Texte intégral
F. Laborde Ce matin, les médecins libéraux et la Cnam ont conclu un accord pour que la consultation passe à 20 euros, en échange de quoi les médecins s'engagent à prescrire davantage de médicaments génériques. [Ces derniers] coûtent moins cher et donc la Sécurité sociale aura moins à rembourser. Cet accord, nous disent la Cnam et monsieur Spaeth, devrait permettre de maintenir l'équilibre. Qu'en pensez-vous ?
- "D'abord, je suis très heureux que cette consultation des 20 euros soit enfin retenue, comme ce qu'attendaient les médecins."
Vous n'êtes pas de ceux qui disent que les médecins sont des privilégiés et qu'ils ont exagéré dans leurs revendications...
- "Non, je pense que vraiment 20 euros, c'est nécessaire. La question est de savoir qui va payer. J'ai entendu une partie de ce que représentent les accords. Cela me confirme dans l'idée que le Gouvernement, actuellement, qui n'a pas lui négocié directement, dissimule un certain nombre de choses. Nous savons bien qu'il y avait les 20 euros pour la consultation des médecins, mais il y a des dizaines de problèmes qui sont posés aux infirmières, aux kinésithérapeutes, aux hôpitaux, qui vont devoir en tout état de cause conduire à une révision des dépenses de santé. Il faut augmenter ces dépenses nécessaires. Or le Gouvernement ne veut pas aujourd'hui toucher aux équilibres et, en fait, il ne veut pas mettre davantage d'argent - il l'annonce plus moins - sur ces dépenses publiques. Cela va se traduire par une augmentation des cotisations à terme. C'est dangereux et c'est cela qui me préoccupe. Il y a beaucoup de choses dissimulées par ce Gouvernement ces jours-ci."
Il y a un accord sur les médecins ; il y a eu un conflit de sept mois. Les médecins n'ont pratiquement jamais été reçus par le gouvernement précédent et l'ont beaucoup regretté. Est-ce qu'on peut aujourd'hui simplement dire que ce gouvernement "fait mal" alors que c'est un dossier qui traîne depuis des mois ?
- "Ce n'est pas le Gouvernement qui a signé l'accord ce matin, c'est la Cnam. Ce n'est pas pareil quand même. D'ailleurs, auparavant, les problèmes étaient posés en ces termes. Loin de moi l'idée..."
... de dire qu'avant tout était formidable ?
- "Ce n'est pas moi qui vais dire cela. Les Français ont donné leur sentiment le 21 avril là-dessus et il faut que la gauche ait bien entendu le message. Et je crois qu'elle l'a entendu. En tout cas, en ce qui concerne les communistes, c'est clair. Mais en même temps, cela ne doit pas me conduire au mutisme complet par rapport à la méthode de ce gouvernement Raffarin qui passe son temps à brasser du vent, il faut bien le dire, qui sur toute une série de mesures, ne prend pas position, qui ne veut pas augmenter le Smic et ne prend pas position sur les dépenses de santé. C'est une véritable tornade sociale qui se prépare, menée par J. Chirac et Raffarin. Il faut que les Français le sachent."
Vous voulez dire qu'il y aura des grosses manifs, que les Français vont descendre dans la rue ?
- "Je suis frappé que l'on ne discerne pas actuellement dans la démarche du Gouvernement cette volonté de cacher qu'il va mettre en oeuvre une vraie politique antisociale, une vraie politique de régression sociale."
Quand monsieur Raffarin dit que pour les retraites, il va prendre son temps, qu'il va consulter tout le monde et qu'[on] verra en 2003, comment pouvez-vous dire que c'est épouvantable et qu'[ils] vont tout casser ?
- "F. Laborde, merci de me poser cette question. Ce matin, en entrant dans ce studio, je lis la presse, je lis vos confrères du Parisien. Sarkozy mange le morceau : il annonce qu'ils vont allonger la durée des cotisations. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est la Une du Parisien. Ce Gouvernement a un double langage : il dissimule une partie de ce qu'il va faire ensuite et j'alerte les Français sur ce qui va se passer ensuite. Je ne veux pas en rajouter, je vois bien qu'aujourd'hui, nous sommes dans une situation où ce n'est pas simple pour la gauche et on a un vrai risque d'une mainmise totale, d'une sorte de monarchie RPR - même Bayrou le dit - sur la France. Donc attention à ce qui va se passer !"
Dans un sondage aujourd'hui, les Français disent à 64 % qu'ils trouvent que J.-P. Raffarin est un bon choix. Alors, est-ce que c'est un discours raisonnable ?
- "Je respecte l'opinion des Français mais permettez-moi de donner la mienne. C'est quand même pas mal en politique d'essayer d'anticiper un peu. Peut-être ne l'a-t-on pas assez fait dans d'autres périodes... Donc, je crains que l'on vérifie dans quelques semaines, dans quelques mois, qu'il se passe quelque chose un peu comme ce qu'a fait J. Chirac en 1995, c'est-à-dire tourner complètement le dos à ses promesses. Vous vous souvenez de ce qu'il avait dit à propos de "la fracture sociale", qu'il allait s'attaquer à tout cela. Il a, six mois après, complètement tourné le dos à tout ça ; c'est ce qui se prépare. Je crois qu'il y a un véritable signal rouge qui doit alerter les Français. Je sais bien qu'il est de bon ton en ce moment de dire que monsieur Raffarin a une certaine rondeur affectée mais la réalité, c'est que de mauvais coups se préparent."
On voit émerger des revendications qu'on n'avait pas entendues : une augmentation du Smic, par exemple. C'est nouveau, ça vient de sortir dans les programmes !
- "Pas à moi et pas ça ! Dans la campagne présidentielle, j'étais le seul, y compris à gauche, à reprendre cette idée ! J'étais le seul à dire qu'il fallait une augmentation du Smic, des bas salaires, des minima sociaux, des retraites. Et là, si au 1er juillet il n'y a pas une augmentation telle que je l'imagine de 100 euros, nous serons en difficulté. Ce sont encore les gens modestes qui vont trinquer."
100 euros, cela fait 10 %.
- "Oui, et alors ? Quand on annonce 5 % de baisses des impôts qui vont aller aux catégories les plus aisées et que par ailleurs, 16 millions de Français n'auront aucune baisse d'impôts, je dis qu'il est temps d'augmenter les bas salaires."
Cela veut dire que le Parti socialiste aujourd'hui s'inspire directement des propositions du Parti communiste ?
- "Il n'est pas faux de dire qu'aujourd'hui, le PS revendique une augmentation du Smic ; je ne vais pas m'en plaindre. Mais accordez-moi que j'ai porté cette revendication pendant des semaines, des mois !
Je vous l'accorde.
- "Merci."
Parlons de votre campagne : ce n'est pas vraiment une promenade de santé, c'est un peu difficile.
- "C'est une circonscription difficile. J'ai battu nettement le RPR en 1997 parce qu'il avait soutenu le plan antisocial de Juppé, mais aujourd'hui, la situation est comme celle que l'on connaît en France, c'est-à-dire qu'il y a une pression très forte des forces de droite. Comme dans beaucoup de circonscriptions de France, mon adversaire politique ne pourra me battre que s'il a le concours du FN, d'une façon directe ou indirecte. Donc c'est une situation difficile. Beaucoup de députés de droite peuvent être élus avec l'obligation, ensuite, de devoir rendre des comptes au FN. Il faut qu'on fasse très attention que ne se reproduise pas ce qui s'est passé au premier tour de l'élection présidentielle, c'est-à-dire une sorte de gauche écartée, ce qui s'annonce parfois..."
C'est-à-dire un deuxième tour FN-UMP ?
- "Oui, droite-Front national. Il est dans mon rôle de dire que ce ne sont pas que des paroles, c'est une vraie réalité. C'est une menace qui existe, une sorte d'Etat RPR dominant toute la société française comme il ne l'a jamais fait et, de l'autre côté, des gages qu'il devrait donner au FN. Tout cela est sérieux et je crois qu'il faut vraiment que l'on alerte les Français là-dessus."
(Source :premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 6 juin 2002)
- "D'abord, je suis très heureux que cette consultation des 20 euros soit enfin retenue, comme ce qu'attendaient les médecins."
Vous n'êtes pas de ceux qui disent que les médecins sont des privilégiés et qu'ils ont exagéré dans leurs revendications...
- "Non, je pense que vraiment 20 euros, c'est nécessaire. La question est de savoir qui va payer. J'ai entendu une partie de ce que représentent les accords. Cela me confirme dans l'idée que le Gouvernement, actuellement, qui n'a pas lui négocié directement, dissimule un certain nombre de choses. Nous savons bien qu'il y avait les 20 euros pour la consultation des médecins, mais il y a des dizaines de problèmes qui sont posés aux infirmières, aux kinésithérapeutes, aux hôpitaux, qui vont devoir en tout état de cause conduire à une révision des dépenses de santé. Il faut augmenter ces dépenses nécessaires. Or le Gouvernement ne veut pas aujourd'hui toucher aux équilibres et, en fait, il ne veut pas mettre davantage d'argent - il l'annonce plus moins - sur ces dépenses publiques. Cela va se traduire par une augmentation des cotisations à terme. C'est dangereux et c'est cela qui me préoccupe. Il y a beaucoup de choses dissimulées par ce Gouvernement ces jours-ci."
Il y a un accord sur les médecins ; il y a eu un conflit de sept mois. Les médecins n'ont pratiquement jamais été reçus par le gouvernement précédent et l'ont beaucoup regretté. Est-ce qu'on peut aujourd'hui simplement dire que ce gouvernement "fait mal" alors que c'est un dossier qui traîne depuis des mois ?
- "Ce n'est pas le Gouvernement qui a signé l'accord ce matin, c'est la Cnam. Ce n'est pas pareil quand même. D'ailleurs, auparavant, les problèmes étaient posés en ces termes. Loin de moi l'idée..."
... de dire qu'avant tout était formidable ?
- "Ce n'est pas moi qui vais dire cela. Les Français ont donné leur sentiment le 21 avril là-dessus et il faut que la gauche ait bien entendu le message. Et je crois qu'elle l'a entendu. En tout cas, en ce qui concerne les communistes, c'est clair. Mais en même temps, cela ne doit pas me conduire au mutisme complet par rapport à la méthode de ce gouvernement Raffarin qui passe son temps à brasser du vent, il faut bien le dire, qui sur toute une série de mesures, ne prend pas position, qui ne veut pas augmenter le Smic et ne prend pas position sur les dépenses de santé. C'est une véritable tornade sociale qui se prépare, menée par J. Chirac et Raffarin. Il faut que les Français le sachent."
Vous voulez dire qu'il y aura des grosses manifs, que les Français vont descendre dans la rue ?
- "Je suis frappé que l'on ne discerne pas actuellement dans la démarche du Gouvernement cette volonté de cacher qu'il va mettre en oeuvre une vraie politique antisociale, une vraie politique de régression sociale."
Quand monsieur Raffarin dit que pour les retraites, il va prendre son temps, qu'il va consulter tout le monde et qu'[on] verra en 2003, comment pouvez-vous dire que c'est épouvantable et qu'[ils] vont tout casser ?
- "F. Laborde, merci de me poser cette question. Ce matin, en entrant dans ce studio, je lis la presse, je lis vos confrères du Parisien. Sarkozy mange le morceau : il annonce qu'ils vont allonger la durée des cotisations. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est la Une du Parisien. Ce Gouvernement a un double langage : il dissimule une partie de ce qu'il va faire ensuite et j'alerte les Français sur ce qui va se passer ensuite. Je ne veux pas en rajouter, je vois bien qu'aujourd'hui, nous sommes dans une situation où ce n'est pas simple pour la gauche et on a un vrai risque d'une mainmise totale, d'une sorte de monarchie RPR - même Bayrou le dit - sur la France. Donc attention à ce qui va se passer !"
Dans un sondage aujourd'hui, les Français disent à 64 % qu'ils trouvent que J.-P. Raffarin est un bon choix. Alors, est-ce que c'est un discours raisonnable ?
- "Je respecte l'opinion des Français mais permettez-moi de donner la mienne. C'est quand même pas mal en politique d'essayer d'anticiper un peu. Peut-être ne l'a-t-on pas assez fait dans d'autres périodes... Donc, je crains que l'on vérifie dans quelques semaines, dans quelques mois, qu'il se passe quelque chose un peu comme ce qu'a fait J. Chirac en 1995, c'est-à-dire tourner complètement le dos à ses promesses. Vous vous souvenez de ce qu'il avait dit à propos de "la fracture sociale", qu'il allait s'attaquer à tout cela. Il a, six mois après, complètement tourné le dos à tout ça ; c'est ce qui se prépare. Je crois qu'il y a un véritable signal rouge qui doit alerter les Français. Je sais bien qu'il est de bon ton en ce moment de dire que monsieur Raffarin a une certaine rondeur affectée mais la réalité, c'est que de mauvais coups se préparent."
On voit émerger des revendications qu'on n'avait pas entendues : une augmentation du Smic, par exemple. C'est nouveau, ça vient de sortir dans les programmes !
- "Pas à moi et pas ça ! Dans la campagne présidentielle, j'étais le seul, y compris à gauche, à reprendre cette idée ! J'étais le seul à dire qu'il fallait une augmentation du Smic, des bas salaires, des minima sociaux, des retraites. Et là, si au 1er juillet il n'y a pas une augmentation telle que je l'imagine de 100 euros, nous serons en difficulté. Ce sont encore les gens modestes qui vont trinquer."
100 euros, cela fait 10 %.
- "Oui, et alors ? Quand on annonce 5 % de baisses des impôts qui vont aller aux catégories les plus aisées et que par ailleurs, 16 millions de Français n'auront aucune baisse d'impôts, je dis qu'il est temps d'augmenter les bas salaires."
Cela veut dire que le Parti socialiste aujourd'hui s'inspire directement des propositions du Parti communiste ?
- "Il n'est pas faux de dire qu'aujourd'hui, le PS revendique une augmentation du Smic ; je ne vais pas m'en plaindre. Mais accordez-moi que j'ai porté cette revendication pendant des semaines, des mois !
Je vous l'accorde.
- "Merci."
Parlons de votre campagne : ce n'est pas vraiment une promenade de santé, c'est un peu difficile.
- "C'est une circonscription difficile. J'ai battu nettement le RPR en 1997 parce qu'il avait soutenu le plan antisocial de Juppé, mais aujourd'hui, la situation est comme celle que l'on connaît en France, c'est-à-dire qu'il y a une pression très forte des forces de droite. Comme dans beaucoup de circonscriptions de France, mon adversaire politique ne pourra me battre que s'il a le concours du FN, d'une façon directe ou indirecte. Donc c'est une situation difficile. Beaucoup de députés de droite peuvent être élus avec l'obligation, ensuite, de devoir rendre des comptes au FN. Il faut qu'on fasse très attention que ne se reproduise pas ce qui s'est passé au premier tour de l'élection présidentielle, c'est-à-dire une sorte de gauche écartée, ce qui s'annonce parfois..."
C'est-à-dire un deuxième tour FN-UMP ?
- "Oui, droite-Front national. Il est dans mon rôle de dire que ce ne sont pas que des paroles, c'est une vraie réalité. C'est une menace qui existe, une sorte d'Etat RPR dominant toute la société française comme il ne l'a jamais fait et, de l'autre côté, des gages qu'il devrait donner au FN. Tout cela est sérieux et je crois qu'il faut vraiment que l'on alerte les Français là-dessus."
(Source :premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 6 juin 2002)