Déclaration de Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, sur la mise en place du dispositif et la préparation des élections prud'homales du 11 décembre 2002.

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Circonstance : Elections prud'homales le 11 décembre 2002

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,
L'année 2002 sera naturellement marquée par deux scrutins politiques particulièrement importants. Mais elle le sera aussi par les élections générales prud'homales qui se dérouleront le mercredi 11 décembre.
Ce scrutin est porteur d'enjeux majeurs pour l'ensemble du monde du travail.
1/ Le premier tient naturellement à l'élection des juges du travail, les conseillers prud'hommes.
Vous savez qu'ils ont un rôle décisif dans notre système de régulation sociale puisqu'ils sont saisis de tous les litiges nés du contrat de travail. Leur intervention est souvent délicate puisqu'ils interviennent par définition lorsque l'employeur et le salarié n'ont pas pu trouver un terrain d'entente. Ils doivent d'abord tenter de concilier les parties. En cas d'échec, ils jugent l'affaire, au besoin avec le concours actif d'un magistrat professionnel, le juge départiteur lorsque les conseillers qui siègent paritairement, n'ont pu aboutir à une décision. Mais cela ne représente que 10 % des affaires, ce qui montre bien la capacité des conseillers prud'hommes à juger d'abord en droit.
La qualité de leurs décisions ne peut guère être contestée lorsque l'on voit que les Cours d'appel confirment 70 % des jugements rendus en première instance par les conseils de prud'hommes.
Enfin la durée de jugement est bien sûr variable selon les conseils, cela va plus vite dans les petits que dans les gros en règle générale, mais la durée moyenne est stable et elle s'établit à 10 mois et demi, ce qui est très proche des tribunaux de droit commun, comme par exemple les tribunaux d'instances.
Les conseils de prud'hommes jugent ainsi plus de 170 000 affaires par an auxquelles il faut ajouter environ 50 000 affaires en référé.
C'est donc une juridiction essentielle simple et de proximité, à laquelle les organisations professionnelles et syndicales sont très attachées, à juste titre. Elle fait partie intégrante de notre système de relations professionnelles.
Il s'agira donc d'abord le 11 décembre prochain d'élire au total près de 15 000 conseillers employeurs et salariés.
C'est un effort considérable pour ces organisations qui sont déjà en train de constituer leurs listes de candidatures. Je souhaite saluer l'engagement que représente pour un salarié ou pour un employeur le fait de consacrer une partie de son temps à participer au fonctionnement de notre système judiciaire. Pour ma part, je veillerai à mettre à disposition des Instituts de formation des conseillers prud'hommes les moyens nécessaires pour que les nouveaux conseillers bénéficient, dans les meilleurs délais, de la formation nécessaire au bon exercice de leur importante fonction.
2/ Le deuxième enjeu de ce scrutin concerne la participation des 16 millions d'électeurs qui sont conviés aux urnes.
Vous savez que le taux de participation à ce scrutin est en baisse permanente depuis 1982. I1 a atteint en 1997 35 % pour les salariés et 21 % pour les employeurs.
Il y a bien sûr de nombreuses explications à ce phénomène. Elles tiennent d'abord à une évolution structurelle de notre économie qui se traduit par une baisse très forte, sur la longue période, des emplois dans l'industrie, là où les syndicats étaient le plus implantés, au profit du développement des emplois tertiaires parmi lesquels les syndicats ont jusqu'à maintenant eu beaucoup de difficultés à faire des adhésions, s'agissant notamment d'un tissu de petites entreprises. Or, toutes les études montrent que la présence ou la proximité des syndicats compte énormément dans le taux de participation.
Il y a aussi bien sûr une connaissance insuffisante de l'institution même si les études montrent qu'elle bénéficie d'une forte notoriété. C'est un domaine dans lequel nous pouvons les uns et les autres contribuer à améliorer la situation, en faisant mieux connaître le rôle des conseils de prud'hommes.
Il y a enfin une certaine difficulté pour les électeurs à se projeter, en votant pour élire les conseillers prud'hommes, dans une situation d'échec ou de conflit. C'est une des raisons pour lesquelles nous avons choisi cette signature de la campagne qui insiste sur le caractère normal, tant pour les employeurs que pour les salariés, de la défense de leurs droits par le conseil de prud'hommes.
Nous avons bien sûr tenu compte des critiques qui avaient été émises à l'issue du scrutin de 1997 sur la préparation et l'organisation du scrutin afin de rendre plus facile le vote des électeurs. Je mentionnerai rapidement les principales mesures que nous avons prises :
- Nous allons d'abord faciliter le travail des mairies pour constituer les listes électorales, ce qui sera bienvenu en cette année électorale : nous avons demandé aux services déconcentrés du ministère de les aider, nous mettons à leur disposition des outils informatiques et un traitement par internet plus facile et plus performant, nous renforçons le rôle des commissions communales chargées d'aider les maires à préparer les listes électorales et nous y associons plus largement les partenaires sociaux.
- Nous avons sensiblement amélioré les modalités de contestation de l'inscription d'abord au niveau du maire, en instituant un recours gracieux qui permettra de résoudre beaucoup de difficultés, qui ne pouvaient autrefois l'être que devant le juge, et en aménageant le contentieux judiciaire de l'inscription jusqu'au jour du scrutin.
- Enfin, nous avons procédé à deux réformes particulièrement importantes en ce qui concerne le scrutin lui-même.
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Le vote par correspondance sans être généralisé, puisque les cas de recours à ce type de vote ne changent pas, sera cependant largement facilité, le matériel nécessaire étant adressé à tous les électeurs et les formalités administratives étant très allégées (attestation sur l'honneur de remplir les conditions fournie par l'électeur au lieu d'une autorisation préalable du maire).
En second lieu, le préfet devra désormais s'assurer que les bureaux de vote sont situés le plus près possible des lieux de travail des électeurs au terme du décret qui est en cours de signature. Cette mesure devrait permettre d'éviter les dérives constatées en 1997 , de nombreux électeurs ayant été contraints à des temps de transport très longs pour pouvoir voter.
Je voudrai préciser à ce stade, que la totalité des textes (lois et décrets) nécessaires à l'organisation du scrutin du 11 décembre 2002, sont désormais prêts, pour certains déjà publiés, comme le décret fixant la date du scrutin, pour beaucoup d'autres, en cours de signature. Je signale en particulier que le texte relatif aux effectifs des conseillers à élire par conseil et par section figure dans votre dossier.
3/ Le troisième enjeu de ce scrutin concerne bien sûr le test de représentativité qu'il représente pour chacune des organisations qui se présentent
Je ferai sur ce sujet quelques observations rapides.
La première concerne les conditions générales de déroulement de ce scrutin. Vous vous souvenez qu'en 1997 nous avions assisté à une tentative de détournement de ces élections par un parti politique, en l'occurrence le Front National. Le gouvernement s'était engagé à prendre les mesures nécessaires pour empêcher le renouvellement d'une telle opération politique.
La loi du 16 novembre 2001 relative à la lutte contre les discriminations a interdit aux partis politiques l'accès à ces élections de même qu'à toute autre organisation prônant des discriminations et poursuivant ainsi un objectif étranger à l'institution prud'homale.
La seconde observation porte sur la situation au sein du monde patronal. Alors que l'on avait traditionnellement une liste unique regroupant l'ensemble des organisations patronales, il n'est pas sûr que ce soit le cas cette année. Nous verrons si l'UPA décide d'aller seule aux élections. Par ailleurs les employeurs de l'économie sociale, qui se sont récemment regroupés, ont indiqué leur intention de se présenter. Le paysage sera ainsi peut-être un peu modifié du côté patronal.
Du côté des salariés, il sera bien sûr intéressant d'analyser les résultats de chacune des confédérations dans un contexte où les débats sur la représentativité sont parfois vifs. Plus particulièrement, les scores réalisés par l'UNSA et les positions des différentes confédérations chez les cadres seront étudiés avec beaucoup d'attention par les observateurs avisés que vous êtes. Mais il y aura des occasions de reparler de tout cela quand le scrutin approchera.
Pour l'heure, et je veux conclure mes propos par là, il convient de réussir la première phase de préparation de ces élections, qui est pour nous, ministère de l'emploi et de la solidarité, chargé d'organiser ces élections, la plus lourde et la plus cruciale, c'est à dire la phase d'inscription, car d'elle dépend la possibilité pour les employeurs, les salariés et les demandeurs d'emploi, de voter le 11 décembre prochain.
Les déclarations en vue de l'inscription sur les listes électorales prud'homales doivent être faites avant le 29 avril prochain. Tous les documents sont en cours d'acheminement et cela continuera jusqu'à la fin mars pour que tout le monde puisse procéder à temps aux déclarations nécessaires. Je compte beaucoup sur vous pour nous aider à rappeler aux déclarants (employeurs et demandeurs d'emploi) les formalités à accomplir et les délais à respecter, même si je suis consciente que le contexte politique ne s'y prête pas particulièrement.
Je vous propose maintenant de me poser quelques questions, si vous le souhaitez, puis, je laisserai la parole à JD COMBREXELLE, qui est directeur des relations du travail, et qui vous présentera la campagne de communication du Ministère qui a été élaborée pour cette phase de la préparation des élections prud'homales.
Je vous remercie.
(Source http://www.travail.gouv.fr, le 18 mars 2002)