Conférence de presse de M. Robert Hue, secrétaire national du PCF, sur la campagne de lutte contre les inégalités lancée par le parti, Paris, le 17 mai 2000.

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Circonstance : Lancement du "Mouvement national pour faire reculer les inégalités et pour construire une société citoyenne de partage", à Paris, le 17 mai 2000

Texte intégral

Mesdames, Messieurs, merci d'avoir répondu à notre invitation.
Avec cette conférence de presse nous donnons aujourd'hui le coup d'envoi d'un " Mouvement national pour faire reculer les inégalités et pour construire une société citoyenne de partage ".
J'avais avancé cette proposition, vous vous en souvenez, lors du 30ème congrès du parti communiste, à la fin du mois de mars à Martigues.
Le 22 avril, notre conseil national en a discuté et en a précisé les modalités concrètes.
Pendant trois jours, les 18, 19 et 20 mai les militantes et militants, les élus communistes vont multiplier les occasions d'en débattre avec des millions de Françaises et de Français.
Le " 4 pages " qui est à votre disposition va en effet être diffusé à cinq millions d'exemplaires. Il est accompagné d'un certain nombre de cartes-pétitions - 5 sont déjà disponibles et il y en aura en tout une quinzaine - portant sur autant d'inégalités, de discriminations, de ségrégations que nous voulons contribuer à faire reculer concrètement.
A chaque fois, vous pouvez le constater, nous disons " pourquoi " il est nécessaire de s'en fixer l'ambition, et " comment " il est possible d'obtenir des résultats.
Le " pourquoi " nous renvoie à cette terrible et massive réalité : en France les inégalités ne cessent de croître et de s'aggraver. Tous ceux qui s'intéressent à notre société et à ses évolutions - sociologues, chercheurs en sciences sociales, universitaires. - en font le constat inquiet, et beaucoup d'entre eux soulignent le caractère " explosif " de cette situation.
Le " comment " concerne les moyens à dégager, les choix politiques radicalement nouveaux à accomplir pour relever ce véritable défi de civilisation.
Je ne veux pas vous accabler de chiffres, mais tout de même : comment ne pas être révolté quand la bourse enregistre une progression de 50% en 1999, tandis que 3 millions de bénéficiaires des minima sociaux vivent en deçà du seuil de pauvreté soit avec moins de 3800 F. par mois ? Et comment ne pas juger avec sévérité les termes du récent débat sur la fiscalité des stocks options - qui ne concernent qu'une toute petite poignée de privilégiés - alors que c'est le silence assourdissant qui répond à l'exigence d'une revalorisation sensible de ces mêmes minima sociaux ?
C'est, en vérité, parfaitement intolérable.
Voilà pourquoi, sur ce point précis, nous disons qu'il faut donner une impulsion nette à l'augmentation du SMIC. Nous proposons qu'il soit relevé de 6% au 1er juillet, avec la perspective de le faire progresser jusqu'à 8500 francs.
Quant au minima sociaux, il n'est pas acceptable moralement et il est préjudiciable socialement qu'ils soient inférieurs au seuil de pauvreté.
Nous demandons par conséquent une revalorisation de 50% de l'allocation spécifique de solidarité et du RMI et de 20% pour les autres minima.
Je fais observer que de telles dispositions coûteraient environ 32 milliards.. soit à peine 8% des seuls revenus financiers des entreprises industrielles et commerciales. Et elles auraient sur la croissance un effet autrement dynamique que la fuite en avant dans la recherche de la rentabilité financière.
Je pourrais aussi donner d'autres exemples et peut-être les évoquerons-nous dans un instant. Ce sur quoi je veux insister à ce point de mon propos c'est sur l'actualité de notre démarche. C'est-à-dire concrètement sur le rapport étroit dans lequel elle est avec les attentes, les impatiences, et parfois les mécontentements qui s'expriment à l'égard du gouvernement de gauche plurielle.
J'ai souvent l'occasion de le dire : nous ne faisons nullement la fine bouche sur les avances réalisées depuis 1997. Je pense notamment aux 35 heures, aux emplois-jeunes, à la CMU, à la baisse récente de la TVA et à celle, programmée, de la taxe d'habitation. Et les ministres communistes ont pris toute leur part à la mise en chantier de ces réformes.
Mais il faut avoir le courage et la lucidité de le reconnaître : l'heure ne peut pas être à la gestion " tranquille " de ce bilan.
Une certaine croissance retrouvée n'autorise nullement l'autosatisfaction. Nous savons combien elle reste fragile, incertaine, si elle n'est pas confortée par une véritable dynamique de réponses aux besoins sociaux. Ignorer cette réalité ce serait - j'y insiste - sous-estimer gravement le nombre et l'ampleur des attentes à l'égard de la gauche plurielle. Du même coup, ce serait offrir l'opportunité à la droite et au MEDEF d'exercer avec plus de force leurs pressions libérales. Et ce ne serait pas sans conséquences sur l'avenir.
Quant à nous, nous voulons peser, au contraire, en faveur d'une politique résolument orientée vers la satisfaction des besoins sociaux et vers les progrès démocratiques qu'appelle l'exigence d'une citoyenneté renouvelée, responsable, épanouissante.
C'est le sens de notre contribution au travail de la majorité et du gouvernement, et il n'y a aucune ambiguïté sur ce point. Chacun va d'ailleurs pouvoir le vérifier à l'occasion des débats parlementaires dans le cadre de la préparation du budget 2001.
Mais notre conviction est qu'il nous faut, inséparablement, aider à ce que l'exigence de cette politique transformatrice monte de la société elle-même. C'est le sens de l'initiative que nous avons décidée.
En faisant ainsi, nous sommes pleinement dans notre rôle de parti politique de la transformation sociale.
Et j'ai la conviction que nous sommes en résonance avec les exigences et la volonté d'agir qui s'expriment de toutes parts et sous des formes diverses un nombre grandissant de citoyennes et de citoyens.
Ce fut particulièrement visible le week-end dernier, à l'occasion de la rencontre, à l'initiative de Marie-George Buffet, entre une dizaine de ministres et les délégués des conseils départementaux de la jeunesse, en présence du Premier ministre.
Précarité et discriminations diverses, santé, droit au logement, accès à la culture, à Internet et aux nouvelles technologies : les membres du gouvernement n'ont pas été ménagés par leurs jeunes interlocuteurs.
C'est dès à présent qu'ils veulent voir s'engager une action résolue, précise, de grande envergure, susceptible de répondre vraiment aux problèmes qui les assaillent.
C'est ce qu'attendent, aussi, celles et ceux qui ont engagé l'action pour le droit de vote des étrangers ; celles et ceux qui refusent la précarité que le MEDEF veut généraliser et institutionnaliser ; celles et ceux qui veulent en finir avec l'homophobie. Celles et ceux qui estiment, avec raison, que l'égalité entre hommes et femmes dans toutes les sphères de la société doit encore progresser significativement. Nous sommes de tous ces combats, naturellement, et la liste n'en est pas limitative.
Mais notre ambition ne se résume pas à cette participation et à ce soutien indispensables.
Nous voulons, de plain-pied dans les combats sociaux et politiques du moment, contribuer à l'engagement de nouvelles expériences de lutte, de construction, de conquête de droits nouveaux et d'améliorations sensibles de leur vie quotidienne pour les citoyennes et les citoyens de notre pays.
C'est dans cet esprit que je me suis adressé, au lendemain de notre conseil national du 22 avril, aux formations politiques de gauche, aux organisations syndicales et à des dizaines d'associations. Nous ne cherchons nullement à les rallier à une initiative dont nous serions les maîtres d'uvre tandis qu'ils en seraient les auxiliaires.
Nous leur proposons de rechercher ensemble toute convergence permettant de faire grandir jusqu'à les imposer des droits nouveaux, modernes et efficaces au bénéfice de notre peuple, du progrès social, de l'élévation des connaissances, de la démocratie et du respect de la personne humaine.
Il s'agit donc, ensemble, de réfléchir, voire s'ils le souhaitent, de coélaborer et de codécider pour conquérir ces droits.
Nous avons déjà reçu un certain nombre de réponses. Elles sont toutes positives. C'est le cas de la Confédération paysanne, de SOS racisme, de l'UNEF et de l'UNEF-ID, de la Confédération syndicale des familles, du Secours populaire, de l'APEIS pour n'en citer que quelques-unes unes.
Le cas, également du Mouvement des Alternatifs, du MDC et de Lutte ouvrière. D'autres associations vont réunir leurs instances pour examiner notre proposition. Elles nous ont fait savoir, cependant, qu'elles prenaient intérêt à la démarche que nous proposons.
Sylvie JAN, responsable des relations extérieures au sein de notre collège exécutif, pourra vous apporter des précisions sur ce point. Et Jean-François GAU, responsable de la communication, vous dira comment s'engagent, ici ou là, les trois journées d'initiatives des 18, 19 et 20 mai.
Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que je voulais vous dire en guise d'introduction à notre rencontre.
Nous sommes à présent à votre disposition pour répondre à vos questions sur ces sujets et sur bien d'autres de l'actualité qui ne manquent pas de vous intéresser, je suppose.
(Source http://www.pcf.fr, le 17 janvier 2001)