Texte intégral
Monsieur le Ministre,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames, Messieurs,
Je vous remercie, Monsieur le Ministre, de me donner la possibilité d'évoquer avec vous les principaux enjeux des négociations agricoles actuellement engagées par l'Union européenne.
En conduisant de front les négociations d'élargissement, la réforme de la politique agricole commune et les négociations commerciales multilatérales, l'Union européenne va, dans les mois qui viennent, façonner la politique agricole de l'Europe élargie et définir sa place dans la compétition économique et commerciale internationale.
Au-delà des choix économiques et des différentes solutions techniques envisageables, ce débat sera d'abord et avant tout un débat politique, un choix de société.
C'est d'ailleurs sous une forme tout aussi politique que ces débats trouvent leur écho dans vos pays de résidence, où la PAC est souvent critiquée, pour les effets très négatifs qu'on lui prête sur le commerce international et sur le développement.
Dans ce véritable combat de communication qui n'a, à vrai dire, jamais cessé depuis la création de la PAC il y a 40 ans, vous êtes, en tant que représentants de la France à l'étranger, régulièrement exposés à la critique, sans disposer toujours des armes nécessaires pour y répondre dans de bonnes conditions.
Pour toutes ces raisons, je souhaite que le Ministère dont j'ai la charge travaille, dans les mois qui viennent, en très étroite coopération avec vous.
Je veillerai en particulier à ce qu'à chaque étape importante des réflexions et négociations que je viens d'évoquer, vous disposiez d'éléments de langage et d'argumentaires vous permettant, comme à l'ensemble des relais d'influence de la France à l'étranger, d'exposer les faits, d'expliquer nos positions et de leur assurer une large audience.
Un mot seulement, à ce stade de mon propos, pour vous indiquer l'esprit dans lequel nous conduisons actuellement les discussions à Bruxelles sur la revue à mi-parcours de la PAC.
En arrêtant en 1999 pour la période 2000 - 2006 les plafonds budgétaires de l'ensemble des politiques européennes ainsi que les grands paramètres de la PAC, le Conseil européen de Berlin a prévu un rendez-vous à mi-parcours permettant d'ajuster, si nécessaire, les mécanismes des organisations communes de marché pour en améliorer le fonctionnement, et de s'assurer que les plafonds de dépenses budgétaires sont bien respectés.
La France a contribué à cette réflexion par un mémorandum présenté en juin dernier. Notre pays ne souhaite pas, en revanche, une anticipation des décisions à prendre par les chefs d'Etat et de Gouvernement pour la période 2007 - 2013.
Or, prenant prétexte d'un débat d'opinion engagé en Europe sur la pertinence de la PAC, la Commission nous propose, dans des délais très rapprochés, de réformer en profondeur cette politique, allant en cela très au-delà du mandat défini à Berlin et anticipant, pour la seule politique agricole, le débat budgétaire pour la période 2007 - 2013.
Elle prend part, elle aussi, à ce combat de communication que j'évoquais à l'instant, en multipliant les initiatives médiatiques dans chacun des Etats membres. Les objectifs incontestables derrière lesquels elle s'abrite : la protection de l'environnement, le développement de la qualité, le soutien des revenus et le développement rural, masquent mal des motivations bien différentes.
Dans ce contexte, la volonté de la France de voir respectées les deux étapes résultant de Berlin est alors présentée comme un combat d'arrière-garde, conduit par les suppôts d'un modèle productiviste suranné, qui aurait enfanté les crises sanitaires dans lesquelles nous nous débattons depuis près de dix ans. Bref, une nouvelle querelle des anciens et des modernes.
Or la PAC mérite mieux qu'un faux procès, la réalité étant, comme vous le savez, bien différente.
La pertinence des propositions de la Commission ne se mesure pas à la générosité et à la généralité des objectifs affichés mais à l'efficacité des instruments qu'elle propose de mettre en place. Or elle ne présente sur ce point ni solutions précises, ni analyses concrètes d'impact. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle l'accueil d'une grande majorité de ministres de l'Agriculture a été si froid lors du premier débat à Bruxelles sur ce point.
L'empressement mis à réformer la PAC doit moins à l'urgence créée par le débat ouvert en Europe sur ce point qu'à la volonté de modifier à la hâte cette politique - et cette politique seulement - avant l'élargissement, ce qui démontre une curieuse confiance politique dans la construction européenne, et de donner des gages de bonne volonté à nos partenaires de l'OMC. Dans le même temps, les Etats-Unis font le chemin inverse, tirant lucidement dans le Farm Act les leçons des erreurs du passé, notamment sur le découplage complet des aides.
Sur ces différents points, vous serez conduits, dans les jours et les semaines qui viennent, à expliquer la position de la France. Au-delà des éléments que mes services vous fourniront à cet effet, je m'efforcerai, dans toute la mesure du possible, de me rendre dans les différents pays avec lesquels nous devons nouer un dialogue plus étroit sur ces questions.
Le Ministère dont j'ai la charge a également pour objectif de contribuer activement, en liaison étroite avec le vôtre, à la mise en uvre des engagements du Président de la République en matière de développement et à la préparation de la Présidence française du G 8. Renforcer notre action en ce domaine constitue une priorité, tant les attentes créées chez nos partenaires en développement par les conférences de Doha et de Monterrey sont grandes. Or l'agriculture constitue une des dimensions sectorielles importantes des politiques de développement, en particulier en Afrique, où les 2/3 des mal nourris vivent en milieu rural.
Dans le domaine du développement, la France est porteuse de spécificités qui peuvent en faire un acteur plus écouté et influent dans le monde : je pense en particulier au développement rural et à la recherche agronomique, où notre expertise est reconnue et notre utilité manifeste, comme j'ai eu l'occasion de le souligner lors du Sommet mondial de l'Alimentation qui s'est tenu à Rome le 10 juin dernier.
Le discours dominant des organisations internationales sur le développement apparaît encore, par constraste, trop réducteur. Parce qu'il accompagne un recul généralisé de l'Etat depuis une vingtaine d'années, il fait du commerce un instrument unique et inconditionnel du développement, négligeant par trop l'articulation des politiques et la vision globale du destin d'un pays.
C'est par cette série de petits reculs, d'infimes renoncements, que nous en sommes arrivés à une situation où la PAC est présentée, dans l'indifférence voire l'assentiment du plus grand nombre, comme la cause de tous les maux, en particulier dans le monde en développement. Nous l'observons bien ces jours-ci à Johannesbourg.
Mais, pour instruire ce procès, a-t-on étudié la contribution respective de l'Europe et des autres pays développés au commerce de produits agricoles avec les pays en développement ? A-t-on mesuré l'effet des concessions unilatérales et des accords préférentiels conclus par l'Europe avec nombre de ces pays ? A-t-on réfléchi à ce que signifie réellement, en agriculture, le mythe du prix mondial ?
A toutes ces questions qui reçoivent, je le sais, des réponses contrastées et parfois contradictoires dans les pays où vous avez l'honneur de représenter la France, je souhaite que vous puissiez contribuer à définir avec nous des réponses permettant à notre pays de demeurer, comme le Président de la République l'a souligné dans son intervention du 14 juillet dernier, la grande nation agricole et la puissance exportatrice qu'elle est aujourd'hui.
(source http://www.agriculture.gouv.fr, le 28 août 2002)
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames, Messieurs,
Je vous remercie, Monsieur le Ministre, de me donner la possibilité d'évoquer avec vous les principaux enjeux des négociations agricoles actuellement engagées par l'Union européenne.
En conduisant de front les négociations d'élargissement, la réforme de la politique agricole commune et les négociations commerciales multilatérales, l'Union européenne va, dans les mois qui viennent, façonner la politique agricole de l'Europe élargie et définir sa place dans la compétition économique et commerciale internationale.
Au-delà des choix économiques et des différentes solutions techniques envisageables, ce débat sera d'abord et avant tout un débat politique, un choix de société.
C'est d'ailleurs sous une forme tout aussi politique que ces débats trouvent leur écho dans vos pays de résidence, où la PAC est souvent critiquée, pour les effets très négatifs qu'on lui prête sur le commerce international et sur le développement.
Dans ce véritable combat de communication qui n'a, à vrai dire, jamais cessé depuis la création de la PAC il y a 40 ans, vous êtes, en tant que représentants de la France à l'étranger, régulièrement exposés à la critique, sans disposer toujours des armes nécessaires pour y répondre dans de bonnes conditions.
Pour toutes ces raisons, je souhaite que le Ministère dont j'ai la charge travaille, dans les mois qui viennent, en très étroite coopération avec vous.
Je veillerai en particulier à ce qu'à chaque étape importante des réflexions et négociations que je viens d'évoquer, vous disposiez d'éléments de langage et d'argumentaires vous permettant, comme à l'ensemble des relais d'influence de la France à l'étranger, d'exposer les faits, d'expliquer nos positions et de leur assurer une large audience.
Un mot seulement, à ce stade de mon propos, pour vous indiquer l'esprit dans lequel nous conduisons actuellement les discussions à Bruxelles sur la revue à mi-parcours de la PAC.
En arrêtant en 1999 pour la période 2000 - 2006 les plafonds budgétaires de l'ensemble des politiques européennes ainsi que les grands paramètres de la PAC, le Conseil européen de Berlin a prévu un rendez-vous à mi-parcours permettant d'ajuster, si nécessaire, les mécanismes des organisations communes de marché pour en améliorer le fonctionnement, et de s'assurer que les plafonds de dépenses budgétaires sont bien respectés.
La France a contribué à cette réflexion par un mémorandum présenté en juin dernier. Notre pays ne souhaite pas, en revanche, une anticipation des décisions à prendre par les chefs d'Etat et de Gouvernement pour la période 2007 - 2013.
Or, prenant prétexte d'un débat d'opinion engagé en Europe sur la pertinence de la PAC, la Commission nous propose, dans des délais très rapprochés, de réformer en profondeur cette politique, allant en cela très au-delà du mandat défini à Berlin et anticipant, pour la seule politique agricole, le débat budgétaire pour la période 2007 - 2013.
Elle prend part, elle aussi, à ce combat de communication que j'évoquais à l'instant, en multipliant les initiatives médiatiques dans chacun des Etats membres. Les objectifs incontestables derrière lesquels elle s'abrite : la protection de l'environnement, le développement de la qualité, le soutien des revenus et le développement rural, masquent mal des motivations bien différentes.
Dans ce contexte, la volonté de la France de voir respectées les deux étapes résultant de Berlin est alors présentée comme un combat d'arrière-garde, conduit par les suppôts d'un modèle productiviste suranné, qui aurait enfanté les crises sanitaires dans lesquelles nous nous débattons depuis près de dix ans. Bref, une nouvelle querelle des anciens et des modernes.
Or la PAC mérite mieux qu'un faux procès, la réalité étant, comme vous le savez, bien différente.
La pertinence des propositions de la Commission ne se mesure pas à la générosité et à la généralité des objectifs affichés mais à l'efficacité des instruments qu'elle propose de mettre en place. Or elle ne présente sur ce point ni solutions précises, ni analyses concrètes d'impact. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle l'accueil d'une grande majorité de ministres de l'Agriculture a été si froid lors du premier débat à Bruxelles sur ce point.
L'empressement mis à réformer la PAC doit moins à l'urgence créée par le débat ouvert en Europe sur ce point qu'à la volonté de modifier à la hâte cette politique - et cette politique seulement - avant l'élargissement, ce qui démontre une curieuse confiance politique dans la construction européenne, et de donner des gages de bonne volonté à nos partenaires de l'OMC. Dans le même temps, les Etats-Unis font le chemin inverse, tirant lucidement dans le Farm Act les leçons des erreurs du passé, notamment sur le découplage complet des aides.
Sur ces différents points, vous serez conduits, dans les jours et les semaines qui viennent, à expliquer la position de la France. Au-delà des éléments que mes services vous fourniront à cet effet, je m'efforcerai, dans toute la mesure du possible, de me rendre dans les différents pays avec lesquels nous devons nouer un dialogue plus étroit sur ces questions.
Le Ministère dont j'ai la charge a également pour objectif de contribuer activement, en liaison étroite avec le vôtre, à la mise en uvre des engagements du Président de la République en matière de développement et à la préparation de la Présidence française du G 8. Renforcer notre action en ce domaine constitue une priorité, tant les attentes créées chez nos partenaires en développement par les conférences de Doha et de Monterrey sont grandes. Or l'agriculture constitue une des dimensions sectorielles importantes des politiques de développement, en particulier en Afrique, où les 2/3 des mal nourris vivent en milieu rural.
Dans le domaine du développement, la France est porteuse de spécificités qui peuvent en faire un acteur plus écouté et influent dans le monde : je pense en particulier au développement rural et à la recherche agronomique, où notre expertise est reconnue et notre utilité manifeste, comme j'ai eu l'occasion de le souligner lors du Sommet mondial de l'Alimentation qui s'est tenu à Rome le 10 juin dernier.
Le discours dominant des organisations internationales sur le développement apparaît encore, par constraste, trop réducteur. Parce qu'il accompagne un recul généralisé de l'Etat depuis une vingtaine d'années, il fait du commerce un instrument unique et inconditionnel du développement, négligeant par trop l'articulation des politiques et la vision globale du destin d'un pays.
C'est par cette série de petits reculs, d'infimes renoncements, que nous en sommes arrivés à une situation où la PAC est présentée, dans l'indifférence voire l'assentiment du plus grand nombre, comme la cause de tous les maux, en particulier dans le monde en développement. Nous l'observons bien ces jours-ci à Johannesbourg.
Mais, pour instruire ce procès, a-t-on étudié la contribution respective de l'Europe et des autres pays développés au commerce de produits agricoles avec les pays en développement ? A-t-on mesuré l'effet des concessions unilatérales et des accords préférentiels conclus par l'Europe avec nombre de ces pays ? A-t-on réfléchi à ce que signifie réellement, en agriculture, le mythe du prix mondial ?
A toutes ces questions qui reçoivent, je le sais, des réponses contrastées et parfois contradictoires dans les pays où vous avez l'honneur de représenter la France, je souhaite que vous puissiez contribuer à définir avec nous des réponses permettant à notre pays de demeurer, comme le Président de la République l'a souligné dans son intervention du 14 juillet dernier, la grande nation agricole et la puissance exportatrice qu'elle est aujourd'hui.
(source http://www.agriculture.gouv.fr, le 28 août 2002)