Déclaration de M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur, sur le rôle et les nouvelles missions des conseillers du commerce extérieur, la situation des entreprises exportatrices françaises et sur la mondialisation, Paris, le 9 juillet 2002.

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Circonstance : Assemblée générale du Comité national des conseillers du commerce extérieur de la France à Paris le 9 juillet 2002

Texte intégral

Monsieur le président, Monsieur le délégué général, Monsieur le directeur, Mesdames et Messieurs les conseillers du commerce extérieur de la France, Mesdames et Messieurs,
Je suis très heureux d'avoir d'emblée l'occasion de vous rencontrer, dans les jours suivant ma nomination comme ministre délégué au commerce extérieur, afin d'établir entre nous un premier contact.
J'ai déjà pu évoquer la vie de cette institution unique que constitue le comité national des conseillers du commerce extérieur de la France avec son président et son délégué général. Cela m'a permis de prendre toute la mesure de vos missions et du dynamisme avec lequel vous exercez chacun votre mandat, sur la base du volontariat.
C'est donc une grande satisfaction pour moi de pouvoir dès aujourd'hui dialoguer avec les conseillers du commerce extérieur.
J'arrive dans ce ministère, avec une expérience d'homme politique et de chef d'entreprise. J'ai en effet dirigé une entreprise exportatrice, qui réalisait 64 % de son chiffre d'affaires à l'international, et qui a du reste reçu le prix de l'export du MOCI. Je croyais connaître, je découvre ou redécouvre, et j'effectue un certain nombre de constats.
1/ Quelques remarques préliminaires sur la situation des entreprises exportatrices françaises.
Les entreprises vivent une période difficile. Elles ont à faire face à des charges importantes, à des procédures administratives lourdes. Cela n'encourage ni l'exportation ni les investissements étrangers en France. L'attractivité du territoire sera renforcée. La compétitivité du site France est une priorité du gouvernement.
Ce n'est pas à vous que j'apprendrai que la mondialisation constitue une évidence. Les exportations de la France se montaient en 2001 à 325,5 milliards d'euros, et l'excédent commercial dégagé était de 3,3 milliards d'euros, ce qui demeure insuffisant. Les exportations françaises représentent un quart de la richesse nationale et des emplois, contre un sixième il y a trente ans. La France se classe ainsi au quatrième rang mondial en matière d'exportations de marchandises et au troisième rang mondial pour les exportations de services. Elle est par ailleurs le quatrième pays d'origine et le septième pays d'accueil pour les investissements internationaux.
La récente appréciation de l'euro (+ 10 % par rapport au dollar depuis janvier 2002) n'est pas sans risque. La performance globale de notre économie doit permettre d'absorber ce léger choc de change. En effet, la majeure partie de nos échanges (plus de 50 %) s'effectue avec nos partenaires de la zone euro, ce qui atténue d'autant la concurrence ressentie par nos exportateurs sur les marchés extérieurs. La désinflation importée est un élément positif qui permet à la Banque centrale européenne (BCE) de maintenir des taux d'intérêt bas.
Au total, une appréciation de 10 % de l'euro par rapport à l'ensemble des autres devises (cas d'école distinct de l'évolution observée depuis janvier) conduirait à une baisse d'environ 3,2 milliards de notre solde commercial à un horizon de 18 mois (qui serait supérieure sans l'allègement de la facture énergétique de 3,2 milliards d'euros).
2/ Quelques idées ensuite sur la mondialisation. Elle est inévitable et représente une chance. Mais la globalisation doit donner lieu à régulation.
La globalisation appelle une réponse claire et structurée de la part des Etats. La France et l'Union européenne seront une force de proposition active dans ce champ nouveau de régulation des échanges et des marchés mondiaux. La conférence ministérielle de l'OMC de Cancún en sera la prochaine étape.
Nous sommes engagés dans le jeu multilatéral, dans le cadre de l'OMC, dont la mission est le développement et la régulation du commerce mondial. La mutation de cette organisation internationale est engagée, et nous l'encourageons. La réforme du mécanisme de règlement des différends, les règles antidumping, le respect de règles équitables sur les marchés publics, ou encore la mise en place d'un organisme dédié à l'environnement au niveau international constituent autant de pistes que la France entend travailler de concert avec ses partenaires.
D'autres grands sujets vont mobiliser le gouvernement : la conduite volontaire et équilibrée de l'élargissement de l'Union européenne, la poursuite de l'intégration régionale dans d'autres régions du monde (Amériques, Asie, bassin méditerranéen, Afrique subsaharienne), les réponses à apporter à l'impératif du développement durable auquel une conférence internationale importante sera consacrée fin août à Johannesburg.
Lors du sommet du G8 qui vient de se tenir à Kananaskis, au Canada, le président de la République a rappelé la nécessité de mieux définir les relations entre croissance économique, réduction de la pauvreté et développement durable. Des partenariats constructifs doivent être construits à cette fin : le plan d'action pour l'Afrique du G8, pour lequel la France s'est beaucoup battu, constitue un premier pas. Confirmant les orientations dessinées à Monterrey en mars dernier, il prévoit d'ici 2006 une augmentation de l'aide publique au développement de 12 milliards de dollars américains par an, dont 50 %, voire plus (critères de bonne gouvernance), iront à l'Afrique.
3/ Troisième constat, celui qui porte sur l'administration avec laquelle je travaille directement. Elle est déjà engagée dans un processus de modernisation novateur.
Les sections de conseillers du commerce extérieur travaillent en étroite collaboration avec les 154 Missions économiques. Comme vous le savez, depuis quelques semaines, ces Missions économiques font partie d'un grand réseau unifié des services économiques du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie à l'étranger, qui regroupe les anciens postes d'expansion économique, les agences financières, les attachés fiscaux et les attachés douaniers. Avec le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, Francis Mer, je réunirai d'ailleurs la semaine prochaine ce nouveau réseau qui, pour le service aux entreprises, devrait se voir remettre à cette occasion le certificat ISO 9001 de l'association française d'amélioration de la qualité (AFAQ). L'obligation de fournir une réponse à toute question reçue, l'engagement sur des délais de prestation, le respect d'un process qualité précis constituent autant de déclinaisons concrètes de cette démarche novatrice dans l'action quotidienne de ce réseau sur le terrain.
4/ Quatrième axe de mon intervention : vos missions.
Les conseillers du commerce extérieur constituent une institution unique, du fait de son ancrage dans le temps (le cap du centenaire a été franchi en 1998) et du service que vous apportez : conseil aux autorités publiques, soutien aux initiatives à destination des jeunes et des petites et moyennes entreprises.
L'institution présente donc une grande originalité. Elle n'a son pareil dans aucun pays du monde. C'est cette spécificité qui constitue sa force.
Les conseillers du commerce extérieur sont autant d'experts au profil extraordinairement varié : la diversité de vos secteurs d'activité économique et de vos spécialisations géographiques, de vos expériences professionnelles, de vos centres d'intérêt ou de réflexion constituent une richesse dont nos entreprises peuvent tirer parti. A ces éléments qualitatifs s'ajoute bien entendu la densité du réseau des conseillers, fort de quelque 4300 personnes (4297 au 4 juillet 2002 très exactement) dont presque 60% sont à l'étranger. Vous représentez ainsi une force d'analyse et de proposition, une vision de terrain qui éclaire les autorités publiques. Pour être présent à l'étranger, il faut avoir une France compétitive.
Vos conseils, vos analyses, vos propositions nous sont précieux. Votre expérience de terrain est irremplaçable. Je vous demande de continuer à nous alerter le plus en amont possible sur les entraves aux échanges ou à l'implantation sur les marchés étrangers, parfois même au sein du marché intérieur. Poursuivez également vos suggestions dans le cadre de groupes de travail thématiques avec les Missions économiques, afin de mettre en évidence les différences entre les discours officiels de certains de nos partenaires et le fonctionnement réel de leurs marchés nationaux.
Vous devez apporter votre soutien au commerce extérieur français, en apportant vos conseils pratiques et expérimentés aux entreprises qui souhaitent se lancer à l'international.
Parmi les 115 300 entreprises exportatrices recensées en 2001, les PME indépendantes réalisent environ le quart de nos exportations directes, soit autant que les 15 premiers groupes industriels. Compte tenu de leur poids économique (6 emplois sur 10 relèvent des PME), le soutien à l'ouverture internationale des PME est un facteur essentiel pour la croissance et l'emploi en France.
J'insiste sur cette mission qui est à mes yeux fondamentale et qui doit faire l'objet d'une nouvelle mobilisation. Qu'il s'agisse d'export ou d'investissement à l'étranger, vous constituez un point d'appui précieux pour nos PME. Il est dans vos fonctions d'accompagner les PME dans leurs premiers pas sur des marchés étrangers qui vous sont familiers.
Je compte également sur vous pour aider les jeunes. Comme vous le savez, un nouveau dispositif a succédé en octobre 2000 aux coopérants du service national (CSN), qui ont disparu du fait de la réforme du service national. Il s'agit du volontariat international, dispositif encore mal connu. Il permet aux entreprises (volontariat international en entreprise, ou VIE) de recruter des jeunes à l'international dans les conditions attractives d'un contrat de droit public et sur la base d'une bourse aux emplois offrant un large vivier de talents professionnels pour des périodes adaptées à leurs besoins (pouvant aller de 6 à 24 mois). Un centre d'information (le CIVI, centre d'information sur le volontariat international) recueille les candidatures, plus de 32 000 à ce jour, de jeunes de 18 à 28 ans, et Ubifrance (qui a remplacé le CFME-ACTIM) gère l'ensemble du dispositif.
Or, l'amorçage du VIE demeure à ce stade en-deçà des objectifs: les 861 affectations enregistrées durant ce premier semestre 2002 dénotent un retard par rapport à nos objectifs. Beaucoup d'entreprises ne connaissent pas le dispositif.
Il convient donc de relancer avec volontarisme le VIE. Des actions de communication ont été lancées. Un certain nombre d'entre vous sont d'anciens CSNE ou VSNE. Je vous engage à apporter votre soutien à cette action déterminante en faisant savoir autour de vous que cette procédure existe, qu'elle est utile pour les jeunes, les entreprises et la France, car l'expérience montre que la majorité des jeunes VIE poursuivent des carrières internationales.
5/ Je viens de mentionner les axes majeurs de votre action. Je souhaite terminer mon allocution par un vif et sincère encouragement à la poursuite de la modernisation entamée par le comité national.
Sous votre impulsion, cher président, l'institution a connu une dynamique qui lui confère un positionnement renouvelé. La réforme de l'Etat n'est pas un thème abstrait, incantatoire, mais bien une action concrète, afin de maximiser le service rendu par les pouvoirs publics aux citoyens et aux entreprises. J'attache personnellement une grande importance à cette action, d'ores et déjà bien engagée par les services du commerce extérieur. Le pilotage par objectifs y est maintenant pratiqué et je veillerai à rendre le service plus proche, plus rapide et plus adapté aux besoins des PME.
La refonte des statuts du comité national, sujet certes aride mais correspondant à une nécessité, est ainsi en cours, et l'administration s'engage dans le même temps à alléger les procédures de gestion courante avec vous. Le décret de 1950 relatif aux conseillers du commerce extérieur mériterait également un toilettage. Ce projet est lancé : les objectifs sont une plus grande internationalisation, un certain rajeunissement et une féminisation des sections à l'étranger et des comités régionaux en France.
La souplesse des structures doit permettre une réactivité immédiate : le dernier exemple en date a été la création le 25 juin dernier d'une section " Union européenne " basée à Bruxelles, indispensable dans la période cruciale que traverse l'Europe en ce début de nouveau siècle, avec la perspective conjointe de l'approfondissement et de l'élargissement.
Les expériences vécues par les conseillers du commerce extérieur sont riches d'enseignements pour les nouveaux venus. Le travail en réseau permet de fédérer les énergies et les expertises. Là encore, mon appui vous est acquis. J'attends donc avec impatience les conclusions définitives du travail mené sur le thème des " perspectives et conséquences du changement de comportement des Etats-Unis sur la scène internationale ". Cette réflexion nous aidera dans le travail de préparation des grandes échéances multilatérales de 2003 et pour le traitement des contentieux transatlantiques.
Cette première occasion d'échanges sera bien entendu suivie de rencontres en cercle plus restreint, notamment lors des déplacements en régions ou à l'étranger que je ne manquerai pas d'effectuer avec vous au fil des mois.
Je compte sur votre collaboration efficace pour qu'ensemble nous puissions servir les intérêts de la France et de ses entreprises dans le monde.
Je vous remercie.
(source http://www.minefi.gouv.fr, le 18 juillet 2002)