Texte intégral
Q - Joschka Fischer vient de briser le tabou de la " fédération " européenne. Le scénario qu'il propose vous paraît-il réalisable ?
R - La proposition de Joschka Fischer est la bienvenue : au moment où s'annonce le grand élargissement de l'Union européenne, il est indispensable d'explorer toutes les formules qui permettront, demain, de faire fonctionner l'Europe à vingt-sept, trente, ou plus. D'ailleurs, dès novembre 1998, nous avions, Joschka Fischer et moi, lancé une réflexion sur l'Europe à trente.
Nous avons poursuivi cette réflexion ensemble ces dernières semaines, au cours de plusieurs dîners. Aucune solution n'est à écarter a priori. La contribution de Joschka Fischer à ce débat est jusqu'ici la plus ambitieuse. Elle s'inscrit dans une tradition fédéraliste, ses idées sont proches de celles de Jacques Delors.
Q - Comment peut s'articuler la politique française par rapport à cette proposition ?
R - Nous prenons la présidence de l'Union européenne dans quelques semaines. Notre rôle, en tant que président, est d'abord de tout faire pour que la Conférence intergouvernementale puisse aboutir au Conseil européen sur les trois sujets : élargissement du vote à la majorité qualifiée, repondération des voix et réforme de la Commission.
Notre rôle est aussi d'encourager ce débat sur l'avenir à long terme de l'Union européenne. Tout doit être analysé, exploré.
Q - Y a-t-il des éléments qui vous paraissent mériter réflexion plus que d'autres ?
R - C'est la proposition dans son ensemble qui est intéressante. Elle dessine une perspective à long terme, bien au-delà de la Conférence intergouvernementale. Joschka Fischer insiste, comme je le pense aussi, sur le fait que dans tous les cas de figure, le moteur franco-allemand est, ou doit redevenir, central.
Je note que la première des étapes qu'il envisage passe par l'assouplissement des coopérations renforcées : nous sommes en effet arrivés à la conclusion que cette formule permettrait à la fois des coopérations pragmatiques sur des sujets concrets, mais aussi un bond en avant pour des Etats qui voudraient progresser dans l'intégration politique.
L'assouplissement des coopérations renforcées est en quelque sorte le point de passage commun à tous les projets, y compris les plus ambitieux. C'est d'ailleurs un sujet que nous devons traiter au sein de la Conférence intergouvernementale.
A ce stade, il vaut mieux avancer que d'opposer les différents projets entre eux. Notre rôle, à la tête de l'Union européenne, ne sera pas de réveiller des antagonismes, mais de faire avancer l'ensemble. Ce sera de faire émerger le consensus le plus dynamique et le plus ambitieux possible sur la réforme institutionnelle.
Q - Que pensez-vous de la notion de "centre de gravité", l'étape suivante dans le plan de M. Fischer ?
R - Ce que Joschka Fischer appelle "centre de gravité", c'est ce que d'autres appellent "noyau dur", c'est ce que Jacques Delors appelle "fédération d'Etats-nations", mais pour Joschka Fischer, cela vient dans une étape ultérieure.
Cela présente les mêmes attraits - simplicité et ambition - et les mêmes inconvénients - fracture entre l'avant-garde et l'arrière-garde, problèmes de souveraineté nationale - que les formules que je viens de citer.
Il faut les examiner et voir si dans l'Europe d'aujourd'hui il y a des pays qui sont prêts à franchir ce pas.
Q - Dans quel cadre va avoir lieu ce débat ?
R - Joschka Fischer souligne qu'il a parlé à titre personnel, et non pas au nom du gouvernement allemand. Sa proposition n'est donc pas "sur la table" de la Conférence intergouvernementale.
Mais elle va nécessairement alimenter les réflexions à plus long terme sur l'avenir de l'Europe. Je m'en réjouis et je souhaite que ce débat s'amplifie./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 mai 2000)
R - La proposition de Joschka Fischer est la bienvenue : au moment où s'annonce le grand élargissement de l'Union européenne, il est indispensable d'explorer toutes les formules qui permettront, demain, de faire fonctionner l'Europe à vingt-sept, trente, ou plus. D'ailleurs, dès novembre 1998, nous avions, Joschka Fischer et moi, lancé une réflexion sur l'Europe à trente.
Nous avons poursuivi cette réflexion ensemble ces dernières semaines, au cours de plusieurs dîners. Aucune solution n'est à écarter a priori. La contribution de Joschka Fischer à ce débat est jusqu'ici la plus ambitieuse. Elle s'inscrit dans une tradition fédéraliste, ses idées sont proches de celles de Jacques Delors.
Q - Comment peut s'articuler la politique française par rapport à cette proposition ?
R - Nous prenons la présidence de l'Union européenne dans quelques semaines. Notre rôle, en tant que président, est d'abord de tout faire pour que la Conférence intergouvernementale puisse aboutir au Conseil européen sur les trois sujets : élargissement du vote à la majorité qualifiée, repondération des voix et réforme de la Commission.
Notre rôle est aussi d'encourager ce débat sur l'avenir à long terme de l'Union européenne. Tout doit être analysé, exploré.
Q - Y a-t-il des éléments qui vous paraissent mériter réflexion plus que d'autres ?
R - C'est la proposition dans son ensemble qui est intéressante. Elle dessine une perspective à long terme, bien au-delà de la Conférence intergouvernementale. Joschka Fischer insiste, comme je le pense aussi, sur le fait que dans tous les cas de figure, le moteur franco-allemand est, ou doit redevenir, central.
Je note que la première des étapes qu'il envisage passe par l'assouplissement des coopérations renforcées : nous sommes en effet arrivés à la conclusion que cette formule permettrait à la fois des coopérations pragmatiques sur des sujets concrets, mais aussi un bond en avant pour des Etats qui voudraient progresser dans l'intégration politique.
L'assouplissement des coopérations renforcées est en quelque sorte le point de passage commun à tous les projets, y compris les plus ambitieux. C'est d'ailleurs un sujet que nous devons traiter au sein de la Conférence intergouvernementale.
A ce stade, il vaut mieux avancer que d'opposer les différents projets entre eux. Notre rôle, à la tête de l'Union européenne, ne sera pas de réveiller des antagonismes, mais de faire avancer l'ensemble. Ce sera de faire émerger le consensus le plus dynamique et le plus ambitieux possible sur la réforme institutionnelle.
Q - Que pensez-vous de la notion de "centre de gravité", l'étape suivante dans le plan de M. Fischer ?
R - Ce que Joschka Fischer appelle "centre de gravité", c'est ce que d'autres appellent "noyau dur", c'est ce que Jacques Delors appelle "fédération d'Etats-nations", mais pour Joschka Fischer, cela vient dans une étape ultérieure.
Cela présente les mêmes attraits - simplicité et ambition - et les mêmes inconvénients - fracture entre l'avant-garde et l'arrière-garde, problèmes de souveraineté nationale - que les formules que je viens de citer.
Il faut les examiner et voir si dans l'Europe d'aujourd'hui il y a des pays qui sont prêts à franchir ce pas.
Q - Dans quel cadre va avoir lieu ce débat ?
R - Joschka Fischer souligne qu'il a parlé à titre personnel, et non pas au nom du gouvernement allemand. Sa proposition n'est donc pas "sur la table" de la Conférence intergouvernementale.
Mais elle va nécessairement alimenter les réflexions à plus long terme sur l'avenir de l'Europe. Je m'en réjouis et je souhaite que ce débat s'amplifie./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 mai 2000)