Déclarations de M. Georges Sarre, président du Mouvement des citoyens, sur la candidature de Jean-Pierre Chevènement à l'élection présidentielle 2002 et sur le bilan de la politique bipartiste de Jacques Chirac et Lionel Jospin, Créteil le 23 mars, Chateauroux le 25 mars, Paris le 26 mars, Guéret le 28 mars 2002.

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Circonstance : Discours lors de la campagne électorale à Créteil le 23 mars, Chateauroux le 25 mars, Paris le 26 mars, Guéret le 28 mars 2002

Texte intégral

Conférence à Créteil le 23 mars 2002
Chers Amis,
Dans vingt neuf jours, ce sera le premier tour. Loin de se décanter, la situation n'a jamais été aussi confuse ni aussi incertaine. Près d'un électeur sur deux demeure indécis.
Les Françaises et les Français persistent à se désintéresser massivement d'une campagne électorale méthodiquement confisquée au profit des deux candidats sortants, des deux compères de cinq années de cohabitation.
Cette confiscation de la campagne a pour but de détourner l'attention des vrais enjeux et de la focaliser sur de faux débats.
Ce qui est en cause, c'est la survie de la République et de la France ; c'est aussi l'orientation de la construction européenne, qui est à une redoutable croisée des chemins. C'est le sort du monde du travail qu'on est en train de soumettre à la loi de l'argent, toujours plus, et donc à la loi de la jungle, sous prétexte d'ouverture, de concurrence, de déréglementation, de flexibilité.
Or, ce à quoi la classe politique, les médias, les candidats sortants eux-mêmes réduisent systématiquement le débat, c'est à l'affrontement dérisoire de deux hommes et de deux clans celle de l'Etat PS et celle de l'Etat RPR, qui pour l'essentiel, sont d'accord sur tout !
Nous assistons à un étouffement de la République et de la démocratie. Plus besoin de coups d'Etat à grand fracas. C'est le lacet de l'étrangleur. Point de bruit. Une lente asphyxie.
Sur les médias, il n'y en a que pour les deux compères cohabitants et pour leurs lieutenants. Rien ou presque pour les autres. C'est un déni de justice.
Mais, il y a aussi et surtout, de la part de la plupart des médias, un discours insidieux et lancinant tendant à faire croire que le premier tour est joué, que le second opposera nécessairement Chirac et Jospin, que les Françaises et les Français n'ont le choix qu'entre le pareil et le même et que les autres candidats ne sont là que pour leur servir de rabatteurs, ce qui est malheureusement vrai d'un grand nombre d'entre eux, ou bien pour certains, pour apporter un témoignage particulier qui n'a guère sa place dans une élection présidentielle.
A moins qu'ils n'aient une fonction particulière, comme c'est le cas depuis des lustres de Monsieur Le Pen, dont le premier mandat parlementaire remonte à quarante six ans en arrière, ou de Madame Laguiller, qui en est à sa cinquième élection présidentielle. Ils ont la fonction de fixer sur des positions extrémistes les voix de plus en plus nombreuses des mécontents qui souhaitent de profonds changements ; ce faisant, le vieux cheval de retour de l'extrême droite et la madone inoxydable des travailleuses et des travailleurs jouent fondamentalement le même rôle, le même rôle utile au système qu'ils disent combattre : ils stérilisent ces voix, car à supposer que l'un ou l'autre accède au second tour, il y serait inévitablement battu. Ainsi donc, nous n'aurions le choix qu'entre Jospin et Chirac.
Ce bateleur d'estrade, en embuscade depuis cinq ans en son château de l'Elysée, et qui espère qu'aujourd'hui, l'oubli des promesses non tenues va permettre de le ramener à la réalité du pouvoir.
Jospin, l'austère aux lapsus si délicieux, dont le discours professoral théorise la bonne organisation du déclin, ce champion toutes catégories des privatisations, cet homme de gauche prétendue, qui est le cher ami de Monsieur Blair, qui est le cher ami de Monsieur Berlusconi.
Non nous ne l'acceptons pas. L'élection présidentielle doit être l'occasion d'un sursaut. Elle n'est pas jouée d'avance au profit de Chirac ou de Jospin, contrairement à ce qu'on veut nous faire croire.
La société française souffre. Elle est malade. L'insécurité sociale frappe trop de salariés. L'insécurité sociale frappe depuis trop d'années. La précarité de l'emploi devient la règle. Les contrats à durée déterminée se multiplient. Le travail temporaire imposé s'étend. Les licenciements de masse se répandent. Les plans sociaux succèdent aux plans sociaux. Les usines les mieux établies sont à leur tour menacées. Les ouvriers, les employés, les cadres ont l'impression de n'être que des Kleenex. Souvenons-nous Michelin, Moulinex, Danone, les " Lu " et bien d'autres.
Pourquoi tant de sinistres industriels ? Les actionnaires veulent leurs dividendes. Les actionnaires veulent une rentabilité de 15 %. En 1983, la répartition des revenus était aux trois quarts pour le travail et un quart pour le capital. En 1998, cette répartition était de deux tiers pour le travail et d'un tiers pour le capital. Sans commentaires.
En 1983, Lionel Jospin déclarait ouverte une parenthèse libérale. Il ne l'a toujours pas fermée. Et, il ne compte toujours pas la fermer, bien au contraire. En 1983, Jean-Pierre Chevènement quittait le gouvernement. Il refusait cette soumission au marché. Il savait où nous conduirait cette dérive libérale. Il voulait une politique industrielle.
Oui, je l'avoue, parfois je me demande si je ne me suis pas trompé. Quand Lionel Jospin a parlé de droit d'inventaire, j'ai cru qu'il parlait des deux septennats de François Mitterrand. Aujourd'hui, je pense qu'il visait seulement les deux premières années. Le droit d'inventaire de Lionel Jospin, c'est la remise en cause de la retraite à soixante ans. Le droit d'inventaire, c'est la liquidation des nationalisations, même les plus anciennes, plus de mille entreprises privatisées en cinq ans. Qui dit mieux ? Le droit d'inventaire, c'est l'abandon de toute politique industrielle. Le droit d'inventaire se résume par cet aveu terrible de Lionel Jospin devant les licenciements par Michelin pour convenance boursière : " L'Etat ne peut pas tout ". Traduisez le gouvernement ne veut rien faire.
Comme Jacques Chirac, Lionel Jospin, partage avec Tony Blair, José Maria Aznar et Silvio Berlusconi la même conception d'une Europe libérale. Les socialistes français parlent d'une Europe sociale depuis des décennies alors que nous vivons d'année en année une régression sociale sans précédent. Le droit du travail est démantelé pour que le chômage demeure la meilleure variable d'ajustement. La flexibilité se transforme bien vite en marche inflexible vers l'exclusion. Sauf les détenteurs d'un patrimoine conséquent, nul n'est aujourd'hui à l'abri de perdre son emploi et de sombrer en quelques mois dans l'exclusion, qui s'avérera bientôt sans retour. Alors, pour éviter la misère de masse, pour contenir la rue, ils ont généralisé et veulent généraliser l'assistanat qui ira bientôt du berceau au tombeau. Ainsi, tant d'aides à l'emploi se révèlent des trappes à pauvreté pour les femmes et pour les jeunes. Ainsi, tous les CES ou autres petits boulots qui sont laissés sans perspective. Ainsi, le SMIC-jeunes d'Edouard Balladur que Lionel Jospin reprend sous le nom d'allocation d'autonomie. Ainsi, les préretraites imposées qui excluent des salariés d'expérience.
Avec la disparition du rôle de la loi au profit du contrat, l'insécurité s'établit dans les relations du travail. Issue du débat public et démocratique entre les citoyens, la loi protège les plus faibles, parce qu'elle est égale pour tous. La loi, expression de l'intérêt général, est garantie par la puissance de l'Etat. Le contrat est le fruit d'un rapport de forces entre des parties privées, donc rarement entre des parties égales. Le contrat consacre l'infériorité du faible. Le contrat laisse seul l'employé devant l'employeur. Certes, il y a le syndicat. La vocation du syndicalisme est même d'essayer de rééquilibrer le rapport de forces. Mais, chacun sait combien ce rééquilibrage est difficile, combien l'employeur possède de moyens pour l'entraver. La force du syndicalisme dépend d'abord de l'adhésion des salariés. Mais, elle doit aussi être confortée par le rempart de la loi. Le monde du travail a donc besoin d'une République sociale vigoureuse, qui sache s'affirmer et se faire respecter. Sous couvert de dialogue social, Jacques Chirac et Lionel Jospin veulent favoriser le contrat. Ils ne manquent pas une occasion pour faire l'éloge du contrat. Quand ils ont recours à la loi, ils n'hésitent pas à la rendre bavarde et imprécise. La prolifération réglementaire qui en résulte n'est en réalité qu'une illusion fragile de protection bureaucratique.
Le programme commun de renoncement présenté respectivement par Jacques Chirac et par Lionel Jospin n'apporte aucune solution en profondeur. Au mieux, ils proposent quelques mesures cosmétiques supplémentaires et ajoutent des voeux pieux à une liste déjà longue. Pour le reste, malgré leurs dénégations, ils n'envisagent que d'ajouter du libéralisme au marché. Ils ne tirent aucun enseignement de l'expérience. Car, au-delà des promesses, il y a les faits. De Barcelone, nos deux compères de la cohabitation sont revenus tout heureux en criant victoire. Ils ont capitulé sur tout, mais ils ont obtenu de leurs complices la possibilité de sauver la face. A quelques semaines de l'élection présidentielle, c'était la seule chose qui comptait pour eux.
Car en réalité, il y a exactement deux ans, un autre sommet européen, auquel ils participaient aussi, décidait l'accélération de la libéralisation de secteurs tels que le gaz, l'électricité, l'eau, les services postaux, les transports. Cette liste n'est pas exhaustive. On sait qu'elle s'étend à la santé, à l'Ecole, aux transports urbains et encore à d'autres fonctions de l'Etat. A Barcelone, ils n'ont pas remis en cause les intentions de Lisbonne, qui ont pourtant montré en deux ans leur perversité et leur nocivité.
Regardons certains bilans. France Télécom connaît un endettement spectaculaire. Or, avant l'ouverture de son capital, France Télécom était une grande entreprise publique moderne qui marchait bien et gagnait de l'argent. Mais, les bien pensants demandaient avec force le changement de statut pour faire place à la mondialisation libérale. Ils prophétisaient son déclin si la privatisation n'intervenait pas au plus tôt.
Quelques années se sont écoulées et les résultats sont là. Plus de 60 milliards d'Euros de dettes. Le Président Directeur Général se déclare responsable et demande la privatisation de la filiale TDF. Que va faire l'Etat ? Suivre et garder le Président actuel ou ne pas privatiser et se séparer du Président ?
La liquidation des services publics, d'abord par l'ouverture de leur capital, puis par leur complète privatisation, est un mauvais coup porté à la France et à la République. Comment ne pas s'interroger sur la cohérence de Jean-Claude Gayssot, ce ministre communiste des Transports, qui met en vente la société des Autoroutes du Sud de la France ? A quoi sert donc le Parti communiste si, lui aussi, privatise ?
Le service public n'est pas seulement un élément facilitant la solidarité nationale. Le service public est aussi un instrument pour l'aménagement du territoire par la péréquation tarifaire et par l'égalité de traitement de tous les usagers. Le service public est surtout un outil pour entraîner et impulser l'économie. Le service public est le fer de lance d'une politique industrielle. Oui, il faut à la France des industries ! Oui, il faut produire avant de consommer. Oui, il faut à la France une vraie politique industrielle.
Les usines ne sont pas un fardeau ; elles sont l'avenir ! Oui, la condition ouvrière est honorable, elle mérite considération ; elle est le quotidien d'un tiers des salariés de ce pays. Elle mérite d'être défendue, améliorée, revalorisée, par le salaire, bien sûr, mais par la considération aussi que lui porte la société, une société aujourd'hui où on exalte trop d'argent facile, où on déprécie trop l'effort ! Seul le travail donne du sens à la vie des femmes et des hommes.
L'usine ne représente pas en soi un danger, comme le suggère Noël Mamère. Il voudrait fermer tous les pôles industriels, chimiques, nucléaires et autres. Il ne dit pas comment il les remplacerait. Peut-être voudrait-il les délocaliser dans les pays pauvres ? Noël Mamère au nom de l'environnement et Ernest Antoine Seillière au nom du profit se retrouveraient alors. Ce n'est pas la solution. Les installations d'usines doivent respecter les plans d'urbanisme. L'inspection du travail doit être dotées des effectifs et moyens nécessaire. Alors, les usines seront sûres. Il n'y aura pas un million trois cent milles accidents du travail chaque année !
Pour les retraites, nos deux sortants ont la même stratégie du faux-semblant. Ils affirment le maintien de la retraite par répartition. Mais l'un et l'autre veulent instiller la retraite par capitalisation. Jacques Chirac le dit sans ambages, il veut créer des fonds de pension que, par souci cosmétique, il appelle " à la française ". Lionel Jospin, plus tortueux, parle de fonds d'épargne salariale. Le résultat est le même : ils veulent jouer les retraites au casino de la bourse.
Nos deux sortants n'ont pas trop insisté sur une recommandation du sommet de Barcelone qu'ils ont acceptée. D'ici 2010, l'âge légal de la retraite sera porté à soixante trois ans. Jacques Chirac et Lionel Jospin ont ainsi remis en cause la retraite à soixante ans dans la plus grande discrétion. Là aussi, ils espèrent passer, ni vus, ni connus, le cap des élections. Ensuite, si l'un d'eux devait encore exercer des responsabilités, il nous expliquerait docilement qu'il n'y peut rien, que c'est l'Europe. Par ailleurs, soyons en sûr, la Commission de Bruxelles ne tardera pas à revenir à sa proposition initiale : soixante cinq ans.
Mais, la Commission de Bruxelles n'est pas toujours aussi volontariste. Que de prudence devant la décision des Etats-Unis de frapper de droits de douanes les aciers importés. Elle se perd dans des procédures aussi longues que compliquées. Rien de significatif n'interviendra avant plusieurs mois. Sous couvert d'OMC, la Commission de Bruxelles se comporte en relais européen de la Maison Blanche !
La mondialisation ? De 1997 à 2000, les trente deux entreprises industrielles dites françaises, cotées au CAC 40, ont augmenté de quelques 45 % leurs investissements à l'étranger. Ceux-ci sont restés stables en France, quand ils n'ont pas régressé. Je laisse cette statistique récente à votre méditation.
La politique proposée par Jacques Chirac et Lionel Jospin revient à sacrifier pour un profit immédiat les éléments qui permettent la compétitivité du site de production France sur la longue durée. Avec la déconstruction de l'Ecole de la République par les soixante huitards attardés, la remise en cause de la protection sociale au nom d'un libéralisme dogmatique et la liquidation des services publics au nom, disent-ils, de la construction européenne. Notre pays n'aura bientôt plus d'autre atout que l'engrenage infini du moins-disant fiscal et social. La France ne sera plus une puissance industrielle.
Disneyland, l'aménageur du territoire de l'Ile-de-France, vient d'ouvrir son second parc avec, comme pour le premier, des clauses dérogatoires au droit du travail. Il faut saisir la chance qu'offre l'élection présidentielle car la France deviendrait un grand Disneyland, laboratoire du social libéralisme et du libéralisme ultra. Les deux sortants nous prennent-ils pour des Mickeys que l'on pourrait anesthésier par le cannabis en vente libre ou des prothèses de révolte comme Arlette de Fontenay, la pom-pom girl des travailleuses et des travailleurs de la jet-set ?
Le projet républicain de Jean-Pierre Chevènement est le seul qui offre le moyen d'assurer une croissance soutenue de la production et de l'emploi, en proposant à nos partenaires de libérer nos économies du carcan (règles de la BCE, pacte de stabilité budgétaire).
Le projet républicain est le seul qui veut en finir avec le mépris du travail et l'encouragement au travail précaire ; il propose une revalorisation du travail par une refonte complète des charges sociales et une franchise sur les premiers 750 euros de salaires (environ 5000 francs).
Le projet républicain met en lumière la nécessité d'augmenter le taux d'emploi des Français, aujourd'hui exceptionnellement faible (moins de 40 % de la population totale). D'ici à 2007, la création d'un million huit cent milles emplois est possible.
De ce fait, le projet républicain est le seul qui soit cohérent et permette de répondre aux préoccupations prioritaires des Français, en garantissant la sécurité globale (sécurité des citoyens, sécurité sociale, sécurité alimentaire et sanitaire, sécurité nationale).
Voilà l'objectif !
Jean-Pierre Chevènement mène pour gagner une belle et forte campagne. Il est présent partout, actif, incisif, maître de lui.
Voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est donner un espoir au monde du travail.
Voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est donner un contenu social à la République.
Voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est donner un avenir à la France.
(Source http://www.georges-sarre.net, le 5 avril 2002)
Conférence à Chateauroux le 25 mars 2002
Chers Amis,
Comment se différencier l'un de l'autre ? Voilà la grave question que se posent Jacques Chirac et Lionel Jospin. Encore, aujourd'hui, malgré les efforts déployés les trois quarts des Français ne voient aucune différence entre les deux programmes. Je les comprends, moi non plus. A la relecture - que voulez-vous il y a des punitions qu'il faut savoir s'infliger - à la relecture donc de ces deux textes affligeants, j'ai fini avec beaucoup de peine par percevoir ici ou là quelques nuances dérisoires. Alors, les deux sortants se sont essayés à des substituts de différences. Lionel Jospin s'est ainsi gravement interrogé sur l'âge du capitane. Outre le fait que ces deux candidats ne sont séparés que par peu d'années, cette attaque personnelle a été très mal ressentie par les Français. Lionel Jospin a du s'en excuser. Les deux cohabitants laissent depuis se développer un autre thème d'opposition entre eux. Après cinq ans de vie commune, ils se détesteraient. La haine de l'un envers l'autre serait le mobile qui les animerait tous les deux. C'est possible. Mais, cet aspect sentimental de leur rivalité souligne que seule l'ambition personnelle les sépare. Il n'existe qu'un seul fauteuil présidentiel. L'un a la passion du pouvoir. L'autre a le désir du pouvoir.
Comment Jacques Chirac et Lionel Jospin pourraient-ils avoir des programmes différents ? L'un et l'autre, l'autre et l'un, acceptent les mêmes préalables contraignants : soumission à la mondialisation financière à l'OMC et participation à une construction européïste libérale retour dans l'OTAN. On l'a bien vu lors du sommet de Barcelone. Ils ont accepté de poursuivre le démantèlement des services publics, tel qu'ils en avaient décidé le principe au sommet de Lisbonne en mars 2000. Toutefois pour leur permettre de franchir le cap des élections, les Tony Blair, les José Maria Aznar et autres Silvio Berlusconi ont autorisé le report de certaines échéances. La satisfaction affichée par Jacques Chirac et par Lionel Jospin ne reflétait pas un succès pour la France. Elle traduisait le soutien électoral obtenu.
Puisque la véritable différence n'est pas entre le programme de Jacques Chirac et celui de Lionel Jospin. Elle est ailleurs. Elle est entre d'une part leur programme commun de renoncement et d'autre part les dix grandes orientations présentées le 9 septembre dernier par Jean-Pierre Chevènement et qu'il développe progressivement depuis. Il les a encore précisées vendredi dernier. On peut comparer grand thème par grand thème, et on verra où se situent les véritables différences.
Jacques Chirac et Lionel Jospin présentent ainsi les mêmes mesures contre l'insécurité. Mais, ces mesures ne sont qu'une reprise, avec moins de cohérence et de rigueur, des propositions que Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l'Intérieur, a faites dès le début de 1999 à Lionel Jospin. Il les avait repoussées, non par naïveté, comme il le dit aujourd'hui, mais parce qu'à cette époque, il privilégiait déjà un axe stratégique avec les verts. Une des conditions de ce succès politicien était d'accepter leur angélisme. Souvenez-vous en ce temps-là, Jean-Pierre Chevènement était critiqué, insulté par la gauche caviar pour avoir osé parler de " sauvageons ". A cette époque, Jacques Chirac, s'il avait exercé dignement ses fonctions de chef de l'Etat, aurait pu intervenir pour soutenir le ministre de l'Intérieur. Mais, déjà, candidat en embuscade, il est resté silencieux, et ce silence équivaut à une complicité avec Lionel Jospin.
Enfin, il ne s'en vante pas. Mais, Jacques Chirac est à l'origine de mesures que les Français payent chères aujourd'hui. En 1987, il a supprimé la possibilité de la détention provisoire pour les mineurs, mêmes multirécidivistes. En 1995, il n'a pas appliqué la loi de programmation pour la police et la gendarmerie que Charles Pasqua venait de faire voter. En janvier 1997, il a lancé la procédure conduisant à l'indépendance des parquets, introduisant la fragmentation de la politique pénale et l'inégalité des citoyens devant l'application de la loi. Lionel Jospin s'est employé à faire aboutir cette réforme. Il est vrai que Jacques Chirac voulait aller encore plus loin en supprimant la hiérarchie au sein des parquets, disposition qui aurait en plus provoqué l'anarchie judiciaire.
Certains diront puisque Jacques Chirac et Lionel Jospin ont, au moins implicitement, reconnu leur erreur en reprenant les propositions de Jean-Pierre Chevènement, pourquoi ne pas leur faire confiance désormais ? Parce que l'un comme l'autre est prêt à changer d'avis en fonction de sa stratégie politicienne. L'un, par exemple, pourrait suivre Alain Madelin qui se réclame du libéralisme et qui, il y a encore peu de temps, se prononçait pour la mise en vente libre de la drogue. L'autre pourrait à nouveau tomber sous l'influence des verts et autres libéraux libertaires, qui refusent la responsabilité individuelle des criminels et des délinquants pour mieux culpabiliser la société toute entière.
Jacques Chirac et Lionel Jospin défendent tous les deux, d'un commun accord, le développement de la formation au cours de la vie professionnelle. C'est bien. Qui peut être contre ? Mais la formation permanente ne peut être efficace que si elle repose sur une formation initiale solide. Or, leur discours sur l'Ecole ne sort pas du pédagogisme et de l'idéologie des post soixante huitards attardés. Par la loi d'orientation qu'il a fait voter en 1989, quand il était ministre de l'Education Nationale, Lionel Jospin a placé l'élève au centre de l'Ecole. C'est une grave erreur de conception. L'Ecole est alors transformée en lieu de vie. Au centre de l'Ecole doit être placée la transmission des savoirs, des connaissances, des repères. Il n'y a pas d'égalité entre le maître et l'élève. Le maître sait. L'élève apprend. L'enfant deviendra adulte et l'élève citoyen. L'Ecole doit former des citoyens, aptes à participer au débat public et capables de subvenir à ses besoins. L'Ecole ne doit pas assumer la promotion des tags et des marseillaises frelatées.
Jean-Pierre Chevènement est un ferme défenseur de l'Ecole de la République, qui repose sur le principe de la laïcité. On n'y importe ni sa violence, ni ses croyances. On en exporte ses connaissances et ses espérances. C'est dans ce creuset que se forment les futurs citoyens ; c'est à partir de ce creuset que les futurs citoyens font de la République un projet perpétuellement renouvelé. Alors, bien sûr, la formation permanente ! Mais, la formation permanente ne doit pas être un alibi pour laisser l'Ecole poursuivre sa dérive. Comme le propose Jean-Pierre Chevènement, commençons par le commencement ; commençons par l'Ecole, et même l'Ecole élémentaire ; commençons par apprendre à nos enfants à lire, à écrire et à compter.
Jacques Chirac et Lionel Jospin chantent en choeur les louanges du dialogue social. En réalité, ils font la promotion du contrat au détriment de la loi. Le contrat, c'est le résultat d'un rapport de forces. Or, il est rare que les deux parties soient de force équivalente. Dans le domaine social, en dehors de quelques cas particuliers, l'employeur est le plus fort et l'employé est le plus faible. Certes, le syndicat existe pour atténuer, sinon rééquilibrer cette disproportion. Mais, chacun sait combien est fragile et difficile le travail du syndicat. En revanche, la loi, par nature, est égale pour tous, s'impose à tous. Son application permet de changer les termes du rapport de forces pour que les interlocuteurs se situent au même niveau. Le dialogue social n'échappe pas à cette problématique. La dialogue social sera fructueux et positif que s'il est conforté par la loi.
La République, c'est le règne de la loi. La République, c'est donc l'égalité des partenaires sociaux devant la loi. Avant d'établir la loi, le législateur dialogue avec chaque partie intéressée, prend en compte ses remarques, et même se soucie de ses intérêts particuliers. Puis, correctement informé, le législateur se prononce en fonction de l'intérêt général. Voilà, la philosophie qui inspire Jean-Pierre Chevènement : la concertation, mais toujours au-dessus l'intérêt général.
Aujourd'hui, l'intérêt général commande de relancer l'économie par la demande. Il convient donc d'améliorer le pouvoir d'achat du plus grand nombre. Jean-Pierre Chevènement propose d'augmenter le SMIC de 25 % en valeur réelle sur cinq ans. Il compte diminuer les charges sociales, qui taxent le travail, en transférant celles qui pèsent sur les sept cents cinquante premiers euros de tout salaire vers la fiscalité général. Très rapidement, il souhaite pouvoir ouvrir une large concertation avec tous les partenaires sociaux en convoquant une conférence sur les revenus. Dans une telle procédure, l'Etat reste, comme il se doit, le garant de l'intérêt général.
Il faut accroître les revenus du salaire direct.
Il est souvent trop peu avantageux de quitter un revenu d'assistance pour reprendre un travail ou une activité économique. Pour accroître les revenus du salaire direct, sans alourdir les charges des entreprises, les cotisations, salariales et employeurs, sur la partie inférieure du salaire doivent être allégées de manière très importante.
En outre, il faut assouplir l'application des 35H00 qui interdit le recours aux heures supplémentaires
Dès 2003, une franchise de cotisations salariales et patronales sera appliquée sur les premiers 750 euros (5000 francs) de salaires, et remplacera les systèmes actuels d'exonérations, très lourds à gérer pour les entreprises et qui constituent une subvention au travail précaire
Les cotisations patronales, actuellement assises sur les salaires, seront, à partir de 2004, graduellement remplacées par une taxe assise sur la valeur ajoutée comptable de l'entreprise : un prélèvement unique remplacera ainsi l'enchevêtrement complexe de cotisations et d'exonérations ciblées actuellement en vigueur.
Les cotisations salariales, sauf les cotisations de retraite, seront, à partir de 2004 et dans une proportion importante, remplacées par une majoration de la CSG qui deviendra déductible de l'impôt sur le revenu.
Les cotisations retraites resteront assises sur la totalité du salaire à l'exception des 5000 premiers francs.
Ces trois mesures auront un effet bénéfique sur l'emploi : le remplacement des cotisations patronales par une taxe assise sur la valeur ajoutée délivrera les entreprises qui emploient une main d'uvre abondante d'un handicap important ; les coûts de gestion des entreprises seront allégés, puisque les formalités administratives seront simplifiées.
Certains observateurs veulent voir une différence dans les propositions fiscales de Jacques Chirac et de Lionel Jospin. Ils ont dû acheter une loupe très grossissante. Les deux veulent réformer la taxe d'habitation, sans être toujours très précis sur les modalités envisagées. Les deux veulent baisser l'impôt sur le revenu. Jacques Chirac, qui ne lésine jamais sur les promesses, parle d'un tiers. Lionel Jospin, qui veut faire plus sérieux, se contente d'un dixième. Puis, Lionel Jospin, qui se donne une image de gauche, veut imposer plus le capital et les revenus du capital. Mais, selon sa méthode, il a prévu le mécanisme qui bloquera ses intentions. En effet, il se déclare partisan d'un gouvernement économique européen, dont les décisions en matière fiscale seraient prises à la majorité qualifiée. Ainsi, Lionel Jospin pourrait nous dire un jour, s'il est élu : " je voudrais bien, mais Tony Blair, José Maria Aznar et Silvio Berlusconi ne veulent pas ".
Il semble que certains amis de Jacques Chirac commencent à s'affoler devant les engagements inconsidérés pris par leur candidat. Tout cela ne fait pas très sérieux pendant la campagne. S'il était élu, il serait bien vite obligé de se renier comme, il y a sept ans, pour la résorption de la fracture sociale. Alors, on voit ici ou là certains de ses proches en train de rogner ses promesses.
Bien évidemment, nos deux compères de la cohabitation veulent augmenter le nombre de policiers, de gendarmes, d'instituteurs, de professeurs, d'infirmières, de juges et de quelques autres corps de fonctionnaires. Leur programme est simple : baisser les recettes, augmenter les dépenses. Toutefois, Jacques Chirac a cherché à répondre à cette critique en trouvant de nouvelles ressources. Pour un quart, il les voit provenir d'une croissance de 3 % par an pendant cinq ans. Nous sommes à 1,2 %. Il s'agit donc d'un pari très risqué. Pour un autre quart, il les attend d'un desserrement des contraintes du pacte de stabilité budgétaire pendant trois ou quatre ans. C'est en totale incohérence avec ses autres propositions sur la construction européenne. Pour la moitié, il y affecterait le produit de la vente des services publics. On voit bien la limite de ses cris de victoire après le sommet de Barcelone. Lionel Jospin est moins disert sur le financement de ses propositions. Mais, il poursuivra aussi la liquidation du secteur public. N'en est-il pas à vendre les sociétés d'autoroutes, avec l'accord de Jean-Claude Gayssot, le ministre communiste des Transports ?
Le système du pareil au même a, pour se perpétuer, lâcher des leurres. Ils ont le discours du changement. Ils ont l'apparence du changement. Mais, ils ne sont pas le changement. Ils fourvoient ceux qui veulent changer. Jean-Marie Le Pen et Arlette Laguiller sont des leurres. Regardez comme, pour cette campagne électorale, Jean-Marie Le Pen n'apparaît plus comme le diable. Tous les antifascistes autoproclamés restent chez eux et ne manifestent plus leur indignation de commande. Regardez comme, pour cette campagne électorale, Jean-Marie Le Pen nous est présenté comme adouci, quasiment acceptable. C'est Le Pen light. Et, Arlette Laguiller, la voilà soudain promue vedette de la presse du cur. Son discours inoffensif sur " les travailleuses, travailleurs " prend une douceur rétro qui frise la nostalgie. Madame de Fontenay l'a proclamée Miss Révolution. Plus les sondages, vrais ou arrangés, sont prometteurs pour l'un et pour l'autre, plus les tenants du système se réjouissent et en rajoutent.
Non seulement Jean-Marie Le Pen et Arlette Laguiller ne font pas peur, mais ils sont presque considérés comme des sauveurs. En France, il y a un plancher incompressible de 2 à 3 % de l'électorat qui votent respectivement pour l'extrême droite ou pour l'extrême gauche. Le reste des électeurs qui pourraient se prononcer pour ces deux candidats veulent manifester un désir de changement. Mais, Jean-Marie Le Pen et Arlette Laguiller n'y pourront rien changer. Si, d'aventure, l'un des deux figurait au second tour, il serait écrasé. Ils sont donc les candidats du changement sans risque de changement dans la réalité.
En revanche, il y a un véritable candidat du changement, véritable parce que fiable et crédible. Ce candidat se nomme Jean-Pierre Chevènement. En conséquence, pour le système, il faut éviter que le plus grand nombre possible d'électeurs qui veulent le changement se portent sur son nom, d'où l'intérêt des leurres, d'où la valorisation des leurres. Ils sont des candidats protestataires stériles. Jean-Pierre Chevènement est un candidat protestataire utile.
Chers Amis,
Autour de Jean-Pierre Chevènement, s'est constitué un rassemblement qui réunit des femmes et des hommes venant de tous les horizons politiques. Certains vont jusqu'à le qualifier d'attelage hétéroclite.
Manifestement, ils n'ont pas compris quelle était la situation de la France aujourd'hui. En face, du Pôle républicain, il y a bien deux candidats ; mais ils ne sont séparés que par leur ambition personnelle respective. Droite et gauche ne sont qu'apparences et illusions. Au Pôle républicain, nous savons qu'au dessus de la droite et de la gauche se situe la République. Nous savons que le combat pour la République et pour la France est désormais la priorité. La droite et la gauche n'ont donc pas disparu. Elles demeurent deux sensibilités qui doivent travailler ensemble dans le respect mutuel au profit d'un idéal plus élevé, au profit de la Nation toute entière.
Le programme du Pôle républicain a été exposé à Vincennes par Jean-Pierre Chevènement dès le 9 septembre dernier. Il comprend dix grandes orientations. Il n'y a donc ni négociations, ni accords entre des partis ou des groupes d'intérêts. Il n'y a pas de marchandage ou de pressions. Bref, ce n'est pas le retour au régime des partis. C'est un homme qui présente son programme à la Nation et le rejoigne ceux qui se retrouvent dans ses orientations. Sur cette base, nous voulons aider Jean-Pierre Chevènement à mettre en oeuvre son projet pour la France. La première étape est, bien évidemment, son élection à la Présidence de la République.
En juin prochain, nous présenterons un candidat dans chaque circonscription législative. Nous désignerons ces candidats dans quelques semaines. Il faut que les évolutions en cours se poursuivent.
Comme je l'ai dit, le vote pour Jean-Pierre Chevènement est un vote protestataire utile. Chacun voit bien la tension qui surgit au seul rapprochement des deux termes. Une protestation qui ne serait pas une impasse. Une utilité qui ne serait pas une compromission. C'est pour cela que le vote pour Jean-Pierre Chevènement est un vote d'avenir. En même temps, le vote pour Jean-Pierre Chevènement est une véritable chance pour la France et pour la République.
Avec Jean-Pierre Chevènement, c'est le retour de la France dans le concert des nations. Car, la France a toujours quelque chose à dire au monde. Car, le monde attend encore que la France s'exprime. Non, les Etats-Unis d'Europe de Lionel Jospin n'auront pas la même puissance dans le message. Non, un président de l'Europe, cher à Jacques Chirac, ne sera pas porteur d'un discours tendant vers l'universel. La France est unique, à condition qu'elle ose parler, à condition qu'elle ne noie pas sa parole dans le verbiage d'un européisme sans rivage.
Nous ne sommes pas contre l'Europe. Depuis les temps géologiques, la France appartient à l'Europe. Mais, nous sommes pour une Europe qui respecte les nations, qui s'enrichit des nations. Nous sommes pour une Europe dans laquelle la France conserve son indépendance, tout en coopérant avec les autres pays. La nation est encore pour longtemps le cadre indépassable de la démocratie. La synthèse de la nation et de la démocratie forme le socle de la République. C'est à ce socle que Jacques Chirac et Lionel Jospin s'attaquent au nom de la mondialisation, au nom d'une construction européenne qui n'est que le relais continental de cette mondialisation.
Avec Jean-Pierre Chevènement, nous remettrons les choses en place et en ordre. La France sera première servie, une France généreuse, accueillante, ouverte sur le monde, une France qui aura retrouvé sa fierté, sa raison d'être, sa vocation dans la République.
Oui, voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est donner un avenir à la France,
Oui, voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est donner un espoir à la République,
Oui, voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est donner à nous-mêmes une espérance.
(Source http://www.georges-sarre.net, le 5 avril 2002)
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
Dans vingt sept jours, ce sera le premier tour. Loin de se décanter, la situation n'a jamais été aussi confuse ni aussi incertaine. Près d'un électeur sur deux demeure indécis.
Les Françaises et les Français persistent à se désintéresser massivement d'une campagne électorale méthodiquement confisquée au profit des deux candidats sortants, des deux compères de cinq années de cohabitation.
Cette confiscation de la campagne a pour but de détourner l'attention des vrais enjeux et de la focaliser sur de faux débats.
Ce qui est en cause, c'est la survie de la République et de la France ; c'est aussi l'orientation de la construction européenne, qui est à une redoutable croisée des chemins. C'est le sort du monde du travail qu'on est en train de soumettre à la loi de l'argent, toujours plus, et donc à la loi de la jungle, sous prétexte d'ouverture, de concurrence, de déréglementation, de flexibilité.
Or, ce à quoi la classe politique, les médias, les candidats sortants eux-mêmes réduisent systématiquement le débat, c'est à l'affrontement dérisoire de deux hommes et de deux clans celle de l'Etat PS et celle de l'Etat RPR, qui pour l'essentiel, sont d'accord sur tout !
Nous assistons à un étouffement de la République et de la démocratie. Plus besoin de coups d'Etat à grand fracas. C'est le lacet de l'étrangleur. Point de bruit. Une lente asphyxie.
Sur les médias, il n'y en a que pour les deux compères cohabitants et pour leurs lieutenants. Rien ou presque pour les autres.
Mais, il y a aussi et surtout, de la part de la plupart des médias, un discours insidieux et lancinant tendant à faire croire que le premier tour est joué, que le second opposera nécessairement Chirac et Jospin, que les Françaises et les Français n'ont le choix qu'entre le pareil et le même et que les autres candidats ne sont là que pour leur servir de rabatteurs, ce qui est malheureusement vrai d'un grand nombre d'entre eux, ou bien pour certains, pour apporter un témoignage particulier qui n'a guère sa place dans une élection présidentielle.
A moins qu'ils n'aient une fonction particulière, comme c'est le cas depuis des lustres de Monsieur Le Pen, dont le premier mandat parlementaire remonte à quarante six ans en arrière, ou de Madame Laguiller, qui en est à sa cinquième élection présidentielle. Ils ont la fonction de fixer sur des positions extrémistes les voix de plus en plus nombreuses des mécontents qui souhaitent de profonds changements ; ce faisant, le vieux cheval de retour de l'extrême droite et la madone inoxydable des travailleuses et des travailleurs jouent fondamentalement le même rôle, le même rôle utile au système qu'ils disent combattre : ils stérilisent ces voix, car à supposer que l'un ou l'autre accède au second tour, il y serait inévitablement battu. Ainsi donc, nous n'aurions le choix qu'entre Chirac et Jospin.
Ce bateleur d'estrade, en embuscade depuis cinq ans en son château de l'Elysée, et qui espère qu'aujourd'hui, l'oubli des promesses non tenues va permettre de le ramener à la réalité du pouvoir.
Jospin, l'austère aux lapsus si délicieux, dont le discours professoral théorise la bonne organisation du déclin, ce champion toutes catégories des privatisations, cet homme de gauche prétendue, qui est le cher ami de Monsieur Blair, qui est le cher ami de Monsieur Berlusconi.
Non nous ne l'acceptons pas. L'élection présidentielle doit être l'occasion d'un sursaut. Elle n'est pas jouée d'avance au profit de Chirac ou de Jospin, contrairement à ce qu'on veut nous faire croire.
Qu'ont-ils à nous dire, ces deux la, que nous ne sachions déjà ? Chacun sait la politique menée depuis cinq ans. L'un l'a conduite, comme Premier ministre. L'autre, comme Président de la République a souvent approuvé cette politique et l'a toujours laissé faire, non pas quelques mois, comme au temps de Mitterrand, mais cinq longues années, alors qu'il avait s'il le voulait, des moyens constitutionnels pour s'y opposer.
Alors ils essaient d'attirer l'attention en faisant assaut de démagogie, comme si cela pouvait encore tromper quelqu'un.
Chirac promet la baisse des impôts, l'impunité zéro pour tous l'impunité zéro pour tous les autres. Ceux qui l'entendent pensent à 1995 et à ses promesses de réduction de la fracture sociale. Il disait aussi que la feuille de paye n'est pas l'ennemie de l'emploi juste avant son élection et le tour de vis général. Super-menteur est de retour !
Jospin lui-même s'évertue à démentir sa réputation de plus grand sérieux. Ne promet-il pas de réduire fortement le chômage, alors qu'il refuse par ailleurs de se donner les moyens d'une politique industrielle ? N'annonce-t-il pas la disparition des SDF en cinq ans, alors qu'en 1995, il promettait la même chose sur deux axes et que la situation ces dernières années n'a cessé de s'aggraver ?
Leurs projets sont si nuls, si bâclés, si irresponsables, que nous les voyons aujourd'hui contraints d'en gommer les aspects les plus démagogiques, sous les rires et sous les huées : les impôts pour Chirac, les SDF pour Jospin.
Incapables de retenir l'attention par des projets sérieux et crédibles, ils s'efforcent maintenant de l'attirer en haussant le ton de leurs polémiques. Voici nos deux compères qui se défient et s'injurient, comme des lutteurs de foire avant le match truqué.
L'un vocifère sur l'âge du capitaine et sur son usure, avant d'ailleurs de se rétracter platement. L'autre traite le premier de fasciste et de gauchiste. Ils espèrent que cette dramatisation pitoyable et dérisoire va regrouper autour d'eux, par réflexe, les batillons de la droite et de la gauche traditionnelles, dont ils cherchent désespérément à ressusciter le clivage.
Mais tout le monde sait bien que rien de décisif ne les sépare plus aujourd'hui. Ils ont en commun de parler bien peu, bien tard et bien mal de la France, ni de la République, de n'avoir pour elles d'autres projets, d'autre ambition, d'autre perspective que la poursuite d'une lente décomposition. Ils n'ont pas davantage de projet ni d'ambition pour l'Europe : pas d'autre bilan que d'avoir accepté l'impossible usine à gaz du traité de Nice ; pas d'autre perspective que cette soi-disant fédération d'Etats-Nations, qui dissoudrait les nations dans un bain d'acide ultra-libéral, sous contrôle américain.
Ils ont été d'accord pour la démission de l'Etat dans le domaine de la justice avec l'absurde indépendance qu'ils ont voulu donner aux Parquets. Ils ont été d'accord pour la démission de la République en Corse, pour les concessions au terrorisme et pour le démembrement du pouvoir législatif. Ils ont été d'accord pour la disparition du service militaire. On les voyait encore dimanche dernier, à Barcelone, d'accord pour faire semblant de défendre le service public de l'électricité et du gaz, alors qu'ils venaient d'accepter pour 2004, comme l'a souligné Monsieur Aznar, l'ouverture à la concurrence de près de 70 % du marché, pour tout ce qui concerne les entreprises, et le principe de rediscuter du reste une fois les élections passées ! Ils sont d'accord encore sur le principe de la supranationalité qui, le moment venu permettrait à nos partenaires de décider à la majorité la privatisation de nos services publics, quel que puisse être nos avis.
Voilà où nous en sommes. On sent dans le pays monter l'indignation contre ce simulacre de démocratie, cette comédie qui veut faire croire aux Françaises et aux Français qu'ils n'ont d'autre choix que de poursuivre la même politique avec l'un des deux candidats sortants, et leur offre au premier tour un défoulement sans conséquences et sans suites avec Monsieur Le Pen ou Madame Laguiller.
Ce n'est pas la première fois que la classe politique et les médias tentent de confisquer la démocratie en faisant croire qu'il n'y a pas de vrai choix. Déjà pour Maastricht, on a assisté à un vrai matraquage. Le " non " était supposé mettre en péril l'Europe, la prospérité, jusqu'à la paix elle-même.
Il s'agissait alors, comme aujourd'hui, de faire accepter comme inévitable la loi de la mondialisation ultra-libérale, la loi de l'argent, la loi de la jungle.
Pour le monde du travail, cette loi est source d'une insécurité généralisée. L'insécurité n'est pas seulement au coin de la rue où s'embusque le petit malfrat. Elle est aussi, elle est surtout dans l'entreprise, avec la multiplication des emplois précaires, les restructurations imposées par l'insatiable appétit des gros actionnaires et des fonds de pension, le licenciement toujours menaçant, quel que soit le niveau de qualification. L'insécurité est dans toute la société, où la marginalisation s'étend et où parmi ceux qu'elle épargne, peu sont absolument sûrs d'être à l'abri.
L'élection présidentielle doit être l'occasion d'un sursaut. Elle n'est pas jouée d'avance au profit de Chirac et de Jospin, contrairement à ce qu'on veut nous faire croire. Les sondages de premier tour ne peuvent valoir prédiction dans l'état d'indécision et de colère croissante où se trouve le corps électoral.
D'autres sondages, moins largement diffusés, montrent clairement le sujet de l'opinion à l'égard des deux candidats sortants : que près d'un français sur deux souhaite la défaite de Chirac et moins d'un sur cinq sa victoire et qu'il en est presque exactement de même pour Jospin. Les choix définitifs se fixeront dans les jours et mêmes les heures précédents le jour décisif du 21 avril. Vous verrez alors, comme on l'a vu et comme on le voit de plus en plus souvent, que le verdict des urnes est fort éloigné des sondages et que Chirac et Jospin sont loin des scores escomptés.
Tout reste possible. Oui, les Françaises et les Français sont en train de prendre conscience : ils préparent un vote sanction massif contre les deux sortants. Oui, Jean-Pierre Chevènement est le seul des candidats qui présente un projet républicain et social crédible. Il est le seul qui ait la capacité de rassemblement nécessaire pour battre les deux sortants. Redoublons d'efforts pour qu'il se qualifie le 21 avril et pour qu'il gagne le 5 mai !
(Source http://www.georges-sarre.net, le 5 avril 2002)
Conférence à Paris (12e) le 26 mars 2002
Chers Amis,
Comment se différencier l'un de l'autre ? Voilà la grave question que se posent Jacques Chirac et Lionel Jospin. Encore, aujourd'hui, malgré les efforts déployés les trois quarts des Français ne voient aucune différence entre les deux programmes. Alors, les deux sortants se sont essayés à des substituts de différences. Lionel Jospin s'est ainsi gravement interrogé sur l'âge du capitane. Outre le fait que ces deux candidats ne sont séparés que par peu d'années, cette attaque personnelle a été très mal ressentie par les Français. Lionel Jospin a du s'en excuser. Les deux cohabitants laissent depuis se développer un autre thème d'opposition entre eux. Après cinq ans de vie commune, ils se détesteraient. La haine de l'un envers l'autre serait le mobile qui les animerait tous les deux. C'est possible. Mais, cet aspect sentimental de leur rivalité souligne que seule l'ambition personnelle les sépare. Il n'existe qu'un seul fauteuil présidentiel. L'un a la passion du pouvoir. L'autre a le désir du pouvoir.
Il y aurait peut être une solution pour satisfaire l'appétit de l'un et de l'autre. Il faudrait revenir aux institutions de l'antique République romaine. Il existait alors deux consuls, il est vrai, élus pour un an non renouvelable.
Comment Jacques Chirac et Lionel Jospin pourraient-ils avoir des programmes différents ? L'un et l'autre, l'autre et l'un, acceptent les mêmes préalables contraignants : soumission à la mondialisation financière à l'OMC et participation à une construction européïste libérale. On l'a bien vu lors du sommet de Barcelone. Ils ont accepté de poursuivre le démantèlement des services publics, tel qu'ils en avaient décidé le principe au sommet de Lisbonne en mars 2000. Toutefois pour leur permettre de franchir le cap des élections, les Tony Blair, les José Maria Aznar et autres Silvio Berlusconi ont autorisé le report de certaines échéances. La satisfaction affichée par Jacques Chirac et par Lionel Jospin ne reflétait pas un succès pour la France. Elle traduisait le soutien électoral obtenu.
Rien n'est plus étrange que cette fascination exercée par Tony Blair. Désormais, tout le monde le reconnaît les services publics britanniques sont en crise. En Grande-Bretagne, la poste, le rail, l'éducation, la santé et encore d'autres sont en pleine déliquescence. Depuis vingt ans, depuis Margaret Thatcher suivie de Tony Blair en passant par John Major, la Grande-Bretagne n'a pas investi dans ses infrastructures de base. Les privatisations devaient suppléer ; Les actionnaires se sont bien emparés des profits. Mais, ils n'ont pas mis une livre dans des équipements qui ne leur assuraient pas une rentabilité immédiate. Or, c'est précisément ce modèle en faillite que nous dicte Bruxelles avec l'accord préalable, bien qu'implicite et discret, de Jacques Chirac et de Lionel Jospin. Ne l'oublions jamais, Bruxelles ne pourrait pas nous imposer ses dogmes libéraux, si les gouvernements ne lui donnaient pas avant leur assentiment selon des procédures si complexes qu'elles en deviennent obscures pour les peuples. Elles dégagent ainsi la responsabilité des responsables politiques au détriment de la démocratie.
Puisque la véritable différence n'est pas entre le programme de Jacques Chirac et celui de Lionel Jospin. Elle est ailleurs. Elle est entre d'une part leur programme commun de renoncement et d'autre part les dix grandes orientations présentées le 9 septembre dernier par Jean-Pierre Chevènement et qu'il développe progressivement depuis. Il les a encore précisées vendredi dernier. On peut comparer grand thème par grand thème, et on verra où se situent les véritables différences.
Jacques Chirac et Lionel Jospin présentent ainsi les mêmes mesures contre l'insécurité. Mais, ces mesures ne sont qu'une reprise, avec moins de cohérence et de rigueur, des propositions que Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l'Intérieur, a faites dès le début de 1999 à Lionel Jospin. Il les avait repoussées, non par naïveté, comme il le dit aujourd'hui, mais parce qu'à cette époque, il privilégiait déjà un axe stratégique avec les verts. Une des conditions de ce succès politicien était d'accepter leur angélisme. Souvenez-vous en ce temps-là, Jean-Pierre Chevènement était critiqué, insulté par la gauche caviar pour avoir osé parler de " sauvageons ". A cette époque, Jacques Chirac, s'il avait exercé dignement ses fonctions de chef de l'Etat, aurait pu intervenir pour soutenir le ministre de l'Intérieur. Mais, déjà, candidat en embuscade, il est resté silencieux, et ce silence équivaut à une complicité avec Lionel Jospin.
Enfin, il ne s'en vante pas. Mais, Jacques Chirac est à l'origine de mesures que les Français payent chères aujourd'hui. En 1987, il a supprimé la possibilité de la détention provisoire pour les mineurs, mêmes multirécidivistes. En 1995, il n'a pas appliqué la loi de programmation pour la police et la gendarmerie que Charles Pasqua venait de faire voter. En janvier 1997, il a lancé la procédure conduisant à l'indépendance des parquets, introduisant la fragmentation de la politique pénale et l'inégalité des citoyens devant l'application de la loi. Lionel Jospin s'est employé à faire aboutir cette réforme. Il est vrai que Jacques Chirac voulait aller encore plus loin en supprimant la hiérarchie au sein des parquets, disposition qui aurait en plus provoqué l'anarchie judiciaire.
Certains diront puisque Jacques Chirac et Lionel Jospin ont, au moins implicitement, reconnu leur erreur en reprenant les propositions de Jean-Pierre Chevènement, pourquoi ne pas leur faire confiance désormais ? Parce que l'un comme l'autre est prêt à changer d'avis en fonction de sa stratégie politicienne. L'un, par exemple, pourrait suivre Alain Madelin qui se réclame du libéralisme et qui, il y a encore peu de temps, se prononçait pour la mise en vente libre de la drogue. D'ailleurs, les récents propos équivoques de Lionel Jospin sur le cannabis peuvent susciter de légitimes inquiétudes. L'autre pourrait à nouveau tomber sous l'influence des libéraux libertaires, qui refusent la responsabilité individuelle des criminels et des délinquants pour mieux culpabiliser la société toute entière.
Jacques Chirac et Lionel Jospin défendent tous les deux, d'un commun accord, le développement de la formation au cours de la vie professionnelle. C'est bien. Qui peut être contre ? Mais la formation permanente ne peut être efficace que si elle repose sur une formation initiale solide. Or, leur discours sur l'Ecole ne sort pas du pédagogisme et de l'idéologie des post soixante huitards attardés. Par la loi d'orientation qu'il a fait voter en 1989, quand il était ministre de l'Education Nationale, Lionel Jospin a placé l'élève au centre de l'Ecole. C'est une grave erreur de conception. Au centre de l'Ecole doit être placée la transmission des savoirs, des connaissances, des repères. Il n'y a pas d'égalité entre le maître et l'élève. Le maître sait. L'élève apprend. L'enfant deviendra adulte et l'élève citoyen. L'Ecole doit former des citoyens, aptes à participer au débat public et capables de subvenir à ses besoins. L'Ecole ne doit pas assumer la promotion des tags et des marseillaises frelatées.
Jean-Pierre Chevènement est un ferme défenseur de l'Ecole de la République, qui repose sur le principe de la laïcité. On n'y importe ni sa violence, ni ses croyances. On en exporte ses connaissances et ses espérances. C'est dans ce creuset que se forment les futurs citoyens ; c'est à partir de ce creuset que les futurs citoyens font de la République un projet perpétuellement renouvelé. Alors, bien sûr, la formation permanente ! Mais, la formation permanente ne doit pas être un alibi pour laisser l'Ecole poursuivre sa dérive. Comme le propose Jean-Pierre Chevènement, commençons par le commencement ; commençons par l'Ecole, et même l'Ecole élémentaire ; commençons par apprendre à nos enfants à lire, à écrire et à compter.
Jacques Chirac et Lionel Jospin chantent en choeur les louanges du dialogue social. En réalité, ils font la promotion du contrat au détriment de la loi. Le contrat, c'est le résultat d'un rapport de forces. Or, il est rare que les deux parties soient de force équivalente. Dans le domaine social, en dehors de quelques cas particuliers, l'employeur est le plus fort et l'employé est le plus faible. Certes, le syndicat existe pour atténuer, sinon rééquilibrer cette disproportion. Mais, chacun sait combien est fragile et difficile le travail du syndicat. En revanche, la loi, par nature, est égale pour tous, s'impose à tous. Son application permet de changer les termes du rapport de forces pour que les interlocuteurs se situent au même niveau. Le dialogue social n'échappe pas à cette problématique. Le dialogue social sera fructueux et positif que s'il est conforté par la loi.
La République, c'est le règne de la loi. La République, c'est donc l'égalité des partenaires sociaux devant la loi. Avant d'établir la loi, le législateur dialogue avec chaque partie intéressée, prend en compte ses remarques, et même se soucie de ses intérêts particuliers. Puis, correctement informé, le législateur se prononce en fonction de l'intérêt général. Voilà, la philosophie qui inspire Jean-Pierre Chevènement : la concertation, mais toujours au-dessus l'intérêt général.
Aujourd'hui, l'intérêt général commande de relancer l'économie par la demande. Il convient donc d'améliorer le pouvoir d'achat du plus grand nombre. Jean-Pierre Chevènement propose d'augmenter le SMIC de 25 % en valeur réelle sur cinq ans. Il compte diminuer les charges sociales, qui taxent le travail, en transférant celles qui pèsent sur les sept cents cinquante premiers euros de tout salaire vers la fiscalité général. Très rapidement, il souhaite pouvoir ouvrir une large concertation avec tous les partenaires sociaux en convoquant une conférence sur les revenus. Dans une telle procédure, l'Etat reste, comme il se doit, le garant de l'intérêt général.
Il faut accroître les revenus du salaire direct.
Il est souvent trop peu avantageux de quitter un revenu d'assistance pour reprendre un travail ou une activité économique. Pour accroître les revenus du salaire direct, sans alourdir les charges des entreprises, les cotisations, salariales et employeurs, sur la partie inférieure du salaire doivent être allégées de manière très importante.
En outre, il faut assouplir l'application des 35H00 qui interdit le recours aux heures supplémentaires
Dès 2003, une franchise de cotisations salariales et patronales sera appliquée sur les premiers 750 euros (5000 francs) de salaires, et remplacera les systèmes actuels d'exonérations, très lourds à gérer pour les entreprises et qui constituent une subvention au travail précaire.
Les cotisations patronales, actuellement assises sur les salaires, seront, à partir de 2004, graduellement remplacées par une taxe assise sur la valeur ajoutée comptable de l'entreprise : un prélèvement unique remplacera ainsi l'enchevêtrement complexe de cotisations et d'exonérations ciblées actuellement en vigueur.
Les cotisations salariales, sauf les cotisations de retraite, seront, à partir de 2004 et dans une proportion importante, remplacées par une majoration de la CSG qui deviendra déductible de l'impôt sur le revenu.
Les cotisations retraites resteront assises sur la totalité du salaire à l'exception des 5000 premiers francs.
Ces trois mesures auront un effet bénéfique sur l'emploi : le remplacement des cotisations patronales par une taxe assise sur la valeur ajoutée délivrera les entreprises qui emploient une main d'oeuvre abondante d'un handicap important ; les coûts de gestion des entreprises seront allégés, puisque les formalités administratives seront simplifiées.
Certains observateurs veulent voir une différence dans les propositions fiscales de Jacques Chirac et de Lionel Jospin. Ils ont dû acheter une loupe très grossissante. Les deux veulent réformer la taxe d'habitation, sans être toujours très précis sur les modalités envisagées. Les deux veulent baisser l'impôt sur le revenu. Jacques Chirac, qui ne lésine jamais sur les promesses, parle d'un tiers. Lionel Jospin, qui veut faire plus sérieux, se contente d'un dixième. Puis, Lionel Jospin, qui se donne une image de gauche, veut imposer plus le capital et les revenus du capital. Mais, selon sa méthode, il a prévu le mécanisme qui bloquera ses intentions. En effet, il se déclare partisan d'un gouvernement économique européen, dont les décisions en matière fiscale seraient prises à la majorité qualifiée. Ainsi, Lionel Jospin pourrait nous dire un jour, s'il est élu : " je voudrais bien, mais Tony Blair, José Maria Aznar et Silvio Berlusconi ne veulent pas ".
Bien évidemment, nos deux compères de la cohabitation veulent augmenter le nombre de policiers, de gendarmes, d'instituteurs, de professeurs, d'infirmières, de juges et de quelques autres corps de fonctionnaires. Leur programme est simple : baisser les recettes, augmenter les dépenses. Toutefois, Jacques Chirac a cherché à répondre à cette critique en trouvant de nouvelles ressources. Pour un quart, il les voit provenir d'une croissance de 3 % par an pendant cinq ans. Nous sommes à 1,2 %. Il s'agit donc d'un pari très risqué. Pour un autre quart, il les attend d'un desserrement des contraintes du pacte de stabilité budgétaire pendant trois ou quatre ans. C'est en totale incohérence avec ses autres propositions sur la construction européenne. Pour la moitié, il y affecterait le produit de la vente des services publics. On voit bien la limite de ses cris de victoire après le sommet de Barcelone. Lionel Jospin est moins disert sur le financement de ses propositions. Mais, il poursuivra aussi la liquidation du secteur public. N'en est-il pas à vendre les sociétés d'autoroutes, avec l'accord de Jean-Claude Gayssot, le ministre communiste des Transports ? A quoi sert donc aujourd'hui le Parti communiste, si lui aussi privatise ?
Nos deux sortants ont encore en commun un chiffre fétiche : le zéro. C'est déjà tout un symbole. En toute impudence personnelle, Jacques Chirac parle d'impunité zéro. En toute démagogie humanitariste, Lionel Jospin promet zéro F. Mais, qui peut les prendre au sérieux ? Depuis vingt ans, ils ont tant promis ; ils ont tant trahi.
Le système du pareil au même a, pour se perpétuer, lâcher des leurres. Ils ont le discours du changement. Ils ont l'apparence du changement. Mais, ils ne sont pas le changement. Ils fourvoient ceux qui veulent changer. Jean-Marie Le Pen et Arlette Laguiller sont des leurres. Regardez comme, pour cette campagne électorale, Jean-Marie Le Pen n'apparaît plus comme le diable. Tous les antifascistes autoproclamés restent chez eux et ne manifestent plus leur indignation de commande. Regardez comme, pour cette campagne électorale, Jean-Marie Le Pen nous est présenté comme adouci, quasiment acceptable. C'est Le Pen light. Et, Arlette Laguiller, la voilà soudain promue vedette de la presse du coeur. Son discours inoffensif sur " les travailleuses, travailleurs " prend une douceur rétro qui frise la nostalgie. Madame de Fontenay l'a proclamée Miss Révolution. Plus les sondages, vrais ou arrangés, sont prometteurs pour l'un et pour l'autre, plus les tenants du système se réjouissent et en rajoutent.
Non seulement Jean-Marie Le Pen et Arlette Laguiller ne font pas peur, mais ils sont presque considérés comme des sauveurs. En France, il y a un plancher incompressible de 2 à 3 % de l'électorat qui votent respectivement pour l'extrême droite ou pour l'extrême gauche. Le reste des électeurs qui pourraient se prononcer pour ces deux candidats veulent manifester un désir de changement. Mais, Jean-Marie Le Pen et Arlette Laguiller n'y pourront rien changer. Si, d'aventure, l'un des deux figurait au second tour, il serait écrasé. Ils sont donc les candidats du changement sans risque de changement dans la réalité.
En revanche, il y a un véritable candidat du changement, véritable parce que fiable et crédible. Ce candidat se nomme Jean-Pierre Chevènement. En conséquence, pour le système, il faut éviter que le plus grand nombre possible d'électeurs qui veulent le changement se portent sur son nom, d'où l'intérêt des leurres, d'où la valorisation des leurres. Ils sont des candidats protestataires stériles. Jean-Pierre Chevènement est un candidat protestataire utile.
Chers Amis,
Autour de Jean-Pierre Chevènement, s'est constitué un rassemblement qui réunit des femmes et des hommes venant de tous les horizons politiques. Certains vont jusqu'à le qualifier d'attelage hétéroclite.
Manifestement, ils n'ont pas compris quelle était la situation de la France aujourd'hui. En face, du Pôle républicain, il y a bien deux candidats ; mais ils ne sont séparés que par leur ambition personnelle respective. Droite et gauche ne sont qu'apparences et illusions. Au Pôle républicain, nous savons qu'au dessus de la droite et de la gauche se situe la République. Nous savons que le combat pour la République et pour la France est désormais la priorité. La droite et la gauche n'ont donc pas disparu. Elles demeurent deux sensibilités qui doivent travailler ensemble dans le respect mutuel au profit d'un idéal plus élevé, au profit de la Nation toute entière.
Le programme du Pôle républicain a été exposé à Vincennes par Jean-Pierre Chevènement dès le 9 septembre dernier. Il comprend dix grandes orientations. Il n'y a donc ni négociations, ni accords entre des partis ou des groupes d'intérêts. Il n'y a pas de marchandage ou de pressions. Bref, ce n'est pas le retour au régime des partis. C'est un homme qui présente son programme à la Nation et le rejoigne ceux qui se retrouvent dans ses orientations. Sur cette base, nous voulons aider Jean-Pierre Chevènement à mettre en oeuvre son projet pour la France. La première étape est, bien évidemment, son élection à la Présidence de la République.
En juin prochain, nous présenterons un candidat dans chaque circonscription législative. Nous désignerons ces candidats dans quelques semaines. Il faut que les évolutions en cours se poursuivent.
Comme je l'ai dit, le vote pour Jean-Pierre Chevènement est un vote protestataire utile. Chacun voit bien la tension qui surgit au seul rapprochement des deux termes. Une protestation qui ne serait pas une impasse. Une utilité qui ne serait pas une compromission. C'est pour cela que le vote pour Jean-Pierre Chevènement est un vote d'avenir. En même temps, le vote pour Jean-Pierre Chevènement est une véritable chance pour la France et pour la République.
Avec Jean-Pierre Chevènement, c'est le retour de la France dans le concert des nations. Car, la France a toujours quelque chose à dire au monde. Car, le monde attend encore que la France s'exprime. Non, les Etats-Unis d'Europe de Lionel Jospin n'auront pas la même puissance dans le message. Non, un président de l'Europe, cher à Jacques Chirac, ne sera pas porteur d'un discours tendant vers l'universel. La France est unique, à condition qu'elle ose parler, à condition qu'elle ne noie pas sa parole dans le verbiage d'un européisme sans rivage.
Nous ne sommes pas contre l'Europe. Depuis les temps géologiques, la France appartient à l'Europe. Mais, nous sommes pour une Europe qui respecte les nations, qui s'enrichit des nations. Nous sommes pour une Europe dans laquelle la France conserve son indépendance, tout en coopérant avec les autres pays. La nation est encore pour longtemps le cadre indépassable de la démocratie. La synthèse de la nation et de la démocratie forme le socle de la République. C'est à ce socle que Jacques Chirac et Lionel Jospin s'attaquent au nom de la mondialisation, au nom d'une construction européenne qui n'est que le relais continental de cette mondialisation.
Avec Jean-Pierre Chevènement, nous remettrons les choses en place et en ordre. La France sera première servie, une France généreuse, accueillante, ouverte sur le monde, une France qui aura retrouvé sa fierté, sa raison d'être, sa vocation dans la République.
Oui, voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est donner un avenir à la France,
Oui, voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est donner un espoir à la République,
Oui, voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est donner à nous-mêmes une espérance.
(Source http://www.georges-sarre.net, le 5 avril 2002)
Inauguration du local de campagne du 12e arrondissement de Paris, le 27 mars 2002
Chers Amis,
Avoir un local, avoir un point fixe où se réunir, avoir un endroit où entreposer le matériel, avoir une adresse où recevoir les sympathisants, voilà le début d'une installation solide dans le paysage politique. En inaugurant ce local pour sa campagne électorale, nous participons à l'inscription de la candidature de Jean-Pierre Chevènement en profondeur. Cette candidature est d'un type nouveau parce qu'elle n'émane pas d'un appareil où grouillent de solides appétits. Cette candidature est d'un type nouveau parce qu'elle est effectivement un dialogue entre un homme et la Nation. Cette candidature est d'un type nouveau parce qu'elle suscite un large rassemblement, qui se nomme Pôle républicain.
Le Pôle républicain n'est pas une structure figée. Le Pôle républicain est une dynamique, qui émerge face au système du pareil au même. Son avenir est donc dans les mains des militants, mais aussi dans celles des citoyens. L'avenir du Pôle républicain dépend du résultat qu'obtiendra la candidature de Jean-Pierre Chevènement. Aussi, aujourd'hui, pour assurer un bel avenir au Pôle républicain, l'important est de mener campagne pour cette candidature, de mener campagne pour obtenir le meilleur résultat possible, de mener campagne pour gagner.
Aux élections législatives des 9 et 16 juin prochains, le Pôle républicain présentera un candidat dans chaque circonscription de France métropolitaine et d'Outre-mer. Il est encore trop tôt pour les désigner. Toutes les évolutions ne sont pas encore achevées.
Pour le moment, nous connaissons seulement deux impératifs. D'une part, il faudra respecter la loi et assurer la parité entre les hommes et les femmes dans les candidatures. D'autre part la palette des candidats devra refléter l'originalité du rassemblement qui s'est constitué autour de Jean-Pierre Chevènement. Tout esprit de boutique, des anciennes boutiques, sera à proscrire. L'essentiel sera à la fois de maintenir la cohésion de ce rassemblement et de renforcer la dynamique enclenchée par la campagne présidentielle.
Jean-Pierre Chevènement est l'homme de la Nation. Il s'adresse à tous les Français à partir des dix grandes orientations qu'il a présentées à Vincennes le 9 septembre dernier. Il les précise depuis progressivement. Il ne découpe pas le peuple de notre pays en peuple de droite et en peuple de gauche. Il parle au peuple tout entier au-dessus de ces étiquettes traditionnelles, qui ne correspondent pas à la situation que nous vivons aujourd'hui. Contrairement à Jacques Chirac et à Lionel Jospin, il ne veut pas enfermer nos concitoyens dans des catégories politiques pour essayer de profiter d'une rente électorale. Il ne souhaite pas plus les diviser en camps opposés. Il cherche, au contraire, à les rassembler pour que la France puisse affronter victorieusement les défis du nouveau millénaire.
Pour autant, la droite et la gauche n'ont pas disparu. Demain ou après-demain peut-être, la droite et la gauche redeviendront le clivage fondamental de la vie politique française. Mais, aujourd'hui, la question fondamentale est la survie même de la France, et donc de la République. Soit, notre pays se dissout dans une improbable Europe, des régions, elle-même modalité continentale de la mondialisation ultra-libérale. Soit, notre pays connaît un sursaut républicain et retrouve à la fois son dynamisme et sa vocation, celle de parler au monde pour éviter la domination des empires.
Sur cette base, le Pôle républicain doit être l'outil dynamique du rassemblement des citoyens de ce pays. Les comités de soutien à la candidature de Jean-Pierre Chevènement, qui se sont constitués un peu partout, en sont les noyaux. Ils vont se transformer, ils vont s'adapter pour que l'impulsion, donnée à Belfort le 4 septembre dernier, ne s'arrête pas. Car, retrouver la France, relever le citoyen, revaloriser le travail est une tâche exaltante qui prendra du temps.
Il reste un peu plus de trois semaines avant le premier tour. Les trois quarts des électeurs ne voient, avec raison, aucune différence entre Jacques Chirac et Lionel Jospin. Plus de la moitié d'entre eux se déclarent indécis, quoique certains d'aller voter. Sur toutes les grandes questions, Jean-Pierre Chevènement est considéré comme l'un des trois meilleurs pour apporter des solutions. Tout est donc possible. Certes, contre lui, on promeut avec Arlette Laguiller et Jean-Marie Le Pen deux leurres pour stériliser les votes protestataires. A nous de savoir montrer que le seul vote protestataire utile est celui pour Jean-Pierre Chevènement. A nous, à nous le Pôle républicain, de savoir impulser la dynamique nécessaire jusqu'à la victoire.
Un mot encore pour évoquer le drame de Nanterre. Nous avons un ami, André Cassou, adjoint au maire de Nanterre, qui a été gravement blessé. Ses jours ne sont plus en danger. Il s'agit certes d'un coup de folie. Mais, un coup de folie qui intervient dans un climat délétère. La perte des repères conduits des êtres déséquilibrés à croire qu'une mission leur est dévolue. Leur rêve peut se transformer en cauchemar. Face à de tels drames, bien sûr, nous devons exprimer toute notre sympathie pour les victimes et pour leurs familles. Nous devons aussi redonner à la société quelques points fixes. La République reste le meilleur d'entre eux.
(Source http://www.georges-sarre.net, le 5 avril 2002)
Guéret 28 mars 2002
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
Dans un peu plus de trois semaines, ce sera le premier tour. Loin de se décanter, la situation n'a jamais été aussi confuse ni aussi incertaine. Près d'un électeur sur deux demeure indécis.
Les Françaises et les Français persistent à se désintéresser massivement d'une campagne électorale méthodiquement confisquée au profit des deux candidats sortants, des deux compères de cinq années de cohabitation.
Cette confiscation de la campagne a pour but de détourner l'attention des vrais enjeux et de la focaliser sur de faux débats.
Ce qui est en cause, c'est la survie de la République et de la France ; c'est aussi l'orientation de la construction européenne, qui est à une redoutable croisée des chemins. C'est le sort du monde du travail qu'on est en train de soumettre à la loi de l'argent, toujours plus, et donc à la loi de la jungle, sous prétexte d'ouverture, de concurrence, de déréglementation, de flexibilité.
Or, ce à quoi la classe politique, les médias, les candidats sortants eux-mêmes réduisent systématiquement le débat, c'est à l'affrontement dérisoire de deux hommes et de deux clans celle de l'Etat PS et celle de l'Etat RPR, qui pour l'essentiel, sont d'accord sur tout !
Nous assistons à un étouffement de la République et de la démocratie. Plus besoin de coups d'Etat à grand fracas. C'est le lacet de l'étrangleur. Point de bruit. Une lente asphyxie.
Sur les médias, il n'y en a que pour les deux compères cohabitants et pour leurs lieutenants. Rien ou presque pour les autres.
Mais, il y a aussi et surtout, de la part de la plupart des médias, un discours insidieux et lancinant tendant à faire croire que le premier tour est joué, que le second opposera nécessairement Chirac et Jospin, que les Françaises et les Français n'ont le choix qu'entre le pareil et le même et que les autres candidats ne sont là que pour leur servir de rabatteurs, ce qui est malheureusement vrai d'un grand nombre d'entre eux, ou bien pour certains, pour apporter un témoignage particulier qui n'a guère sa place dans une élection présidentielle.
A moins qu'ils n'aient une fonction particulière, comme c'est le cas depuis des lustres de Monsieur Le Pen, dont le premier mandat parlementaire remonte à quarante six ans en arrière, ou de Madame Laguiller, qui en est à sa cinquième élection présidentielle. Ils ont la fonction de fixer sur des positions extrémistes les voix de plus en plus nombreuses des mécontents qui souhaitent de profonds changements ; ce faisant, le vieux cheval de retour de l'extrême droite et la madone inoxydable des travailleuses et des travailleurs jouent fondamentalement le même rôle, le même rôle utile au système qu'ils disent combattre : ils stérilisent ces voix, car à supposer que l'un ou l'autre accède au second tour, il y serait inévitablement battu. Ainsi donc, nous n'aurions le choix qu'entre Chirac et Jospin.
Ce bateleur d'estrade, en embuscade depuis cinq ans en son château de l'Elysée, et qui espère qu'aujourd'hui, l'oubli des promesses non tenues va permettre de le ramener à la réalité du pouvoir.
Jospin, l'austère aux lapsus si délicieux, dont le discours professoral théorise la bonne organisation du déclin, ce champion toutes catégories des privatisations, cet homme de gauche prétendue, qui est le cher ami de Monsieur Blair, qui est le cher ami de Monsieur Berlusconi.
Non nous ne l'acceptons pas. L'élection présidentielle doit être l'occasion d'un sursaut. Elle n'est pas jouée d'avance au profit de Chirac ou de Jospin, contrairement à ce qu'on veut nous faire croire.
Qu'ont-ils à nous dire, ces deux la, que nous ne sachions déjà ? Chacun sait la politique menée depuis cinq ans. L'un l'a conduite, comme Premier ministre. L'autre, comme Président de la République a souvent approuvé cette politique et l'a toujours laissé faire, non pas quelques mois, comme au temps de Mitterrand, mais cinq longues années, alors qu'il avait s'il le voulait, des moyens constitutionnels pour s'y opposer.
Alors ils essaient d'attirer l'attention en faisant assaut de démagogie, comme si cela pouvait encore tromper quelqu'un.
Chirac promet la baisse des impôts, l'impunité zéro pour tous... l'impunité zéro pour tous les autres. Ceux qui l'entendent pensent à 1995 et à ses promesses de réduction de la fracture sociale. Il disait aussi que la feuille de paye n'est pas l'ennemie de l'emploi... juste avant son élection et le tour de vis général. Supermenteur est de retour !
Jospin lui-même s'évertue à démentir sa réputation de plus grand sérieux. Ne promet-il pas de réduire fortement le chômage, alors qu'il refuse par ailleurs de se donner les moyens d'une politique industrielle ? N'annonce-t-il pas la disparition des SDF en cinq ans, alors qu'en 1995, il promettait la même chose sur deux axes et que la situation ces dernières années n'a cessé de s'aggraver ?
Leurs projets sont si nuls, si bâclés, si irresponsables, que nous les voyons aujourd'hui contraints d'en gommer les aspects les plus démagogiques, sous les rires et sous les huées : les impôts pour Chirac, les SDF pour Jospin.
Incapables de retenir l'attention par des projets sérieux et crédibles, ils s'efforcent maintenant de l'attirer en haussant le ton de leurs polémiques. Voici nos deux compères qui se défient et s'injurient, comme des lutteurs de foire avant le match truqué.
L'un vocifère sur l'âge du capitaine et sur son usure, avant d'ailleurs de se rétracter platement. L'autre traite le premier de fasciste et de gauchiste. Ils espèrent que cette dramatisation pitoyable et dérisoire va regrouper autour d'eux, par réflexe, les batillons de la droite et de la gauche traditionnelles, dont ils cherchent désespérément à ressusciter le clivage.
Mais tout le monde sait bien que rien de décisif ne les sépare plus aujourd'hui. Ils ont en commun de parler bien peu, bien tard et bien mal de la France, ni de la République, de n'avoir pour elles d'autres projets, d'autre ambition, d'autre perspective que la poursuite d'une lente décomposition. Ils n'ont pas davantage de projet ni d'ambition pour l'Europe : pas d'autre bilan que d'avoir accepté l'impossible usine à gaz du traité de Nice ; pas d'autre perspective que cette soi-disant fédération d'Etats-Nations, qui dissoudrait les nations dans un bain d'acide ultra-libéral, sous contrôle américain.
Ils ont été d'accord pour la démission de l'Etat dans le domaine de la justice avec l'absurde indépendance qu'ils ont voulu donner aux Parquets. Ils ont été d'accord pour la démission de la République en Corse, pour les concessions au terrorisme et pour le démembrement du pouvoir législatif. Ils ont été d'accord pour la disparition du service militaire. On les voyait encore dimanche dernier, à Barcelone, d'accord pour faire semblant de défendre le service public de l'électricité et du gaz, alors qu'ils venaient d'accepter pour 2004, comme l'a souligné Monsieur Aznar, l'ouverture à la concurrence de près de 70 % du marché, pour tout ce qui concerne les entreprises, et le principe de rediscuter du reste une fois les élections passées ! Ils sont d'accord encore sur le principe de la supranationalité qui, le moment venu permettrait à nos partenaires de décider à la majorité la privatisation de nos services publics, quel que puisse être nos avis.
Pour le monde du travail, cette loi est source d'une insécurité généralisée. L'insécurité n'est pas seulement au coin de la rue où s'embusque le petit malfrat. Elle est aussi, elle est surtout dans l'entreprise, avec la multiplication des emplois précaires, les restructurations imposées par l'insatiable appétit des gros actionnaires et des fonds de pension, le licenciement toujours menaçant, quel que soit le niveau de qualification. L'insécurité est dans toute la société, où la marginalisation s'étend et où parmi ceux qu'elle épargne, peu sont absolument sûrs d'être à l'abri.
Pour le monde agricole, c'est la poursuite du déclin. Aujourd'hui, seulement 6 200 jeunes agriculteurs s'installent à la terre chaque année. Dans trente ans, à ce rythme, il y aura moins de 200 000 exploitations agricoles contre 600 000 actuellement. Pour enrayer cette pente, il faut une politique volontariste. Il faut maintenir des prix rémunérateurs. Il faut aussi attribuer des aides directes substantielles correspondant au rôle utile que jouent nos agriculteurs. Qualité des aliments, sécurité sanitaire, préservation des terroirs et des paysages. Veillons à valoriser les espaces ruraux qui sont un grand atout de la France. Voilà les grandes lignes du programme de Jean-Pierre Chevènement pour nos campagnes. Ces propositions méritent d'être débattues par toutes les parties intéressées.
L'élection présidentielle doit être l'occasion d'un sursaut. Elle n'est pas jouée d'avance au profit de Chirac et de Jospin, contrairement à ce qu'on veut nous faire croire. Les sondages de premier tour ne peuvent valoir prédiction dans l'état d'indécision et de colère croissante où se trouve le corps électoral.
D'autres sondages, moins largement diffusés, montrent clairement le sujet de l'opinion à l'égard des deux candidats sortants : que près d'un français sur deux souhaite la défaite de Chirac et moins d'un sur cinq sa victoire et qu'il en est presque exactement de même pour Jospin. Les choix définitifs se fixeront dans les jours et mêmes les heures précédents le jour décisif du 21 avril. Vous verrez alors, comme on l'a vu et comme on le voit de plus en plus souvent, que le verdict des urnes est fort éloigné des sondages et que Chirac et Jospin sont loin des scores escomptés.
Tout reste possible. Oui, les Françaises et les Français sont en train de prendre conscience : ils préparent un vote sanction massif contre les deux sortants. Oui, Jean-Pierre Chevènement est le seul des candidats qui présente un projet républicain et social crédible. Il est le seul qui ait la capacité de rassemblement nécessaire pour battre les deux sortants. Redoublons d'efforts pour qu'il se qualifie le 21 avril et pour qu'il gagne le 5 mai !
(Source http://www.georges-sarre.net, le 5 avril 2002)
Guéret le 28 mars 2002
Chers Amis,
Je ne peux commencer cette réunion publique sans évoquer le drame de Nanterre. Nous devons avoir une pensée pour les huit morts et les quatorze blessés graves, au-delà bien évidemment de leur appartenance politique. Je pense ne pas me tromper en voulant exprimer, au nom de nous tous ici présents, notre sympathie attristée aux familles endeuillées. De même, je crois pouvoir exprimer nos vux collectifs de rétablissement, aussi prompts que possible, à ceux qui sont encore hospitalisés. Parmi eux, permettez-moi d'avoir une pensée plus particulière pour mon ami, pour notre ami du Pôle républicain, André Cassou, adjoint au maire de Nanterre. Il a été gravement blessé. Heureusement, ses jours ne sont plus en danger. Le tueur est un déséquilibré. Son acte de folie intervient dans un climat grandissant d'insécurité. Il n'y a pas de rapport. Mais, il y a une même sourde inquiétude.
Dois-je rappeler que, quelques heures avant ce drame, un commissariat de police de la banlieue de Mulhouse avait été pris d'assaut par une bande de jeunes délinquants ? Ils voulaient délivrer trois des leurs qui venaient d'être arrêtés pour quelques trafics. A première vue, les deux faits semblent sans lien entre eux. Et pourtant, ils sont, avec bien d'autres, les conséquences d'un même climat délétère, qui finit par engendrer la violence. En effet, depuis des années, la société française vit dans une ambiance de méfiance grandissante vis-à-vis de toute autorité. La stratégie du soupçon érigée en principe politique mine l'une après l'autre toutes les institutions de la République, et même des institutions qui, bien que légitimes, n'appartiennent pas à la République. L'idéologie post soixante huitarde attardée sape ainsi les bases de la République. Les libertaires fusionnent avec les libéraux pour faire la promotion du marché. Daniel Cohn-Bendit et Alain Madelin marchent désormais d'un même pas.
Avec la République qui s'affaiblit, c'est le respect de la loi qui s'effrite. Et, si la loi républicaine devient évanescente, alors revient au galop la loi de la jungle. La société n'offre plus de repères. Les citoyens se transforment en individus repliés sur eux-mêmes pour tenter de profiter d'un bonheur restreint, fugitif et menacé pour certains même, l'horizon se limite de plus en plus à la seule survie. Alors, dans ce climat, tout semble permis. La force, la violence, la débrouille sont des moyens parmi d'autres. L'essentiel est de ne pas se faire prendre par le peu d'autorité qui subsiste. Et, si l'on se fait prendre, l'important est de délégitimer encore plus cette autorité résiduelle. Ainsi, par sa seule présence, la police provoquerait, son comportement serait toujours condamnable. Attaquer un commissariat devient donc banal, sinon normal. Dans ce climat, surgissent aussi des justiciers autoproclamés. Les actes d'autodéfense se banalisent. On ne peut vivre dans l'harmonie avec un Etat déliquescent.
Face à cette crise de l'autorité, qui est en fait une crise profonde de la République, que proposent donc les deux candidats sortants ? Rien, sinon aggraver l'évolution trentenaire avec encore plus de marché mondialisé, avec encore plus de bureaucratie européiste, avec encore plus de libéralisme. Jacques Chirac et Lionel Jospin se prononcent pour la société civile et les contre-pouvoirs ; Or, par nature, la société civile et les contre-pouvoirs s'opposent au principe même de la République. L'existence d'une société civile suppose que l'exercice de la politique est réservé à un petit nombre.
Dans la République, l'exercice de la politique appartient à tous les citoyens. L'accès aux charges de la politique dépend du vote de ses concitoyens. De même, dans la République, il n'existe pas de contre-pouvoirs. Tout pouvoir procède du suffrage universel. Le rôle des contre-pouvoirs est exercé par les minorités politiques, qui ont vocation à devenir la majorité si les électeurs en décident ainsi.
Pour répondre à cette crise de la République, il faut, comme le propose Jean-Pierre Chevènement, relever le citoyen. Et, pour relever le citoyen, il faut commencer par le commencement. Dans la République, au commencement est l'Ecole. L'Ecole est à la base de tout. Au centre de l'Ecole, il doit y avoir la transmission des savoirs, des connaissances et des repères. Le maître et l'élève ne sont pas égaux. Ils ne sont même pas équivalents. Le maître sait. L'élève apprend. Quand il était ministre de l'Education nationale, Lionel Jospin fit voter en 1989 une loi d'orientation qui plaçait et qui place l'élève au centre de l'Ecole. C'est une grave erreur de conception, qui accentue toutes les dérives. Elle transforme l'Ecole en simple lieu de vie, qui devient un but pour lui-même, qui oublie ses objectifs. Or, l'enfant est un adulte en devenir. Or, l'élève est un futur citoyen. La vocation de l'Ecole est de former des citoyens, capables de subvenir à leurs besoins et à ceux des leurs. L'élève ne peut donc pas être considéré que dans le seul instantané du moment présent. La formation permanente, que nous vantent tant Jacques Chirac que Lionel Jospin, ne peut être efficace que si elle est précédée d'une excellente formation initiale. Je le répète : au commencement est l'Ecole. Tout retour à la République passe par la remise de l'Ecole sur ses pieds.
Jack Lang, actuel ministre de l'Education nationale, a découvert, il y a quelques semaines, dix huit ans après Jean-Pierre Chevènement, qu'à l'Ecole primaire les enfants doivent apprendre à lire, à écrire et à compter. Nous n'aurions pas été, lors de cette découverte, à deux mois de l'élection présidentielle, je m'en serais réjoui sans y voir malice. Mais, je ne peux oublier que le même Jack Lang a diffusé, il y a quelques temps, dans nos écoles des Marseillaises frelatées. Notre hymne national mérite le respect. Il est scandaleux qu'il soit sifflé au Stade de France par des adolescents auxquels on n'a transmis aucun repère. Il est donc irresponsable de le livrer, comme un jouet, aux humeurs d'un ministre de passage. Il est vrai qu'il fut un temps où jack Lang, déjà ministre, se répandait pour nous dire combien étaient " formidables " les tags, qui seraient une forme spontanée d'expression artistique.
L'Ecole ne suffit pas malheureusement. Il faut aussi des dispositions immédiates.
Jean-Pierre Chevènement présente un ensemble de mesures pour lutter avec efficacité contre la grave augmentation de l'insécurité en France. On peut les diviser en deux grandes catégories. D'une part, les mesures qu'il avait proposées aux deux sortants quand il était ministre de l'Intérieur et qu'ils avaient alors rejetées. D'autre part, les mesures nécessaires pour revenir sur les décisions erronées prises par l'un ou par l'autre des deux sortants à un moment donné. Depuis, Lionel Jospin a esquissé une de ces repentances à la mode, invoquant sa naïveté. En réalité, Lionel Jospin a mis du temps à s'apercevoir que les premières victimes de la violence et de la délinquance sont les plus démunies des quartiers populaires, et moins les bourgeois des quartiers aisés. Il est prisonnier de cet angélisme, qui se veut de gauche et qui rejette la faute sur la société. Alors, aujourd'hui, parce qu'il constate l'exaspération des citoyens, Lionel Jospin reprend une partie des propositions de Jean-Pierre Chevènement ; mais, il les édulcore et il les ampute au point de leur enlever toute cohérence.
En 1999, lorsque Jean-Pierre Chevènement avait fait ses propositions, Jacques Chirac, quoique Président de la République, était resté silencieux. Il était déjà candidat en embuscade. Aujourd'hui, comme Lionel Jospin, il les reprend dans son programme ; mais il les caricature en les exagérant et il les isole en ne cherchant pas à traiter leurs causes sur le long terme.
Jean-Pierre Chevènement propose, lui, une loi de programmation pour la police et la gendarmerie et une loi de programmation pour la justice. En 1999, Lionel Jospin a refusé une telle projection sur le long terme. En 1995, Jacques Chirac n'a pas appliqué la loi de programmation que Charles Pasqua avait fait voter.
Jean-Pierre Chevènement propose, lui, une refonte de l'ordonnance de 1945 sur la délinquance des mineurs. Notamment, il prévoit la création de soixante centres de retenus fermés pour délinquants mineurs récidivistes. En 1999, Lionel Jospin a rejeté tout plan d'ensemble contre la violence juvénile. Souvenez-vous, à cette époque, Jean-Pierre Chevènement était stigmatisé pour avoir parlé de " sauvageons ". En 1987, Jacques Chirac a supprimé la détention provisoire pour les mineurs, mêmes multirécidivistes. Lionel Jospin et Jacques Chirac ont créé le sentiment d'impunité. Ils ont beau jeu aujourd'hui de le dénoncer.
Jean-Pierre Chevènement propose, lui, de rétablir l'unité de la politique pénale sur tout le territoire de la République en mettant fin à l'indépendance du Parquet. Cette indépendance a été proposée par Jacques Chirac en janvier 1997. Elle a été soumise au Parlement par Lionel Jospin au printemps 1999. Elle revient à une fragmentation de l'application de la loi, entraînant de fait une inégalité des citoyens devant la loi.
Cette fragmentation est déjà sensible en matière d'aménagement du territoire. L'Etat s'est mis aux abonnés absents. Les marchés régulent tout. Il reste un assistanat de plus en plus étendu, loin d'être toujours efficace pour réparer les dégâts. Car, n'en déplaise à ces chantres, la mondialisation n'est pas heureuse. Les dégâts sont nombreux. Vous en connaissez les termes, ils reviennent si souvent dans l'actualité : chômage, précarité, pauvreté, exclusion, déglobalisation, désindustrialisation, flux migratoires incontrôlés, saturation des centres urbains, désertification des campagnes .... De tous ces mouvements, le Limousin en général et la Creuse en particulier sont trop souvent les victimes.
L'ardeur à la tâche, le goût de la qualité, l'esprit d'entreprise sont autant de caractéristiques reconnues à notre région ; mais l'enclavement, l'altitude, le climat constituent des handicaps que peut seule compenser l'intervention de la puissance publique. Quand l'Etat recule, ce sont les villages qui se dévitalisent, les quartiers qui se replient sur eux-mêmes, la richesse et la pauvreté qui se concentrent au point de s'ignorer. Il faut au contraire que l'Etat joue son rôle. C'est là ce que Jean-Pierre Chevènement nous propose, au nom de l'égalité.
Dans la vision libérale, les territoires ne sont pas solidaires, mais rivaux. Ils entrent en concurrence, ce qui signifie l'abandon du dessein commun, l'absence de vision nationale. Cela ne peut donner des résultats qu'à très court terme. Du jour au lendemain, la délocalisation d'un site de production fait tout basculer.
Pour se soustraire à la dictature des marchés, nos villes, nos départements, nos régions, aussi développé que soit leur esprit d'initiative, ont besoin d'un Etat régulateur. Cessons d'opposer les deux niveaux, Paris et la province. C'est une opposition datée, une opposition archaïque. Aujourd'hui, la véritable opposition est d'un côté Paris et la province et de l'autre Wall Street.
Dans une économie mondialisée, la France doit mobiliser tous ses atouts, nationaux et locaux, si elle veut rester une puissance qui compte.
En matière de décentralisation, ne nous laissons pas enfermer dans le faux débat entre "jacobins" fantasmés et "girondins" supposés. Ce sont les actes qui comptent. Jean-Pierre Chevènement a soutenu les lois Defferre et il a mis en oeuvre la décentralisation des collèges et des lycées. Sur ce terrain, il ne craint donc personne. Et surtout pas ces partisans d'une décentralisation théorique qui, en cinq ans, ont en fait asséché les ressources des collectivités locales, à force de faire les réformes fiscales sur leur dos. Que signifie l'autonomie de gestion, si l'essentiel du budget communal provient des dotations de l'Etat ? Il faut au contraire responsabiliser les élus locaux en leur laissant la liberté de déterminer le niveau de la fiscalité locale. Au lieu de supprimer des recettes, il faut moderniser les impositions, en modifiant leur assiette par exemple.
Ainsi, il serait plus juste de remplacer la part départementale de la taxe d'habitation par un prélèvement assis sur le revenu. De même, le calcul de la taxe professionnelle pourrait intégrer le montant du résultat réalisé par l'entreprise.
Mais la solidarité nationale exige qu'on maintienne et même qu'on renforce nos mécanismes de péréquation. La réforme d'EDF met en péril la péréquation tarifaire. A terme, l'électricité coûtera plus chère dans les zones de montagne que dans les centres urbains. Notre pays n'a eu que trop tendance à se cloisonner ces dernières années. Il faut à tout prix empêcher que le fossé se creuse entre collectivités riches et collectivités pauvres.
Dans le même souci de solidarité territoriale, l'intercommunalité doit continuer de se développer. En tant que ministre de l'Intérieur, c'est un mouvement que Jean-Pierre Chevènement n'a cessé d'encourager. Pour autant, il ne faut pas s'en servir comme prétexte pour faire disparaître nos communes, qui sont d'irremplaçables écoles de la démocratie. Il faudra un jour que les responsables des instances intercommunales soient élus au suffrage universel, mais cette élection ne pourra ignorer le cadre communal.
Le département conserve un avenir, en raison même de sa dimension, qui le rend plus apte que les régions à remplir certaines missions de proximité : l'action sociale, l'équipement, l'entretien des collèges. Nous avons encore besoin du conseil général ; c'est seulement son mode de désignation qui doit être réformé.
Quant aux régions, qui manquent de substance, pourquoi ne pas en faire à terme des instances interdépartementales ?
Non, le chapitre de la décentralisation n'est pas clos. De nouvelles compétences pourraient être transférées, comme le logement social, aujourd'hui en panne. Les communes ont déjà les terrains : donnons-leur donc les moyens de bâtir !
On le voit, la décentralisation peut être approfondie, renforcée, démocratisée, sans qu'il soit pour autant nécessaire de porter atteinte à l'unité de la République !
Si la dévolution du pouvoir législatif en Corse a été censurée par le Conseil constitutionnel, c'est tout simplement que cette idée était le contraire de la décentralisation, telle qu'elle est définie dans la Constitution. Décentraliser, ce n'est pas abandonner un territoire à son triste sort ! Nos régions ne sont pas des centres de profit que la maison-mère parisienne pourrait liquider s'ils ne sont pas rentables !
Nos collectivités territoriales, avec tous leurs particularismes, s'arriment à une collectivité plus vaste dont elles sont indissociables et cette collectivité-là est la France. Loin de s'opposer aux territoires, la nation en est la plus haute expression, l'aboutissement, le dépassement. C'est par la nation que les territoires s'ouvrent à l'universel ; et c'est grâce à la nation qu'ils peuvent se développer en harmonie. La décentralisation n'a de sens en effet que reliée à un dessein national qui se concrétise par une véritable politique d'aménagement du territoire.
Les contrats de plan Etat-région, c'est très bien - à condition qu'il y ait un plan. Les schémas de services collectifs, c'est très intéressant, du moment qu'il y a bien la volonté d'un service public. Décentraliser, sectoriser, d'accord, si les décisions s'articulent autour d'un projet structurant.
Le meilleur de nos atouts sera toujours la cohésion nationale. Si les investisseurs étrangers apprécient la France, c'est parce que le niveau de formation et les infrastructures y sont plus satisfaisants qu'ailleurs. Ne perdons pas ces avantages comparatifs au jeu du "moins-disant" fiscal.
Aménager le territoire, c'est optimiser nos ressources, mais aussi rétablir l'égalité entre les régions. L'Etat est le seul acteur qui puisse y parvenir. Les marchés sont volatils et versatiles. Livrée à elle-même, la direction d'un grand groupe international n'aura aucun état d'âme à plonger tout un territoire dans le marasme en fermant un site de production. A l'inverse, l'activité ne viendra créer des emplois dans une zone retirée que si l'investissement public la rend plus accessible et mieux dotée.
Vous vous souvenez de la célèbre réplique de Lionel Jospin à propos des licenciements chez Michelin pour convenance boursière : " L'Etat ne peut pas tout ". Traduisez : "Il ne veux rien faire ". Mais, alors qui peut faire ? C'est le renoncement, c'est la démission, c'est la capitulation. Pourquoi les élire, Jacques Chirac, Lionel Jospin, s'ils ne veulent rien faire. Les rois fainéants ont disparu depuis longtemps. Mais, la République veut vivre. L'Etat républicain doit faire parce seul l'Etat a la vision du long terme. S'il n'a pas vocation à intervenir, au quotidien, dans les décisions des entreprises, il a la responsabilité des grandes orientations en matière de transport, d'énergie, d'infrastructures, de fiscalité.
Il est choquant de voir à quel point l'aménagement du territoire est absent des programmes présidentiels. Tout le monde parle d'écologie, mais il s'agit d'une écologie abstraite, immatérielle, éthérée, de grandes chartes fumeuses, sans conséquences sur le monde réel. Eh bien je le dis : il n'y a pas d'écologie sans aménagement du territoire. Préserver l'environnement, garantir la qualité de l'air et de l'eau, combattre le bruit, lutter contre l'effet de serre, cela nécessite des actions concrètes et concertées, cela implique la réalisation de grands équipements. C'est cela que Jean-Pierre Chevènement propose.
La France a besoin de voies de circulation sûres et fluides, de liaisons transversales, d'un transport ferroviaire à la fois dense et rapide, d'une couverture GSM intégrale, d'une énergie propre et durable. Les politiques malthusiennes ne sont plus de mises. L'avenir appartient à celui qui s'équipe. Pour concilier développement et environnement, aménager le territoire est une nécessité. Sans le programme TGV, nos routes seraient complètement engorgées. Sans le programme nucléaire, notre air serait hautement pollué par les émanations d'hydrocarbures. C'est pourquoi il faut poursuivre ces programmes.
On voit que l'aménagement du territoire a partie liée avec le service public. La SNCF, EDF, GDF ou La Poste ne doivent être ni démantelés ni privatisés : ou bien c'en serait fini de toute politique territoriale. Déjà, l'équivalent de vingt départements français n'est pas desservi par le téléphone mobile. Il s'agit de régions isolées, où il serait le plus utile pour le médecin, le pompier, le vétérinaire ou le gendarme. Et, pendant ce temps-là, France Télécom est allée s'endetter de quelques soixante cinq milliards d'euros dans des investissements à l'étranger, trop souvent hasardeux.
La fourniture d'électricité, la desserte ferroviaire, l'acheminement du courrier ne sont pas des activités économiques comme les autres. Les exemples étrangers l'ont montré, l'ouverture à la concurrence ne profiterait pas au consommateur. Et elle ne profiterait pas plus à la France, dont toutes les zones rurales seraient lâchées par les opérateurs. A substituer la règle du profit maximum à la logique du service public, tout le monde y perdra, sauf des actionnaires lointains dont les capitaux peuvent s'envoler au premier retournement. Ne nous bradons pas !
L'Etat, en la matière, doit se montrer exemplaire. En zone rurale, le maintien des services publics élémentaires doit devenir la règle si on veut enrayer la désertification des campagnes. A l'échelle de l'Europe, notre pays est vaste, mais à l'heure d'Internet, on laisse encore la population se concentrer sur des centres urbains saturés, comme au temps de la révolution industrielle ! Les nouvelles technologies permettraient pourtant de redynamiser des départements peu peuplés, où il fait bon vivre.
Tout cela est affaire de volonté politique.
Cher amis,
Autour de la candidature de Jean-Pierre Chevènement, s'est forgé un Pôle républicain. Il réunit des hommes et des femmes venus de tous les horizons politiques. Leur objectif est ensemble de relever la France avec la République. Parfois ce rassemblement étonne. Pourtant, il a au moins un précédent. C'est vrai dans une époque autrement dramatique. Dans la Résistance, on ne demandait à ceux qui s'engageaient d'où ils venaient. On leur demandait de lutter jusqu'au bout contre l'occupant, pour la libération de la France. Dans la Résistance, se retrouvaient celui qui croyait au ciel et celui qui n'y croyait pas. Le Pôle républicain perpétue ce combat sous d'autres formes avec d'autres moyens dans un autre contexte.
Mais, ne nous laissons pas endormir. L'existence même de la France en tant que République, en tant que Nation indépendante est aujourd'hui menacée. Il suffit de voir le résultat du sommet de Barcelone, une fois enlevée la poudre aux yeux distribuée pour sauver la face de Jacques Chirac et de Lionel Jospin : à terme, nos services publics sont condamnés. L'engrenage qui doit nous conduire à une constitution européenne s'est mis en route ; la France doit y être engloutie dans une improbable Europe des régions, dominée par l'Allemagne. La bombe infernale du statut de Matignon doit mettre en 2004 la Corse à part de la République ; l'égalité des citoyens devant la loi alors rompue. Le Pôle républicain rassemble tous ceux qui s'opposent à ces funestes projets que partagent Jacques Chirac et Lionel Jospin.
Oui, Jean-Pierre Chevènement est le seul candidat qui soit en mesure de battre les deux sortants. Peu importe lequel des deux, de Jacques Chirac ou de Lionel Jospin, se trouvera en face de Jean-Pierre Chevènement au second tour, car les deux incarnent la même politique de renoncement. Un vote pour Jean-Pierre Chevènement est un vote protestataire, mais un vote protestataire utile. Il existe des votes protestataires stériles. En France, il y a des planchers incompressibles de 2 à 3 % de l'électorat qui se retrouvent respectivement dans l'extrême gauche ou dans l'extrême droite. Mais, les autres citoyens, qui s'interrogent pour savoir s'ils vont se prononcer pour Arlette Laguiller ou pour Jean-Marie Le Pen, perdent leur voix s'ils se laissent entraîner dans cette impasse. Ni Arlette Laguiller, ni Jean-Marie Le Pen ne peuvent être élus. Si, d'aventure, l'un des deux accédait au second tour, il serait écrasé. Le seul candidat crédible pour le changement est Jean-Pierre Chevènement.
Alors, on ne peut que remarquer le tapage fait soudain autour d'Arlette Laguiller. Avec son grand chapeau, Madame de Fontenay a ainsi désigné devant les télévisions ébahies Miss Révolution. Arlette Laguiller est devenue en quelques jours la coqueluche inoffensive des médias. Elle est à la mode dans les milieux du cynisme branché. Elle appartient au folklore. Elle suscite bien plus d'amusement que de peur. Les hebdomadaires de la vie heureuse en font leur héroïne. Personne ne la craint. Au contraire, dans les beaux quartiers, elle donne comme un délicieux frisson de nostalgie, quand on la voit chanter l'Internationale, le poing levé. Tous les gauchistes établis retrouvent alors leurs vingt ans. Arlette Laguiller est un moyen de se donner bonne conscience sans conséquence aucune. Mais, il y a aussi des électeurs qui veulent sincèrement le changement et qui pourraient tomber dans le piège qui leur est ainsi tendu. A nous de les convaincre que voter pour Arlette Laguiller, comme voter pour Jean-Marie Le Pen, c'est conforter Jacques Chirac et Lionel Jospin.
Le Pôle républicain n'est pas une structure figée. Le Pôle républicain est une dynamique, qui émerge face au système du pareil au même. Son avenir est donc dans les mains des citoyens.
L'avenir du Pôle républicain dépend du résultat qu'obtiendra la candidature de Jean-Pierre Chevènement. Aussi, aujourd'hui, pour assurer un bel avenir au Pôle républicain, l'important est de mener campagne pour cette candidature, de mener campagne pour gagner, de mener campagne pour obtenir le meilleur résultat possible.
Aux élections législatives de juin prochain, le Pôle républicain présentera des candidats dans toutes les circonscriptions de France métropolitaine et d'Outre-Mer. Il est encore trop tôt pour les désigner. Toutes les évolutions ne sont pas encore achevées.
Pour le moment, nous connaissons deux impératifs. D'une part, il faudra respecter la loi et assurer la parité entre hommes et femmes dans les candidatures. D'autre part, la palette des candidats devra refléter l'originalité du rassemblement qui s'est constitué autour de Jean-Pierre Chevènement. Tout esprit de boutique, des anciennes boutiques, sera à proscrire. L'essentiel sera à la fois de maintenir la cohésion de ce rassemblement et de renforcer la dynamique enclenchée par la campagne présidentielle.
Jean-Pierre Chevènement est l'homme de la Nation. Il s'adresse à tous les Français à partir des dix grandes orientations qu'il a présentées à Vincennes le 9 septembre dernier. Il les a précisées progressivement depuis. Il ne découpe pas le peuple de notre pays en peuple de droite ou en peuple de gauche. Il lui parle au-dessus de ces étiquettes traditionnelles, qui ne correspondent pas à la situation du moment. Contrairement à Jacques Chirac et à Lionel Jospin, il ne veut pas enfermer nos concitoyens dans des catégories politiques pour essayer de profiter d'une rente électorale. Il ne souhaite pas plus les diviser en camps opposés. Il cherche, au contraire, à les rassembler pour que la France puisse affronter victorieusement les défis du nouveau millénaire.
Sur cette base, le Pôle républicain doit être l'outil dynamique de ce rassemblement. Les comités de soutien à la candidature de Jean-Pierre Chevènement, qui se sont constitués un peu partout, en sont les noyaux. Ils vont se transformer. Ils vont s'adapter, pour que l'impulsion, donnée à Belfort le 4 septembre dernier, ne s'arrête pas. Il reste à retrouver la France, à relever le citoyen, à revaloriser le travail.
Il reste un peu plus de trois semaines avant le premier tour. Les trois quarts des électeurs ne voient aucune différence entre Jacques Chirac et Lionel Jospin. Plus de la moitié d'entre eux se déclarent encore indécis. Sur toutes les grandes questions, Jean-Pierre Chevènement est considéré comme l'un des trois meilleurs pour apporter des solutions. Tout est donc possible.
Oui, voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est donner un avenir à la France,
Oui, voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est donner un espoir à la République,
Oui, voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est donner à nous-mêmes une espérance.
(Source http://www.georges-sarre.net, le 5 avril 2002)