Position de la France relative à la proposition soviétique sur le gel des armements nucléaires.

Prononcé le 1er juillet 1983

Intervenant(s) : 

Média : Bulletin d'information du ministère des relations extérieures

Texte intégral

La France, en réponse à la proposition de gel des armements nucléaires présentée par l'URSS, le 21 juin, a rappelé à Moscou qu'elle s'est déjà prononcée négativement sur une proposition similaire discutée lors de la dernière assemblée générale des nations unies.

La note remise aux autorités soviétiques souligne en particulier les raisons pour lesquelles un tel gel ne constituerait pas une contribution efficace à la recherche d'une réduction des arsenaux nucléaire, à commencer par ceux de l'URSS et des Etats-Unis :

  • un gel aboutirait à figer, pour une période qui ne serait pas nécessairement déterminée à l'avance, les déséquilibres existants.

- Ceci équivaut à conférer à tout état ayant effectué un effort d'armement important un avantage durable au détriment de ceux qui auraient montré de la modération.
- Les Etats dont la sécurité se trouverait affectée se verraient empêchés de procéder au rééquilibrage nécessaire.
- La situation qui en résulterait ne saurait être considérée comme une incitation à la négociation en vue de réductions vérifiables et substantielles entre les deux puissances nucléaires les plus armées.
- Un gel indifférencié et global, tel que celui proposé par l'aide-mémoire précité, serait largement invérifiable.
- Un grand nombre de ses aspects ne serait pas, de l'avis de la France, susceptibles d'être contrôlés par les seuls moyens techniques nationaux tandis que d'autres supposeraient que soient conduites au préalable des négociations très complexes et donc nécessairement longues en vue de déterminer quelles méthodes, y compris l'inspection sur place et l'observation internationales, apparaîtraient les plus appropriées. Un aspect important du problème résiderait dans l'égalité d'accès aux moyens de vérification.
- Ces discussions nécessaires sur la vérification ne seraient pas moins longues et complexes que les négociations concernant le même aspect dans le cadre d'efforts tendant à la réduction des armements.
- En faisant de la participation des autres puissances nucléaires la condition du maintien, en ce qui la concerne, du gel qu'elle propose, l'URSS paraît chercher à s'exonérer des responsabilités particulières qui, comme pour les Etats-Unis, découlent de son niveau actuel d'armement nucléaire.
- La France qui souhaite que les négociations en cours aboutissent, ne voit pas en quoi le gel proposesé aux autres puissances nucléaires, dont le niveau des forces est sans commune mesure avec celles des deux puissances actuellement engagées dans la négociation start, pourrait contribuer au progrès de ces négociations.
- Les différents moratoires qui ont été proposés dans le passé n'ont d'ailleurs jamais débouché sur des réductions significatives et vérifiables (dans un cas précis c'est l'URSS elle-même qui a pris l'initiative de lever le moratoire en question).

La France est sincèrement désireuse de dialogue et de paix.
- Elle considère que cette dernière passe, comme l'histoire l'a surabondamment démontré, par l'équilibre des forces en Europe comme dans le reste du monde, et que cet équilibre doit être assuré au plus bas niveau possible.
- C'est pourquoi le gouvernement français appuie les efforts entrepris, à commencer par ceux des Etats les plus armés, tendant à la recherche, par la négociation, d'un tel équilibre, qu'il s'agisse des armes conventionnelles ou nucléaires. Il souhaite leur aboutissement.
- La France participe d'autre part aux négociations en cours à Genève qui ont pour objet l'interdiction complète de la production des armes chimiques et de la destruction des stocks.

En ce qui concerne le désarmement nucléaire, la France, comme le sait l'Union Soviétique, n'exclut pas de s'y associer le moment venu et dans les conditions qu'elle a maintes fois précisées :

  • La réduction des arsenaux des deux superpuissances à des niveaux tels que l'on puisse considérer que l'écart entre les potentiels ait changé de nature.
  • La limitation quantitative et qualitative des systèmes stratégiques défensifs.
  • Des progès significatifs dans la réduction des déséquilibres conventionnels en Europe et la disparition de toute menace chimique.