Texte intégral
C'était une réunion sympathique, détendue, très bien conduite, de manière énergique et conforme au caractère d'un Gymnich, suffisamment informel pour que l'on puisse parler aisément des sujets, sans être obsédés par la négociation, la rédaction d'un texte, etc.
Nous avons essentiellement traité la question de l'élargissement mais aussi la question du Proche-Orient, ainsi que deux ou trois autres sujets.
Sur l'élargissement, nous sommes dans la phase décisive, puisque nous traitons des chapitres les plus lourds : la PAC, les fonds structurels et le financement. Nous voulons collectivement aboutir d'ici à la fin de l'année pour les pays qui viendront ensuite. Tenir un calendrier, tenir des positions communes, cela veut dire adopter des positions communes à Séville au mois de juin.
Le cadrage financier est très important, c'est le travail de la Commission. C'est difficile et je reconnais que ce travail est très lourd. C'est un bon document mais le problème est qu'il n'y a que très peu de marge. C'est pour cela que j'ai été amené à dire en séance que nous pensons qu'il faudrait un cadre plus rigoureux si nous voulons aboutir avec un budget acceptable qui ne nous échappe pas. On parle de chiffres qui sont considérés comme acceptables par la Commission, peut-être un peu trop importants, les autres prenant cela comme une base de départ indicative pour demander plus. Il faut donc être rigoureux, y compris dans la composition exacte.
Sur les aides directes agricoles, nous sommes d'accord. Avec les mesures précises type sécurité des centrales nucléaires, soutien institutionnel nous sommes aussi d'accord mais nous avons un problème avec l'action structurelle. Cela a été ajouté au cadre de Berlin, ce qui ne se justifie pas à notre avis et je ne suis même pas sûr que cela corresponde à des capacités d'absorption. Ceci mérite un échange.
D'autre part, concernant le calendrier, j'ai dit explicitement en séance hier que nous souhaitions aboutir le plus vite possible, avant Barcelone.
Par ailleurs, nous avons parlé ce matin du Proche-Orient. Notre discussion a fait apparaître une grande harmonie dans les positions autour d'une idée très simple, c'est que l'Union européenne doit continuer à présenter ses analyses, même si elles diffèrent de celles des Etats-Unis. Nous avons des convictions, nous poursuivons dans nos propositions. Toutes les propositions faites posent naturellement des problèmes de mise en oeuvre, mais il s'agit fondamentalement de relancer le volet politique. Nous sommes toujours d'accord sur les exigences à avoir sur le volet sécurité bien sûr, mais l'autre volet est le point faible car nous pensons qu'il faut, simultanément, parallèlement, relancer un volet politique et le nourrir. Il y a un certain nombre d'idées que vous connaissez : le soutien au plan Peres-Abou Ala, les élections, complétées éventuellement par un référendum, une conférence qui viendrait plus tard dans le processus. Il y a beaucoup de choses, mais ce ne sont pas des idées qui s'opposent, elles forment un tout. Ce sont des idées européennes pour relancer et nourrir le processus politique qui aujourd'hui est bloqué.
J'ai senti une grande harmonie sur ce plan. C'est un Gymnich, nous n'avons donc pas fait de texte, mais ceci résume bien nos entretiens.
Q - Il y a vraiment un consensus européen ?
R - Il y a un consensus sur le fait que l'Europe doit continuer à faire prévaloir ses idées. Il y a discussion sur chacun des points. Il ne s'agit pas d'organiser des élections, un référendum, ni la reconnaissance d'un Etat ni même une conférence, la semaine prochaine.
Il ne faut pas prendre cela comme une négociation du texte, il y a un consensus très fort au sein des Européens pour réveiller le volet politique, pour considérer que le problème du Proche-Orient ne doit pas être ramené uniquement à la question de la sécurité préalable ni à la question de la lutte contre le terrorisme, qui est très importante, mais qui ne suffit pas. Et d'ailleurs, on voit bien qu'un an de cette politique ne relance pas le processus. Ce qui est normal mais cela n'assure pas la sécurité non plus.
Les Européens ont leurs analyses. Elles sont diverses mais parfaitement complémentaires, parfaitement harmonieuses. Comment s'organiseront-elles dans le temps ? Nous verrons, le problème ne se pose pas maintenant. C'est ce message que nous voulons faire passer, il faut absolument réveiller le volet politique.
Q - Quelle est la prochaine étape ?
R - Nous continuons. Nous n'avons pas le pouvoir d'imposer, nous n'organisons pas les choses. Nous sommes dans un travail de dialogue, de persuasion.
Q - Vous avez parlé d'un plan ?
R - Non, je n'ai pas parlé d'un plan dans ce sens.
Aujourd'hui, nous avons à faire à un gouvernement israélien qui n'est pas sur cette ligne, à un président américain qui n'est pas non plus sur cette ligne, malgré quelques signes positifs que j'ai bien notés.
Il n'a pas accepté la demande de M. Sharon de "couper les ponts" avec M. Arafat. Il a exprimé deux ou trois projets avec des déclarations qui montrent un peu d'intérêt, un peu de compassion pour les populations palestiniennes. C'est bien, c'est un peu mieux qu'avant.
Nous voulons aller au-delà, nous voulons absolument réveiller la dimension politique qui n'existe plus. C'est cela l'originalité européenne.
Q - Les Américains rejettent ces idées en disant que ce n'est pas le moment ?
R - C'est possible, mais ils disent également qu'il ne faut pas traiter avec M. Arafat, nous-mêmes nous le faisons ; qu'il faut l'isoler, et nous allons le voir. Mais ceci ne nous empêchera pas de continuer avec des analyses, des propositions, de continuer de parler aux responsables américains, en leur disant qu'il faut traiter la sécurité et le volet politique simultanément.
Nous connaissons très bien les positions de départ des uns et des autres. Même dans ce que nous disons, certaines idées ne plaisent pas forcément aux Palestiniens comme une partie de la Déclaration de Laeken par exemple. Mais nous ne pouvons pas fabriquer une politique européenne uniquement fondée sur ce qui ne déplaît à personne.
Q - Mais cette position ne sera jamais clairement écrite. Ce ne sont que des idées ?
R - Ce sont des idées car, dans un Gymnich, nous ne faisons pas de déclarations. Il ne faut pas en déduire, du fait qu'il n'y a pas de déclaration, que nous n'avons pas voulu les écrire. C'est la nature de cette réunion et nous y tenons beaucoup.
Q - Y a-t-il une différence qui permettra de le dire dans les mois qui viennent ?
R - Peut-être, oui. Je pense que, petit à petit, les choses se clarifieront. Et à l'occasion d'un CAG ou d'un Conseil européen, nous irons plus loin.
Prenez l'exemple de Laeken : il y a eu une déclaration très forte. Nous demandons au gouvernement israélien de dire des choses précises, qui vont dans le sens inverse de ce qu'ils font en pratique. Nous demandons aux Palestiniens des choses beaucoup plus énergiques sur la question de la lutte contre le terrorisme.
Ce n'est pas arrivé si brusquement, cela a été préparé par des discussions informelles. Il y a également eu des déclarations lors d'un ou plusieurs CAG. Ensuite, cela a abouti à Laeken. Nous continuons, c'est une marche, nous progressons.
Je serais d'un avis différent si j'avais constaté un désaccord ce matin au sein des Quinze. Tout le monde sait qu'il faut faire des choses simultanément plutôt que de demander l'une pour obtenir la suivante.
C'est important, tout à fait encourageant pour poursuivre. Les Européens, aujourd'hui à Caceres sont encouragés à poursuivre une action et une expression fortes au Proche-Orient.
Q - Y a-t-il quelques éléments de débat ?
R - Pas en séance en tout cas.
Sur ce sujet, personne n'a désapprouvé mes déclarations ou celles de Patten.
Q - Ne pensez-vous pas que les Européens devraient se démarquer davantage ?
R - Nous ne cherchons pas à nous démarquer pour le plaisir, cela n'a pas d'intérêt. Par rapport à un pays aussi considérable que les Etats-Unis, notre souhait est quand même le partenariat. Il nous faut travailler ensemble, en se mettant d'accord. Si vous avez un accord entre les Etats-Unis et l'Europe, sur le reste du monde, l'impact est formidable. Mais - par euphémisme - si les gens ne cherchent pas ce partenariat ou cette coopération, nous devons agir par nous-mêmes et être seuls dans certains domaines. Nous avons été obligés de le faire durant l'année écoulée concernant le protocole de Kyoto.
Les Américains s'y opposaient pour des raisons que nous contestions. Nous avons dit que nous continuerions sans eux. Il y a donc des cas où nous ne parvenons pas à travailler avec eux. Nous avançons donc sans eux dans des cas où il faut s'opposer mais pas pour le plaisir, pas pour réveiller des guérillas d'un autre âge, mais parce que nous avons des convictions fondamentales pour le monde.
Nous respectons ce que les Américains font pour la gestion des Etats-Unis. Mais dans leur position particulière, les décisions qu'ils prennent ont un impact sur l'ensemble du monde. C'est quand même notre monde à nous tous et il est normal qu'il y ait un échange.
Nous ne nous démarquons pas pour le plaisir. Il faut que ce soit un vrai sujet, sur lequel nous ne pouvons pas accepter leurs positions, où nous avons de vrais intérêts légitimes. Il faut donc chercher à constituer une alternative.
Q - Et le vrai sujet est quand même l'augmentation considérable du budget militaire des Américains et le fait que les Européens exercent un mouvement inverse ?
R - S'il y a un sujet qui domine les autres, c'est de savoir comment nous devons gérer les affaires du monde, les questions globales, la gouvernance, le système multilatéral... Est-ce un pays qui, par son impact exceptionnel, gère les choses, ou gérons-nous cela ensemble ? Nous optons pour la seconde solution. Ce qui renvoie à toutes ces propositions très nombreuses que vous connaissez bien, que le gouvernement a faites depuis quelques années, sur l'architecture internationale. C'est la question qui regroupe toutes les autres. Ensuite, il y a toutes sortes de questions particulières.
Sur la question de la défense, nous n'en avons pas parlé. Cela viendra. Nous aurons forcément une occasion d'analyser les conséquences de cette augmentation et ses raisons.
Nous en parlerons à un autre moment, l'ordre du jour était déjà très important.
Q - Ce point de vue très différent des Européens et des Américains sur la manière de former des coalitions pour s'opposer aux menaces, n'avez-vous pas l'impression que le partenariat est en chute libre ?
Et sur le Proche-Orient, pour mettre en oeuvre ce que nous souhaitons en matière d'élections
R - Non, nous n'en sommes pas là.
Il s'agit essentiellement de ramener la discussion sur un terrain politique. Toutes ces interrogations sont bonnes, elles permettent d'approfondir la réflexion.
S'il devait y avoir des élections, comment les organiser ? Et la campagne électorale, pourrait-elle avoir lieu en présence de l'armée qui occupe ? Faut-il des observateurs internationaux ? La nature de la campagne ? Quel est le degré supplémentaire de démocratie et de transparence que cela nécessite ? Ce sont deux bonnes questions
Nous en sommes à gérer les bonnes questions à ce stade mais pas à raisonner sur la mise en uvre. Nous verrons.
L'essentiel je vous le redis, c'est cette idée d'élections, du référendum. L'idée de la reconnaissance de l'Etat au début du processus, ceci consiste à revenir sur le terrain politique alors que, depuis des mois, on n'entend qu'un discours de sécurité totale préalablement établie, pour penser à la suite. Mais c'est une impasse.
A ce stade, il n'est pas étonnant que les Israéliens et les Palestiniens réagissent de façon circonspecte. Ils se trouvent dans un blocage. Et si la politique européenne commence par écarter tout ce qui déplaît aux Américains, aux Israéliens, aux Arabes et aux Palestiniens, que reste-t-il ensuite ?
Nous avons donc notre raisonnement, notre analyse. Nous l'exprimons en écoutant les actions dont nous tenons compte.
Ceci nous permettra d'enrichir nos idées et peut-être pourrons-nous juger opportun de fixer les idées sous la forme d'une vraie proposition, une initiative, un vrai plan. Ce que nous n'avons pas fait pour le moment. Nous sommes en phase de réflexion ouverte mais nous savons ce que nous voulons. Nous allons continuer d'affirmer notre analyse et notre propre voie et remettre les choses sur le plan politique, c'est-à-dire le dénominateur commun de toutes les idées.
Q - Sur le partenariat ?
R - Bien sûr qu'aujourd'hui nous ne sommes pas dans un partenariat tel que nous le souhaiterions et c'est pour cela qu'hier, dans son discours, le Premier ministre disait qu'il souhaitait que les Etats-Unis se réengagent dans le système multilatéral. Et les Etats-Unis aujourd'hui ne se cachent pas d'être sur une autre ligne. Lorsqu'ils sont interpellés, ils disent qu'ils ne sont pas unilatéralistes mais donnent une définition de leur politique qui le confirme. Il faut donc composer. Ce sont nos alliés, nous sommes amis de ce peuple, nous devons continuer de parler. Même si c'est un peu dommage d'être obligé de hausser le ton pour se faire entendre et pour provoquer des réactions à la discussion. Mais nous y sommes conduits par les circonstances.
Q - Cette opposition de l'Union européenne aux Etats-Unis est-elle bien ancrée ou bien, est-ce encore fragile ?
R - Je constate que lorsque les Quinze souhaitent se mettre d'accord, pour donner un mandat de négociation commerciale par exemple, ils défendent leurs intérêts, ils ne les abandonnent pas.
Lorsque l'on parle de la question de l'environnement, car il y a une conscience beaucoup plus aiguë en Europe qu'aux Etats-Unis, il y a une certaine netteté européenne.
Mais là, nous parlons de sujets très difficiles. Le Proche-Orient est très sensible pour tout le monde et il a beaucoup divisé les Européens entre eux. Lorsque nous avons adopté le texte de Berlin en 1999, avec l'Etat palestinien, ce ne sont pas les Etats-Unis qui l'ont demandé. C'était dans un contexte différent, mais si vous demandez aux Etats-Unis s'il faut faire quelque chose, ils vous diront toujours, même si c'est une phase de grande compréhension, que ce n'est pas urgent. Ce ne seront donc pas eux qui nous demanderont d'avoir une expression plus forte.
Nous ne sommes jamais très encouragés. Mais sur des sujets sensibles comme le Proche-Orient, on progresse doucement.
Q - Sur l'élargissement.
R - Il y a d'innombrables problèmes sur cette question : de fond, d'articulation entre les promesses et la réalité, le financement, le calendrier, plein de choses qui augmenteront toute l'année. Nous adopterons des positions communes à Séville. Par rapport à cette année difficile et déterminante pour l'élargissement, il n'y a pas de raison que la France soit gênée. Nous avons toujours eu un langage qui, malheureusement, a été souvent déformé et travesti, injustement qualifié mais qui a toujours été un langage honnête. Nous avons toujours été pour tout en disant que cela ne suffisait pas, mais qu'il fallait mettre l'accent sur le fait que l'élargissement devait être sérieusement préparé, aussi bien par l'Union à travers ses réformes internes si difficiles soient-elles, que par les candidats. Nous avons toujours dit que les pays candidats n'avaient pas besoin d'avocats mais de négociateurs et de réformateurs. C'est un langage de respect des candidats. C'est un langage d'attachement aux intérêts fondamentaux de l'Union européen d'aujourd'hui et de demain. Nous n'avons donc pas changé. Et donc, nous ne sommes pas dans la position difficile de ceux qui doivent corriger brusquement leur langage en reprenant contact avec les réalités. Non. Mais nous tenterons de trouver tous ensemble la meilleure solution possible.
Q - Vous allez demander un cadrage financier à Barcelone. Mais M. Piqué dit que l'ordre du jour est trop chargé à Barcelone ?
R - Je suis étonné de ce que vous me dites, car M. Piqué a approuvé ce que je dis. Nous pensons qu'il faut adopter des positions très claires. Il y a deux étapes pour que la négociation d'élargissement puisse être menée à son terme d'ici à la fin de l'année comme nous le souhaitons, c'est Barcelone et Séville. Nous n'avons jamais demandé un report du calendrier. J'ai demandé en revanche que cette affaire soit clarifiée d'ici à Barcelone, pour que la Commission sache exactement sur quelle base elle négocie. Tous ceux qui sont pour l'élargissement, pour le respect des engagements et de la feuille de route, doivent être pour une clarification rapide.
On ne peut pas dire une chose et son contraire sans cesse.
Q - Pensez-vous à l'Allemagne ?
R - Non, je ne pense à personne en particulier. Cette affaire d'élargissement place tous les pays devant leurs contradictions. Ceci dépend de quelle politique commune nous parlons.
Q - Quelle est la prochaine étape pour le Proche-Orient ?
R - Cela pourrait partir par exemple du papier espagnol, qui est un non-papier puisqu'il est informel. Nous retravaillons, nous réfléchissons et nous arriverons peut-être à quelque chose pour le CAG. Pour nous, qui sommes chargés de l'élaboration du concept de fond et de la politique, il est aussi important de passer du temps à bien comprendre ce que nous pensons les uns et les autres que la sortie formelle du papier.
Lorsque je dis que Caceres est une bonne réunion, c'est parce que j'ai senti une harmonie, une cohérence.
Personne ne pense non plus que ceci ne sert à rien. Nous pensons que le réveil du camp de la paix d'Israël, qui est fragile, est un peu encouragé par la tonalité européenne.
Il y a quelques nuances du côté américain, des différences de déclarations de la Maison Blanche et de Colin Powell, même s'ils ne le reconnaissent pas. Nous pensons que nos positions ont joué un rôle. Là aussi il y a eu un accord, c'est important.
Nous agissons sans cesse, il n'y a pas à attendre une initiative européenne alors que nous sommes à l'oeuvre toute la journée. Ce ne sera pas très différent lorsque nous aurons inscrit cela dans un plan en 6 points.
Nous travaillons avec les moyens que l'on a, compte tenu des blocages que vous connaissez.
Q - Pensez-vous que vous pouvez organiser des élections dans les Territoires palestiniens sans demander leur avis aux Palestiniens ?
R - Si ce n'était que cela le message, l'Autorité palestinienne serait contre tout de suite. Ce n'est pas le cas, lorsque M. Arafat répond : "Cela dépend dans quel contexte elles s'insèrent, oui, bien sûr". Tout le monde sait bien que notre premier message c'est de dire que nous sommes face à une politique qui depuis des mois vise à "saper" les bases de l'Autorité palestinienne sous tous les prétextes, à contester même une expression palestinienne légitime, pour contester le fait même qu'il y ait un interlocuteur palestinien. Car en fait, ils ne souhaitent pas négocier.
Parler d'élections dans le cadre d'un processus ou d'un plan politique d'ensemble qui prendrait forme le moment venu, dans lequel il y aurait la reconnaissance de l'Etat, avec des élections, c'est une réponse forte. C'est le premier élément, la réponse politique à une entreprise insidieuse et constante de déstabilisation et de destruction des bases politiques et légitimes des Palestiniens. Ceci consiste à dire que, face à la crise actuelle, les Palestiniens sont asphyxiés, ils ont droit à un autre mode d'expression que l'attentat suicide. Il faut redonner une expression politique pour que les élections soient un défi pour l'Autorité palestinienne, le but numéro 1 n'étant pas de leur compliquer la tâche. Et je pense que si, à un moment donné, les conditions sont réunies pour qu'il y ait des élections, compte tenu de ce que M. Arafat représente historiquement, compte tenu du fait que la politique de Sharon en fait une sorte de martyre, un martyre symbolique de ce que vit le peuple palestinien, je pense qu'il l'emporterait. Et au contraire, il est probable qu'une perspective électorale poserait de sérieux problèmes aux autres forces en présence.
Nous avons beaucoup réfléchi sur la suite mais nous n'en sommes pas là. Nous devons parler des sujets politiques pour bien montrer qu'il faut ramener les choses sur ce terrain.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 février 2002)
Nous avons essentiellement traité la question de l'élargissement mais aussi la question du Proche-Orient, ainsi que deux ou trois autres sujets.
Sur l'élargissement, nous sommes dans la phase décisive, puisque nous traitons des chapitres les plus lourds : la PAC, les fonds structurels et le financement. Nous voulons collectivement aboutir d'ici à la fin de l'année pour les pays qui viendront ensuite. Tenir un calendrier, tenir des positions communes, cela veut dire adopter des positions communes à Séville au mois de juin.
Le cadrage financier est très important, c'est le travail de la Commission. C'est difficile et je reconnais que ce travail est très lourd. C'est un bon document mais le problème est qu'il n'y a que très peu de marge. C'est pour cela que j'ai été amené à dire en séance que nous pensons qu'il faudrait un cadre plus rigoureux si nous voulons aboutir avec un budget acceptable qui ne nous échappe pas. On parle de chiffres qui sont considérés comme acceptables par la Commission, peut-être un peu trop importants, les autres prenant cela comme une base de départ indicative pour demander plus. Il faut donc être rigoureux, y compris dans la composition exacte.
Sur les aides directes agricoles, nous sommes d'accord. Avec les mesures précises type sécurité des centrales nucléaires, soutien institutionnel nous sommes aussi d'accord mais nous avons un problème avec l'action structurelle. Cela a été ajouté au cadre de Berlin, ce qui ne se justifie pas à notre avis et je ne suis même pas sûr que cela corresponde à des capacités d'absorption. Ceci mérite un échange.
D'autre part, concernant le calendrier, j'ai dit explicitement en séance hier que nous souhaitions aboutir le plus vite possible, avant Barcelone.
Par ailleurs, nous avons parlé ce matin du Proche-Orient. Notre discussion a fait apparaître une grande harmonie dans les positions autour d'une idée très simple, c'est que l'Union européenne doit continuer à présenter ses analyses, même si elles diffèrent de celles des Etats-Unis. Nous avons des convictions, nous poursuivons dans nos propositions. Toutes les propositions faites posent naturellement des problèmes de mise en oeuvre, mais il s'agit fondamentalement de relancer le volet politique. Nous sommes toujours d'accord sur les exigences à avoir sur le volet sécurité bien sûr, mais l'autre volet est le point faible car nous pensons qu'il faut, simultanément, parallèlement, relancer un volet politique et le nourrir. Il y a un certain nombre d'idées que vous connaissez : le soutien au plan Peres-Abou Ala, les élections, complétées éventuellement par un référendum, une conférence qui viendrait plus tard dans le processus. Il y a beaucoup de choses, mais ce ne sont pas des idées qui s'opposent, elles forment un tout. Ce sont des idées européennes pour relancer et nourrir le processus politique qui aujourd'hui est bloqué.
J'ai senti une grande harmonie sur ce plan. C'est un Gymnich, nous n'avons donc pas fait de texte, mais ceci résume bien nos entretiens.
Q - Il y a vraiment un consensus européen ?
R - Il y a un consensus sur le fait que l'Europe doit continuer à faire prévaloir ses idées. Il y a discussion sur chacun des points. Il ne s'agit pas d'organiser des élections, un référendum, ni la reconnaissance d'un Etat ni même une conférence, la semaine prochaine.
Il ne faut pas prendre cela comme une négociation du texte, il y a un consensus très fort au sein des Européens pour réveiller le volet politique, pour considérer que le problème du Proche-Orient ne doit pas être ramené uniquement à la question de la sécurité préalable ni à la question de la lutte contre le terrorisme, qui est très importante, mais qui ne suffit pas. Et d'ailleurs, on voit bien qu'un an de cette politique ne relance pas le processus. Ce qui est normal mais cela n'assure pas la sécurité non plus.
Les Européens ont leurs analyses. Elles sont diverses mais parfaitement complémentaires, parfaitement harmonieuses. Comment s'organiseront-elles dans le temps ? Nous verrons, le problème ne se pose pas maintenant. C'est ce message que nous voulons faire passer, il faut absolument réveiller le volet politique.
Q - Quelle est la prochaine étape ?
R - Nous continuons. Nous n'avons pas le pouvoir d'imposer, nous n'organisons pas les choses. Nous sommes dans un travail de dialogue, de persuasion.
Q - Vous avez parlé d'un plan ?
R - Non, je n'ai pas parlé d'un plan dans ce sens.
Aujourd'hui, nous avons à faire à un gouvernement israélien qui n'est pas sur cette ligne, à un président américain qui n'est pas non plus sur cette ligne, malgré quelques signes positifs que j'ai bien notés.
Il n'a pas accepté la demande de M. Sharon de "couper les ponts" avec M. Arafat. Il a exprimé deux ou trois projets avec des déclarations qui montrent un peu d'intérêt, un peu de compassion pour les populations palestiniennes. C'est bien, c'est un peu mieux qu'avant.
Nous voulons aller au-delà, nous voulons absolument réveiller la dimension politique qui n'existe plus. C'est cela l'originalité européenne.
Q - Les Américains rejettent ces idées en disant que ce n'est pas le moment ?
R - C'est possible, mais ils disent également qu'il ne faut pas traiter avec M. Arafat, nous-mêmes nous le faisons ; qu'il faut l'isoler, et nous allons le voir. Mais ceci ne nous empêchera pas de continuer avec des analyses, des propositions, de continuer de parler aux responsables américains, en leur disant qu'il faut traiter la sécurité et le volet politique simultanément.
Nous connaissons très bien les positions de départ des uns et des autres. Même dans ce que nous disons, certaines idées ne plaisent pas forcément aux Palestiniens comme une partie de la Déclaration de Laeken par exemple. Mais nous ne pouvons pas fabriquer une politique européenne uniquement fondée sur ce qui ne déplaît à personne.
Q - Mais cette position ne sera jamais clairement écrite. Ce ne sont que des idées ?
R - Ce sont des idées car, dans un Gymnich, nous ne faisons pas de déclarations. Il ne faut pas en déduire, du fait qu'il n'y a pas de déclaration, que nous n'avons pas voulu les écrire. C'est la nature de cette réunion et nous y tenons beaucoup.
Q - Y a-t-il une différence qui permettra de le dire dans les mois qui viennent ?
R - Peut-être, oui. Je pense que, petit à petit, les choses se clarifieront. Et à l'occasion d'un CAG ou d'un Conseil européen, nous irons plus loin.
Prenez l'exemple de Laeken : il y a eu une déclaration très forte. Nous demandons au gouvernement israélien de dire des choses précises, qui vont dans le sens inverse de ce qu'ils font en pratique. Nous demandons aux Palestiniens des choses beaucoup plus énergiques sur la question de la lutte contre le terrorisme.
Ce n'est pas arrivé si brusquement, cela a été préparé par des discussions informelles. Il y a également eu des déclarations lors d'un ou plusieurs CAG. Ensuite, cela a abouti à Laeken. Nous continuons, c'est une marche, nous progressons.
Je serais d'un avis différent si j'avais constaté un désaccord ce matin au sein des Quinze. Tout le monde sait qu'il faut faire des choses simultanément plutôt que de demander l'une pour obtenir la suivante.
C'est important, tout à fait encourageant pour poursuivre. Les Européens, aujourd'hui à Caceres sont encouragés à poursuivre une action et une expression fortes au Proche-Orient.
Q - Y a-t-il quelques éléments de débat ?
R - Pas en séance en tout cas.
Sur ce sujet, personne n'a désapprouvé mes déclarations ou celles de Patten.
Q - Ne pensez-vous pas que les Européens devraient se démarquer davantage ?
R - Nous ne cherchons pas à nous démarquer pour le plaisir, cela n'a pas d'intérêt. Par rapport à un pays aussi considérable que les Etats-Unis, notre souhait est quand même le partenariat. Il nous faut travailler ensemble, en se mettant d'accord. Si vous avez un accord entre les Etats-Unis et l'Europe, sur le reste du monde, l'impact est formidable. Mais - par euphémisme - si les gens ne cherchent pas ce partenariat ou cette coopération, nous devons agir par nous-mêmes et être seuls dans certains domaines. Nous avons été obligés de le faire durant l'année écoulée concernant le protocole de Kyoto.
Les Américains s'y opposaient pour des raisons que nous contestions. Nous avons dit que nous continuerions sans eux. Il y a donc des cas où nous ne parvenons pas à travailler avec eux. Nous avançons donc sans eux dans des cas où il faut s'opposer mais pas pour le plaisir, pas pour réveiller des guérillas d'un autre âge, mais parce que nous avons des convictions fondamentales pour le monde.
Nous respectons ce que les Américains font pour la gestion des Etats-Unis. Mais dans leur position particulière, les décisions qu'ils prennent ont un impact sur l'ensemble du monde. C'est quand même notre monde à nous tous et il est normal qu'il y ait un échange.
Nous ne nous démarquons pas pour le plaisir. Il faut que ce soit un vrai sujet, sur lequel nous ne pouvons pas accepter leurs positions, où nous avons de vrais intérêts légitimes. Il faut donc chercher à constituer une alternative.
Q - Et le vrai sujet est quand même l'augmentation considérable du budget militaire des Américains et le fait que les Européens exercent un mouvement inverse ?
R - S'il y a un sujet qui domine les autres, c'est de savoir comment nous devons gérer les affaires du monde, les questions globales, la gouvernance, le système multilatéral... Est-ce un pays qui, par son impact exceptionnel, gère les choses, ou gérons-nous cela ensemble ? Nous optons pour la seconde solution. Ce qui renvoie à toutes ces propositions très nombreuses que vous connaissez bien, que le gouvernement a faites depuis quelques années, sur l'architecture internationale. C'est la question qui regroupe toutes les autres. Ensuite, il y a toutes sortes de questions particulières.
Sur la question de la défense, nous n'en avons pas parlé. Cela viendra. Nous aurons forcément une occasion d'analyser les conséquences de cette augmentation et ses raisons.
Nous en parlerons à un autre moment, l'ordre du jour était déjà très important.
Q - Ce point de vue très différent des Européens et des Américains sur la manière de former des coalitions pour s'opposer aux menaces, n'avez-vous pas l'impression que le partenariat est en chute libre ?
Et sur le Proche-Orient, pour mettre en oeuvre ce que nous souhaitons en matière d'élections
R - Non, nous n'en sommes pas là.
Il s'agit essentiellement de ramener la discussion sur un terrain politique. Toutes ces interrogations sont bonnes, elles permettent d'approfondir la réflexion.
S'il devait y avoir des élections, comment les organiser ? Et la campagne électorale, pourrait-elle avoir lieu en présence de l'armée qui occupe ? Faut-il des observateurs internationaux ? La nature de la campagne ? Quel est le degré supplémentaire de démocratie et de transparence que cela nécessite ? Ce sont deux bonnes questions
Nous en sommes à gérer les bonnes questions à ce stade mais pas à raisonner sur la mise en uvre. Nous verrons.
L'essentiel je vous le redis, c'est cette idée d'élections, du référendum. L'idée de la reconnaissance de l'Etat au début du processus, ceci consiste à revenir sur le terrain politique alors que, depuis des mois, on n'entend qu'un discours de sécurité totale préalablement établie, pour penser à la suite. Mais c'est une impasse.
A ce stade, il n'est pas étonnant que les Israéliens et les Palestiniens réagissent de façon circonspecte. Ils se trouvent dans un blocage. Et si la politique européenne commence par écarter tout ce qui déplaît aux Américains, aux Israéliens, aux Arabes et aux Palestiniens, que reste-t-il ensuite ?
Nous avons donc notre raisonnement, notre analyse. Nous l'exprimons en écoutant les actions dont nous tenons compte.
Ceci nous permettra d'enrichir nos idées et peut-être pourrons-nous juger opportun de fixer les idées sous la forme d'une vraie proposition, une initiative, un vrai plan. Ce que nous n'avons pas fait pour le moment. Nous sommes en phase de réflexion ouverte mais nous savons ce que nous voulons. Nous allons continuer d'affirmer notre analyse et notre propre voie et remettre les choses sur le plan politique, c'est-à-dire le dénominateur commun de toutes les idées.
Q - Sur le partenariat ?
R - Bien sûr qu'aujourd'hui nous ne sommes pas dans un partenariat tel que nous le souhaiterions et c'est pour cela qu'hier, dans son discours, le Premier ministre disait qu'il souhaitait que les Etats-Unis se réengagent dans le système multilatéral. Et les Etats-Unis aujourd'hui ne se cachent pas d'être sur une autre ligne. Lorsqu'ils sont interpellés, ils disent qu'ils ne sont pas unilatéralistes mais donnent une définition de leur politique qui le confirme. Il faut donc composer. Ce sont nos alliés, nous sommes amis de ce peuple, nous devons continuer de parler. Même si c'est un peu dommage d'être obligé de hausser le ton pour se faire entendre et pour provoquer des réactions à la discussion. Mais nous y sommes conduits par les circonstances.
Q - Cette opposition de l'Union européenne aux Etats-Unis est-elle bien ancrée ou bien, est-ce encore fragile ?
R - Je constate que lorsque les Quinze souhaitent se mettre d'accord, pour donner un mandat de négociation commerciale par exemple, ils défendent leurs intérêts, ils ne les abandonnent pas.
Lorsque l'on parle de la question de l'environnement, car il y a une conscience beaucoup plus aiguë en Europe qu'aux Etats-Unis, il y a une certaine netteté européenne.
Mais là, nous parlons de sujets très difficiles. Le Proche-Orient est très sensible pour tout le monde et il a beaucoup divisé les Européens entre eux. Lorsque nous avons adopté le texte de Berlin en 1999, avec l'Etat palestinien, ce ne sont pas les Etats-Unis qui l'ont demandé. C'était dans un contexte différent, mais si vous demandez aux Etats-Unis s'il faut faire quelque chose, ils vous diront toujours, même si c'est une phase de grande compréhension, que ce n'est pas urgent. Ce ne seront donc pas eux qui nous demanderont d'avoir une expression plus forte.
Nous ne sommes jamais très encouragés. Mais sur des sujets sensibles comme le Proche-Orient, on progresse doucement.
Q - Sur l'élargissement.
R - Il y a d'innombrables problèmes sur cette question : de fond, d'articulation entre les promesses et la réalité, le financement, le calendrier, plein de choses qui augmenteront toute l'année. Nous adopterons des positions communes à Séville. Par rapport à cette année difficile et déterminante pour l'élargissement, il n'y a pas de raison que la France soit gênée. Nous avons toujours eu un langage qui, malheureusement, a été souvent déformé et travesti, injustement qualifié mais qui a toujours été un langage honnête. Nous avons toujours été pour tout en disant que cela ne suffisait pas, mais qu'il fallait mettre l'accent sur le fait que l'élargissement devait être sérieusement préparé, aussi bien par l'Union à travers ses réformes internes si difficiles soient-elles, que par les candidats. Nous avons toujours dit que les pays candidats n'avaient pas besoin d'avocats mais de négociateurs et de réformateurs. C'est un langage de respect des candidats. C'est un langage d'attachement aux intérêts fondamentaux de l'Union européen d'aujourd'hui et de demain. Nous n'avons donc pas changé. Et donc, nous ne sommes pas dans la position difficile de ceux qui doivent corriger brusquement leur langage en reprenant contact avec les réalités. Non. Mais nous tenterons de trouver tous ensemble la meilleure solution possible.
Q - Vous allez demander un cadrage financier à Barcelone. Mais M. Piqué dit que l'ordre du jour est trop chargé à Barcelone ?
R - Je suis étonné de ce que vous me dites, car M. Piqué a approuvé ce que je dis. Nous pensons qu'il faut adopter des positions très claires. Il y a deux étapes pour que la négociation d'élargissement puisse être menée à son terme d'ici à la fin de l'année comme nous le souhaitons, c'est Barcelone et Séville. Nous n'avons jamais demandé un report du calendrier. J'ai demandé en revanche que cette affaire soit clarifiée d'ici à Barcelone, pour que la Commission sache exactement sur quelle base elle négocie. Tous ceux qui sont pour l'élargissement, pour le respect des engagements et de la feuille de route, doivent être pour une clarification rapide.
On ne peut pas dire une chose et son contraire sans cesse.
Q - Pensez-vous à l'Allemagne ?
R - Non, je ne pense à personne en particulier. Cette affaire d'élargissement place tous les pays devant leurs contradictions. Ceci dépend de quelle politique commune nous parlons.
Q - Quelle est la prochaine étape pour le Proche-Orient ?
R - Cela pourrait partir par exemple du papier espagnol, qui est un non-papier puisqu'il est informel. Nous retravaillons, nous réfléchissons et nous arriverons peut-être à quelque chose pour le CAG. Pour nous, qui sommes chargés de l'élaboration du concept de fond et de la politique, il est aussi important de passer du temps à bien comprendre ce que nous pensons les uns et les autres que la sortie formelle du papier.
Lorsque je dis que Caceres est une bonne réunion, c'est parce que j'ai senti une harmonie, une cohérence.
Personne ne pense non plus que ceci ne sert à rien. Nous pensons que le réveil du camp de la paix d'Israël, qui est fragile, est un peu encouragé par la tonalité européenne.
Il y a quelques nuances du côté américain, des différences de déclarations de la Maison Blanche et de Colin Powell, même s'ils ne le reconnaissent pas. Nous pensons que nos positions ont joué un rôle. Là aussi il y a eu un accord, c'est important.
Nous agissons sans cesse, il n'y a pas à attendre une initiative européenne alors que nous sommes à l'oeuvre toute la journée. Ce ne sera pas très différent lorsque nous aurons inscrit cela dans un plan en 6 points.
Nous travaillons avec les moyens que l'on a, compte tenu des blocages que vous connaissez.
Q - Pensez-vous que vous pouvez organiser des élections dans les Territoires palestiniens sans demander leur avis aux Palestiniens ?
R - Si ce n'était que cela le message, l'Autorité palestinienne serait contre tout de suite. Ce n'est pas le cas, lorsque M. Arafat répond : "Cela dépend dans quel contexte elles s'insèrent, oui, bien sûr". Tout le monde sait bien que notre premier message c'est de dire que nous sommes face à une politique qui depuis des mois vise à "saper" les bases de l'Autorité palestinienne sous tous les prétextes, à contester même une expression palestinienne légitime, pour contester le fait même qu'il y ait un interlocuteur palestinien. Car en fait, ils ne souhaitent pas négocier.
Parler d'élections dans le cadre d'un processus ou d'un plan politique d'ensemble qui prendrait forme le moment venu, dans lequel il y aurait la reconnaissance de l'Etat, avec des élections, c'est une réponse forte. C'est le premier élément, la réponse politique à une entreprise insidieuse et constante de déstabilisation et de destruction des bases politiques et légitimes des Palestiniens. Ceci consiste à dire que, face à la crise actuelle, les Palestiniens sont asphyxiés, ils ont droit à un autre mode d'expression que l'attentat suicide. Il faut redonner une expression politique pour que les élections soient un défi pour l'Autorité palestinienne, le but numéro 1 n'étant pas de leur compliquer la tâche. Et je pense que si, à un moment donné, les conditions sont réunies pour qu'il y ait des élections, compte tenu de ce que M. Arafat représente historiquement, compte tenu du fait que la politique de Sharon en fait une sorte de martyre, un martyre symbolique de ce que vit le peuple palestinien, je pense qu'il l'emporterait. Et au contraire, il est probable qu'une perspective électorale poserait de sérieux problèmes aux autres forces en présence.
Nous avons beaucoup réfléchi sur la suite mais nous n'en sommes pas là. Nous devons parler des sujets politiques pour bien montrer qu'il faut ramener les choses sur ce terrain.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 février 2002)