser croire à l'opinion française que les accords d'Evian ont été respectés par leurs signataires algériens est une malhonnêteté historique.
Ensuite, on ne peut pas accepter, même avec les raisonnements les plus tortueux, d'exclure de l'énumération des victimes tous ceux qui sont tombés parce que les accords d'Evian n'ont pas été respectés par nos partenaires algériens : 700 militaires, 2 100 pieds-noirs, un nombre incalculable de Harkis, assassinés parce que les accords d'Evian n'étaient pas respectés ! Voilà la vérité ! Et vous voudriez faire de ces accords-là le symbole de la journée du souvenir ? Vous n'en avez pas le droit !
Enfin, je voudrais rappeler à tous ceux, dans cet hémicycle, qui avaient de la famille, des parents, des amis de l'autre côté de la Méditerranée que c'est à partir des accords d'Evian qu'a commencé cet exode que personne n'a oublié en France, l'exode des pieds-noirs, exclus de l'Algérie par un mécanisme qu'on ne qualifiait pas à l'époque d'" épuration ethnique ".Vous ne pouvez pas, chers collègues de la majorité, lutter contre l'épuration ethnique ailleurs et accepter celle qui a été réalisée en Algérie ! C'est l'histoire, certes. Au moins, ayons la décence, dans notre pays, de ne pas célébrer ce qui reste comme un échec de notre diplomatie et comme une tache, pour les gouvernants algériens de l'époque, sur des accords de paix.

La paix se fait à deux, elle n'est pas unilatérale. Le devoir de mémoire est un devoir bilatéral. Il n'est pas la repentance systématique devant ceux qui n'ont pas respecté leurs engagements. C'est la raison pour laquelle nous voterons contre l'article 2.

(Source http://www.claude-goasguen.org, le 1er février 2002)