Texte intégral
1.La campagne et ses leçons.
Je veux d'abord remercier et les déléguer et, à travers eux, tous les comités de soutien qui on su m'apporter une aide inestimable durant une campagne qui, vous le savez, reposait sur peu de moyens. Merci, sincèrement, du fond du coeur de l'élan que vous avez su créer.
L'élection présidentielle n'a rien réglé. Tous les problèmes posés avant le 21 avril restent en suspens : progression du chômage et de la précarité, creusement du déficit budgétaire, délitement du tissu industriel, insécurité globale devant l'avenir, montée des ethnicismes et des communautarismes. Après les incendies de synagogues, les attaques contre les mosquées révèlent la fragilité des repères républicains et les risques que comporte pour la paix civile l'effacement de la France et de la République.
La Marseillaise à nouveau sifflée au stade de France à l'occasion du match Bastia-Lorient nous rappelle les limites du sursaut républicain du deuxième tour. Il ne suffit pas que BHL, pourfendeur de l'idéologie française il y a vingt ans, s'enveloppe de tricolore et chante à gorge déployée la Marseillaise pour faire reculer la francophobie que nos élites ont laissé s'installer au fil des ans.
Il faudrait aussi que Jacques Chirac confirme sur la Corse ses discours de Bastia et d'Ajaccio en n'entamant pas un énième retournement.
Ce n'est pas en baissant de 5 % l'impôt sur le revenu à l'automne prochain que le gouvernement mettra un terme à la crise profonde qui ébranle le pays.
Tirons quelques leçons de la campagne présidentielle.
Si la campagne que j'ai lancée le 4 septembre 2001 nous a permis de faire entendre plusieurs mois durant notre voix, en revanche à partir du début février 2002, le débat au fond a été occulté. Tout s'est passé, de février à avril, comme si le premier tour avait déjà eu lieu. La campagne s'est bornée pour l'essentiel au commentaire des faits et gestes du Président de la République et du Premier ministre, finalistes désignés du deuxième tour.
Avec la grave crise sociale et nationale que connaît le pays, ce véritable déni de démocratie est une des sources principales du rejet enregistré le 21 avril.
Ce qu'a traduit le premier tour, c'est en effet moins la poussée de Jean-Marie Le Pen (+ 200.000 voix) que la profondeur de la désaffection touchant la droite comme la gauche parlementaires : près de 12 millions d'abstentions, un million de votes blancs, trois millions de votes d'extrême-gauche, cinq millions de votes d'extrême-droite , les quatre candidats de l'ex-gauche plurielle rassemblant seulement 27 % des votants, et les cinq candidats de la droite parlementaire 33 %. Quant à Jacques Chirac, à lui seul, il n'atteint pas 20 % des exprimés, soit à peine 13 % des inscrits ! La relégation de Lionel Jospin derrière Jean-Marie Le Pen a occulté ce fait majeur : celui d'une démocratie profondément atteinte dans ses ressorts fondamentaux.
Jamais élection n'a fait mieux apparaître la nécessité d'une refondation républicaine et d'un relèvement de la citoyenneté.
Certains dirigeants socialistes, obligeamment relayés sinon devancés par quelques bien-pensants, ont cherché à me désigner comme le bouc-émissaire de leur défaite, plutôt que de s'interroger sur leurs propres responsabilités. L'analyse politique aussi bien que statistique fait litière de ce procès en sorcellerie qui non seulement permet d'éviter toute autocritique, mais constitue, en soi, un nouveau déni de démocratie. Ce qui est en question en effet, c'est le droit de défendre ses idées, au besoin en se portant candidat. On en revient toujours à la dictature de la bienpensance, telle que Jacques Delors, déjà en 1992, l'avait formulée : " S'il y a des responsables qui ne sont pas d'accord avec le traité de Maastricht, alors qu'ils cessent de faire de la politique ! ". Le parti socialiste entend imposer aujourd'hui comme hier son hégémonie : " Ou bien vous êtes d'accord ou bien vous démissionnez, mais dans ce cas-là aussi, vous devez fermer votre gueule ".
2. Le défi de la création du pôle républicain.
Le pôle républicain a rassemblé le 21 avril un peu plus de 1,5 million d'électeurs. Nous n'avons pas réussi à faire turbuler le système. Celui-ci était trop bien défendu. Mais nous avons jeté les bases d'un recours possible dans les prochaines années. Le problème qui se pose au pôle républicain est maintenant de s'inscrire dans la durée. Parmi les 30.000 membres des comités de soutien, nombreux sont ceux qui entendent continuer le combat. Naturellement je ne sous-estime pas la difficulté d'une telle tâche dans un système politique où le mode de scrutin majoritaire conduit à une bipolarisation de la vie politique. Mais celle-ci est devenue avec le virage libéral de la gauche de plus en plus factice : comment ne pas voir que Jacques Chirac et Lionel Jospin, à eux deux, n'ont rassemblé au premier tour que 25 % des inscrits ? Cette bipolarisation est notre difficulté. Son caractère factice est notre chance.
Je n'entends rien renier des analyses que j'ai développées publiquement pendant huit mois de campagne.
On m'a reproché d'avoir critiqué le système du pareil au même". Mais est-ce moi qui ai inventé des expressions telles que "la seule politique possible", le "gouvernement invisible", ou encore "le grand secret des décisions qui pour l'essentiel se prennent ailleurs" ? Les politiques mises en oeuvre depuis près de vingt ans par la gauche et par la droite procèdent pour l'essentiel d'une même matrice : le ralliement sous couvert d'européisme à la mondialisation libérale. Elles conduisent à l'alternance sans alternative.
Non seulement je ne retire rien de mes analyses, mais je maintiens qu'il y a une autre politique possible que celle que nous imposent, prisonniers de la même orthodoxie, les sociaux-libéraux et les libéraux-sociaux : la dictature des marchés financiers, les restructurations et les délocalisations industrielles, la réduction à zéro du déficit budgétaire, le démantèlement des services publics, et en définitive la régression sociale.
Pour mettre en oeuvre cette autre politique, je ne vois d'appuis solides que dans la souveraineté populaire, la citoyenneté active, l'autorité de la loi égale pour tous, l'égalité des chances, bref dans la République.
Je crois être armé par une assez longue expérience pour vous aider à surmonter, si vous le voulez, les difficultés que constitue la formation d'un nouveau parti politique. Elles tiennent à ce que je sais de la nature humaine, et d'abord à notre capacité à repousser les tentations jumelles de l'électoralisme et de l'intellectualisme.
Ce sont ces deux tentations que nous devons conjurer, si nous voulons inscrire le pôle républicain dans la durée. Nous ne vivons pas en effet dans un pur éther, qui serait le ciel des idées. Nous sommes sur la terre. Il y a des élections, un mode de scrutin, un système de financement des partis politiques qui tient compte pour moitié des voix recueillies et pour moitié des parlementaires élus. Ces réalités triviales s'imposent à quiconque veut inscrire son effort dans le temps, bref faire de la politique. Ce n'est pas compromettre son âme que de tenir compte du réel.
3. La question des élections.
Je n'ai rien proposé d'ailleurs qui ne soit honorable et parfaitement compatible avec la visée de dépassement que je vous ai proposée pendant la campagne présidentielle.
Nous sommes aujourd'hui dans l'opposition. Combien de fois n'ai-je pas entendu tel ou tel m'adjurer par avance de déclarer avant même que le combat soit livré, que je m'y retrouverais, nécessairement ? Eh bien nous y sommes. Nous sommes l'opposition républicaine.
J'ai proposé de passer un pacte de non-agression à cette autre opposition que domine le parti socialiste, dont l'orientation social-libérale n'est pas la nôtre. Mais compte tenu de ce qu'est la dynamique des institutions et la forte probabilité d'une majorité de droite dans la prochaine Assemblée Nationale, j'ai proposé de le faire pour " limiter les dégâts ".
Cette proposition n'a pas abouti du fait de l'attitude dominatrice du parti socialiste.
Je m'exprime avec une certaine franchise qui peut rebuter les âmes sensibles : je n'ai jamais envisagé rien d'autre qu'un accord équilibré et respectueux de l'identité de chaque partenaire, à commencer par celle du pôle républicain.
Evidemment regarder la réalité en face, non pour y sacrifier ses principes, mais pour leur donner chance un jour de s'imposer, cela demande lucidité et courage. Et c'est cela qui manque le plus : les uns sacrifient les principes et les autres s'évadent du réel.
Si je dois être responsable du pôle républicain, j'entends avoir la capacité de passer des engagements qui soient dans notre intérêt et compatibles avec nos principes.
Le fait que cette démarche, dictée par la situation nouvelle, n'a pu aboutir ne signifie pas qu'il ne fallait pas la tenter. Le parti socialiste a pris la responsabilité d'une situation que nous sommes tout à fait capables d'assumer. Il nous demande de faire amende honorable, de nous situer à gauche, etc. Mais d'où nous parle-t-il ainsi avec arrogance ? Du haut des engagements qu'il a souscrits à Barcelone ou de la dérive libérale qui l'a emporté bien loin des engagements pris en 1997 de faire en tous domaines " retour à la République "
Il faut avoir confiance en nous, et préserver en toutes circonstances notre capacité à faire face, bref à présenter, partout où il le faudra, des candidats.
Tout cela demande une certaine solidité. C'est pour le pôle républicain un test décisif.
4.Construire une alternative.
Si vous croyez à la nécessité d'une refondation républicaine, en dehors des perspectives usées que nous offrent une droite et une gauche qui sont au bout de leurs principes, si vous ressentez la nécessité de bâtir une véritable alternative qui soit autre chose que le repoussoir convulsif qu'offre le Front National, alors votre volonté ne se dérobera pas, car nous avons du pain sur la planche !
Qui, en effet, en dehors de nous, a fait l'effort de ressourcement idéologique dans le logiciel républicain - valeurs, principes, philosophie - après la chute du communisme qui - nous le voyons bien - laisse sans repères ceux qui avaient fait de la théodicée marxiste leur horizon ?
Qui a fait l'effort de penser la mondialisation financière telle qu'elle s'opère sous l'égide de la superpuissance américaine ? Et qui ose y résister ? Question qu'a très bien posée Anicet Le Pors ce matin.
Bien sûr, il faut penser la société telle qu'elle se transforme sous l'impact des nouvelles technologies plus ou moins instrumentées par les forces sociales dominantes, je pense à la communication qui joue un si grand rôle dans les élections.
Je vous l'ai dit à Vincennes : " La gauche et la droite continueront d'exister à l'avenir sous des formes et avec des contenus différents, mais il y a une chose qui est au-dessus de la droite, au-dessus de la gauche, c'est la République ".
Eh bien, oui, c'est à partir de la République qu'on pourra reconstruire la gauche, car nous avons dû nous rendre à l'évidence qu'on ne pouvait pas reconstruire la République à partir de la gauche. Et c'est aussi à partir de la République que nous pourrons faire comprendre à nos concitoyens la nécessité de valeurs, de repères et d'institutions stables - la nation, l'Ecole, la famille - sans lesquelles aucune société démocratique ne peut se maintenir.
Sachons donc nous unir sans exclusive pour offrir au peuple français une issue positive à la crise dans laquelle notre pays s'enfonce et à laquelle ni la droite libérale ni les sociaux-libéraux n'ont de réponse prête. Ce qu'ils proposent c'est une fuite en avant dans la mondialisation libérale, dans une Europe pseudo-fédérale où se dissoudrait la démocratie, désormais confinée dans les régions, dernier et dérisoire horizon d'une citoyenneté qui jadis ouvrait la nation sur le monde. Cette grande histoire de la France, ce magnifique dépassement de nos différences par la citoyenneté républicaine, ne s'est pas définitivement refermée avec l'histrionesque récupération des symboles de la République par tous les chantres de la bienpensance.
Notre pays connaît une grave crise qui ne peut malheureusement que s'approfondir, car le gouvernement de la droite libérale sera aussi impuissant que l'a été celui de la gauche plurielle à enrayer les effets néfastes de la mondialisation libérale sur la société française.
Il nous incombe donc de construire l'alternative républicaine dont le pays a besoin. Sinon nous serons ramenés à la situation que nous avons connue d'une droite et d'une gauche ralliées sur le fond aux mêmes dogmes se relayant pour faire la même politique, chacune attendant patiemment dans l'opposition, de l'échec de l'autre son retour au pouvoir.
Ce système d'alternance sans alternative se nourrit de l'effet Le Pen, repoussoir commode qui stabilise l'ensemble comme le balancier la pirogue.
5.Construire un nouveau parti.
En décidant de construire un nouveau parti nous avons donc entrepris une longue marche qui durera sans doute des années. Mais nous ne partons pas de rien. Il y a d'abord le soutien exprimé d'un Français sur vingt et un soutien potentiel sans aucun doute incomparablement plus élevé. Il y a aussi l'acquis du Mouvement des Citoyens qui, hier, a une très forte majorité, a accepté ma proposition de se fondre dans le pôle républicain. Je veux rendre hommage au MDC et à son Président Georges Sarre qui ont choisi la voie du dépassement que je leur proposais plutôt que la tentation commode du repli sur soi qui aurait inévitablement signifié recroquevillement et en définitive satellisation par le parti socialiste.
Le Mouvement des Citoyens a porté pendant dix ans l'effort de ressourcement de la gauche dans l'idée républicaine. Nous n'avons pas mené la politique du pire. Au contraire nous avons essayé d'influencer le parti socialiste de l'extérieur pour le conduire à " faire en tous domaines retour à la République ".
a)Leçons à tirer de l'échec de la gauche plurielle.
Nous n'y avons pas réussi, comme cela est devenu évident à partir de 1999 dans des champs aussi différents que la lutte contre l'insécurité, la politique industrielle ou le dossier corse. Cet échec pèsera lourdement, tant qu'il n'aura pas été analysé et compris. La gauche plurielle n'a pas su transformer sa victoire aux législatives de 1997 - qui était à bien des égards un rejet du gouvernement Juppé - en un projet stratégique cohérent. Cet échec n'est pas seulement celui du parti socialiste. Il est aussi notre échec : nous n'avons pas réussi, malgré tous nos efforts, à relever la République à partir de la gauche. La raison en est sans doute que le parti socialiste, excessivement dominé par ses courants sociaux-libéraux, a privilégié la recherche d'une entente stratégique avec les Verts plutôt qu'un ressourcement républicain. Or le parti vert, bien loin d'être préoccupé d'abord par la cause de l'environnement, est l'un des vecteurs privilégiés de l'irrationalisme moderne fort éloigné de toute philosophie républicaine. C'est un parti postgauchiste beaucoup plus qu'un parti écologiste. Sa cause emblématique est la " sortie du nucléaire ". Derrière le principe de précaution, se dissimule en fait une idéologie profondément malthusienne et réactionnaire. Le parti communiste aurait pu jouer un rôle de contrepoids en s'appuyant sur sa tradition populaire et nationale. Mais obsédé par sa repentance, il a, lui aussi, cédé au " bougisme ", s'essoufflant à rattraper les revendications petites bourgeoises et à communier avec la bienpensance, sur des dossiers comme l'insécurité ou l'immigration, la judiciarisation des licenciements, abandonnant ainsi l'électorat populaire à l'extrême-droite.
Ainsi la gauche aujourd'hui n'offre pas un terreau solide pour la refondation républicaine. C'est la raison pour laquelle nous avons choisi de nous adresser aux républicains à quelque rive qu'ils appartiennent, dès lors qu'ils mettaient au-dessus de tout l'intérêt public. Ai-je besoin de le rappeler ? Je ne me suis jamais défini comme n'étant " ni à droite ni à gauche ". J'ai seulement indiqué qu'au-dessus de la droite et de la gauche il y avait la République. Parce que trente après Epinay, -faut-il le dire ?- ce qu'est devenue la gauche me désespère. Pour autant, je n'oublie pas qu'il y a des femmes et des hommes de gauche sur le terrain.
A vous de les convaincre.
b)L'identité du pôle républicain.
Sommes-nous de droite ? Sommes-nous de gauche ? Cette question dans laquelle veulent nous enfermer nos adversaires est une question piège. Nous sommes avant tout des républicains.
Qu'est-ce à dire ?
Pour ma part, je suis fidèle à mon parcours et je sais que chacun d'entre vous entend l'être à sa manière. La République c'est ce que nous opposons à la fois à la mondialisation libérale et à l'idéologie libéral-libertaire qui l'accompagne.
Je voudrais convaincre Eric Halphen de ce que je ne suis pas mal réveillé :
Nous sommes contre la loi de la jungle en économie : nous passerons donc pour des hommes et des femmes de gauche. Et, en même temps, sur le plan social, nous croyons à la nécessité de valeurs, de repères et de règles sans lesquels aucune vie démocratique et civilisée n'est possible. D'aucuns en déduiront que nous sommes des conservateurs.
Il est vrai que, comme Pierre-André Taguieff l'a fort bien montré, il y a des institutions et des valeurs qui nous paraissent mériter d'être conservées : la nation, cadre irremplaçable de la démocratie, l'Ecole, gardienne du savoir et de l'esprit critique, la famille, enfin lieu des solidarités élémentaires.
Mais nous ne sommes pour autant les thuriféraires d'aucune idéologie organique qui subordonnerait l'individu à une entité collective supérieure. Parce que nous sommes des républicains, nous croyons d'abord à l'individu libre. Nous croyons à la raison humaine, bref au citoyen.
6.Nos tâches prioritaires.
a)Principes et organisation.
Pour créer un nouveau parti, nous devons mobiliser toutes les ressources de la réflexion. Nous devons aussi nous respecter les uns les autres, apprécier la richesse du parcours et de l'effort de chacun à la diversité du pôle républicain. Il faudra élaborer une Charte mais aussi accepter une certaine souplesse d'organisation. Définir une ligne politique. C'est sans doute cela qui sera le moins difficile car nous ne partons pas de rien et les dix orientations de Vincennes, développées et enrichies par le travail des experts du Pôle républicain, constituent une bonne base de départ.
Je m'efforcerai de mettre mon sens de la synthèse au service de notre nouveau parti. Tout cela sera la tâche de notre prochain Congrès en novembre.
Le pôle républicain est la seule force réellement nouvelle qui ait émergé en France à l'occasion des élections présidentielles. La gestation du courant républicain est certainement beaucoup plus ancienne. Ce courant s'est manifesté dès la fin des années quatre-vingts en réaction au différentialisme, à la proclamation du droit à la différence alors dominant à gauche, à l'oubli de l'égalité, et à l'inféodation croissante à l'idéologie néo-impériale.
Je ne serais pas juste de ne pas citer Régis Debray et Max Gallo notre premier Président que je veux assurer de la reconnaissance et de l'affection de tous. Son talent nous restera précieux pour faire entendre dans le paysage nos analyses et nos convictions.
Le pôle républicain a réuni plus de voix que des courants anciennement constitués : les Verts, le parti communiste, Démocratie Libérale ou le Parti radical de gauche.
Surtout, j'en suis convaincu, si nous parvenons à placer le pôle républicain sur orbite, il aimantera fortement dans les années à venir tous ceux - et ils sont nombreux - qui ont pris la mesure des limites de la droite et de la gauche établies.
b)La préparation des législatives.
Pour installer le pôle républicain sur orbite, il y a déjà l'échéance des élections législatives. Quatre cents candidates et candidats, jeunes pour beaucoup, dont plus de la moitié viennent d'autres composantes initiales que le MDC, seront autant de représentants en mission pour faire avancer nos idées sur le terrain. L'amalgame devra se faire autour de leurs candidatures. Tout est à conquérir. Dans deux ans, il y aura des élections cantonales, régionales et européennes. Et sans doute un référendum sur l'Europe que Jacques Chirac a promis. Dans cinq ans des élections législatives et présidentielles. Enfin qui peut dire, dans la grave crise que traverse le pays, si les échéances ne seront pas avancées ?
Les élections législatives des 9 et 16 juin prochains vont se dérouler sur des idées simples : l'Union pour la majorité présidentielle entendra confirmer l'élection de Jacques Chirac par une majorité de sièges à l'Assemblée Nationale. L'ex-gauche plurielle entendra faire appel à l'élimination de Lionel Jospin. Plus que jamais il nous appartiendra de faire valoir qu'il existe un autre chemin que celui où nous ont fait rouler ensemble une droite et une gauche prisonnières des mêmes dogmes libéraux.
Il faudra faire entendre une voix claire dans le pays et si possible au Parlement pour éclairer la route. Bien sûr et de la même manière que le parti chiraquien entend étouffer François Bayrou, de la même manière le parti socialiste veut empêcher le pôle républicain d'exister.
Voilà le défi que nous devons relever.
Conclusion.
Au-delà du cap des législatives, le travail ne fera que commencer. Intense travail d'élaboration, de débat, d'enracinement sur le terrain. Il nous appartiendra plus que jamais de défricher les voies de l'avenir. De faire l'amalgame en notre sein. De nous ouvrir aux nouvelles générations. Là est notre rôle : servir de passeurs, comme l'avait excellemment dit un jour Max Gallo, entre les générations. C'est à cela particulièrement que je vous appelle tous.
Nous avons pour cela une sûre boussole : dans le paysage politique aujourd'hui dévasté, nous sommes les seuls héritiers de la République française et de ses principes.
Il vous appartient de faire en sorte que le magnifique idéal de la République, celui d'une communauté de citoyens, se définissant non par l'origine, mais par la politique, ne tombe pas aux oubliettes de l'Histoire.
Comme le dit un proverbe allemand : " La où est le danger, là croît la chance du salut ".
L'Europe entière est en crise. La France plus que d'autres nations. Mais c'est peut être pour cela que l'espoir demeure.
J'ai évoqué dans mon discours au Zénith, le 18 avril, la nécessité de " républicaniser l'Europe ".
Oui, je le crois, la France, demain comme hier, sera encore utile à l'Europe et au monde par les valeurs qu'elle porte. Plus que jamais en effet la République est une idée neuve !
Ce qui était vrai avant le 21 avril le reste après le 5 mai. Est-ce que nous le voulons ?
Alors si nous le voulons, je suis à votre disposition pour porter la création de ce nouvel outil politique, au service des valeurs de liberté, de laïcité, d'égalité, de fraternité et de dialogue des civilisations et des cultures dont notre pays a besoin.
Par notre effort nous marqueront le paysage et nous créerons les conditions d'un recours qu'attendent la France et la République !
(source http://www.pole-republicain, le 14 mai 2002)
Je veux d'abord remercier et les déléguer et, à travers eux, tous les comités de soutien qui on su m'apporter une aide inestimable durant une campagne qui, vous le savez, reposait sur peu de moyens. Merci, sincèrement, du fond du coeur de l'élan que vous avez su créer.
L'élection présidentielle n'a rien réglé. Tous les problèmes posés avant le 21 avril restent en suspens : progression du chômage et de la précarité, creusement du déficit budgétaire, délitement du tissu industriel, insécurité globale devant l'avenir, montée des ethnicismes et des communautarismes. Après les incendies de synagogues, les attaques contre les mosquées révèlent la fragilité des repères républicains et les risques que comporte pour la paix civile l'effacement de la France et de la République.
La Marseillaise à nouveau sifflée au stade de France à l'occasion du match Bastia-Lorient nous rappelle les limites du sursaut républicain du deuxième tour. Il ne suffit pas que BHL, pourfendeur de l'idéologie française il y a vingt ans, s'enveloppe de tricolore et chante à gorge déployée la Marseillaise pour faire reculer la francophobie que nos élites ont laissé s'installer au fil des ans.
Il faudrait aussi que Jacques Chirac confirme sur la Corse ses discours de Bastia et d'Ajaccio en n'entamant pas un énième retournement.
Ce n'est pas en baissant de 5 % l'impôt sur le revenu à l'automne prochain que le gouvernement mettra un terme à la crise profonde qui ébranle le pays.
Tirons quelques leçons de la campagne présidentielle.
Si la campagne que j'ai lancée le 4 septembre 2001 nous a permis de faire entendre plusieurs mois durant notre voix, en revanche à partir du début février 2002, le débat au fond a été occulté. Tout s'est passé, de février à avril, comme si le premier tour avait déjà eu lieu. La campagne s'est bornée pour l'essentiel au commentaire des faits et gestes du Président de la République et du Premier ministre, finalistes désignés du deuxième tour.
Avec la grave crise sociale et nationale que connaît le pays, ce véritable déni de démocratie est une des sources principales du rejet enregistré le 21 avril.
Ce qu'a traduit le premier tour, c'est en effet moins la poussée de Jean-Marie Le Pen (+ 200.000 voix) que la profondeur de la désaffection touchant la droite comme la gauche parlementaires : près de 12 millions d'abstentions, un million de votes blancs, trois millions de votes d'extrême-gauche, cinq millions de votes d'extrême-droite , les quatre candidats de l'ex-gauche plurielle rassemblant seulement 27 % des votants, et les cinq candidats de la droite parlementaire 33 %. Quant à Jacques Chirac, à lui seul, il n'atteint pas 20 % des exprimés, soit à peine 13 % des inscrits ! La relégation de Lionel Jospin derrière Jean-Marie Le Pen a occulté ce fait majeur : celui d'une démocratie profondément atteinte dans ses ressorts fondamentaux.
Jamais élection n'a fait mieux apparaître la nécessité d'une refondation républicaine et d'un relèvement de la citoyenneté.
Certains dirigeants socialistes, obligeamment relayés sinon devancés par quelques bien-pensants, ont cherché à me désigner comme le bouc-émissaire de leur défaite, plutôt que de s'interroger sur leurs propres responsabilités. L'analyse politique aussi bien que statistique fait litière de ce procès en sorcellerie qui non seulement permet d'éviter toute autocritique, mais constitue, en soi, un nouveau déni de démocratie. Ce qui est en question en effet, c'est le droit de défendre ses idées, au besoin en se portant candidat. On en revient toujours à la dictature de la bienpensance, telle que Jacques Delors, déjà en 1992, l'avait formulée : " S'il y a des responsables qui ne sont pas d'accord avec le traité de Maastricht, alors qu'ils cessent de faire de la politique ! ". Le parti socialiste entend imposer aujourd'hui comme hier son hégémonie : " Ou bien vous êtes d'accord ou bien vous démissionnez, mais dans ce cas-là aussi, vous devez fermer votre gueule ".
2. Le défi de la création du pôle républicain.
Le pôle républicain a rassemblé le 21 avril un peu plus de 1,5 million d'électeurs. Nous n'avons pas réussi à faire turbuler le système. Celui-ci était trop bien défendu. Mais nous avons jeté les bases d'un recours possible dans les prochaines années. Le problème qui se pose au pôle républicain est maintenant de s'inscrire dans la durée. Parmi les 30.000 membres des comités de soutien, nombreux sont ceux qui entendent continuer le combat. Naturellement je ne sous-estime pas la difficulté d'une telle tâche dans un système politique où le mode de scrutin majoritaire conduit à une bipolarisation de la vie politique. Mais celle-ci est devenue avec le virage libéral de la gauche de plus en plus factice : comment ne pas voir que Jacques Chirac et Lionel Jospin, à eux deux, n'ont rassemblé au premier tour que 25 % des inscrits ? Cette bipolarisation est notre difficulté. Son caractère factice est notre chance.
Je n'entends rien renier des analyses que j'ai développées publiquement pendant huit mois de campagne.
On m'a reproché d'avoir critiqué le système du pareil au même". Mais est-ce moi qui ai inventé des expressions telles que "la seule politique possible", le "gouvernement invisible", ou encore "le grand secret des décisions qui pour l'essentiel se prennent ailleurs" ? Les politiques mises en oeuvre depuis près de vingt ans par la gauche et par la droite procèdent pour l'essentiel d'une même matrice : le ralliement sous couvert d'européisme à la mondialisation libérale. Elles conduisent à l'alternance sans alternative.
Non seulement je ne retire rien de mes analyses, mais je maintiens qu'il y a une autre politique possible que celle que nous imposent, prisonniers de la même orthodoxie, les sociaux-libéraux et les libéraux-sociaux : la dictature des marchés financiers, les restructurations et les délocalisations industrielles, la réduction à zéro du déficit budgétaire, le démantèlement des services publics, et en définitive la régression sociale.
Pour mettre en oeuvre cette autre politique, je ne vois d'appuis solides que dans la souveraineté populaire, la citoyenneté active, l'autorité de la loi égale pour tous, l'égalité des chances, bref dans la République.
Je crois être armé par une assez longue expérience pour vous aider à surmonter, si vous le voulez, les difficultés que constitue la formation d'un nouveau parti politique. Elles tiennent à ce que je sais de la nature humaine, et d'abord à notre capacité à repousser les tentations jumelles de l'électoralisme et de l'intellectualisme.
Ce sont ces deux tentations que nous devons conjurer, si nous voulons inscrire le pôle républicain dans la durée. Nous ne vivons pas en effet dans un pur éther, qui serait le ciel des idées. Nous sommes sur la terre. Il y a des élections, un mode de scrutin, un système de financement des partis politiques qui tient compte pour moitié des voix recueillies et pour moitié des parlementaires élus. Ces réalités triviales s'imposent à quiconque veut inscrire son effort dans le temps, bref faire de la politique. Ce n'est pas compromettre son âme que de tenir compte du réel.
3. La question des élections.
Je n'ai rien proposé d'ailleurs qui ne soit honorable et parfaitement compatible avec la visée de dépassement que je vous ai proposée pendant la campagne présidentielle.
Nous sommes aujourd'hui dans l'opposition. Combien de fois n'ai-je pas entendu tel ou tel m'adjurer par avance de déclarer avant même que le combat soit livré, que je m'y retrouverais, nécessairement ? Eh bien nous y sommes. Nous sommes l'opposition républicaine.
J'ai proposé de passer un pacte de non-agression à cette autre opposition que domine le parti socialiste, dont l'orientation social-libérale n'est pas la nôtre. Mais compte tenu de ce qu'est la dynamique des institutions et la forte probabilité d'une majorité de droite dans la prochaine Assemblée Nationale, j'ai proposé de le faire pour " limiter les dégâts ".
Cette proposition n'a pas abouti du fait de l'attitude dominatrice du parti socialiste.
Je m'exprime avec une certaine franchise qui peut rebuter les âmes sensibles : je n'ai jamais envisagé rien d'autre qu'un accord équilibré et respectueux de l'identité de chaque partenaire, à commencer par celle du pôle républicain.
Evidemment regarder la réalité en face, non pour y sacrifier ses principes, mais pour leur donner chance un jour de s'imposer, cela demande lucidité et courage. Et c'est cela qui manque le plus : les uns sacrifient les principes et les autres s'évadent du réel.
Si je dois être responsable du pôle républicain, j'entends avoir la capacité de passer des engagements qui soient dans notre intérêt et compatibles avec nos principes.
Le fait que cette démarche, dictée par la situation nouvelle, n'a pu aboutir ne signifie pas qu'il ne fallait pas la tenter. Le parti socialiste a pris la responsabilité d'une situation que nous sommes tout à fait capables d'assumer. Il nous demande de faire amende honorable, de nous situer à gauche, etc. Mais d'où nous parle-t-il ainsi avec arrogance ? Du haut des engagements qu'il a souscrits à Barcelone ou de la dérive libérale qui l'a emporté bien loin des engagements pris en 1997 de faire en tous domaines " retour à la République "
Il faut avoir confiance en nous, et préserver en toutes circonstances notre capacité à faire face, bref à présenter, partout où il le faudra, des candidats.
Tout cela demande une certaine solidité. C'est pour le pôle républicain un test décisif.
4.Construire une alternative.
Si vous croyez à la nécessité d'une refondation républicaine, en dehors des perspectives usées que nous offrent une droite et une gauche qui sont au bout de leurs principes, si vous ressentez la nécessité de bâtir une véritable alternative qui soit autre chose que le repoussoir convulsif qu'offre le Front National, alors votre volonté ne se dérobera pas, car nous avons du pain sur la planche !
Qui, en effet, en dehors de nous, a fait l'effort de ressourcement idéologique dans le logiciel républicain - valeurs, principes, philosophie - après la chute du communisme qui - nous le voyons bien - laisse sans repères ceux qui avaient fait de la théodicée marxiste leur horizon ?
Qui a fait l'effort de penser la mondialisation financière telle qu'elle s'opère sous l'égide de la superpuissance américaine ? Et qui ose y résister ? Question qu'a très bien posée Anicet Le Pors ce matin.
Bien sûr, il faut penser la société telle qu'elle se transforme sous l'impact des nouvelles technologies plus ou moins instrumentées par les forces sociales dominantes, je pense à la communication qui joue un si grand rôle dans les élections.
Je vous l'ai dit à Vincennes : " La gauche et la droite continueront d'exister à l'avenir sous des formes et avec des contenus différents, mais il y a une chose qui est au-dessus de la droite, au-dessus de la gauche, c'est la République ".
Eh bien, oui, c'est à partir de la République qu'on pourra reconstruire la gauche, car nous avons dû nous rendre à l'évidence qu'on ne pouvait pas reconstruire la République à partir de la gauche. Et c'est aussi à partir de la République que nous pourrons faire comprendre à nos concitoyens la nécessité de valeurs, de repères et d'institutions stables - la nation, l'Ecole, la famille - sans lesquelles aucune société démocratique ne peut se maintenir.
Sachons donc nous unir sans exclusive pour offrir au peuple français une issue positive à la crise dans laquelle notre pays s'enfonce et à laquelle ni la droite libérale ni les sociaux-libéraux n'ont de réponse prête. Ce qu'ils proposent c'est une fuite en avant dans la mondialisation libérale, dans une Europe pseudo-fédérale où se dissoudrait la démocratie, désormais confinée dans les régions, dernier et dérisoire horizon d'une citoyenneté qui jadis ouvrait la nation sur le monde. Cette grande histoire de la France, ce magnifique dépassement de nos différences par la citoyenneté républicaine, ne s'est pas définitivement refermée avec l'histrionesque récupération des symboles de la République par tous les chantres de la bienpensance.
Notre pays connaît une grave crise qui ne peut malheureusement que s'approfondir, car le gouvernement de la droite libérale sera aussi impuissant que l'a été celui de la gauche plurielle à enrayer les effets néfastes de la mondialisation libérale sur la société française.
Il nous incombe donc de construire l'alternative républicaine dont le pays a besoin. Sinon nous serons ramenés à la situation que nous avons connue d'une droite et d'une gauche ralliées sur le fond aux mêmes dogmes se relayant pour faire la même politique, chacune attendant patiemment dans l'opposition, de l'échec de l'autre son retour au pouvoir.
Ce système d'alternance sans alternative se nourrit de l'effet Le Pen, repoussoir commode qui stabilise l'ensemble comme le balancier la pirogue.
5.Construire un nouveau parti.
En décidant de construire un nouveau parti nous avons donc entrepris une longue marche qui durera sans doute des années. Mais nous ne partons pas de rien. Il y a d'abord le soutien exprimé d'un Français sur vingt et un soutien potentiel sans aucun doute incomparablement plus élevé. Il y a aussi l'acquis du Mouvement des Citoyens qui, hier, a une très forte majorité, a accepté ma proposition de se fondre dans le pôle républicain. Je veux rendre hommage au MDC et à son Président Georges Sarre qui ont choisi la voie du dépassement que je leur proposais plutôt que la tentation commode du repli sur soi qui aurait inévitablement signifié recroquevillement et en définitive satellisation par le parti socialiste.
Le Mouvement des Citoyens a porté pendant dix ans l'effort de ressourcement de la gauche dans l'idée républicaine. Nous n'avons pas mené la politique du pire. Au contraire nous avons essayé d'influencer le parti socialiste de l'extérieur pour le conduire à " faire en tous domaines retour à la République ".
a)Leçons à tirer de l'échec de la gauche plurielle.
Nous n'y avons pas réussi, comme cela est devenu évident à partir de 1999 dans des champs aussi différents que la lutte contre l'insécurité, la politique industrielle ou le dossier corse. Cet échec pèsera lourdement, tant qu'il n'aura pas été analysé et compris. La gauche plurielle n'a pas su transformer sa victoire aux législatives de 1997 - qui était à bien des égards un rejet du gouvernement Juppé - en un projet stratégique cohérent. Cet échec n'est pas seulement celui du parti socialiste. Il est aussi notre échec : nous n'avons pas réussi, malgré tous nos efforts, à relever la République à partir de la gauche. La raison en est sans doute que le parti socialiste, excessivement dominé par ses courants sociaux-libéraux, a privilégié la recherche d'une entente stratégique avec les Verts plutôt qu'un ressourcement républicain. Or le parti vert, bien loin d'être préoccupé d'abord par la cause de l'environnement, est l'un des vecteurs privilégiés de l'irrationalisme moderne fort éloigné de toute philosophie républicaine. C'est un parti postgauchiste beaucoup plus qu'un parti écologiste. Sa cause emblématique est la " sortie du nucléaire ". Derrière le principe de précaution, se dissimule en fait une idéologie profondément malthusienne et réactionnaire. Le parti communiste aurait pu jouer un rôle de contrepoids en s'appuyant sur sa tradition populaire et nationale. Mais obsédé par sa repentance, il a, lui aussi, cédé au " bougisme ", s'essoufflant à rattraper les revendications petites bourgeoises et à communier avec la bienpensance, sur des dossiers comme l'insécurité ou l'immigration, la judiciarisation des licenciements, abandonnant ainsi l'électorat populaire à l'extrême-droite.
Ainsi la gauche aujourd'hui n'offre pas un terreau solide pour la refondation républicaine. C'est la raison pour laquelle nous avons choisi de nous adresser aux républicains à quelque rive qu'ils appartiennent, dès lors qu'ils mettaient au-dessus de tout l'intérêt public. Ai-je besoin de le rappeler ? Je ne me suis jamais défini comme n'étant " ni à droite ni à gauche ". J'ai seulement indiqué qu'au-dessus de la droite et de la gauche il y avait la République. Parce que trente après Epinay, -faut-il le dire ?- ce qu'est devenue la gauche me désespère. Pour autant, je n'oublie pas qu'il y a des femmes et des hommes de gauche sur le terrain.
A vous de les convaincre.
b)L'identité du pôle républicain.
Sommes-nous de droite ? Sommes-nous de gauche ? Cette question dans laquelle veulent nous enfermer nos adversaires est une question piège. Nous sommes avant tout des républicains.
Qu'est-ce à dire ?
Pour ma part, je suis fidèle à mon parcours et je sais que chacun d'entre vous entend l'être à sa manière. La République c'est ce que nous opposons à la fois à la mondialisation libérale et à l'idéologie libéral-libertaire qui l'accompagne.
Je voudrais convaincre Eric Halphen de ce que je ne suis pas mal réveillé :
Nous sommes contre la loi de la jungle en économie : nous passerons donc pour des hommes et des femmes de gauche. Et, en même temps, sur le plan social, nous croyons à la nécessité de valeurs, de repères et de règles sans lesquels aucune vie démocratique et civilisée n'est possible. D'aucuns en déduiront que nous sommes des conservateurs.
Il est vrai que, comme Pierre-André Taguieff l'a fort bien montré, il y a des institutions et des valeurs qui nous paraissent mériter d'être conservées : la nation, cadre irremplaçable de la démocratie, l'Ecole, gardienne du savoir et de l'esprit critique, la famille, enfin lieu des solidarités élémentaires.
Mais nous ne sommes pour autant les thuriféraires d'aucune idéologie organique qui subordonnerait l'individu à une entité collective supérieure. Parce que nous sommes des républicains, nous croyons d'abord à l'individu libre. Nous croyons à la raison humaine, bref au citoyen.
6.Nos tâches prioritaires.
a)Principes et organisation.
Pour créer un nouveau parti, nous devons mobiliser toutes les ressources de la réflexion. Nous devons aussi nous respecter les uns les autres, apprécier la richesse du parcours et de l'effort de chacun à la diversité du pôle républicain. Il faudra élaborer une Charte mais aussi accepter une certaine souplesse d'organisation. Définir une ligne politique. C'est sans doute cela qui sera le moins difficile car nous ne partons pas de rien et les dix orientations de Vincennes, développées et enrichies par le travail des experts du Pôle républicain, constituent une bonne base de départ.
Je m'efforcerai de mettre mon sens de la synthèse au service de notre nouveau parti. Tout cela sera la tâche de notre prochain Congrès en novembre.
Le pôle républicain est la seule force réellement nouvelle qui ait émergé en France à l'occasion des élections présidentielles. La gestation du courant républicain est certainement beaucoup plus ancienne. Ce courant s'est manifesté dès la fin des années quatre-vingts en réaction au différentialisme, à la proclamation du droit à la différence alors dominant à gauche, à l'oubli de l'égalité, et à l'inféodation croissante à l'idéologie néo-impériale.
Je ne serais pas juste de ne pas citer Régis Debray et Max Gallo notre premier Président que je veux assurer de la reconnaissance et de l'affection de tous. Son talent nous restera précieux pour faire entendre dans le paysage nos analyses et nos convictions.
Le pôle républicain a réuni plus de voix que des courants anciennement constitués : les Verts, le parti communiste, Démocratie Libérale ou le Parti radical de gauche.
Surtout, j'en suis convaincu, si nous parvenons à placer le pôle républicain sur orbite, il aimantera fortement dans les années à venir tous ceux - et ils sont nombreux - qui ont pris la mesure des limites de la droite et de la gauche établies.
b)La préparation des législatives.
Pour installer le pôle républicain sur orbite, il y a déjà l'échéance des élections législatives. Quatre cents candidates et candidats, jeunes pour beaucoup, dont plus de la moitié viennent d'autres composantes initiales que le MDC, seront autant de représentants en mission pour faire avancer nos idées sur le terrain. L'amalgame devra se faire autour de leurs candidatures. Tout est à conquérir. Dans deux ans, il y aura des élections cantonales, régionales et européennes. Et sans doute un référendum sur l'Europe que Jacques Chirac a promis. Dans cinq ans des élections législatives et présidentielles. Enfin qui peut dire, dans la grave crise que traverse le pays, si les échéances ne seront pas avancées ?
Les élections législatives des 9 et 16 juin prochains vont se dérouler sur des idées simples : l'Union pour la majorité présidentielle entendra confirmer l'élection de Jacques Chirac par une majorité de sièges à l'Assemblée Nationale. L'ex-gauche plurielle entendra faire appel à l'élimination de Lionel Jospin. Plus que jamais il nous appartiendra de faire valoir qu'il existe un autre chemin que celui où nous ont fait rouler ensemble une droite et une gauche prisonnières des mêmes dogmes libéraux.
Il faudra faire entendre une voix claire dans le pays et si possible au Parlement pour éclairer la route. Bien sûr et de la même manière que le parti chiraquien entend étouffer François Bayrou, de la même manière le parti socialiste veut empêcher le pôle républicain d'exister.
Voilà le défi que nous devons relever.
Conclusion.
Au-delà du cap des législatives, le travail ne fera que commencer. Intense travail d'élaboration, de débat, d'enracinement sur le terrain. Il nous appartiendra plus que jamais de défricher les voies de l'avenir. De faire l'amalgame en notre sein. De nous ouvrir aux nouvelles générations. Là est notre rôle : servir de passeurs, comme l'avait excellemment dit un jour Max Gallo, entre les générations. C'est à cela particulièrement que je vous appelle tous.
Nous avons pour cela une sûre boussole : dans le paysage politique aujourd'hui dévasté, nous sommes les seuls héritiers de la République française et de ses principes.
Il vous appartient de faire en sorte que le magnifique idéal de la République, celui d'une communauté de citoyens, se définissant non par l'origine, mais par la politique, ne tombe pas aux oubliettes de l'Histoire.
Comme le dit un proverbe allemand : " La où est le danger, là croît la chance du salut ".
L'Europe entière est en crise. La France plus que d'autres nations. Mais c'est peut être pour cela que l'espoir demeure.
J'ai évoqué dans mon discours au Zénith, le 18 avril, la nécessité de " républicaniser l'Europe ".
Oui, je le crois, la France, demain comme hier, sera encore utile à l'Europe et au monde par les valeurs qu'elle porte. Plus que jamais en effet la République est une idée neuve !
Ce qui était vrai avant le 21 avril le reste après le 5 mai. Est-ce que nous le voulons ?
Alors si nous le voulons, je suis à votre disposition pour porter la création de ce nouvel outil politique, au service des valeurs de liberté, de laïcité, d'égalité, de fraternité et de dialogue des civilisations et des cultures dont notre pays a besoin.
Par notre effort nous marqueront le paysage et nous créerons les conditions d'un recours qu'attendent la France et la République !
(source http://www.pole-republicain, le 14 mai 2002)